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L’Encyclopédie/1re édition/RETOUR

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RETOUR, s. m. (Gram.) mouvement d’un corps vers le lieu d’où il est parti ; on dit j’attens le retour du courier ; il est de retour de ses voyages ; le retour de la marée a été plus prompt qu’on ne l’espéroit ; ce labyrinthe forme un grand nombre de tours & de retours ; il faut pratiquer là un retour d’équerre ; les retours d’une tranchée éloignent quelquefois beaucoup sa tête de sa queue ; cette femme est sur le retour ; la jeunesse s’enfuit sans retour ; le bon goût, l’esprit national, les mœurs simples, se sont éclipsés sans retour ; vous avez perdu son amitié sans retour ; faites sur vous quelques retours, & vous vous en trouverez bien ; tous les êtres sentent plus ou moins le retour du printems ; il y a de tems en tems à la mauvaise conduite, à la fourberie, des retours fâcheux ; que me donnerez-vous de retour ? ce bien lui a été donné à charge de retour ; il n’y a guere de femme sage qui ne croie qu’on lui en doit beaucoup de retour ; on fait au trictrac jan-de-retour ; à l’hombre & à d’autres jeux, un retour ; il a des retours de partage. Voyez les articles suivans pour quelques autres acceptions du même mot, & pour une plus grande intelligence des précédens.

Retour des suites, terme en usage dans l’Analyse sublime ; voici en quoi le retour des suites consiste. On a l’expression d’une quantité, comme x, par une suite composée de constantes & d’une autre quantité y ; il s’agit de tirer de cette premiere suite, une autre suite qui exprime la valeur de y en x & en constantes ; par exemple, on a , &c. Il s’agit de trouver une valeur de y, exprimée par une suite qui ne renferme que x ; la méthode pour resoudre ce probleme est expliquée dans le septieme livre de l’analyse démontrée du P. Reyneau, tom. I. dans l’exemple proposé, on supposera &c. A, B, C, F, &c. étant des coefficiens inconnus, & substituant cette valeur dans l’équation &c. ou &c. , on déterminera en faisant évanouir chaque terme les coefficiens A, B, C, F, &c. Voyez cette méthode expliquée plus au long dans l’ouvrage cité. (O)

Retour, (Jurisprud.) ou droit de retour, ou reversion, est un droit en vertu duquel les immeubles donnés retournent au donateur quand le donataire meurt sans enfans.

Ce droit est conventionnel ou légal.

Le retour conventionnel est celui qui est stipulé par la donation ; il peut avoir lieu au profit de toutes sortes de donateurs, parens ou étrangers, selon ce qui a été stipulé, l’étendue de ce droit dépendant en tout des termes de la convention.

Le retour légal est celui qui est établi par la loi, il a lieu dans les pays de droit & dans les pays coutumiers ; mais il s’y pratique diversement.

Dans les pays de droit écrit, il est fondé sur les lois romaines. Il fut d’abord accordé au pere, pour la dot profectice, suivant la loi 6. ff. de jure dotium, & la loi 4. cod. soluto matrim. &c.

On l’accorda aussi ensuite au pere pour la donation faite à son fils en faveur de mariage, l. II. cod. de bonis quæ liberis.

Enfin il fut accordé à la mere & à tous les ascendans paternels & maternels, par la loi derniere, cod. comm. utriusq. jud.

Il a été accordé aux ascendans donateurs, par deux motifs également justes.

L’un est afin que l’ascendant ne souffre pas en même tems la perte de ses enfans & de ses biens.

L’autre est la crainte de refroidir les libéralités des parens envers leurs enfans.

Le parlement de Toulouse a étendu le droit de retour aux parens collatéraux jusqu’aux freres & sœurs, oncles & tantes, sur le fondement de ces termes de la loi, 2. cod. de bonis quæ lib. ne hac injectâ formidine parentum circa à liberos munificentia retardetur.

Le retour a lieu au profit du donateur, soit que l’enfant doté soit mort pendant le mariage, ou qu’il soit mort étant en viduité ; mais il n’a lieu que quand le donataire meurt sans enfans.

Dans le cas où les enfans du donataire décedent après lui, pendant la vie de l’ayeul, la question se juge diversement dans les différens tribunaux ; on peut voir, à ce sujet, le recueil des questions de Bretonnier.

Dans les pays coutumiers on suit pour le retour légal, la disposition de l’article 313 de la coutume de Paris, qui porte que les pere, mere, ayeul ou ayeule, succedent ès choses par eux données à leurs enfans décédans sans enfans & descendans d’eux.

Il y a néanmoins quelques coutumes qui ont sur cette matiere des dispositions différentes, mais celle de Paris forme le droit commun & le plus général.

Le droit de retour des dots, donations & institutions contractuelles, donne lieu à une infinité de questions très-épineuses, qu’il seroit trop long d’agiter ici ; on peut voir le traité du droit de retour de M. de la Bouviere, voyez aussi les mots Donation & Dot. (A)

Retour, (Com.) se dit en terme de commerce des marchandises qui sont apportées d’un pays où l’on en avoit envoyé d’autres. Ce marchand d’Anvers avoit envoyé des toiles en Espagne, & pour son retour il a eu des laines.

Retour, se dit aussi des vaisseaux marchands, envoyés pour commercer dans les pays éloignés, qui reviennent chargés des marchandises de ces climats. On attend toujours avec impatience, en Espagne, le retour des galions & de la flotte.

Retour, signifie encore un supplément de prix quand on troque ou qu’on échange les unes contre les autres des marchandises qui ne sont pas d’égale valeur. Je vous donnerai ma pendule pour la vôtre, moyennant six louis de retour. Diction. de Commerce.

Retour de la tranchée, (Fortific.) ce sont les coudes & les obliquités qui forment les lignes de la tranchée, qui sont en quelque façon tirées paralleles aux côtés de la place qu’on attaque, pour en éviter l’enfilade. Ces différens retours mettent un grand intervale entre la tête & la queue de la tranchée, qui en droite ligne ne sont séparées que par une petite distance ; aussi quand la tête est attaquée par quelque sortie de la garnison, les plus hardis des assiégeans, pour abréger le chemin des retours, sortent de la ligne, & vont à découvert repousser la sortie, & couper l’ennemi en le prenant à dos. Dict. milit. (D. J)

Retour d’équerre, (Coupe des pierres.) c’est un angle droit ; on dit retourner d’équerre, pour faire une ligne ou une surface perpendiculaire à une autre ; pour y parvenir, les ouvriers se servent d’une équerre de fer, représentée fig. 23. qu’ils posent ensorte que l’une des branches BC fig. 24. comme appliquée à plat sur la face où il faut faire le retour d’équerre ; & l’autre branche BA soit appliquée de champ sur la face conique & parallelement autant qu’il est possible à l’arrête BM, l’ouvrier trace ensuite avec un ciseau une ligne BD le long du côté BC de l’équerre, cette ligne BD en est le retour.

Présentement pour faire le retour sur l’autre face MNOB, (fig. 24. n°. 2) il prend l’équerre & en applique le côté B de champ près de l’arrête MB de la face MD, & l’autre côté BC à plat sur la face MNO, en sorte que l’arrête extérieure de l’équerre passe par le point B, il tire ensuite la ligne BO, alors le retour d’équerre solide se trouve fait.

Retour de marée, (Marine.) c’est le retour du reflux. On se sert aussi de cette expression pour désigner un endroit de terre qui forme des courans causés par une terre voisine.

Retours les, s. m. pl. (Tissutier-Rubannier.) c’est ici ce qu’il y a de plus difficile à faire comprendre par écrit, puisque même en le voyant sur le métier, à peine y comprend-on ; on va cependant en donner la description la plus claire qu’il sera possible. Avant l’invention des retours, on ne pouvoit faire sur les ouvrages que de très-petits desseins, comme un pois, une petite lézarde, un petit carreau, &c. parce qu’ayant fini le cours de marches, le dessein étoit achevé : si l’on eût pu multiplier ces marches en très-grande quantité, les desseins auroient été plus considérables ; mais l’ouvrier n’auroit pu écarter assez les jambes pour les marcher ; on imagina donc, il y a environ 60 à 80 ans, de pouvoir répeter ce cours de marches pour pouvoir faire un ouvrage dont le dessein fût plus étendu, & c’est à quoi le retour est destiné ; par la suite on en a ajouté plusieurs autres, & ainsi en allant toujours en augmentant, on en met aujourd’hui jusqu’à 22 : ce qui fait le même effet que si le métier étoit à 528 marches, en multipliant seulement 24 marches par 22 retours ; c’est ainsi qu’on est venu à bout de faire les beaux ouvrages que nous voyons aujourd’hui. Le retour ainsi entendu, il faut en donner la description ; ce sont des bâtons quarrés applatis, attachés au derriere du métier ; ils sont percés uniformément au tiers de leur longueur, pour pouvoir être enfilés dans une broche de fer qui traverse le chassis des retours ; ce bâton porte à l’extrémité qui est à la main gauche de l’ouvrier, une quille pour le faire lever par son poids, lorsqu’il ne faut pas qu’il travaille ; l’autre extrémité doit être assez longue pour pouvoir venir s’arrêter sous la planchette, lorsque l’ouvrier le tirera pour le faire travailler ; cette extrémité est terminée un peu anguleusement, & tel que l’on voit, Planches de Tissutier-Rubanier : ce qui sert à lui donner plus de facilité pour se loger sous la planchette, lorsqu’il travaillera. N fait voir l’arcade qui est de gros fil d’archal, & qui sert à attacher les rames. O est le trou dont on a parlé plus haut ; P est une ficelle pour porter la quille Q, voyez Quille. R montre le profil de la planchette qui reçoit & arrête le retour travaillant dans la premiere figure, & qu’il a lâché dans la seconde. La 2. figure fait voir le même bâton de retour dans la situation où il est, lorsqu’il ne travaille pas, au lieu que dans la figure premiere il est censé travaillant, & arrêté sous la planchette qui le tient ferme : ce qui fait que les rames qu’il porte, sont roidies, & par conséquent en état d’être levées par les hautes lisses, à mesure que les marches les feront lever. Venons à l’usage des retours ; après que l’ouvrier a fini son cours de 24 marches, il a fait une partie de son dessein, mais il n’est pas achevé ; s’il le recommençoit encore, il feroit encore la même chose qu’il vient de faire, puisque les mêmes rames levant comme elles viennent de lever, on auroit la même partie du dessein qui vient d’être faite ; c’est pour pouvoir faire une partie de ce même dessein, que l’ouvrier tire un autre retour par le moyen du tirant S, qui va aboutir auprès de sa main droite ; ce retour ainsi tiré & venant à son tour se loger sous la planchette mobile, ainsi qu’il a été dit ailleurs, roidit à son tour les rames qu’il contient, pour les mettre en état de lever les lissettes qu’elles portent, pendant que toutes les autres rames des autres retours étant lâches, sont par conséquent hors d’état de lever les mêmes lissettes, ne pouvant y avoir que les rames de ce retour actuellement travaillant qui puissent les lever ; après que ce retour a fait sa fonction, qui se trouve achevée par le cours de marches, l’ouvrier tire à lui encore une autre retour, & ainsi des autres alternativement jusqu’au dernier ; ce dernier retour employé, il recommence par le premier, & continue toujours de même ; on comprend aisément que lorsque l’ouvrier tire à lui un nouveau retour, le bout de ce retour coupé obliquement venant à toucher la face de la planchette sous laquelle il doit se loger, & la faisant mouvoir en reculant, ce mouvement de la planchette est cause que le retour qu’elle tenoit en état de travailler, s’échappe, & fait place à celui que l’ouvrier tire, pour occuper la place qu’il quitte. Voyez Planchette.