L’Encyclopédie/1re édition/ROULEAU
ROULEAU, s. m. (Conchyliol.) genre de coquille marine, univalve, dont la bouche est toujours alongée ; son sommet est quelquefois détaché du corps par un cercle, & quelquefois il est couronné ; le fût est toujours uni.
Les rouleaux sont autrement nommés cylindres, & plus communément olives. Voyez Olive, (Conchyliol.) (D. J.)
Rouleau, s. m. (Antiq. ecclés.) feuille de parchemin, au haut de laquelle on inscrivoit anciennement dans les monasteres le nom & l’éloge d’un abbé ou d’une abbêsse décédée, avec la date de leur mort. On portoit ensuite cette feuille de monastère en monastere, & chacun y marquoit à son tour qu’il avoit offert des prieres à Dieu pour le repos de l’ame du défunt ou de la défunte. (D. J.)
Rouleau, ou Volume, (Littérat.) ce que nous appellons aujourd’hui livre, se nommoit autrefois rouleau & volume, du latin volumen, dont la racine est volvere, rouler. On ne plioit pas les feuilles pour les coudre & les relier ensemble, comme on fait aujourd’hui, mais on faisoit un rouleau de chaque feuille qu’on mettoit les unes sur les autres ; en sorte que quelquefois une matiere traitée, n’occupant qu’une seule feuille, celle-ci faisoit un volume ; & c’est ce qu’il faut entendre par ce grand nombre de volumes qu’on nous dit que quelques-uns des anciens ont composés, & même par cette multitude prodigieuse de volumes dont étoit composée la bibliotheque d’Alexandrie. Car enfin depuis l’invention de l’Imprimerie, si propre à multiplier les livres avec une promptitude infiniment plus expéditive que la diligence des anciens libraires ou copistes, & malgré la fécondité des modernes, on n’est pas encore parvenu à former une bibliotheque de 700000 volumes, telle qu’étoit celle d’Alexandrie. Il faut donc convenir que la plûpart des volumes dont elle étoit composée, étoient de peu de feuilles. Quant à ceux qui en contenoient davantage, afin d’empêcher que ces feuilles roulées les unes sur les autres ne se brouillassent, on prit la précaution de les coudre toutes ensemble & de n’en faire qu’un rouleau. Il est souvent parlé dans l’Ecriture de ces rouleaux ou volumes, & les Juifs en gardent encore l’usage dans leurs synagogues. Ce sont, dit Léon de Modene, des peaux de vélin cousues ensemble, non avec du fil, mais avec les boyaux d’un animal monde, sur lesquelles la loi est écrite avec une grande exactitude, & qu’on roule sur deux bâtons de bois qui sont aux deux bouts. On roule aussi à mesure une piece d’étoffe de lin ou de soie pour conserver l’écriture, & l’on renferme le tout dans une espece de sac ou d’étui de soie. Les extrémités des bâtons qui excedent de beaucoup le vélin, sont garnis d’ornemens d’argent, comme pommes de grenade, clochettes, couronnes, &c. Le même auteur ajoute qu’il y a dans l’aron ou armoire d’une synagogue quelquefois plus de vingt de ces rouleaux nommés sefer tora, ou livre de la loi. Celle d’Amsterdam en possede plus de cinquante, & un certain jour de l’année on les porte en procession dans la synagogue. Mais aucun de ces rouleaux n’est véritablement ancien. Léon de Moden. cérém. des Juifs, part. I. c. x.
Rouleau, s. m. (Ouvrages & Manufact.) piece de bois de figure cylindrique, dont on se sert dans la fabrique de plusieurs ouvrages, & dans diverses manufactures, mais souvent sous d’autres noms.
C’est sur des rouleaux que se dressent les laines, les soies, les fils, les poils, &c. dont on fait la chaîne des étoffes & des toiles ; chaque métier en a ordinairement deux ; celui des Gaziers en a trois ; on les nomme ensubles, & quelquefois ensubleaux.
Les Tissutiers-rubaniers qui travaillent aux galons & tissus d’or & d’argent, appellent rouleaux de la poitrine, un petit cylindre qui est attaché au-devant de leur métier. C’est sur ce rouleau que passe l’ouvrage à mesure qu’il s’avance, avant de le rouler sur l’ensuble de devant.
Dans les manufactures des glaces de grand volume, on nomme rouleau a couler, un gros cylindre de fonte, qui sert à conduire le verre liquide jusqu’au bout de la table sur laquelle on coule les glaces.
Les Fondeurs en sable se servent d’un rouleau pour corroyer le sable qu’ils emploient à faire leurs moules ; on l’appelle plus communément bâton.
Les Pâtissiers ont un rouleau pour applatir & feuilleter leurs pâtes.
Les presses qu’on nomme calendres, qui servent à calendrer les étoffes, sont entr’autres parties essentielles, composées de deux rouleaux. C’est aussi entre deux rouleaux que se font les ondes des étoffes de soie, de poil ou de laine propres à être tabisées ; comme les moëres, les tabis, les camelots, &c.
Les images, estampes & tailles-douces s’impriment en passant entre deux rouleaux, la planche de cuivre gravée, & le papier humide qui en doit prendre l’impression. Savary. (D. J.)
Rouleau, s. m. (Instrum. de méchan.) espece de cylindre de bois qui sert à mouvoir les plus pesans fardeaux pour les conduire d’un lieu à un autre. Il y a de ces rouleaux qu’on nomme sans fin, ou tours terriers, parce qu’on les fait tourner par le moyen de leviers. Ils sont assemblés sous un poulin avec des entre-toises ou des moises. (D. J.)
Rouleau, (Agricult.) On peut quelquefois l’employer utilement à briser les mottes, suivant le système de M. Tull ; mais il ne faut s’en servir que quand la terre est seche, autrement le rouleau la corroyeroit, & détruiroit en partie les avantages qu’on retire des labours.
Rouleaux, s. m. pl. (Archit.) les ouvriers appellent ainsi les enroulemens des modillons & des consoles, & même ceux des panneaux & ornemens répétés de serrurerie.
Rouleau de cartouche, (Artifice.) c’est un rouleau qui sert à former un cartouche cylindrique, en roulant tout-autour un carton, à mesure qu’on le colle ; tels sont ceux de presque tous les artifices. (D. J.)
Rouleaux, (ustensile de Charpentiers, Marbriers, Tailleurs de pierre.) les rouleaux dont ils se servent pour mener d’un lieu à un autre les poutres, les marbres, les pierres de taille & autres fardeaux qui sont lourds, mais non pas d’une pesanteur extraordinaire, sont de simples cylindres de bois de sept à huit pouces de diametre, & de trois à quatre piés de longueur, qu’ils mettent successivement par-devant sous les pieces qu’ils veulent conduire, tandis qu’on les pousse par derriere avec des pinces ou des leviers.
Quand les blocs de marbre ou les autres fardeaux sont d’un poids excessif, on se sert de rouleaux sans fin, qu’on nomme autrement tours terriers. Ces rouleaux, pour leur donner plus de force, & empêcher qu’ils ne s’écrasent, sont faits de bois assemblés à entre-toises ; ils ont près d’un double de longueur & de diametre des simples rouleaux, & sont outre cela garnis de larges cercles de fer aux deux extrémités. A un pié près de chaque bout, sont quatre mortaises, ou plutôt deux seulement, mais qui sont percées d’outre en outre. Elles servent à y mettre des longs leviers de bois, que des ouvriers tirent avec des cordes qui sont attachées au bout, & l’on change de mortaises à mesure que le rouleau a fait un quart de tour ; ce travail est long & pénible, mais sûr. Savary. (D. J.)
Rouleaux sans fin, (Charpent.) ce sont des rouleaux de bois assemblés avec des entre-toises. On s’en sert très-utilement pour conduire de grands fardeaux & amener de grosses pierres d’un lieu à un autre.
Rouleau, en terme de Cirier, c’est une planche de noyer d’environ un demi-pié de long sur quatre pouces de large & un d’épaisseur. Ce rouleau est garni de deux fiches qui lui servent de poignée. C’est avec cet ustensile qu’on arrondit une piece, & qu’on lui donne une grosseur proportionnée à sa longueur. Voyez les Pl. du Cirier.
Rouleau, (Cuisine.) est un gros cylindre de bois sur lequel on dévide la corde des tournebroches, & est garni d’un haut bord pour soutenir la corde, & l’empêcher de tomber entre lui & la grande roue, & d’un ressort qui s’arrête à une des croisées de la grande roue lorsque la corde est assez remontée.
Rouleau, en terme d’Eperonnier, signifie proprement l’extrémité inférieure de la sous-barbe d’un mords, qui se replie plusieurs fois sur elle-même, & forme une espece de bouton ou rouleau d’où elle tire son nom. Voyez les fig. Pl. de l’Eperonnier.
Rouleau, outil de Fondeur en sable, est un bâton cylindrique de bois dont les Fondeurs en sable se servent pour corroyer le sable dont ils forment les moules dans la caisse qui les contient. Voyez les fig. Pl. du Fondeur en sable, & l’article Fondeur en sable.
Rouleau, s. m. (Comm. de fil.) ruban de fil de différentes largeurs, qui a pris ce nom de la forme dont il est ordinairement roulé. Il s’en fait d’excellent en Auvergne, d’où les marchands de Paris tirent une partie de celui qu’ils débitent dans leurs boutiques. Savary.
Rouleau, s. m. (Horloger.) c’est un corps cylindrique dont on se sert dans la méchanique des grosses horloges. Les rouleaux sont de bois, au-tour desquels s’enveloppe la corde qui éleve les poids. Rouleau se dit aussi de deux cercles placés excentriquement de l’un à l’autre, pour que les deux circonférences forment un angle obtus sur lequel pose le bout d’un arbre pour diminuer les frottemens. (D. J.)
Rouleaux, s. m. (Jardin.) on donne le nom de rouleaux aux enroulemens de parterre. (D. J.)
Rouleau, (Imprimerie.) piece d’une presse d’imprimerie, est un morceau de bois rond, de la largeur de 5 à 6 pouces, sur 10 à 11 pouces de diametre, avec un rebord de deux ou trois lignes, qui regnent autour de ses deux extrémités : il est situé sous la table entre les deux bandes, & percé dans sa longueur pour recevoir la broche : il est aussi percé de deux trous faits de biais, pour arrêter par une des extrémités la corde appellée corde de rouleau. Voyez Corde de rouleau. Voyez les Planches de l’Imprimerie.
Rouleau s’entend encore dans l’imprimerie d’un morceau de bois très-rond d’un pié & demi environ de longueur, & de quatre à cinq pouces de diametre, que l’on a soin de revétir d’un blanchet ; & dont on se sert dans quelques imprimeries pour faire des épreuves : on tient même que quelques ouvrages prohibés ont été entierement imprimés au rouleau.
Rouleaux, (Mercerie.) ce sont de certaines enseignes ou représentations de carton que les Merciers & quelques autres marchands mettent en étalage sur le devant de leurs boutiques, pour faire montre des marchandises qu’ils vendent, en les couvrant de divers échantillons. Savary. (D. J.)
Rouleaux, en terme de Metteur en œuvre, ce sont des especes de consoles en or ou en argent, qui se mettent ordinairement dans les corps des bagues proche la tête, & qui entrent dans la composition de plusieurs ouvrages de cette profession. Voyez Pl. & fig.
Rouleaux, (Monnoyage.) ce sont deux instrumens de fer, de figure cylindrique, qui servent à tirer les larmes d’or, d’argent ou de cuivre, dont on fait les flaons des pieces que l’on fabrique. (D. J.)
Rouleaux, en terme d’Orfévre en grosserie, sont des especes d’S, qui ornent le commencement de la crosse proprement dite, immédiatement au-dessus du fleuron. Voyez les Pl.
Rouleau, (Peinture.) on appelle ainsi certains écriteaux que les anciens peintres mettoient dans leurs tableaux, & qu’ils faisoient sortir grossierement de la bouche de leurs personnages ; c’est ce que fit Simon Memmi, qui, représentant le diable chassé par S. Reinier, lui mit cet écriteau dans la bouche, ohi me ! non posso più.
Ces rouleaux, d’une invention barbare, se sont anéantis avec le goût gothique ; mais les peintres d’histoire devoient imaginer quelqu’autre idée moins grossiere, pour indiquer le sujet de leurs compositions, qu’un grand nombre des spectateurs cherchent quelquefois inutilement, surtout quand c’est un trait d’histoire peu connu : des inscriptions mises au bas du tableau, seroient alors d’un grand usage. J’en ai parlé ailleurs ; j’ajoute ici que Raphaël & Annibal Carrache n’ont point hésité d’insérer dans leurs ouvrages trois ou quatre mots, quand ils les ont jugés nécessaires pour l’intelligence du tableau. Par la même raison, on ne grave guere aujourd’hui d’estampes, sans mettre au bas des vers, des passages, des paroles, qui en expliquent le sujet. (D. J.)
Rouleau, en terme de Potier fournaliste, c’est de la terre maniée en rond, de longueur ; ce qui la rend différente des ballons qui sont maniés en motte. Voyez Ballons.
Rouleaux, (Sucrerie.) on nomme quelquefois rouleaux dans les moulins à sucre les tambours de fer qui servent à briser les cannes, & à en exprimer le suc. Les tambours & les rouleaux sont cependant bien différens, ces derniers n’étant que des cylindres de bois, dont les tambours sont remplis, & les autres des cylindres de métal, dont ceux de bois sont couverts. On affermit les rouleaux dans les tambours avec des serres ou coins de fer & de bois, & pour leur donner encore plus de fermeté, on remplit les vuides qui restent avec du brai bouillant ; c’est dans les rouleaux que les dents des tambours sont emmortoisées. Savary. (D. J.)
Rouleau de tabac, (Manufacture de tabac.) c’est du tabac en feuille cordé au moulin, & roulé en plusieurs rangs autour d’un bâton. La plûpart du tabac de l’Amérique s’y débite en rouleaux de divers poids ; & ce n’est guere que lorsqu’il est arrivé en France, en Angleterre, en Espagne, en Hollande, &c. qu’il se prépare en poudre. C’est du tabac en rouleau dont on se sert, soit pour raper, soit pour mâcher. Les regrattiers qui en font le commerce, & qui le prennent au bureau de la ferme, le coupent en morceaux de plusieurs onces, le ficellent, & l’ornent ordinairement de quelque clinquant de papier marbré. Dict. de Comm. (D. J.)
Rouleau, (Tapissier.) Voyez Ensuple.
Rouleau, (Tisserand.) piece de bois de figure cylindrique, dont plusieurs artisans se servent pour la fabrique des ouvrages de leur métier.
C’est sur des rouleaux que se dressent les chaînes des toiles & des étoffes. Chaque métier a deux rouleaux ; celui des gaziers en a trois ; on les nomme ensubles, & quelquefois ensubleaux. Voyez ces deux articles.
Les maîtres Tissutiers-rubaniers ont à leur métier un cylindre, qu’ils nomment rouleau de la poitriniere ; il est posté sur le devant de leur métier, & c’est sur ce rouleau que glisse l’ouvrage à mesure qu’il s’avance, avant qu’on le roule sur l’ensuble de devant. Voyez Rubanier.
Les plombiers ont aussi des rouleaux dont ils se servent pour former les tuyaux de plomb. Ils les nomment ordinairement rondins ou tondins. Voyez l’un & l’autre.
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