L’Encyclopédie/1re édition/THERMOMETRE

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THERMOMETRE, s. m. (Phys.) c’est un instrument qui sert à faire connoître, ou plutôt à mesurer les degrés de chaleur & de froid. Voyez Chaleur & Thermoscope.

Un paysan hollandois, nommé Drebbel, passe pour avoir eu au commencement du xvij. siecle la premiere idée de cet instrument.

Il y a différentes sortes de thermometres, dont voici les constructions, les défauts, les théories, &c.

Ancienne construction d’un thermometre dont l’effet dépend de la raréfaction de l’air. Dans un tuyau BC, Pl. de Pneumatique, fig. 3. n°. 2. auquel est attachée une boule de verre AB, on met une quantité d’eau commune, mêlée d’eau régale, pour empêcher qu’elle ne se gele l’hiver ; on ajoute à cette mixtion une teinture de vitriol, dissous pour la rendre verte. En emplissant le tuyau, il faut avoir soin de laisser dans la boule & dans le tuyau, assez d’air pour qu’il puisse remplir précisément la boule au plus fort de l’hiver, lorsque l’air se trouve le plus condensé ; & qu’il ne puisse point chasser du tuyau toute la liqueur dans les plus fortes chaleurs de l’été, lorsque l’air est au plus haut degré de sa raréfaction. A l’autre extrémité du tuyau est attachée une autre boule de verre CD, ouverte du côté de l’air en D : des deux côtés du tuyau on applique une échelle, ou une platine EF, sur laquelle on marque les degrés, ou un certain nombre de lignes également distantes les unes des autres.

Dans cet état, quand l’air qui environne le tuyau devient plus chaud, l’air renfermé dans la boule & dans le haut du tuyau venant à se dilater, chasse la liqueur dans la boule inférieure, & par conséquent fait descendre la liqueur : au contraire, quand l’air qui environne le tuyau devient plus froid, l’air renfermé dans la boule venant à se condenser, fait monter la liqueur. Voyez Raréfaction & Condensation.

Ancienne construction du thermometre avec du vif-argent. C’est de la même maniere & avec les mêmes précautions, que l’on met une petite quantité de mercure ou de vif-argent, qui n’excede point l’épaisseur d’un pois, dans un tuyau B C, fig. 4. n°. 2. que l’on coude en plusieurs endroits, afin qu’on puisse le manier plus aisément, & qu’on risque moins de le casser ; on divise ce tuyau dans un certain nombre de parties égales, qui servent d’échelle. Dans cet état, les différentes approches du mercure vers la boule A, marqueront les accroissemens ou les différens degrés de chaleur.

Les défauts de ces deux thermometres consistent en ce qu’ils sont sujets à recevoir les impressions d’une double cause ; car ce n’est pas seulement l’augmentation de la chaleur, mais aussi une augmentation du poids de l’atmosphere, qui peut faire monter la liqueur dans le premier, & le mercure dans le second de ces thermometres ; & d’un autre côté ce peut être la diminution du poids, aussi-bien que la diminution de la chaleur de l’atmosphere, qui fera descendre la liqueur & le mercure dans les deux thermometres. Voyez Barometre.

Construction du thermometre commun ou de Florence. Les académiciens del Cimento ayant remarqué les inconvéniens, ou défauts des thermometres ci-dessus, ils essayerent d’en construire un autre par le moyen duquel ils se flattoient de mesurer les degrés de chaleur & de froid de l’air, par la raréfaction & condensation de l’esprit de vin ; quoique la rarefaction & condensation de cette liqueur soit moins considérable que celle de l’air, & que par conséquent les variations dans les degrés de chaleur doivent y être beaucoup moins sensibles.

Voici la construction de leur thermometre.

Sur quelques petits morceaux de turmeric, qui est une sorte de racine dont on se sert pour guérir la jaunisse, on verse une certaine quantité d’esprit de vin rectifié, pour lui donner une teinture rouge ; ensuite on filtre plusieurs fois l’esprit de vin par un papier gris, afin que les particules grossieres de la racine se séparent de la liqueur. De cet esprit de vin ainsi teint & préparé, on emplit une boule de verre AB, fig. 5. n°. 2. & un tuyau BC, & afin que tout l’esprit de vin ne descende point dans la boule pendant l’hiver, il est à-propos de mettre cette boule dans un potit tas de neige mêlée de sel : ou si cet instrument se fait pendant l’été, on met la boule dans de l’eau de source impregnée de salpêtre, afin que l’esprit de vin étant extrèmement condensé, on puisse voir à quel point il s’abaissera dans le plus fort de la gelée.

Si l’esprit-de-vin monte à une trop grande hauteur au-dessus de la boule, il faut en ôter une partie ; & afin que le tuyau ne soit pas excessivement long, il est à-propos de mettre la boule, remplie de son esprit-de-vin, dans de l’eau bouillante, & de marquer le point le plus éloigné où monte pour-lors l’esprit-de-vin.

C’est à ce point que le tuyau doit être fermé hermétiquement par la flamme d’une lampe ; & des deux côtés du tuyau on applique une échelle comme aux autres thermometres.

L’esprit-de-vin étant susceptible d’une raréfaction & d’une condensation considérables, il se dilate à mesure qu’augmente la chaleur de l’air qui l’environne, & par conséquent il monte dans le tuyau ; de même à mesure que diminue la chaleur de l’air, l’esprit-de-vin descend dans le tuyau, & l’on voit sur l’échelle de combien de degrés il a monté ou descendu d’un jour à l’autre.

Si on n’a pas soin de faire sortir de la liqueur tout l’air qu’elle contient, ce qui est extrèmement difficile, il faut laisser de l’air dans la partie supérieure du tube. Car autrement si elle se trouve sans air, la liqueur ne manquera pas de se séparer en divers endroits à cause de l’air qui se trouve dans les interstices de ses parties. Or si on laisse de l’air dans la partie supérieure du tube, cet air produit un autre inconvénient ; car en vertu de sa pesanteur il doit tendre en en-bas, & empêcher par conséquent la liqueur de monter ; ou si la liqueur monte, elle doit comprimer l’air, & augmenter par conséquent son élasticité.

Comme l’expérience a fait connoître qu’un moindre degré de chaleur se communique plus aisément à l’esprit-de-vin qui est dans la boule, que ne fait un plus grand degré de chaleur, les rarefactions de l’esprit-de-vin ne sont pas proportionnelles aux causes qui les produisent.

Il paroît donc que le thermometre de Florence, quoiqu’il soit fort en usage, ne donne rien moins qu’une mesure exacte du froid & du chaud. A quoi l’on peut ajouter ce que dit le docteur Halley dans les Transactions philosophiques, savoir, qu’il a appris de ceux qui avoient gardé long-tems de l’esprit-de-vin, que cette liqueur perd à la longue une partie de sa vertu expansive.

De plus le verre n’est pas moins dilaté par la chaleur que la liqueur, & le froid les condense l’un & l’autre ; par conséquent lorsque la liqueur est chaude elle ne monte pas si haut qu’elle monteroit, si la boule & le tube avoient toujours la même capacité. Par la même raison la liqueur descend moins lorsqu’elle est froide, qu’elle ne feroit si le verre ne se condensoit pas. On ne peut donc savoir au juste quel est l’effet de la chaleur sur la liqueur seule. C’est ce qu’on remarque fort sensiblement quand on vient à plonger un thermometre dans une liqueur très-froide ou très bouillante ; car dans le premier cas la liqueur commence par monter, parce que le verre est condensé avant la liqueur, & quand la condensation parvient jusqu’à la liqueur elle redescend ; dans le second cas, par une raison contraire, la liqueur commence par baisser à cause de la dilatation du verre, & elle remonte ensuite.

Un autre défaut considérable de ce thermometre & des autres, c’est que ces thermometres ne peuvent point être comparés entr’eux. A la vérité ils marquent les différens degrés de chaud & de froid, mais chacun ne les marque que pour lui-même & à sa façon particuliere. De plus ils ne partent point de quelque point fixe de chaleur ou de froid, & c’est encore un défaut commun à tous les thermometres. Il en est de ces instrumens comme de deux pendules, qui pour n’avoir point été réglées d’abord sur l’heure du soleil, marqueront à la vérité qu’il y a une, deux, ou plusieurs heures de passées, mais ne marqueront point l’heure précise du jour ou du soleil. D’ailleurs quand la liqueur a monté d’un degré dans deux thermometres différens, nous ne pouvons pas être assurés que tous les deux ayent reçu la même impression d’une chaleur égale & additionnelle, puisqu’il se peut faire que l’esprit-de-vin ne soit pas le même dans l’un & dans l’autre, & qu’à proportion que cet esprit est plus ou moins rectifié, il montera plus ou moins dans le tuyau par le même degré de chaleur.

Ce n’est pas encore tout, car en réglant les degrés des thermometres, on juge de l’égalité de l’élévation de l’esprit-de-vin par l’égalité de la longueur du tuyau, en supposant que les diametres du tuyau sont égaux dans toute sa longueur, ce qui arrive très-rarement ; mais il y a tant d’irrégularités dans l’intérieur, qu’une certaine longueur de tuyau demande quelquefois pour être remplie, le double de liqueur qu’il faut pour emplir un autre tube de même longueur & de même diametre ; ce qui ne vient que des inégalités d’épaisseur des parois des tuyaux & des éminences & cavités qui se trouvent toujours aux surfaces intérieures, mais sur-tout de ce qu’ils sont presque toujours plus épais à une des extrémités qu’ils ne le sont à l’autre.

C’est pour cela que les comparaisons des thermometres sont si défectueuses & si difficiles à faire ; cependant ce qu’il y a de plus curieux & de plus intéressant dans l’usage des thermometres, c’est le résultat de ces comparaisons ; car c’est par ce moyen que l’on peut connoître le degré de chaud ou de froid d’une autre saison, d’une autre année, d’un autre climat, & quel est le degré de chaud ou de froid que peuvent supporter les hommes & les animaux.

M. de Réaumur a inventé un thermometre nouveau, & qu’il assure être exempt des défauts ci-dessus mentionnés. La principale propriété de ce thermometre est de servir à comparer les différens degrés de chaleur à des mesures connues, comme la dilatation & la condensation d’une liqueur quelconque, telle que l’esprit-de-vin.

Pour connoître les degrés de dilatation ou de condensation de l’esprit-de-vin, il ne s’agit que de mesurer l’accroissement ou la diminution de son volume, par rapport au volume qu’il avoit dans un certain état dont on est convenu. M. de Réaumur prend pour cet état celui de la liqueur quand elle est environnée d’eau qui commence à se glacer, ou plutôt de neige ou de glace pilée qui commence à se fondre. M. de Réaumur commence par graduer le tuyau en y versant de l’eau & du vif-argent, au moyen de différentes petites mesures qu’il assure être très-exactes ; ensuite il vuide le tuyau, & le remplit d’esprit-de-vin jusqu’à environ un tiers de la longueur au-dessus de la boule : alors il plonge la boule dans la glace, la liqueur descend jusqu’à un certain endroit où elle demeure stationnaire ; & l’on ajoute ou l’on ôte ce qu’il faut d’esprit-de-vin pour que le terme de la congélation soit précisément à l’endroit qui marque 1000 parties. Quand le point de la congélation est ainsi déterminé, on chasse le peu d’air qu’il y a dans le tuyau, & on le scelle hermétiquement. Ensuite on écrit d’un côté 0 au point de la congélation, & au-dessus les nombres 1, 2, 3, 4, &c. qui doivent exprimer les degrés de chaleur ; de-même au-dessous en allant vers la boule, on écrit 1, 2, 3, 4, &c. qui marque les degrés de froid. De l’autre côté du tuyau, vis-à-vis 0, on écrit 1000, & tant au-dessous qu’au-dessus les nombres 1001, 1002, 1003, &c. qui marquent les dégrés de condensation ou de raréfaction de la liqueur.

Il est absolument nécessaire de se servir du même esprit-de-vin pour avoir des thermometres qui soient comparables étant construits sur ces principes ; & comme il s’en trouve qui ont différens degrés de dilatabilité, M. de Réaumur a choisi celui dont le volume étant 1000 à la congélation, devient 1080 par la chaleur de l’eau bouillante. Voyez les mém. de l’ac. royale des Sciences, ann. 1730, p. 645. hist. p. 15. item 1731. p. 354. hist. p. 7.

Malgré toutes ces précautions, M. Musschenbroeck pense que le thermometre de M. de Réaumur est encore sujet à plusieurs des défauts du thermometre de Florence, savoir que l’esprit-de-vin perd à la longue sa vertu expansive ; que le verre se dilate aussi-bien que la liqueur, qu’en général les thermometres à esprit-de-vin ne peuvent servir que pour mesurer de petits degrés de chaleur ; car aussi-tôt que la liqueur commence à bouillir, ils ne peuvent plus marquer. Or l’esprit-de-vin rectifié bout un peu plutôt que l’eau, de sorte que l’on ne peut découvrir à l’aide de ce thermometre quel est le degré de chaleur de l’eau qui bout, & encore moins celui d’une plus grande chaleur, comme celle de l’huile bouillante, du savon bouillant, du mercure qui bout, &c. enfin ils ne peuvent marquer quelle peut être la chaleur des métaux fondus. Voilà les objections de M. Musschenbroeck contre ce thermometre, que nous nous contentons simplement de rapporter, sans nous en rendre garans, & sans prétendre rien ôter à M. de Réaumur de l’utilité de sa découverte.

Plusieurs auteurs ont proposé diverses méthodes pour trouver un point fixe ou un degré de froid & de chaud, afin de régler sur ce degré les autres degrés, & de pouvoir comparer les observations faites dans les mêmes tems, ou dans des tems différens, & en différens endroits.

Quelques-uns marquent l’endroit où se trouve la liqueur dans l’hiver quand l’eau commence à se geler, comme aussi dans l’été quand le beurre mis auprès de la boule du thermometre commence à se fondre ; ils divisent l’espace intermédiaire en deux parties égales, dont le point du milieu, suivant leur façon de compter, répond à la chaleur tempérée ; & ils subdivisent chaque moitié en dix degrés, ajoutant encore quatre autres degrés égaux à chacune des deux extrémités. Mais cette méthode suppose que le même degré de chaud & de froid répond à la congélation de toutes sortes d’eaux & à la fonte de toutes sortes de beurres ; comme aussi que toutes sortes de thermometres reçoivent les mêmes impressions du même degré de chaleur, quoique toutes ces suppositions soient contraires à l’expérience.

D’autres proposent de mettre la boule du thermometre dans une certaine quantité de neige & de sel, & de marquer le point où s’arrête la liqueur ; ensuite on descend le thermometre dans une cave profonde où l’air extérieur ne sauroit pénétrer ; de sorte que la liqueur recevant l’impression d’un air tempéré, puisse marquer le degré de la chaleur tempérée. Enfin on divise l’espace intermédiaire en quinze ou plusieurs parties égales, ce que l’on continue de faire au-delà de chaque extrémité : mais cette méthode est sujette aux mêmes inconvéniens que la précédente.

Le docteur Halley prend pour un degré fixe de chaleur celui où l’esprit-de-vin commence à bouillir ; mais il y a lieu de soupçonner que cet expédient n’a pas plus de justesse que les autres, quoique M. Amontons s’arrête comme lui au degré de chaleur qui répond à l’eau bouillante pour faire l’échelle de son thermometre de mercure ; mais comme les différentes gravités spécifiques des eaux marquent une différence dans leur masse & dans leur texture, il est très-probable que la chaleur de toutes sortes d’eaux bouillantes n’est pas la même, de sorte que le point fixe reste encore indéterminé.

M. Musschenbroeck paroît préférer à tous les autres thermometres ceux qui sont faits avec du mercure, qui, selon lui, a beaucoup d’avantages sur l’esprit-de-vin ; car on peut l’avoir pur, il reste toujours le même quoiqu’on l’ait gardé pendant plusieurs années, & il se raréfie toujours également quelque vieux qu’il soit. M. Musschenbroeck prétend que le principal défaut de ces thermometres est celui de la dilatation & de la condensation du verre qu’on ne sauroit empêcher. Il propose cependant différens expédiens pour remédier à ce défaut ; on en peut voir le détail dans le chapitre du feu de son essai de physique. Cependant il n’ose assurer que ce thermometre ait encore toute la perfection que l’on peut desirer. Mais il le croit supérieur à tous les autres. Les thermometres de mercure les plus en usage aujourd’hui sont celui de Farenheit & celui de M. de Lisle. Ces thermometres different du thermometre de Florence, 1°. en ce qu’on s’y sert de mercure bien purgé d’air, au-lieu d’esprit-devin ; 2°. en ce que le tuyau de verre est capillaire & fort étroit, & se termine non par une boule, mais par une bouteille cylindrique, d’une capacité proportionnée au diametre du tuyau, 3°. en ce que les divisions y sont beaucoup plus exactes, sur-tout dans le thermometre de M. de Lisle ; car on ne marque point ces divisions par des parties égales sur la longueur du tuyau, attendu les inégalités intérieures qui peuvent être au-dedans ; mais on verse successivement dans le tuyau une petite quantité de mercure qui est toujours la même, & qui occupe plus ou moins d’espace en longueur dans le tuyau, selon que le tuyau est moins ou plus large en-dedans ; c’est par ce moyen qu’on parvient à graduer les thermometres. Ceux qui desireront un plus grand détail sur ce sujet, peuvent consulter l’essai de Physique de Musschenbroeck, les miscellanea Berolinensia, tom. IV. p. 343. & l’appendice qui est à la fin des leçons de physique de M. Cottes, traduites en françois, & imprimées à Paris en 1742. (O)

On a encore donné depuis quelques années le nom de thermometre à une machine composée de deux métaux, qui en même tems qu’elle indique les variations du froid & du chaud, sert à compenser les erreurs qui en résultent dans les horloges à pendule.

M. Graham, illustre membre de la société royale de Londres, fut un des premiers qui tenta de remédier aux erreurs qu’occasionnent dans les horloges à pendule, les contractions ou dilatations des métaux, par les différens degrés de chaud & de froid qu’ils éprouvent. Voyez Métal. Il imagina pour cet effet de mettre en place de la lentille un tuyau contenant du mercure, afin que ce fluide se dilatant, ou se contractant par le chaud ou par le froid, il s’élevât ou s’abaissât dans le tube, & fît par-là monter ou descendre le centre d’oscillation précisément de la même quantité dont il seroit descendu ou monté, par l’alongement de la verge du pendule.

L’auteur, apparemment, n’a pas tiré de son invention tout l’avantage qu’il auroit pu desirer, car il n’en a point fait usage dans la pendule que messieurs les académiciens ont porté au nord.

Pour parvenir au même but, M. le Roy se sert d’un moyen tout différent, & sans-doute préférable. Il place perpendiculairement à l’horison, sur le coq, ou autrement dit la potence qui porte le pendule, un tuyau de cuivre TY (Voyez Coq, & nos Pl. d’horl.), long de 54 pouces, dans lequel passe une barre d’acier de même longueur ; celle-ci porte par son extrémité supérieure sur le bout du tuyau, & par l’inférieure elle est attachée aux ressorts de suspension RR, en telle sorte que le poids du pendule ne fait effort sur la potence, qu’après avoir agi sur la barre & sur le tube ; par ce moyen la chaleur alongeant le tube de laiton plus que la barre d’acier qu’il contient, elle fait monter le pendule dans la fente du coq, & le raccourcit autant qu’il alonge, par le surcroît de cette chaleur, ce qui produit une exacte compensation.

L’effet que je viens de décrire, se manifeste par un index E auquel l’extrémité inférieure de la barre fait parcourir les divisions d’un limbe.

Les métaux de même nom n’étant pas toujours entierement semblables, & l’expérience prouvant que les différentes especes de cuivre jaune s’alongent plus ou moins par la chaleur, selon la quantité de pierre calaminaire ou autres ingrédiens qui entrent dans leur composition : il est à propos de rapporter ici la méthode que M. le Roy met en usage pour rendre la longueur de son tube proportionnelle à celle de sa verge : on pourra juger par-là de l’exactitude qu’on doit attendre de sa construction.

Outre l’index dont nous avons parlé, M. le Roy en place un second de même genre, en I, au bas du pendule, le plus près que l’on peut de son centre d’oscillation, ensorte qu’il puisse être mu par l’extrémité de sa verge. Il échauffe ensuite beaucoup l’endroit où cet appareil est situé ; s’il voit que l’index inférieur ne se meuve point, tandis que le supérieur parcourt les divisions de son limbe, il conclut que le tuyau a fait autant remonter la lentille, qu’elle est descendue par l’alongement ; si au-contraire il apperçoit qu’il se meuve, il allonge ou raccourcit le tuyau, selon le chemin que l’index inférieur a pris

Quelquefois aussi il met deux tubes l’un dans l’autre, & après avoir attaché des lames de fer au bas de celui du dedans destiné à porter la barre où sont fixés les ressorts de suspension, il le fait soutenir sur celui du dehors par l’extrémité supérieure du tuyau intérieur ; par ce moyen, la hauteur du tube est diminuée de moitié. Voyez Suspension.

Plusieurs personnes, d’après ce thermometre, inventé en 1738, en ont imaginé d’autres, où ils ont combiné en différentes manieres des verges de cuivre & d’acier pour produire le même effet ; mais on peut dire que de toutes les méthodes qui ont été mises en usage, celle de M. le Roi est incontestablement la meilleure, tant par sa simplicité que par sa solidité : car rien n’est plus propre à soutenir un fardeau, que le tube ; cependant pour ne rien laisser à desirer, j’en rapporterai une seconde qui a été inventée par M. Ellicott, célebre horloger de Londres, elle pourroit être utile dans le cas où l’on voudroit suspendre le pendule sur des couteaux ; & dans celui ou la longueur du tuyau précédent pourroit causer quelque embarras, par rapport à la disposition des lieux, où la pendule devroit être située : selon cette nouvelle méthode, au haut de la verge d’acier du pendule, on en attache une autre de laiton de même longueur ; elle est comme on voit contenue dans la largeur de la verge d’acier, son extrémité s’appuie sur les bouts des leviers EX adaptés à la verge d’acier, & mobile au-tour des points I ; sur les extrémités X des leviers, portent les bouts des vis VV, qui tiennent à la lentille TTTT creuse en dedans. D’après cette description, on en comprendra facilement l’effet, car la verge de cuivre l, l, &c. s’alongeant par la chaleur plus que celle d’acier, pressera en E sur les bouts des leviers XE, & fera par conséquent monter un peu la lentille, au moyen des vis VV, dont les extrémités peuvent approcher plus ou moins près du centre I : on a la facilité de varier l’effet de la verge l, l, l, en alongeant ou raccourcissant le bras du levier IX.