L’Encyclopédie/1re édition/VENTRICULE

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VENTRICULE, ventriculus, comme qui diroit petit ventre, en Anat. est un diminutif de ventre, & signifie une cavité plus petite que celle que nous entendons par un ventre, ou plutôt une partie d’un ventre, ou une moindre cavité contenue dans une plus grande. Voyez Ventre.

Ventricule est aussi un nom qu’on donne par excellence à l’estomac. Voyez Estomac.

Quant à l’action du ventricule dans le vomissement, Voyez Vomissement.

Ventricule, ardeur du ventricule. Voyez Ardeur.

Les ventricules du cœur sont les deux cavités qui se rencontrent dans son corps musculeux, dont l’une est épaisse & ferme, l’autre mince & mollasse. On donne communément à ce dernier le nom de ventricule droit, & à l’autre celui de ventricule gauche ; quoique suivant leur situation naturelle le ventricule droit est antérieur, & le gauche postérieur.

Chacun de ces ventricules est ouvert à la base par deux orifices, dont l’un répond à une des oreillettes, & l’autre à l’embouchure d’une grosse artere. Le ventricule droit s’abouche avec l’oreillette du même côté, & avec le tronc de l’artere pulmonaire. Le ventricule gauche s’abouche avec l’oreillette gauche, & avec le gros tronc de l’aorte. On trouve vers le contour de ces orifices plusieurs pellicules mobiles, que les Anatomistes appellent valvules, dont quelques-unes s’avancent dans les ventricules sous le nom de valvules triglochines, & les autres dans les gros vaisseaux sous le nom de valvules sémilunaires. Voyez Valvule sémilunaire, &c.

Les ventricules ont leur surface interne fort inégale ; on y trouve quantité d’éminences & de cavités. Les éminences les plus considérables sont des allongemens charnus fort épais, qu’on appelle colonnes. A l’extrémité de ces colonnes charnues sont attachés plusieurs cordages tendineux, qui par l’autre bout tiennent aux valvules triglochines. Voyez Cœur.

On a aussi donné le nom de ventricule à quatre cavités particulieres du cerveau, dont deux appellées les ventricules latéraux, beaucoup plus longues que larges, avec très-peu de profondeur, séparées l’une de l’autre par une cloison transparente, sont immédiatement situées sous la voûte médullaire ; on les nomme aussi ventricules antérieurs ou supérieurs du cerveau. Le troisieme ventricules est un canal particulier, situé au bas de l’épaisseur des couches des nerfs optiques, & directement au-dessous de leur union ; ce canal s’ouvre en-devant dans l’entonnoir, & sous l’ouverture commune antérieure où il communique avec les ventricules latéraux. Il s’ouvre en-arriere sous l’ouverture commune postérieure, & communique avec le quatrieme ventricule, qui est une cavité oblongue qui se termine en-arriere comme le bec d’une plume à écrire, située sur la surface supérieure de la portion postérieure de la moële alongée. Voyez Moële alongée, Cerveau, &c.

Ventricule, maladies du, (Medec.) un suc membraneux, musculeux, ouvert par deux oritices, doué d’un mouvement assez fort, & qui lui est particulier, situé dans la partie moyenne supérieure du ventre, & suspendu au diaphragme où il est attaché, est ce qu’on nomme le ventricule. Il répand quantité d’humeur salivaire, appellée suc gastrique, & beaucoup de mucosité. Il reçoit les alimens qu’on a pris, les digere, & les conduit par le pylore dans le duodenum.

Conséquemment à sa construction & à ses différentes fonctions, il est exposé à beaucoup de maladies, dont plusieurs ont un titre particulier, comme la nausée, le vomissement, les rots, l’ardeur, la satiété, le dégoût, la cacochylie ou l’amas de mauvaises humeurs, la cardialgie, & les maladies qui ont rapport à la faim & à la digestion.

Le ventricule chargé d’une trop grande quantité d’alimens ; a besoin d’être évacué par le vomissement méchanique, ou bien il faut que de lui-même il se débarrasse peu-à-peu de ce qui le surcharge. Après cette opération, on évitera dans la suite de tomber dans le même excès de nourriture : mais s’il contient de la mucosité, de la pituite, ou quelqu’autre humeur tenace, il faut avoir recours aux résolutifs stomachiques, en même tems qu’aux doux purgatifs ; si la maladie résiste à l’usage de ces remedes, on tentera les vomitifs. S’il y a dans le ventricule des matieres putrides, rances, bilieuses, l’usage des acides savonneux est excellent ; après cela, on évacuera les matieres viciées par les selles, ou par le vomissement. Quand il se trouve dans le ventricule des corps étrangers, comme le calcul, on doit avoir recours aux dissolvans ; les mercuriels tueront les vers ; mais s’il y a du sang ou du pus contenu dans la capacité de ce viscere, il est à-propos d’user de doux minoratifs, crainte d’irriter l’ulcere, ou d’occasionner une nouvelle effusion de sang. Lorsque le ventricule est gonflé par des vents, on vient à-bout de les dissiper par les remedes généraux propres à cette maladie.

La trop grande compression du ventricule, s’évanouit insensiblement, lorsque la cause qui la produisoit, ne subsiste plus ; la contusion, la piquure & les blessures de cette partie sont dangereuses ; la nature seule en peut procurer la guérison ; mais il faut que ceux qui se trouvent dans ces cas, se contentent d’une diete très-ménagée.

Dans la trop grande dilatation & la hernie du ventricule, on évitera soigneusement de trop manger ; on tentera de guérir, ou du-moins de diminuer ces sortes de maladies par l’usage des remedes corroborans. Quand après une trop longue abstinence le ventricule s’est resserré, on vient à-bout de lui rendre sa capacité ordinaire, par des alimens doux & des boissons semblables qu’on augmentera par degré. La corrosion & l’excoriation du ventricule se guérit souvent par de doux antiseptiques. La cure de l’hémorrhagie de cette partie, appartient à l’article du vomissement de sang. L’inflammation, le rhumatisme, l’érésipele qui viennent attaquer le ventricule, se connoissent par la fievre & la cardialgie, accompagnées d’ardeur & d’anxiété autour de la région de ce viscere, & par l’augmentation du mal à chaque fois que le malade prend des alimens, mal qui lui semble aussi grand, que si on lui brûloit l’estomac. On traite cette maladie, en faisant un usage moderé des boissons & des remedes antiphlogistiques, & en évitant les vomitifs & les purgatifs dont on avoit usé auparavant.

Les ulceres du ventricule veulent souvent des remedes balsamiques, joints aux alimens liquides & mucilagineux. Le relâchement, l’humidité, & l’hydropisie de ce viscere demandent les corroborans, les échauffans & les stomachiques long-tems continués.

Pour guérir la langueur, la foiblesse, la pesanteur, le froid de cette partie, maladies qui dénotent l’affoiblissement de son mouvement vital, il est semblablement nécessaire de recourir aux stomachiques, aux corroborans, & aux échauffans. Si l’ardeur du ventricule n’est pas causée par des acres contenus dans sa cavité, il la faut modérer de même que dans l’inflammation. Comme l’anxiété procede de différentes causes, elle exige aussi différens traitemens. Enfin, lorsque le ventricule est agité de fortes convulsions sympathiques, on les calmera par les antispasmodiques, & les anodins donnés en même tems à petite dose. (D. J.)

Ventricule des oiseaux, (Anat. comparée.) le ventricule, ou pour me servir quelquefois de l’expression la plus ordinaire, l’estomac des oiseaux est placé tout autrement qu’il ne l’est dans les autres animaux ; il est presque joint au dos, enfermé de ce côté par l’os des reins, & tellement recouvert en-devant par les intestins, que lorsqu’on fend par une incision les tégumens du ventre, depuis ce qu’on nomme le brechet jusqu’à l’anus, on apperçoit ces derniers qui se présentent sans qu’on puisse découvrir que très-difficilement l’estomac qui est dessous.

Cette position du ventricule donne aux oiseaux la facilité la plus grande de couver, puisque les parties qui doivent poser presque immédiatement sur les œufs ou sur les petits, sont des parties molles capables de se prêter sans danger à la compression qu’elles doivent éprouver ; ce qui n’arriveroit pas si l’estomac, surtout après qu’ils auroient mangé, étoit obligé d’essuyer cette compression.

D’un autre côté, cette même structure exige que les petits soient couvés après qu’ils sont éclos ; leur estomac qui n’est alors défendu de l’impression de l’air, que par une lame d’os fort mince, & presque cartilagineuse, perdroit trop vîte la chaleur nécessaire pour la digestion, si l’incubation ne la lui rendoit de tems en tems.

Les observations de M. Hérissant lui ont appris, que l’estomac du coucou étoit placé d’une façon toute différente. En disséquant un de ces oiseaux, il fut bien étonné de trouver après l’ouverture du ventre, des morceaux de viande crue, au lieu des intestins qu’il s’attendoit d’y voir : il soupçonna d’abord que ces morceaux de viande avoient été portés dans cet endroit par quelque ouverture accidentelle faite au ventricule ; mais les ayant enlevés sans rien déranger, il vit qu’ils étoient dans ce viscere ; qu’il étoit placé si fort en avant, qu’il l’avoit ouvert avec les tégumens, & qu’il recouvroit les intestins ; au lieu que dans les autres oiseaux il en est recouvert.

La capacité de ce ventricule égaloit celle d’un moyen œuf de poule ; il est garni en-dedans de plis dans lesquels on trouve une matiere gélatineuse ; l’entrée de l’œsophage est fermée comme l’ouverture d’une bourse ; on trouve au-dessus beaucoup de grains glanduleux régulierement arrangés, qui, quand on les exprime, rendent de la liqueur. L’ouverture du pylore ou l’entrée de l’intestin, étoit aussi plissée sur ses bords ; mais ce que cet estomac avoit de plus particulier, c’étoit d’être adhérent par un tissu cellulaire à toutes les parties qui l’environnoient. Cette conformation parut si singuliere à M. Hérissant, qu’il soupçonna que l’oiseau qu’il avoit dissequé pouvoit bien être monstrueux ; mais la dissection de plusieurs autres de la même espece lui ayant toujours présenté la même structure, il fallut enfin la regarder comme constante.

De cette position de l’estomac, il suit qu’il est aussi difficile au coucou de couver ses œufs & ses petits, que cette opération est facile aux autres oiseaux ; les membranes de son estomac chargées du poids de son corps, & comprimées entre les alimens qu’elles renferment & des corps durs, éprouveroient une compression douloureuse & très-contraire à la digestion.

Il suit encore de la structure de ce volatile, que ses petits n’ont pas le même besoin d’être couvés que ceux des autres oiseaux, leur estomac étant plus à l’abri du froid sous la masse des intestins ; & c’est peut-être la raison pour laquelle le coucou donne toujours ses petits à élever à de très-petits oiseaux.

Mais pour revenir au ventricule des oiseaux en général, les Physiciens remarquent qu’il est composé de quatre muscles en-dehors, & en-dedans d’une membrane dure, calleuse, & raboteuse ; laquelle est disposée de telle maniere, qu’elle fait comme deux meules, que les muscles poussent à plusieurs reprises pour leur faire écraser les semences ; or l’épaisseur de la membrane calleuse n’empêche pas, que lorsqu’elle est pressée tout-à-l’entour par les muscles, ses côtés ne s’approchent aisément pour comprimer ce qu’elle contient, parce qu’elle est toute plissée ; cette membrane sert d’antagoniste aux muscles qui la laissent agir, lorsqu’étant relâchés, leur action cesse. Mais afin de rendre l’action de ces muscles & de cette membrane calleuse plus efficace, les oiseaux ont un instinct d’avaler des cailloux, lesquels étant mêlés parmi les semences, aident à broyer les parties les plus dures de la nourriture.

Les autruches qui avalent des morceaux de fer ne le font pas pour s’en nourrir, ainsi que les anciens le pensoient ; elles les prennent pour s’en servir à broyer la nourriture dans leur estomac : car elles avalent indifféremment tout ce qu’elles rencontrent de dur & de solide. Bien loin que ces volatiles se nourrissent de métaux, on a reconnu par expérience à Versailles, qu’ils meurent quand ils en ont beaucoup avalé ; la dissection a fait voir, que les doubles que les autruches avoient avalés, s’étoient changés en verd-de-gris par le frottement mutuel de ces doubles, que l’on y trouva usés seulement par les endroits où ils se pouvoient toucher.

A proportion que la nourriture particuliere à chaque oiseau est différente, la préparation, les organes qui y sont destinés, de même que ceux qui servent à la coction, sont aussi différens. Dans le genre des oiseaux, ceux qui vivent de chair ont bien moins de parties pour ces usages, que ceux qui vivent de semences. Les aigles, les vautours, les cormorans, les onocrotales, n’ont qu’un ventricule simplement membraneux & renforcé de quelques fibres charnues ; mais aussi ces oiseaux ne se servent point de cailloux pour broyer leur nourriture.

Enfin, la variété du ventricule des oiseaux se trouve bien marquée entre ceux qui vivent de grain, & ceux qui sont destinés à se nourrir de proie ; l’estomac des derniers est sans gésier, tout membraneux, & assez semblable à celui de l’homme ; autre animal rapace, qui vit de fruits, de chair, de poisson, & de coquillages. Le ventricule des chats-huants est un peu tendineux, comme s’il servoit indifféremment à digérer la chair & autre nourriture que cet oiseau peut attraper. (D. J.)