L’Heptaméron des nouvelles/Tome IV/18

La bibliothèque libre.

TOME TROISIÈME
CINQUIESME JOURNÉE

VERTU DES DAMES POUR DÉFENDRE LEUR HONNEUR,
FAIBLESSES DE CELLES QUI ONT FAIT LE CONTRAIRE,
ET SIMPLICITÉ DE QUELQUES AUTRES.

XLI. — Punition d’un Cordelier pour avoir voulu imposer une étrange pénitence à une Damoiselle.

1529. A Cambray. Historique. — L.

Page 5, lignes 8-9. — « L’année que Madame Marguerite d’Autriche vint à Cambray, &c. »

C’est au mois de juin de l’année 1529 que Marguerite d’Autriche vint à Cambray, afin de traiter de la paix, au nom de son frère Charles-Quint, avec Louise de Savoie, qui avait reçu les pleins pouvoirs de son fils. Louise avait aussi avec elle Marguerite, Reine de Navarre, ce qui fit donner à la paix qui fut faite à la suite de ces conférences le nom de Paix des Dames. On peut consulter au sujet de cette paix : « Notice sur les principales fêtes & cérémonies publiques qui ont eu lieu à Cambray depuis le XIe siècle jusqu’à nos jours », par M. Leglay, in-4o, Cambray, 1827. — L.

On connaît dans Marot l’épitaphe du cordelier Semi-dieux :

Cy gist Cordelier Semi-dieux,
Dont nos Dames fondent en larmes
Parce qu’il les confessoit mieux
Qu’Augustins, Jacobins ne Carmes.

Marot ; éd. de Lenglet-Dufresnoy, in-4o, II, 425, qui dit n’avoir trouvé ce quatrain que dans une des éditions postérieures de Bonnemère. — M.

— « Les pauvres filles qui sont sujettes, esclaves de leurs pères & mères, parents, tuteurs, maistresses, & craintives, sont contraintes de prendre toutes pierres, quand elles les trouvent, pour mettre en œuvre, & n’aviser s’il est froid ou chaud, ou rosty ou bouilly, & par ce, selon que l’occasion se rencontre, tant qu’elles se servent le plus souvent de leurs Valets, de leurs Maistres d’escole & d’estude, de ces bastisseurs d’Académies, des Joueurs de luth, des Violons, des appreneurs de danses, des Peintres, bref de ceux qui leur apprennent des exercices & sciences, voire d’aucuns Prescheurs, religieux & moines, comme en parlent Boccace & la Reyne de Navarre en ses Nouvelles, comme font aussi des Pages comme j’en ay connu, & des Laquais, des Comédians, enfin de ceux qu’elles trouvent à propos. » Brantôme, Dames galantes, Discours iv ; éd. Lalanne, IX, p. 574-5.

Page 7, lignes 24-5. — Ms. 75762. Le manuscrit que nous suivons portait : « qu’elle avoit paour de faillir au refus qu’elle avoit faict ». Dans l’édition de 1558 : « qu’elle avoit peur de faillir par le reffus qu’elle avoit faict au beau Père ». — L.

Page 8, lignes 16-7. — Ms. 75762 : « qu’elle n’eut bien envie de rire, vu la nouveleté de la pénitence ». — L.

Page 9, lignes 13-24. — Au lieu du passage hardi qui commence ainsi : « Il semble à vous oyr » jusque « Vrayment, dist Parlamente, s’il eût pensé à Joseph », on lit ce qui suit dans l’édit. de 1558 : « Comment, dist Hircan, pensez-vous que les Cordeliers ne soient pas hommes comme vous, & que principalement cestuy là se sentant si proche de ceste jeune Damoiselle, que la chair ne luy donnast pas quelque coup d’éperon », & dans l’édit. de 1559 de C. Gruget : « Comment, dist Hircan, pensez-vous que les Cordeliers ne soient pas hommes comme nous & excusables, & principalement cestuy là se sentant seul de nuict avec une belle fille ? — Vrayement, dist Parlamente, s’il eust pensé à la Nativité de Jesus Christ, qui estoit représentée en ce jour là, il n’eust pas eu la volonté si méchante. — Voire mais, dist Saffredent, vous ne dites pas qu’il tendoit à l’Incarnation avant que de venir à la Nativité ». — L.

XLII. — Vertueuse résistance d’une jeune fille Tourangelle à un jeune Prince.

Vers 1510. En Touraine & en Anjou. Historique. — L.

Page 13, lignes 8-10. — « En une des meilleures villes de Touraine demouroit ung Seigneur de grande & bonne Maison. »

Il est facile de reconnaître dans le Seigneur de grande & bonne Maison le Roi François Ier. Marguerite, dans une Nouvelle précédente (voyez plus haut, no  xxv), l’a déjà nommé ainsi. La ville de Touraine est Amboise, où Louise de Savoye demeurait avec ses enfants, & dont Louis XII avait mis à sa disposition le château afin de les rapprocher de la Cour fixée alors à Blois. — L.

Page 24, lignes 21-3. — « Lequel avoit mené sa sœur en croupe derrière luy ». Cet usage pour une femme d’enfourcher un cheval derrière un homme n’avoit rien de vulgaire & qui ne fût du meilleur monde. On peut se rappeler au Louvre l’admirable émail de la collection Sauvageot représentant de cette façon Henri II & Diane de Poitiers (cf. le livret des Émaux du Louvre de M. de Laborde, p. 236, à la note, & aussi l’article 408, p. 264). Dans la Superfluité des babitz des Dames de Paris (Anciennes Poésies françoises des xve & XVIe siècles, dans la Bibl. Elzevirienne, VIII, 1858, p. 308), on lit:

Mais sur la mule mouteras,
J’entens en crouppe doulcement,
De tou mary, que renvoiras
Pour son retour de Parlement;

Et surtout n’appréhenderas (ne prendrus)
Par la braiette aucunement
Le Clerc, derrière qui seras,
Au corps sans vilain pensement. » — M.

P. 26, lignes 22-3. — Ms. 75762. Cette phrase manquait dans le manuscrit que nous suivons. — L.

Page 29, ligne 29. — Éd. de 1558 : « Et la nommeray Camille ». — L. — Voir la troisième note de la Nouvelle suivante, p. 310. — M.

XLIII. — L’hypocrisie d’une Damoiselle nommée Jambicque, révélée par une marque de craie.

Commencement du XVIe siècle. Nulle indication de lieu. Historique. — L.

Page 31, lignes 7-10. — « En ung très beau chasteau demoroit une grande Princesse & de grande auctorité, & avoyt en sa compaignie une Damoyselle nommée Jambicque.

Brantôme a donné au IIe Discours (p. 210, t. VII des Œuvres complètes) des Dames galantes, l’analyse détaillée, & dans un style très vif, de cette Nouvelle de la Reine de Navarre. Voici un passage de cette analyse d’autant plus piquant qu’il nous révèle le nom d’un des personnages mis en scène : « A ce que j’ay ouy dire à ma mère, qui estoit à la Royne de Navarre & qui en sçavoit quelques secrets de ses Nouvelles, & qu’elle en estoit l’une des devisantes, c’estoit feu mon oncle de La Chastaigneraye, qui estoit brusq, prompt & un peu volage. » Ce seigneur de La Chastaigneraye est le même qui eut ce duel fameux avec le sire de Jarnac où il fut tué d’un coup d’épée connu sous le nom de coup de Jarnac. Brantôme, dans son analyse, nous dit que c’était une grande Dame, mais il ne la nomme pas. — L.

« Si est-ce que plusieurs ont bien eu opinion que ce plaisir estoit fort maigre sans la veuë & la parole, & de ce nous en avons un bel exemple dans les Cent Nouvelles de la Reyne de Navarre, de cet honneste Gentilhomme, lequel, ayant joüy plusieurs fois de cette honneste dame de nuict, bouchée avec son touret de nez, car les masques n’estoient encore en usage, en une galerie sombre & obscure, encore qu’il cogneust bien au toucher qu’il n’y avoit rien que de bon, friant & exquis, ne se contenta point de telle faveur, mais voulut savoir à qui il avoit à faire : par quoy, en l’embrassant & la tenant un jour, il la marqua d’une craye au derrière de sa robe, qui estoit de velours noir ; & puis le soir après souper, car leurs assignations estoient à certaine heure assignée, ainsi que les dames entroient dans la salle du bal, il se mit derrière la porte ; &, les espiant attentivement passer, il vint à voir entrer la sienne marquée sur l’espaule, qu’il n’eust jamais pensé, car, en ses façons, contenances & paroles, on l’eust prise pour la Sapience de Salomon, & telle que la Reyne la descrit. Qui fust esbahy ? Ce fut ce Gentilhomme, pour sa fortune assise sur une femme qui n’eust jamais creu moins d’elle que de toutes les Dames de la Cour. Vray est qu’il voulut passer plus outre & ne s’arrester là, car il luy voulut le tout descouvrir & sçavoir d’elle pourquoy elle se cachoit ainsi de luy & se faisoit ainsi servir à couvert & cachettes ; mais elle, très bien rusée, nia & renia tout, jusques à sa part de Paradis & la damnation de son ame, comme est la coustume des dames, quand on leur va objecter des choses de leur cas qu’elles ne veulent qu’on les sache, encore qu’on en soit bien certain & qu’elles soient très vrayes. Elle s’en dépita, & par ainsi ce Gentilhomme perdit sa bonne fortune. Bonne certes elle estoit, car la Dame estoit grande & valoit le faire, &, qui plus est, parce qu’elle faisoit de la sucrée, de la chaste, de la prude, de la feinte. En cela il pouvoit avoir double plaisir : l’un pour cette joüissance si douce, si bonne, si délicate, & le second, à la contempler souvent devant le monde en sa mixte cointe mine, froide & modeste, & sa parole toute chaste, rigoureuse & rechignarde, songeant en soy son geste lascif, folastre maniement & paillardise, quand ils estoient ensemble. Voilà pourquoy ce Gentilhomme eut grand tort de luy en avoir parlé, mais devoit tousjours continuer ses coups & manger sa viande aussi bien sans chandelle qu’avec tous les flambeaux de sa chambre. Bien devoit-il sçavoir qui elle estoit, & en faut loüer sa curiosité, d’autant que, comme dit le conte, il avoit peur avoir à faire avec quelque espèce de Diable ; car volontiers ces Diables se transforment & prennent la forme des femmes pour habiter avec les hommes & les trompent ainsi, ausquels pourtant, à ce que j’ay ouy dire à aucuns Magiciens subtils, est plus aisé de s’accommoder de la forme & visage de femme que non pas de la parole. Voilà pourquoy ce Gentilhomme avoit raison de la vouloir voir & cognoistre, &, à ce qu’il disoit luy-même, l’abstinence de la parole lui faisoit plus d’appréhension que la veuë & le mettoit en resverie de Monsieur le Diable, dout en cela il monstra qu’il craignoit Dieu. Mais, après avoir le tout descouvert, il ne devoit rien dire. Mais quoy ! ce dira quelqu’un, l’amitié & l’amour n’est point bien parfaite si on ne la déclare & du cœur & de la bouche, & pour ce ce Gentilhomme la luy vouloit faire bien entendre ; mais il n’y gagna rien, car il y perdit tout. Aussi, qui eust cogneu l’humeur de ce Gentilhomme, il sera pour excusé, car il n’estoit si froid ny discret pour joüer ce jeu & se masquer d’une telle discrétion ; &, à ce que j’ay ouy dire à ma mère, qui estoit à la Reyne de Navarre & qui en sçavoit quelques secrets de ses Nouvelles, & qu’elle en estoit l’une des devisantes, c’estoit feu mon oncle de La Chastaigneraye, qui estoit brusq, prompt & un peu volage. Le conte est déguisé pourtant pour le cacher mieux, car mon dict oncle ne fut jamais au service de la grand Princesse, maistresse de cette Dame, ouy bien du Roy son frère, & si n’en fut autre chose, car il estoit fort aymé & du Roy & de la Princesse. La Dame, je ne la nommeray point, mais elle estoit veufve & Dame d’honneur d’une très grande Princesse, & qui sçavoit faire la mine de prude plus que Dame de la Cour.

« J’ay ouy conter d’une Dame de la Cour de nos derniers Roys, que je cognois, laquelle, estant amoureuse d’un fort honneste Gentilhomme de la Cour, vouloit imiter la façon d’amour de cette Dame précédente ; mais, autant de fois qu’elle venoit de son assignation & de son rendez-vous, elle s’en alloit à sa chambre & se faisoit regarder de tous costez à une de ses filles ou femmes de chambre si elle n’estoit point marquée, &, par ce moyen, se garda d’estre méprise & reconnue. Aussi ne fut-elle jamais marquée qu’à la neufiesme assignation, que la marque fut aussitost descouverte & recogneue de ses femmes ; & pour ce, de peur d’estre scandalisée & tomber en opprobre, elle brisa là & oncques puis ne retourna à l’assignation. Il eust mieux valu, ce dit quelqu’un, qu’elle luy eust laissé faire ses marques tant qu’il eust voulu, & autant de faites les deffaire & effacer ; & pour ce eust eu double plaisir, l’un de ce contentement amoureux & l’autre de se mocquer de son homme, qui travailloit tant à cette pierre philosophale pour la descouvrir & cognoistre, & n’y pouvoit jamais parvenir. » Brantôme, Dames galantes, Discours II ; éd. Lalanne, p. 236-8.

Page 31, ligne 10. — Ms. 75762 : « nommée Camele ». Éd. de 1588 : « nommée Camille ». — L.

Camille est un nom littéraire dans les livres amoureux du temps de Marguerite ; un volume du Florentin Giovambattista Verini, qui a imprimé de 1526 à 1541, s’appelle : « Cammilla, opera piacevole d’amore, dove si contiene Strambotti, Mattinate, Sonetti, Canzoni e Capitoli di giovanni innamorati ». — M.

Page 32, lignes 6-7. — Ms. 75762. Le manusc. que nous suivons & l’éd. de 1558 portaient : « combien qu’elle estoit contraire à son cueur ». — L.

Page 32, lignes 16-7. — Ms. 75762 : « & print conclusion qu’il valoit mieus, &c. » — L.

Page 35, ligne 16. — « Que qui auroit veu le Diable au visage ne l’aymeroit jamais » ; leçon du Ms. 75762. Le manusc. que nous suivons habituellement portait : « Que… au visage, l’on ne aymeroit jamais ». — M.

Page 37, ligne 20. — Ms. 75762 & éd. de 1558 : « qu’elle vous cuira ».

XLIV. — Bonne aubaine que vaut à un Cordelier sa sincérité.

À Sedan. Nulle indication de date. Historique. — L.

Page 41, ligne 1. — Cette Nouvelle, qui se trouve dans tous les manusc., manque dans l’éd. de 1558. Claude Gruget, dans l’édition de 1559, y a substitué une autre Nouvelle que nous donnons à la fin du volume. — L. — Nous l’avons donnée dans le texte à la suite de celle-ci. — M.

Page 41, ligne 9. — « Le Seigneur de Sedan ». Ce doit être Robert de la Marck, IIe du nom, Duc de Bouillon, Seigneur de Sedan, Floranges, &c. Il avait épousé en 1491 Catherine de Croye, fille de Philippe VI de Croye, Comte de Chimay. Il eut pour fils le Maréchal de Fleuranges, auteur des Mémoires qui portent son nom. On trouve, t. VII, p. 167, de l’Histoire généalogique de la Maison de France du P.  Anselme, une notice détaillée sur le Seigneur de Sedan. — L.

Page 44, ligne 4. — « Et au fruict congnoist on le bon arbre », Unaquæque enim arbor de fructu suo cognoscitur. Lucæ VI, 44. — M.

Page 44, lignes 13-5. — Ms. 75762 : « car je sçay bien qu’un d’entre eus, Docteur en Théologie, nommé Colimant, grand Prescheur & Provincial de leur Ordre, voulut persuader, &c. ». — L.

XLIVbis.Comment un jeune Parisien arrive à épouser la fille d’un Marchand de soie.

Page 48, ligne 1. — « Contre la descente de Charles d’Autriche ». C’est dans l’été de 1536 que Charles-Quint entra par le Piémont en Provence pour faire le siège de Marseille qu’il fut obligé de lever. — M.

Page 49, ligne 1. — « Ce qui ne faisoit bien à l’honneur de la fille ». Correction ; le ms. donne rien, qui contredit la suite du sens. — M.

Page 54, lignes 6-7.— On remarquera dans la maison d’un marchand de Paris la grandeur du jardin avec ses haies de rosiers & de groseilliers. Il y avait, dans le cœur même de la ville & à l’état simplement bourgeois, bien plus d’espace & de jardins qu’on ne penserait. On l’a bien vu quand on a ouvert le boulevard Sébastopol. Les maisons des rues Saint-Martin & Saint-Denis, serrées & hautes sur la rue, semblaient n’avoir ni air ni lumière ; la percée intermédiaire n’a presque pas rencontré de constructions à l’intérieur des îlots & a fait tomber bien des arbres que le passant ne soupçonnait pas. — M.

Page 56, lignes 1-3. — « qui estoit si serrant qu’il luy sembloit que ce qu’il tenoit en une main l’autre luy déroboit ». Harpagon se préoccupe aussi des mains quand il renvoie La Flèche : « Montre-moi tes mains. — Les voilà. — Les autres ? — Les autres ! — Oui. — Les voilà. » L’Avare, acte I, scène iii.

Page 56, ligne 4. — Le commencement du commentaire de la 44e Nouvelle double est dans la bouche d’une femme. Gruget l’a naturellement rapporté à Nomerfide qui a dit la 43e Nouvelle ; si on n’en faisait pas la remarque, on croirait à une inadvertance de Marguerite, qui n’existe pas ; la fin des deux Nouvelles donne de même la parole à Simontault pour dire la quarante-cinquième. — M.

Page 57, ligne 32. — C’est le mot de la fille dans Tallemant : « Le couchage y fait ».

XLV. — Comment un Tapissier Tourangeau donna les innocents à sa servante d’abord & ensuite à sa femme.

Après l’année 1545. À Tours. Historique. — L.

Page 61, ligne 8. — « En la ville de Tours y avoit un homme ». À la fin de notre Introduction, nous avons déjà eu l’occasion de citer cette Nouvelle ainsi que les premiers vers d’un conte de La Fontaine, livre II, Conte vi, — la Servante justifiée, — où il reconnaît avoir emprunté à la Reine de Navarre les principales circonstances de son récit :

Pour cette fois la Reine de Navarre
D’un : C’étoit moi, naïf autant que rare,
Entretiendra dans ces vers le lecteur…

À l’exception d’un opéra-comique & d’un ballet de notre grand Opéra, connu sous le nom de la Servante justifiée, nous ne voyons pas que nos conteurs français de la fin du XVIe siècle & du XVIIe aient imité le petit chef-d’œuvre de la Reine de Navarre. — L.

Page 61, lignes 10-1. — « Tapissier de feu Monsieur d’Orléans, fils du Roy François Ier. »

Charles de France, Duc d’Orléans, de Bourbonnois, d’Angoumois & de Chastelleraud, Comte de Clermond en Beauvoisis, de la Marche & de Civray, Pair & Chambrier de France, Gouverneur & Lieutenant général pour le Roy en Champagne & en Brie, né au château de Saint-Germain, le 22 janv. 1521. Après avoir pris part à plusieurs expéditions & même commandé plusieurs fois les armées françaises, il mourut d’une pleurésie à l’âge de vingt-trois ans, en 1545. (Voyez Saincte-Marthe, Histoire généalogique de la Maison de France, &c., 1647, in-fo, 1. I, p. 752.) La rédaction de cette Nouvelle est par conséquent postérieure à l’an 1545. — L.

Page 61, lignes 14-5. — « Et ung jour qu’ils parloient de donner les Innocens ». Il y avait au moyen âge, non seulement en France, mais dans les autres pays de l’Europe, un très-naïf usage, c’est que, le matin de la fête des Saints-Innocents, les jeunes gens cherchaient à surprendre dans leur lit les jeunes filles &, quand ils y réussissaient, ils avaient le droit de leur donner le fouet. — L.

Page 62, ligne 24. — Ms. 75762 : « qu’elle n’avoit ni le cœur ni la force de la batre ». — L.

Page 63, ligne 4. — « Le jour des Innocens », c’est-à-dire le 28 décembre :

Très chère sœur, si je savois où couche
Vostre personne au jour des Innocens,
De bon matin je yrois à vostre couche
Veoir ce gent corps, que j’ayme entre cinq cens :
Adonc ma main, veu l’ardeur que je sens,
Ne se pourroit bonnement contenter
Sans vous toucher, tenir, taster, tenter,
Et, si quelcun survenoit d’aventure,
Semblant ferois de vous innocenter.
Seroit-ce pas honneste couverture ?

Clément Marot, éd. Jannet, 1868, in-16, III, p. 7.

Voir un autre jeu d’Innocents dans Cholières, Matiniées (Œuvres, éd. Jouaust, 1879, in-8, I, 224-6). — M.

Page 64, ligne 17 : « à leur bailler » ; leur pour se. M. — Ms. 75762 : « Et en se jouant tous deus à se bailler de la neige l’un à l’autre ». — L.

Page 67, lignes 6-7. — « Le meilleur n’en vaut rien. » C’est au fond la même chose que le mot d’Hamlet : « Man delights me not, nor woman neither. » — M.

XLVI. — Déportements d’un Cordelier.

Avant 1496. À Angoulême. Historique. — L.

Page 69, ligne 1. — Cette Nouvelle, qui est dans tous les manuscrits, manque dans l’édition de 1558. Cl. Gruget, dans l’édition de 1559, l’a remplacée par le récit de propos facétieux attribués au Cordelier de Vale, & débités par lui dans ses sermons. — L.

Page 70, lignes 20-1. — Ms. 75762 : « en lui disant Monsieur de Vale, dévalés » — L.

Il est donc probable qu’on ne prononçait pas Valles, mais Vallés ou Vallès. Adrien de Valois traduisait en latin son nom par Valesius ; le comté de Valois & le Valais sont le même mot, & il convient ici de rappeler que les pasquils ligueurs appelaient Henri III, au lieu de Henri de Valois, Henri dévalé. — M.

Page 73, ligne 22. — « en ceulx » ; ms. : « & ceulx », qui fausse la phrase ; éditions : « voire ceulx ». — Cf. p. 79, ligne 17 : « de ceulx ». — M.

XLVIbis.Sermons du Cordelier de Valles pour & contre les maris qui battent leurs femmes.

Page 77, lignes 3-4. — « Nulla est redemptio. » C’est le mot du Pape à propos de Messer Biagio, que Michel-Ange avait mis dans son Jugement dernier. — M.

Page 77, ligne 6. — Les femmes faisoient leur Achilles. Nom d’un syllogisme vainqueur. — M.

Page 77, lignes 16-8. — « C’est la croix qui fait aller & courir les femmes ». N’est pas dans le sens d’argent, de pièce de monnaie marquée d’une croix, comme dans le vers :

Le plus souvent sans croix ni pile (Anc. Poésies, IX, p. 372) ;

mais dans le sens des visites & des pèlerinages que font les femmes aux églises & où le diable trouve souvent son compte.

Pages 78-80. — Gruget a naturellement pris une partie du vrai commentaire ; cf. p. 73. — M.

XLVII. — Vertueux refus d’un Gentilhomme qui sauve l’honneur de quatre filles de Paris.

Auprès du pays de Perche. Nulle indication de date. — L.

La Nouvelle du Curieux impertinent dans le Don Quichotte de Cervantes a quelque analogie avec celle-ci ; c’est le même thème d’arriver à créer ce qu’on craint & ce qu’on cherche à éviter. — M.

Page 82, ligne 9. — Rien, qui manque dans le ms., ou tout autre substantif, est nécessaire pour donner un sujet au verbe de la phrase. — M.

Page 85, ligne 9. — « sans qu’il y ait de ma faute ». Sans manque dans le manuscrit. — M.

XLVIII. — Malice d’un Cordelier qui, à une noce en Périgord, trouva moyen d’aller prendre la place du mari.

Dans un village du Périgord. Nulle indication de date. — L.

XLIX. — D’une Comtesse étrangère qui ne se contentait pas du roi Charles.

Vers 1490. Règne de Charles VIII. Historique. — L.

Page 95, ligne 11. — « En la Cour du Roy Charles ». L’aventure racontée par Marguerite dans cette Nouvelle est une des plus piquantes de toutes celles qui se trouvent dans l’Heptaméron. Il eût été très curieux de découvrir le nom véritable des personnages mis en scène. Brantôme ne l’a pas fait ; il se contente de dire :

« Voyez, s’il vous plaist, de ces femmes qui ne se contentent ny de leurs marys, ny de leurs serviteurs, grands roys & princes & grands seigneurs ; mais il faut qu’elles aillent au change & que ce grand roy (François Ier) les avoit bien connues & expérimentées pour telles, & pour les avoir desbauchées & tirées des mains de leurs marys, de leurs mères & de leurs libertez & viduitez.

— J’ay cogneu une bien grande dame, veufve, qui en a fait de mesme : car, encore qu’elle fust quasi adorée d’un très grand, si falloit-il avoir quelques menus autres serviteurs, afin de ne pas perdre toutes les heures du temps & demeurer en oisiveté ; car un seul ne peut pas en ces choses y vaquer ny fournir toujours : aussi que telle est la règle de l’amour, que la dame d’amour n’est pas pour un temps préfix, ny aussi pour une personne préfixe, ny seule arrestée. Je m’en rapporte à cette Dame des Cent Nouvelles de la Reyne de Navarre, qui avoit trois serviteurs au coup & estoit si habile qu’elle les sçavoit tous trois fort accortement entretenir. » (Dames galantes, Discours IV, t. VII, p. 396, des Œuvres complètes, édition in-8o ; éd. Lalanne, IX, 716.)

Quant au héros principal, le nom de Hastillon sous lequel il est désigné nous autorise à faire une conjecture. Ne serait-ce pas Jacques de Chastillon, Chambellan des Rois Charles VIII & Louis XII, Lieutenant des cent Gentilshommes du roi Charles VIII, qui fut tué au siège de Ravenne en 1512. Brantôme lui a consacré le XIXe Discours de son livre sur les Capitaines françois : « Il avoit esté », dit-il, « l’un des grands favoris & mignons du Roy Charles VIII & mesme au voyage du royaume de Naples ; aussi disoit-on alors : « Chastillon, Bourdillon & Bonneval gouvernent le sang royal. » (Brantôme, Œuvres complètes, II, 103 ; éd. Lalanne, II, p. 305 & 422.) Dans un état des cent Gentilshommes pensionnaires de l’Hôtel du Roy Charles VIII pour l’année 1490-91, on trouve : « À messire J. Gaucher de Chastillon, Chevalier, Roy d’Ivetot, Lieutenant, la somme de quatre cens livres, pour ses gages & entretenement durant la dite année, qui est au feur de trente trois livres six sols huit deniers par mois. » (Histoire de Charles VIII, par Godefroy ; 1684, in-fol., p. 611.) — L. — Sur le dernier point, voir la juste rectification de M. Frank, III, 484-6. — M.

Nous transcrivons la note postérieure de M. Lacroix (éd. de 1858, p. 325) :

« Nous avons découvert d’une manière à peu près certaine les véritables noms des trois Gentilshonimes François qui sont les héros de cette Nouvelle & que la Reine de Navarre nomme Astillon, Durassier & Valnebon. On lit dans la Vie de Jacques de Chastillon, par Brantôme : « Il avoit esté, &c. Aucuns y mirent Galliot, qui fut dit depuis le Grand Escuyer Galliot, & estoient ces trois, avec le Roy, des tenans aux tournois qu’il fit là en la ville de Naples & par tous les autres, mais on disoit que Chastillon l’emportoit par dessus tous les autres, fust en valeur, fust en crédit. » M. Le Roux de Lincy avait reconnu Chastillon dans Astillon… mais M. Le Roux de Lincy n’a pas donné suite à sa découverte en retrouvant Galliot & Bonneval sous les noms de Valnebon & de Durassier. Jacques de Genouillac, dit Galliot, s’appelait le seigneur d’Acier ; il fut l’un des preux de Charles VIII à la bataille de Fornoue, & il se distingua dans les guerres d’Italie ; il devint Grand Maître de l’artillerie, puis Grand Écuyer de France sous François Ier, & mourut Gouverneur du Languedoc en 1516. Germain de Bonneval — Valnebon est l’anagramme de son nom, — Conseiller & Chambellan du Roi, fut aussi un des sept Gentilshommes qui combattirent auprès du Roi à Fornoue, vêtus & armés de même que lui. Il périt à la bataille de Pavie. » — P. L.

Page 96, lignes 3-4. — Éd. de 1558. Le manusc. que nous suivons portait : « la parole & la crainte de sorte, &c. » — L.

Page 99, lignes 12-3. — « En nul livre », vient du Ms. 75762 ; le manuscrit habituellement suivi portait la mauvaise leçon : « en mil lieues ». — M.

Page 99, lignes 14-5. — Var. en correction du Ms. 75762 : « s’il estoit ainsi qu’il la pût deviner ». — L.

Page 99, ligne 16. — Il leur dit, manque dans le Ms. — M.

Page 102, ligne 22. — Ms. 75762 : « pour vous contanter ». — L.

L. — Malheureuse mort d’un Gentilhomme Crémonois.

Vers 1544. À Crémone, en Italie. — L.

Page 107, lignes 11-2.— Ms. 75762 : « il n’y a pas encore un an ». — L.

Page 112, lignes 29-30. — « Il est escript qu’il n’y a rien nouveau soubz le soleil ». Nibil sub sole novum. Éccles., I, 10. — M.