L’Idylle éternelle/Le Rossignol

La bibliothèque libre.
Paul Ollendorff, éditeur (p. 106-108).


LE ROSSIGNOL


À Léon Dierx


Il fait nuit et les bois sont calmes,
Un souffle léger par instants,
Ose à peine agiter les palmes
Sur des rhythmes doux et chantants.
 
Dans le grand silence féerique
Soudain éclate un chant béni,
Un chant de poète lyrique
Modulé d’un art infini.


Écoutez bien ! c’est l’ouverture
Du miraculeux opéra.
Le théâtre, c’est la nature,
Et le Rossignol chantera.
 
Le Rossignol jette ses rimes
Par delà les cimes d’argent,
Par delà les lointaines cimes
De l’azur nocturne émergeant.

Pour baiser les douces menottes
Qu’aime tant ce triste Lindor,
Le Rossignol jette ses notes
Par delà les étoiles d’or.

Dans le silence ému, dans l’ombre,
Écoutez cette exquise voix,
Cette voix éclatante et sombre
Qui remplit de rêves les bois.


Un amour décevant et triste
Pleure en ce chant inimité
Que l’âme ardente de l’artiste
Fait vibrer dans l’illimité.