L’Idylle éternelle/Rêve d'Idylle

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Paul Ollendorff, éditeur (p. 49-56).


RÊVE D’IDYLLE


I


Un charme capiteux, étrange
Emane de vos mouvements.
Vous avez de grands yeux charmants.
Vous avez une tête d’ange,
 
D’Ange perfide et langoureux
En cravates de mousseline.
Vous avez la grâce câUne
Et les sourires amoureux.


C’est vous qu’on aime, exquise blonde,
C’est vous qui m’avez fait rêver
Ce rêve fou : vous enlever,
Vous emporter au bout du monde.


2


Le Faune dans ses bras nerveux
Prenait la nymphe effarouchée
Et mordait à pleine bouchée
Les seins roses, les blonds cheveux.
 
Et la nymphe blonde aux seins roses
Se débattait, et, de sa main,
Prévoyant de terribles choses,
Cachait ses yeux ; — mais, en chemin,
 
Tandis que l’homme aux pieds de chèvre
Au bout du monde l’emportait,
Un sourire alléché flottait
(Oh ! les doigts mal clos) sur sa lèvre.


3


Formes suaves, fins contours,
Lueurs fauves, roses et blanches
Des épaules, des bras, des hanches,
Mon rêve vous verra toujours.

Ce Faune ! Votre chevelure
M’a tenu des discours pervers
Et j’ai bien su lire à travers
Les promesses de votre allure.

Tes lèvres, lorsque tu souris,
M’ont fait deviner d’autres choses
Plus souriantes et plus roses.
Et vos grands yeux m’ont tout appris.


4


Mon rêve, exquise blonde, écoute.
Mon plus doux rêve, le voici :
T’emporter loin, bien loin d’ici,
Pour t’avoir à moi toute, toute.

Dans le parfum de tes cheveux
Je voudrais oublier le monde
En écoutant, exquise blonde,
La musique de tes aveux.

Il faudrait pour guérir mes fièvres.
Le subtil, le troublant baiser
Que mes lèvres voudraient poser
Longuement sur tes chères lèvres.


5


Songe aux caresses inconnues
Que je trouverais pour tes seins,
Et songe aux habiles desseins
Qu’inspireraient tes formes nues.

Toute la nuit sur toi penché,
Songe, et ne songe pas sans crainte
Aux sanglots de l’ardente étreinte ;
Songe aux douceurs du doux péché.
 
Et calcule combien de fièvres
Sous mes baisers frissonneraient,
Combien de roses fleuriraient
Sous les caresses de mes lèvres.


6


Un beau jour, nous te trouverons
Au fond des bois, sous les feuillées,
Parmi les ramures mouillées,
Les lilas et les liserons,
 
Maisonnette ! Nous entrerons,
Et les choses ensommeillées
Par nos sourires ré%’eillées
Battront des ailes sur nos fronts.


Et nous serons chez nous. Nos rêves,
Nos longs baisers dans les nuits brèves,
Les aveux de ta douce voix,

Tes seins blancs et tes lèvres roses
Empliront de troublantes choses
La maisonnette au fond des bois.