L’Imitation de Jésus-Christ (Lamennais)/Livre troisième/17

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Traduction par Félicité de Lamennais.
Texte établi par M. Pagès, Bonne Presse (p. 166-167).


CHAPITRE XVII.

QU’IL FAUT REMETTRE A DIEU LE SOIN DE CE QUI NOUS REGARDE.

1. J.-C. Mon fils, laissez-moi agir avec vous comme il me plaît, car je sais ce qui vous est bon.

Vos pensées sont celles de l’homme, et vos sentiments sont, en beaucoup de choses, conformes aux penchants de son cœur.

2. Le F. Il est vrai, Seigneur : vous prenez de moi beaucoup plus de soin que je n’en puis prendre moi-même. Il est menacé d’une prompte chute, celui qui ne s’appuie pas uniquement sur vous.

Pourvu, Seigneur, que ma volonté demeure droite et qu’elle soit affermie en vous, faites de moi tout ce qu’il vous plaira : car tout ce que vous ferez de moi ne peut être que bon.

Si vous voulez que je sois dans les ténèbres, soyez béni : et si vous voulez que je sois dans la lumière, soyez encore béni.

Si vous daignez me consoler, soyez béni : et si vous voulez que j’éprouve des tribulations, soyez également toujours béni.

3. J.-C. Mon fils, c’est ainsi que vous devez être, si vous voulez ne pas vous séparer de moi.

Il faut que vous soyez préparé à la souffrance autant qu’à la joie, au dénûment et à la pauvreté autant qu’aux richesses et à l’abondance.

4. Le F. Seigneur, je souffrirai volontiers pour vous tout ce que vous voudrez qui vienne sur moi.

Je veux recevoir indifféremment, de votre main, le bien et le mal, les douceurs et les amertumes, la joie et la tristesse, et vous rendre grâces de tout ce qui m’arrivera.

Préservez-moi à jamais de tout péché, et je ne craindrai ni la mort ni l’enfer.

Pourvu que vous ne me rejetiez pas, et que vous ne m’effaciez pas du livre de vie, aucune tribulation ne peut me nuire.

RÉFLEXION.

On ne saurait trop le répéter, la vie chrétienne consiste uniquement à vouloir ce que Dieu veut, et à ne vouloir que ce qu’il veut. Presque toujours nos désirs nous trompent, par une suite de notre ignorance et de notre corruption. Mais Dieu sait tout ce qui nous est caché ; il connaît les secrètes dispositions de notre cour, la me sure de sa faiblesse, les épreuves auxquelles il est bon que nous soyons soumis, les secours nécessaires pour les supporter, car il ne permettra pas que nous soyons tentés au delà de nos forces[1] : sa sagesse est infinie, et il nous a aimés jusqu’à donner pour nous son Fils unique[2]. Quelle confiance, quelle paix ne devons-nous pas trouver dans cette pensée ! Quoi de plus doux que de s’abandonner sans réserve à celui qui a tout fait pour sa pauvre créature, que de se perdre en lui par l’union intime de notre volonté à la sienne, ne nous réservant rien que l’action de grâces et l’amour ; de sorte que notre âme, notre être entier s’exhale, en quelque sorte, dans cette parole qui comprend tout : Mon Seigneur et mon Dieu[3] !

  1. I Cor. x, 13.
  2. Joan. iii, 16.
  3. Joann. xx, 28.