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L’Infini (trad. Sainte-Beuve)

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L’Infini (trad. Sainte-Beuve)
Revue des Deux Mondes, période initialetome 7 (p. 932).
L’INFINI.

J’aimai toujours ce point de colline déserte,
Avec sa haie au bord, qui clôt la vue ouverte,
Et m’empêche d’atteindre à l’extrême horizon.
Je m’assieds : ma pensée a franchi le buisson ;
L’espace d’au-delà m’en devient plus immense,
Et le calme profond, et l’infini silence,
Me sont comme un abîme ; et mon cœur bien souvent
En frissonne tout bas. Puis, comme aussi le vent
Fait bruit dans le feuillage, à mon gré je ramène
Ce lointain de silence à cette voix prochaine :
Le grand âge éternel m’apparaît, avec lui
Tant de mortes saisons, et celle d’aujourd’hui,
Vague écho. Ma pensée ainsi plonge à la nage,
Et sur ces mers sans fin j’aime jusqu’au naufrage.