L’Inspecteur général (Le Révizor)/Personnages

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L’Inspecteur général (Le Révizor)
Traduction par Prosper Mérimée.
Les Deux héritagesCalmann Lévy (p. 127-129).
Acte I  ►


PERSONNAGES.


ANTON ANTONOVITCH SKVOZNIK-DMOUKHANOFSKI, gouverneur d’une ville[1].
ANNA ANDREIEVNA, sa femme.
MARIA ANTONOVNA, sa fille.
LOUKA LOUKITCH KHLOPOF, recteur du collège.
SA FEMME.
AMMOS FEDOROVITCH LIAPKINE-TIAPKINE, juge.
ARTEMII PHILIPPOVITCH ZEMLIANIKA, administrateur des établissements de bienfaisance, de l’hospice, etc.
IVAN KOUZMITCH CHPEKINE, directeur des postes (aux lettres et aux chevaux).
PETR IVANOVITCH BOBTCHINSKI, gentilshommes propriétaires.
PETR IVANOVITCH DOBTCHINSKI,
IVAN ALEXANDROVITCH KHLESTAKOF, employé dans un ministère à Pétersbourg.
OSIP, son domestique.
CHRISTIAN IVANOVITCH HUEBNER, Allemand, médecin du district.
FEDOR ANDREIEVITCH LIULIUKOF, fonctionnaires retraités composant la haute société de la ville.
IVAN LAZAREVITCH RASTAKOFSKI,
STEPANE IVANOVITCH KOROBKINE,
STEPANE ILITCH OUKHOVERTOF, inspecteur de police.
SVISTINOF, sergents de ville.
POUGOVITSYNE,
DERJIMORDA,
ABDOULINE, marchand.
FEVRONIA PETROVA POCHLEPINE, femme d’un serrurier.
MICHKA, domestique du gouverneur.
LA FEMME D’UN SOUS-OFFICIER.
UN GARÇON D’HÔTEL GARNI.
VISITEURS, MARCHANDS, ETC.


CARACTÈRES ET COSTUMES.


NOTE POUR LES ACTEURS.


LE GOUVERNEUR. C’est un homme qui a vieilli dans l’administration et qui n’est pas une bête. Quoiqu’il aime les pots-de-vin et les cadeaux, il sait se conduire avec aplomb ; c’est un fonctionnaire sérieux, il raisonne même parfois assez juste ; il ne parle ni trop haut, ni trop bas, ni trop, ni trop peu. Chacune de ses paroles a un sens. Ses traits sont durs et sévères, comme ceux des gens qui ont débuté dans un service pénible par les grades inférieurs. Chez lui, le passage de la terreur à la joie, de la bassesse à la hauteur sera rapide comme chez un homme qui a des penchants bas et ignobles. Il est en uniforme, boutonné, bottes à l’écuyère et éperons. Cheveux courts grisonnants.

ANNA ANDREIEVNA sa femme, coquette de province, entre deux âges, élevée en partie avec des romans et des albums, en partie avec les commérages des cuisinières et des femmes de chambre. Très-curieuse ; dans l’occasion, elle se laisse aller à des vanteries. Elle exerce une certaine autorité sur son mari, par la seule raison qu’il ne trouve rien à lui répondre : mais cette autorité s’use en mercuriales et en sarcasmes. Elle change quatre fois de toilette dans le courant de la pièce.

KHLESTAKOF, jeune homme de vingt-trois ans, mince, fluet, un peu sot, et n’ayant pas grand’chose dans la tête. Il est petit employé dans une chancellerie et non de ceux qu’on appelle des piocheurs. Il parle et agit à tort et à travers, montrant cependant parfois une certaine fermeté et quelque intelligence. Il parle par phrases entrecoupées, et les mots sortent toujours inopinément de sa bouche. Plus l’acteur qui remplira ce rôle montrera de naïveté et de simplicité, mieux il s’en acquittera. Costume à la mode.

OSIP, domestique tel que sont ordinairement les valets d’un certain âge. Il parle lentement, regarde un peu en dessous, est raisonneur et aime à faire de la morale à son maître. En parlant il prend presque toujours sa grosse voix. Quand il cause avec son maître, il a une expression bourrue de franchise qui va jusqu’à la grossièreté. Il a plus d’esprit que son maître, et devine assez vite le fond des choses, mais il n’aime guère à parler ; c’est un coquin silencieux. Il porte une redingote grise ou bleue un peu usée.

BOBTCHINSKI et DOBTCHINSKI, l’un et l’autre humbles, bas et très-curieux. Ils se ressemblent beaucoup. Tous les deux un peu ventrus, tous les deux bredouillant et gesticulant beaucoup des mains. Dobtchinski est un peu plus grand et plus sérieux que Bobtchinski, mais Bobtchinski est un peu plus vif et délié que Dobtchinski.

LIAPKINE-TIAPKINE, juge. C’est un homme qui a lu cinq ou six livres, et qui, en conséquence, est quelque peu esprit fort ; grand chasseur, comme il est facile de s’en apercevoir au ton d’importance qu’il donne à chacune de ses paroles. L’acteur qui se chargera de ce rôle devra toujours conserver sur son visage l’expression de ce caractère. Il parle d’une voix de basse, en traînant les mots, reniflant et crachant, comme une vieille pendule qui siffle avant de sonner les heures.

ZEMLIANIKA, très-gros, maladroit et gauche, mais à cela près intrigant fieffé et voleur. Longs services et beaucoup de zèle.

LE DIRECTEUR DES POSTES. Bonhomme jusqu’à la naïveté.

Les autres rôles n’ont pas besoin d’indication particulière ; les originaux se rencontrent à chaque instant sous les yeux.

Messieurs les acteurs doivent apporter une grande attention à la dernière scène. Le dernier mot doit produire sur tous à la fois l’effet d’une commotion électrique. Tout le groupe doit changer de disposition à l’instant. Chacun doit laisser échapper en même temps un cri de stupéfaction, comme si ce cri sortait d’une seule poitrine. Faute d’observer cette recommandation on détruirait tout l’effet.



  1. Je traduis par gouverneur le mot gorodnitchii. C’est l’administrateur d’une ville et d’un district. Il réunit des fonctions municipales et politiques, qui répondent à peu près à celle de sous-préfet chez nous.