L’Ombre des jours/Pluie en été

La bibliothèque libre.
Comtesse Mathieu de Noailles ()
Calmann-Lévy, éditeurs (p. 77-78).


PLUIE EN ÉTÉ


Ô soir lavé de pluie et balayé de vent,
Ô soir et lune !
Une heure se retire et l’autre va devant,
Belle chacune ;

L’air frais semble allégé de toutes les fadeurs,
De ces détresses
Qui dans le soir d’été montent de tant de cœurs
Qu’un cœur oppresse ;


Ces rêves, ces soupirs, dans l’air sentimental
Des crépuscules,
Comme ils s’étirent, comme ils glissent et font mal,
Comme ils circulent !

Mais la belle nuée a dans l’ombre laissé
Couler son onde
Sur la tiédeur du soir, de trop d’amour blessé,
Ô paix profonde ;

Quel calme ! le silence et la bonne fraîcheur…
L’arbre s’égoutte ;
Nul bruit dans les maisons, closes comme des fleurs.
Rien sur la route ;

Et dans l’air trempé d’eau où plus rien n’est assis
De l’âme humaine,
Il se lève une odeur de lierre et de persil
Qui se promène…