L’Orthopédie/Livre I

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Chez George Fricx (Tome Ip. 1-55).

L’ORTHOPÉDIE
OU
L’ART
DE
PREVENIR ET DE CORRIGER
DANS LES ENFANS,
LES DIFFORMITÉS DU CORPS.



LIVRE PREMIER.

Notion générale de l’extérieur du Corps.



Le Corps humain se divise en Tronc & en Branches. Le Tronc a pour Souche l’épine du dos, & comprend trois cavités ; sçavoir, 1.o la Tête, que les Anatomistes appellent ventre supérieur, & qui est posée sur la colomne du col ; 2.o  la poitrine, que les mêmes Anatomistes appellent ventre moyen ; 3.o le ventre proprement dit, qu’ils nomment ventre inférieur.

Les Branches sont les Bras & les Jambes. Je ne détaillerai ces parties que par rapport à l’extérieur seulement. Elles se divisent chacune en plusieurs autres, dont les unes ont des noms connus de tout le monde, & quelques autres des noms moins connus. Je les nomme & les décris toutes par ordre, ce qui sert d’introduction à l’Ouvrage.


LA TESTE.

Première partie du Tronc, considerée extérieurement.

La Tête, pour commencer par la partie du Tronc, que nous avons nommée la premiere, comprend pour le dehors, le Crâne, la Chevelure & le Visage.


LE CRANE.

Le Crâne est la boëte osseuse qui enveloppe le Cerveau.


LA CHEVELURE.

Par la Chevelure, on entend, non les cheveux seulement, mais toute cette partie de la Tête où naissent les cheveux, c’est-à-dire le dessus, les côtés & le derrière de la tête. Le dessus de la Tête commence où finit le haut du front ; on l’appelle Synciput, & le derriere de la Tête se nomme l’Occiput. Aux côtés de la Tête, entre les yeux & les oreilles, sont deux parties nommées Tempes, qui font portion de l’Occiput. L’os des Tempes est la plus foible de tous ceux de la Tête, ce qui est cause que les playes dans cet endroit, sont mortelles. On prétend que ces parties sont appellées Tempes, du mot latin Tempora, qui signifie Temps, parce qu’elles indiquent l’âge de l’homme. Les cheveux des personnes âgées blanchissant premiérement dans ces endroits-là, ce qui cependant ne se vérifie pas dans tous les pays ; y ayant des peuples dont les cheveux, s’il en faut croire certains Historiens, sont blancs dans la jeunesse, & noirs dans la vieillesse[1].


LE VISAGE.

Le Visage est l’assemblage des parties qui composent le devant de la Tête, telles que le front, les sourcils, les paupieres, les yeux, le nez, les oreilles, les joües, les lévres & le menton ; à quoi j’ajoûte la peau, dont ces parties sont recouvertes.


LE FRONT.

On appelle Front, cette avance qui est au-dessus des sourcils, laquelle commence aux cheveux. C’est le sentiment commun des Anatomistes, qu’elle se nomme ainsi du mot grec Fren, qui signifie esprit, pensée. ou de Fronein, autre mot grec qui signifie raisonner, avoir de la raison, parce que c’est principalement sur le front, que l’on connoît quand l’homme pense ; mais il ne faut pas beaucoup compter sur ces étymologies.


LES SOURCILS.

A l’extrémité la plus basse du front, s’éleve, de chaque côté, un petit amas de poils rangés en forme d’arc, qu’on nomme les Sourcils, parce qu’ils sont au-dessus d’une partie de l’œil, qu’on nomme les cils, ensorte que Sourcil est la même chose que Surcil, ainsi que le fait voir le mot latin Supercilium.

La partie des Sourcils qui est du côte du nez, s’appelle la tête des Sourcils ; & l’autre, la queue des Sourcils. L’espace entre les deux Sourcils, est nommé l’Entrecil.


LES YEUX.

Les Yeux, à l’extérieur, sont composés de plusieurs parties : Les deux peaux que l’on voit dessus & dessous, se nomment les paupieres. La paupiere supérieure est mouvante, l’inférieure est immobile. Elles ont un petit bord garni de poils ; ce petit bord s’appelle Tarse, & les poils qui y sont attachés, se nomment les Cils.

Les Tarses ont chacun, du côte du nez, une petite ouverture par où sortent les larmes, ces ouvertures s’appellent points lacrymaux. Les paupieres s’unissent vers le nez, & au côté opposé. Cette union forme un angle de chaque côté ; l’angle du côté du nez s’appelle le grand angle de l’œil, & l’autre le petit angle.

Sous les paupières, en-dedans, est renfermé un corps rond & poli, qui est ce qu’on appelle l’Œil, ou le globe de l’Œil. Ce qui paroît de ce globe est blanc, avec un point au milieu. Cette partie blanche s’appelle le blanc de l’Œil, ce blanc est une tunique qu’on nomme la tunique conjointe, à cause qu’elle joint ensemble, toutes les parties de l’Œil. On découvre au point du milieu un cercle nommé l’Iris, à cause de ces couleurs : ce qui est au centre de ce cercle, est une ouverture dans les tuniques de l’œil, laquelle se nomme la Prunelle.


LE NEZ.

Le milieu du visage est une partie éminente qu’on nomme le Nez, laquelle est l’organe externe de l’odorat. Le nez se divise en plusieurs parties ; le dessus qui est entre les deux yeux, un peu plus haut, s’appelle la racine du Nez ; ce qui est d’abord après, s’appelle l’épine du Nez. C’est une partie toute osseuse. A cette épine est attaché un cartilage, qui va jusqu’au bout du nez. Ce cartilage s’appelle l’Acromion, ou globe du Nez, & vulgairement les Narines. Ces Narines sont séparées pour une petite cloison charnuë, appellée la colomne du Nez. Au-dessous de cette colomne, est creusée une espece de rigole, qui sépare la lévre supérieure en partie droite & en partie gauche ; cette rigole se nomme le philtre.


LES OREILLES.

L’Oreille extérieure se divise en partie supérieure, & en partie inférieure. La supérieure est beaucoup plus large que l’autre. Elle se nomme Pinna, autrement Aile, ou Aileron. L’inférieure s’appelle Fibra ou Lobe. Le Pinna a plusieurs parties : Le circuit extérieur qu’on y remarque, lequel touche les cheveux, s’appelle Helix, & le circuit qui est plus en déça du visage, se nomme Anthelix. Entre l’Helix & l’Anthélix on voit une cavité. Cette cavité se nomme la Nacelle. Le Pinna a un rebord ou petit cercle, qui s’appelle Cercle gibbeux. Ce Cercle gibbeux a une extrémité proche des Tempes, laquelle s’enfonce du devant au-dedans, & qui s’appelle extrémité gibbeuse.

Dans l’Helix, paroît un demi-cercle qu’on nomme la faucille. Après cette faucille est une concavité nommée la coquille. Sous la coquille est une autre cavité située au milieu de l’oreille, laquelle va jusqu’au tympan, on la nomme l’Alvéole, ou la Ruche.

Le Fibra, autrement le Lobe, se divise en partie supérieure, & en partie inférieure. La supérieure s’appelle le Prolobe ; l’inférieure, qui est molle & pendante, s’appelle l’Antilobe. C’est l’endroit où se mettent les pendans d’oreilles. Près de la jouë paroît à l’oreille, une petite éminence plate, & mi-ronde, que l’on nomme Hircus ; laquelle, quand on la presse contre l’ouverture de l’oreille, fait comme l’office de couvercle, & bouche exactement cette ouverture.


LA BOUCHE.

Entre les deux jouës, est une cavité nommée la Bouche, composée en dehors, de deux parties, qu’on appelle les Lévres ; l’une supérieure, l’autre inférieure. Elles sont l’entrée de la Bouche. La partie extérieure des Lévres s’appelle Prolabium, & le bord qui est de couleur rouge, se nomme Prostomia. Les deux extrémités de la Bouche qui font la réunion des deux lévres, se nomment les coins de la bouche ; la Bouche comprend deux parties, qu’on appelle les machoires ; l’une supérieure, l’autre inférieure toutes deux garnies de petits os, qu’on nomme les Dents. La machoire inferieure s’étend depuis les deux oreilles jusqu’au menton inclusivement.


LE MENTON.

Le Menton est la partie antérieure de la machoire inferieure. Il a au-dessous, une partie charnuë qui approche du col. Cette partie s’appelle Buccule, ou petite gorge.


LES DENTS.

A la mâchoire supérieure, & à l’inferieure, le long des gencives, est une rangée de petits os blancs & durs, médiocrement longs & larges, qui font non-seulement l’ornement de la bouche, mais qui servent à macher les alimens, & aident à la prononciation. On les nomme les Dents. Dans l’âge parfait, il y a ordinairement trente-deux Dents ; sçavoir, seize à chaque machoire. De ces trente-deux Dents, il y en a huit en devant ; sçavoir, quatre en haut & quatre en bas ; on les nomme incisives, ou trenchantes, à cause de leur fonction, qui est de trencher ou couper les alimens solides. On les appelle aussi Dents joyeuses, parce que ce sont celles qui paroissent le plus lorsque l’on rit.

Après les Dents incisives, il s’en trouve quatre fort aiguës, nommées canines, deux en haut, & deux en bas. On les nomme canines, parce qu’elles sont pointuës comme des Dents de chien ; celles d’en haut ont le nom d’œilleres, parce qu’elles sont situées au-dessous des yeux.

Ces Dents canines sont suivies de vingt autres Dents ; dix en haut, & autant en bas ; cinq à chaque côté, lesquelles sont appellées molaires, parce qu’elles font comme l’office de meules, à l’égard des alimens durs. Ce nombre fait, en tout, trente-deux Dents. Les quatre dernieres Dents molaires ; sçavoir, les deux d’en haut, une à chaque côté, & les deux d’en bas, une aussi à chaque côté, se nomment vulgairement Dents de sagesse ; parce qu’elles ne viennent gueres que dans la maturité de l’âge.

Après avoir parlé des parties extérieures de la Tête, l’ordre nous conduit à parler de celles de la Poitrine.


LA POITRINE.

Seconde partie du Tronc.

La partie qui est après la Tête, & qui fait comme la forme d’un coffre, tant en devant, qu’à côté & en arriere, S’appelle la Poitrine. La colomne sur laquelle la Tête est posée, & qui est le commencement de cette Poitrine, s’appelle, le Col.


LE COL.

Le Col est regardé comme une portion de la Poitrine, parce qu’à proprement parler, il en est le commencement, & que les principales parties qu’il renferme, dépendent de la poitrine. Il est appellé Col, parce qu’il est comme une colline sur laquelle la tête est élevée. La partie la plus basse du Col en devant, s’appelle la gorge, ou le gosier. La partie supérieure, aussi en devant, comprend une éminence qu’on appelle la pomme, & avec le vulgaire le morceau d’Adam. Cette éminence fait portion d’un tuyau nommé Larynx, qui sert d’instrument à la voix, lequel s’avançant par devant, forme cette éminence ou grosseur qui paroît plus aux hommes qu’aux femmes, parce que les femmes ont en cet endroit, de grosses glandes, qui leur rendent le Col plus arrondi, & la gorge plus pleine. Quand on mange ou qu’on boit, il arrive que cette grosseur monte & puis descend. La cause de ce mouvement est que lorsque nous avalons quelque chose, la descente de l’aliment oblige la Larynx, par une méchanique nécessaire, à s’élever alors, ce qui facilite la chûte de cet aliment dans l’estomach.

Le derriere du Col, autrement la partie postérieure, s’appelle le cervix ; le haut du cervix est appellé l’ophia, mot purement grec. Le milieu du cervix se nomme la nuque, ou la fosse ; & le bas, épomis, autrement le chignon du Col ; on l’appelle épomis, parce qu’il est au-dessus d’une partie qu’on nomme l’épaule, laquelle se dit en grec omos, épi étant une préposition grecque qui signifie dessus, ensorte qu’épomis signifie qui est au-dessus de l’épaule.

Les côtés supérieurs du Col, sous les oreilles, s’appellent les parotides. Ces parotides sont des glandes qui boivent les humidités du cerveau. Le côté moyen sous les parotides, s’appelle Terthræ, & le côté inférieur, Paralophia.

A la base du Col en devant, paroissent deux parties, l’une à droite, l’autre à gauche, qui font deux demi-cercles joints ensemble, des parties s’appellent les Clavicules.


DES CLAVICULES.

Ce sont deux petits os qui ferment la voûte de la poitrine par en haut ; on les appelle Clavicules, du mot latin Clavis, clef, parce qu’elles sont comme la clef de cette voûte.

Aux Clavicules commence le coffre ou la voûte de la poitrine. Ce coffre ou cette voûte se termine derriere les fausses côtes inclusivement. La partie antérieure de la poitrine, est appellée proprement la poitrine. Le haut de cette partie antérieure, s’appelle les Clavicules, dont nous venons de parler. Le milieu au-dessous, se nomme le Sternum.


DU STERNUM.

Le Sternum est un os plat, couché au milieu des côtes par-devant, c’est où aboutissent les côtes. Le mot de Sternum signifie en grec fermeté d’entendement ; & vient, à ce qu’on prétend, de ce que quelques Auteurs Grecs ont crû que l’entendement résidoit dans le cœur, qui est placé sous le Sternum. D’autres l’ont appellé Sternum, c’est-à-dire, solide & ferme, parce qu’il fait comme l’office de plancher. D’autres enfin le dérivent du latin sternere, qui signifie étendre, coucher, parce que cette partie est couchée au milieu des côtes. Elle est aussi appellée brechet, du mot bréche, qui est le nom d’un marbre fort dur, parce qu’elle est posée comme l’est un marbre sur une tombe, & que quand on fait l’ouverture d’un cadavre, elle se lève de même qu’un marbre de dessus un tombeau.

Au bas du Sternum est une partie cartilagineuse, faite en forme de pointe d’épée ; on l’appelle cartilage xiphoïde, du mot grec xiphos, qui signifie épée.


DES AUTRES PARTIES
EXTERIEURES DE LA POITRINE.

La partie antérieure de la Poitrine, se nomme du nom propre de Poitrine, comme nous l’avons remarqué. Les parties latérales sont appellées péristerna, c’est-à-dire autour du Sternum, Peri étant une préposition grecque qui signifie à l’entour. La ligne osseuse qui est au milieu du dos, & qui le sépare en partie droite & en partie gauche, s’appelle l’Epine du Dos, ou autrement, les Vertebres.

Les deux parties supérieures du Dos, à côté des vertebres, s’appellent les polerons, ou omoplates, & vulgairement les Epaules.

Au milieu de la Poitrine, à droite & à gauche, en devant, s’élèvent deux éminences charnuës, nommées les mammelles, lesquelles sont plus grosses aux femmes qu’aux hommes. Celles des femmes sont composées de corps glanduleux, entretissus d’une infinité de vaisseaux, qui servent à la production du lait. Celles des hommes sont seulement de peau, de chair, & de graisse, & ne peuvent faire du lait ; quoiqu’il en sorte quelquefois une humeur qui y ressemble. Il y a néanmoins des Historiens qui rapportent que des hommes ont allaité des enfans, comme auroient fait des nourrices. En général les mammelles des hommes, pour être bien faites, doivent être petites, & un peu plates. Celles des femmes doivent être rondes, élevées, & avoir la figure de deux demi-globes, séparés l’un de l’autre par un espace médiocre.

Les mammelles ont à leur milieu, un petit cercle rougeâtre, nommé Rayon, ou Aréole. Il est pâle aux jeunes filles, obscur aux femmes grosses & aux nourrices, & noir aux vieilles femmes. Ce cercle a pour centre, une petite avance de chair qu’on nomme le mammelon, laquelle est d’une substance fongueuse & poreuse ; elle paroît quelquefois toute flétrie ; mais elle se reléve dès qu’on la frotte un peu, ou que l’enfant la succe. Elle est rouge & petite aux filles, livide & grosse aux nourrices, & plombée aux femmes surannées.

Dans les femmes, les mammelles bien faites, sont rondes, & ont, comme nous avons dit, la forme d’un demi-globe. Mais les bonnes mammelles pour l’allaitement des enfans, sont un peu pendantes.

La grandeur des mammelles est différente, selon les pays ; les Indiennes & les Siamoises, comme l’on sçait, les ont si longues, qu’elles les jettent par-dessus les épaules, & allaitent leurs enfans derriere le dos. Aux Maldives, comme l’on sçait encore, elles ne sont pas moins longues ; mais les femmes les cachent comme une chose honteuse à montrer, & n’osent en prononcer le nom. Il y a des pays où les filles mêmes les applatissent le plus qu’elles peuvent.

Les mammelles sont différentes, selon les âges ; les jeunes filles n’en ont point du tout, il ne leur en paroît que le mammelon ; mais elles leur croissent insensiblement, & à l’âge de quatorze ans elles sont formées ; elles grossissent jusqu’à dix-huit ans ou environ, & ont de la fermeté jusqu’à trente ; mais à quarante-cinq & cinquante ans, elles sont tout-à-fait flétries, & dans la vieillesse il n’y reste plus que des peaux.


LE BAS-VENTRE.

Troisiéme partie du Tronc.

Tout cet espace qui s’étend depuis le cartilage xiphoïde jusqu’aux cuisses, se nomme le Bas-Ventre. La partie antérieure du Bas-Ventre, s’appelle l’abdomen ; & la postérieure, le derriere. La partie supérieure de l’abdomen s’appelle l’epigastre, mot tiré de deux termes grecs, sçavoir de épi, qui signifie dessus, & de gaster, qui signifie ventre, parce que cette partie est au-dessus des autres régions du ventre ; gaster se dit même quelquefois en françois (dans le style burlesque) pour le ventre ou l’estomach, & c’est ainsi que l’a employé la Fontaine dans Fable suivante, au sujet des membres révoltés contre l’estomach.


                Je devois par la Royauté,
                Avoir commencé mon ouvrage :
                A la voir d’un certain côté,
                Sire, Gaster en est l’image.
S’il a quelque besoin, tout le corps s’en ressent,
De travailler pour lui, les membres se lassant,
Chacun d’eux résolut de vivre en Gentil’homme,
Sans rien faire, alléguant l’exemple de Gaster.
Il faudroit, disoient-ils, sans nous, qu’il vécût d’air ;
Notre soin n’aboutit qu’à fournir ses repas.
Chommons : c’est un métier qu’il veut nous faire apprendre.
Ainsi dit, ainsi fait, les mains cessent de prendre,
        Les bras d’agir, les jambes de marcher.
Tous dirent à Gaster, qu’il en allât chercher.
Ce leur fut une erreur dont ils se repentirent.
Bien-tôt les pauvres gens tomberent en langueur,
Il ne se forma plus de nouveau sang au cœur,
Chaque membre en souffrit, les forces se perdirent.
                Par ce moyen les mutins virent
Que Gaster qu’ils croyoient oisif & paresseux,
A l’interêt commun contribuoit plus qu’eux.
Ceci peut s’appliquer à la grandeur Royale,
Elle reçoit & donne, & la chose est égale, &c.

Rabelais dit que Gaster est l’inventeur des Arts, voulant faire entendre que la faim désignée par ce mot qui signifie ventre, a fait inventer aux hommes tous les Arts nécessaires à la vie.

L’Epigastre a deux côtés, qui se nomment Hypochondres, mot grec encore, & qui est composé de Upo, qui signifie dessous, & de chondros, qui signifie Cartilage, parce que ces parties sont placées au dessous des cartilages qui sont aux fausses côtes.

La partie moyenne de l’Epigastre retient le nom propre d’Epigastre.

Le milieu de l’Abdomen s’appelle la partie Umbilicale, ou l’Umbilic, du mot latin Umbilicus. Son centre s’appelle le Nombril.

Les côtés de la partie umbilicale, se nomment les Lombes.

La partie inférieure de l’Abdomen, s’appelle Hypogastre, mot composé du terme grec Upo, dessus, & de Gaster, autre mot grec, comme nous l’avons vû ci-devant ; parce que cette partie est sous les deux autres régions du ventre.

Les côtés de l’Hypogastre s’appellent les Isles, nom qui leur a été donné, parce qu’ils se terminent au bas d’un os, nommé Ilium.

Le bas de l’Hypogastre est appellé Pecten, ou Pubis. Il est situé entre les Isles, un peu au-dessous.

Aux deux côtés de la partie inférieure du pubis, sous les Isles, se fait la jonction des cuisses avec le ventre ; l’endroit de cette jonction, s’appelle l’aine.

La partie postérieure du bas-ventre s’appelle le derriere, comme nous avons dit. Le haut du derriere se nomme la poupe. Immédiatement sous la poupe, est un os qu’on nomme le croupion. Les côtés sont les lombes, & le bas, les fesses.

Les fesses sont deux parties charnuës, sur lesquelles on s’assied. On les appelle fesses du mot latin fissum, ou fissile, qui signifie separé, à cause de la separation qui divise ces deux parties ; ce qui est si vrai, qu’autrefois dans l’ancien Blazon l’on appelloit fesse ce qu’on appelle à présent fasce, parce que la fasce sépare l’Ecusson en deux parts.

La séparation des fesses s’appelle Raye. Au bout de cette raye, est une ouverture par laquelle sortent les superfluités du bas-ventre ; cette ouverture s’appelle l’anus, ou le siége. L’espace contenu entre le siége & les parties secrettes, s’appelle le Perinée.


LES BRAS ET LES JAMBES
CONSIDEREZ EXTERIEUREMENT.


Après avoir parlé du tronc du Corps, il est tems de passer aux branches. Ces branches sont les bras & les jambes.

La partie qui s’étend depuis l’épaule jusqu’au poignet, s’appelle en général, du nom de Bras. Le Bras est composé de deux parties, l’une supérieure, qui va depuis l’épaule jusqu’à la premiere jointure ; l’autre inférieure, qui va depuis cette premiere jointure jusqu’à la seconde, c’est-à-dire jusqu’au poignet. La première portion se nomme proprement le bras ; & la seconde l’avant-bras ; mais vulgairement cet avant-bras s’appelle du nom commun de bras.

La première jointure qui est l’article où l’on plie le bras s’appelle le coude ; la seconde jointure se nomme le poignet, ou le carpe. La partie qui est après le carpe ou poignet, & où l’on remarque à l’extrémité, cinq divisons s’appelle la main. Ces divisons s’appellent les doigts. L’espace de la main contenu depuis le poignet jusqu’aux doigts, se nomme le métacarpe. Meta est une préposition grecque qui signifie après, en sorte que métacarpe signifie, qui est après le carpe.

Le métacarpe est convexe par-dessus, & creux par-dessous ; le côté convexe ou bossu, s’appelle le revers, ou le dessus de la main ; & le côté creux ou concave, s’appelle le plat, ou la paume de la main. Ensuite viennent les doigts, qui ont différens noms : Le premier se nomme le poulce ; le second, l’indice ; le troisiéme, le moyen, le quatriéme, l’annulaire ; & le dernier, l’auriculaire. Le pouce, en latin pollex, s’appelle ainsi, du mot latin pollere, qui veut dire avoir de la force, parce que ce doigt est le plus fort de tous. L’indice, en latin index, est ainsi nommé, parce qu’on s’en sert pour indiquer aux yeux ce qu’on veut faire remarquer. Le moyen est appellé de ce nom à cause de sa situation. Quant à l’annuaire, ce qui l’a fait ainsi nommer, est l’usage où l’on a été de tout tems, d’orner ce doigt d’un anneau. Usage provenu d’une ancienne erreur des Anatomistes Egyptiens, qui s’imaginoient qu’il y avoit à la main gauche, un petit nerf, qui, de ce doigt, alloit aboutir au cœur ; ensorte qu’il croit à propos, selon eux, de distinguer ce doigt par un anneau, en signe de la connexion qu’ils prétendoient qu’il avoit avec le principe de la vie, qui est le cœur[2]. Cette erreur n’est pas même si vieillie, qu’elle ne trouve encore créance chez quelques personnes, qui s’imaginent que le doigt dont il s’agit, a une telle relation avec le cœur, qu’il suffit d’y porter des anneaux d’une certaine matiere, pour se garantir de convulsions, & autres maladies que l’on croit, bien ou mal, avoir leur siége dans le cœur.

Quoique ce soit à la main gauche, qu’on ait attribué la prérogative d’avoir par un de ses doigts, un raport si intime avec le cœur, on n’a pas laissé, par accompagnement, d’orner quelquefois d’un anneau, le même doigt de la main droite.

Le cinquiéme doigt est appelle le petit doigt, parce qu’il est le plus grêle, on le nomme aussi auriculaire, parce qu’on a coutume de le mettre dans l’oreille, lorsque l’oreille fait de la démangeaison.

Le nombre des doigts est borné à cinq, tant aux mains qu’aux pieds ; & quand il y en a moins ou plus, le cas est extraordinaire.

L’Ecriture fait mention d’un homme extrêmement grand, qui avoit six doigts aux pieds & aux mains[3].

Pline le Naturaliste, parle d’une famille où étoient deux sœurs qui avoient six doigts aux mains, & qui, pour cette raison, furent appellées Sédigites[4], c’est-à-dire ayant six doigts. Il fait encore mention d’un fameux Poëte, qui avoit tout de même, six doigts aux mains, & qui pour la même raison, fut aussi appellé Sédigite[5]. Anne de Boulen, si fameuse dans l’Histoire d’Henry VIII.[6] lequel pour l’épouser, répudia Catherine d’Arragon, avoit six doigts à la main droite.

On remarque dans la paulme de la main, à la racine des doigts, de petites bossettes ou éminences, qui font la charnure de la main. Ces petites éminences s’appellent monts. Les Chiromanciens rapportent aux Planettes tous ces petits monts : ils appellent mont de Mars, celui qui est sous le poulce ; mont de Jupiter, celui qui est sous le doigt indice, mont de Saturne, celui qui est sous le doigt moyen ; mont du Soleil, celui qui est sous le doigt annulaire ; mont de Venus, celui qui est sous le petit doigt ; mont de Mercure, celui qui est dans la distance comprime entre le poulce & l’indice, laquelle s’appelle Thénar ou Souris ; & mont de la Lune, celui qui lui est opposé, lequel s’appelle Hypothénar.

La paulme de la main est marquée de plusieurs petits sillons, qu’on appelle lignes. L’observation de ces lignes sert de fondement à la fausse & ridicule science des Chriromanciens, qui est la Chiromancie.

On compte ordinairement quatorze lignes à la paulme de la main, dont trois sont regardées par les Chiromanciens, comme les principales. La premiere qui est au-dessous du poulce, se nomme chez eux, la ligne de vie, ou du cœur ; la seconde qui traverse la paulme de la main, & qui va jusqu’au dessous du petit doigt, se nomme la ligne hépatique ou du foye ; la troisiéme qui lui est parallele, allant dans le même sens, & qui prend depuis le doigt indice jusqu’à l’autre bout de la main, s’appelle la ligne mensale, la ligne thorale, ou de Venus, noms bizarres qu’on a inventés par rapport aux choses qu’on s’est faussement imaginé pouvoir prédire par ces lignes ; je dis, faussement imaginé : car la Chiromance est une science vaine & absurde, qui n’a aucun fondement dans la nature. Taisnerus est celui qui a le plus amplement écrit de la Chiromance. Il y en a un Traité dans Robert Flud Anglois ; Artemidor a aussi écrit de la Chiromance & des Augures. La lecture de ces sortes d’ouvrages, bien loin de disposer l’esprit en faveur de cette folle science, sert beaucoup au contraire, à en faire connoître la vanité.

Les bouts des doigts sont revêtus par-dessus, d’une corne voûtée, un peu longue & large, qui sert à les défendre contre les efforts qu’ils font. Cette corne se nomme ongle. A la base des ongles est une petite tache blanche nommée onyx, du nom d’une pierre précieuse, de couleur Blanchâtre & noire, que les Poëtes ont feint avoir été formée par les Parques, de la rognure des ongles de Venus, que Cupidon lui coupa avec le fer d’une de ses fléches.

Passons aux extrémités inférieures qui sont les jambes.

La jambe comprend deux parties, l’une qu’on appelle la cuisse, & l’autre du propre nom de jambe. La partie charnue longue & mi-ronde, qui s’étend depuis l’aine, jusqu’à la jointure du genoüil, est ce qu’on [appelle la cuisse.

La jointure dont il s’agit, a deux parties, sçavoir l’antérieure & la postérieure. L’antérieure est appellée le génoüil, & la postérieure le jarret ou la jarretiere.

La partie qui commence à la jarretiere & qui finit à la jointure d’en bas, est ce qu’on nomme proprement la jambe. Cette jambe a une portion grasse, la maigre, qui en fait le devant, s’appelle la grêve ; la grasse, qui en fait le derriere, s’appelle le sura, ou le gras de la jambe. La jointure d’en bas, où nous avons dit que la jambe finissoit, s’appelle le Tarse ou le cou du pied.

La partie comprise depuis le cou du pied jusqu’à l’endroit où l’on remarque cinq divisions comme à la main, se nomme le métatarse, à cause qu’il est après le Tarse, ce mot étant composé de la préposition grecque meta, qui signifie après. Le dessus du métatarse s’appelle le dessus du pied, & le dessous la plante du pied. A côté du tarse ou du cou de pied, sont deux éminences, l’une en dedans, l’autre en dehors, qu’on appelle les chevilles du pied ou les malleoles.

Les cinq divisions qui sont après le métatarse, s’appellent les orteuils ou doigts du pied. On les a nommés orteuils, ou arteuils, du latin ortilli, ou artilli, qui, en basse latinité, signifie articles.

Le derrière du pied s’appelle le talon, du mot latin Talus.

Voilà pour ce qui regarde en particulier les parties extérieures du Corps ; venons à leur enveloppe genérale, qui est la peau.


LA PEAU.

Les parties extérieures du Corps, sont recouvertes d’une enveloppe commune, que l’on nomme la Peau. Cette Peau a deux parties ; la premiere très-mince, nommée Epiderme, ou Surpeau ; la seconde plus épaisse, qui est sous celle-là, & qu’on nomme proprement du nom de Peau.

L’Epiderme, ainsi appellé du mot grec Ipiderma, qui signifie Surpeau, est une pellicule dénuée de sentiment, compacte déliée, & un peu transparente ; elle couvre toute la vraye Peau, à laquelle elle est très-adherente. C’est de cet Epiderme que se forment les vessies ou cloches que causent la brûlure.

La couleur de l’Epiderme est ce qui fait le teint ; plusieurs peuples l’ont blanc, d’autres basané, d’autres olivatre, & d’autres noir.

Cette couleur change aussi selon les tempéramens. Ceux qui sont sanguins ont l’Epiderme vermeil, mêlé de blanc & de rouge. Les Bilieux l’ont sec & tirant sur le jaune ; les Pituiteux l’ont molasse & blanc ; les Mélancholiques l’ont rude, brun & plompé. Ce n’est pas que ces couleurs soient véritablement de l’Epiderme, mais c’est que cette pellicule étant mince & transparente, laisse voir la couleur de la peau, comme un verre laisse voir les choses qui sont dessous.

La peau est toute semée de petits poils presque imperceptibles, & est percée d’une infinité de pores par lesquels sortent les sueurs, & se fait l’insensible transpiration. Le hale épaissit l’Epiderme, le rend moins transparent, & lui donne une couleur rousse, qui s’en va par le moyen d’un peu d’eau & de verjus, ou d’un peu d’eau & de vinaigre, pourvu qu’on n’ait pas été un tems considérable au grand air ; car ceux qui passent leur vie au Soleil, comme les gens de la campagne, contractent une couleur bazanée, que rien ne peut corriger.

L’Epiderme est parsemé de lignes parallèles, qui entrecoupées par d’autres, laissent plusieurs espaces de figure rhomboïde, comme on le peut voir par le moyen de ces miroirs caves, qui grossissent les objets. Dans les intersections de ces lignes, paroît un pore avec un poil qui y est planté ; lorsque ces pores se trouvent resserrés par le froid extérieur, ou par quelque frisson, ils s’élèvent sur la peau, & la rendent comme celle de poules.

L’usage de l’Epiderme, est de couvrir la peau, de la rendre unie, d’empêcher la trop grande dissipation des humeurs par les extrêmités des vaisseaux qui s’y terminent, & principalement d’émousser le sentiment trop vif du toucher, qui ne pourroit être sans douleur, si l’impression des objets se faisoit immédiatement sur les fibres, & sur les nerfs qui aboutissent à la peau. Quand l’Epiderme devient épais & calleux, le sentiment du tact en est moins vif, & la transpiration moins libre.

Après l’Epiderme vient la peau appelée Derme par les Anatomistes, du mot grec Derma, qui signifie peau.

La peau est fort épaisse au dos, aux reins, & aux extrêmités. Elle est plus fine au visage, & très-mince aux lévres.

La peau est un rets composé de fibres, de veines, d’arteres & de nerfs, dont nous nous abstenons de marquer ici l’usage pour éviter la longueur. Les pores qui la traversent, sont beaucoup plus lâches & plus ouverts en été qu’en hyver ; ce qui fait que les fourures des animaux qui ont été écorchés en hyver, sont beaucoup meilleures que les autres ; parce que les poils y étant plus étroitement enracinés, y tiennent par conséquent beaucoup mieux.

Ce ne seroit pas donner une notion suffisante de l’extérieur du Corps, si nous n’ajoutions ici en même tems 1o. ce qui concerne les proportions extérieures de ce même Corps, 2o. les variétés qui se remarquent dans la forme de quelques unes de ses parties, 3o. les goûts de différens peuples sur ce sujet.

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PROPORTIONS

Extérieures du Corps humain, variétés qui se remarquent dans la forme de quelques unes de ses parties : goûts de divers peuples sur ce sujet.


Il se trouve une si grande justesse dans les proportions du Corps humain, que c’est sur cela qu’est fondue toute la science des Méchaniques. De-là sont venuës les mesures de poulce, de palme, de coudée, de pas, &c.

La tête, avec le col, fait la sixiéme partie du Corps, la mesure de la face est de la longueur de la paulme de la main. La hauteur du front fait la grandeur du nez. La grandeur du nez fait celle de l’oreille.

Le Corps, quand il n’est ni trop gras ni trop maigre, a de hauteur cinq fois sa largeur.

La distance qu’il y a du moyen doigt d’une main jusqu’au même doigt de l’autre main, les bras étendus en croix, est la hauteur du Corps.

Dix fois la longueur de la main fait encore la hauteur du Corps.

Le centre de la figure humaine, se trouve juste à sa jointure antérieure des os qu’on nomme les Os pubis. De ce point, le Corps se divise en deux parties égales, dont chacune comprend un cercle parfait. Le centre du cercle supérieur se trouve à l’endroit qui répond à la base du cœur, & le centre du cercle inférieur se trouve vis-à-vis la jointure du genoüil.

La même symmetrie se rencontre aussi dans les bras étendus : car si l’on met la pointe du compas sur le plis d’un des bras, & que l’on porte l’autre pointe à l’extrémité du grand doigt de la main, on décrit un cercle, dont le diaméttre va jusqu’au milieu de la poitrine entre les deux clavicules ; ensorte que les bras étendus, comprennent deux cercles parfaits, qui viennent se toucher entre les deux clavicules.

Il est bon de remarquer que la symmetrie des os de la main de l’enfant, est dans la même proportion relative que lorsqu’il est parvenu à un âge parfait : de sorte qu’à mesure qu’il croît, cette même partie porte toujours la dixiéme partie de la hauteur de son corps, ce qui n’arrive pas dans les autres os du corps ; car excepté ceux du pied, ils varient tous suivant les divers accroissemens.

Dans l’homme fait, la partie supérieure du corps est plus courte que l’inférieure. Le contraire se remarque dans les enfans. Ils ont la partie supérieure plus longue ; d’où il faut conclure que le Cupidon qui se voit à Rome dans la cour du jardin de Belvedere, & qui est représenté avec un corps aussi proportionné pour cet égard, que celui d’un homme fait, est par conséquent très-mal représenté ; quoiqu’en dise l’Auteur des Monumens de Rome, qui veut faire de cette faute une perfection.

« Un Sculpteur, dit-il, d’un génie ordinaire, sçachant que Cupidon est un enfant, ne sçait faire autre chose qu’un enfant, lorsqu’il veut le représenter. Il fait donc un petit corps bien gras, bien potelé, dont les membres ne sont point encore formés, & dont les bras & les jambes sont, comme à tous les enfans, prodigieusement courts & gros, à proportion du reste du corps. Son genie ne va pas plus loin. Mais un génie au-dessus du commun, pense que si Cupidon est un enfant, c’est aussi un Dieu ; un Dieu qui ne croît plus, dont par conséquent les membres doivent être aussi formés que ceux d’un homme fait. Tel étoit le Sculpteur qui a travaillé à cet ouvrage. Il a fait son Cupidon dans cet esprit, & les yeux en sont charmés, parce qu’ils voyent en petit, un corps d’homme parfaitement bien formé ; car ni l’Appollon ni l’Antinoüs, ne sont point des corps plus réguliers, ni plus parfaits. Le Cupidon est à leur égard, ce qu’un ouvrage de mignature est à l’égard d’une grande peinture à l’huile[7]. »

L’auteur avance, comme on voit, que dans les enfans, les bras & les jambes ont plus de grosseur, moins de longueur que dans les personnes faites. Or, puisque Cupidon est un enfant, le Sculpteur devoit donc le réprésenter comme tel, & non comme un homme fait. La raison qu’on apporte en disant que cet enfant est un Dieu, & que par conséquent le Sculpteur n’a pas dû le réprésenter avec celui d’un homme fait, est une raison qui semble contrarier la raison même, puisque ce Dieu étant personnellement différent des autres Dieux en ce qu’il est enfant, & qu’il l’est toujours, n’est plus par conséquent réprésenté selon cette différence personnelle, lorsqu’on le réprésente avec les proportions d’un homme fait, & qu’on ne lui laisse de l’enfant, que la petitesse, ce qui fait un nain proportionné, mais non pas un enfant, & contrarie par conséquent la fiction à laquelle on doit se conformer ; à moins qu’on ne prétende que Cupidon est ici réprésenté tel qu’il devint après que sa mère eut consulté Thémis, & qu’elle en eut suivi l’avis. Car la Fable dit que Vénus voyant que son fils, ne croissoit point, & en ayant demandé la cause à Thémis, qui lui répondit qu’il ne grandiroit que lorsqu’il auroit un frere qui pût joüer avec lui ; elle accoucha d’Anteros, qui servit de compagnie à Cupidon, & avec lequel Cupidon commença à croître, & à prendre par conséquent les proportions d’un homme fait. Cette raison, quoiqu’absurde, paroîtroit plus recevable pour mettre le Sculpteur à couvert, que celle qu’apporte l’Auteur des Monumens de Rome. Je dis cette raison, quoiqu’absurde, & le terme n’est point trop fort, puisque si Cupidon croît, il ne faut donc pas avancer que c’est un Dieu qui ne croît plus, à moins qu’on ne cherche tout exprès à se contredire.

Une autre différence entre l’enfant & l’homme fait, c’est que l’homme fait a depuis la jointure des épaules jusqu’au coude, & depuis le coude jusqu’au haut du poulce, aussi-bien que depuis l’extrémité d’une épaule à l’autre, la mesure de deux têtes, au lieu que l’enfant n’a que la mesure d’une tête. Une autre différence encore, c’est que la tête d’un enfant d’un an, n’est qu’un cinquième de la hauteur de son corps, & que la largeur de ses épaules est égale à la longueur de sa tête, au lieu que dans l’homme fait, la tête est d’une huitiéme partie du corps, & que la largeur des épaules est deux fois plus grande que la longueur de la tête.

Le point fermé tant des personnes faites que des enfans, contient en sa rondeur, la longueur du pied.

La conformation des parties du corps, lorsqu’on les considére seules & en elles-mêmes, est un genre de proportion qu’il ne faut pas ometre ici.

La tête, pour être bien proportionnée en soi, doit être plutôt un peu grosse que petite, d’une forme ovale, plâte par les côtés, médiocrement avancée en devant & en arrière.

Le visage doit être plus long que large, & avoir du relief. Chez les Anciens, les visages longs étoient regardés comme les plus beaux, c’est ce qui se peut voir par les Statuës antiques. Le visage de Notre-Seigneur, est réprésenté fort long dans tous les anciens Tableaux.

Le front doit être bossu, mais très-peu.

Les sourcils doivent chacun former une arcade, & être suffisamment garnis de poils.

Les paupieres doivent être bordées de poils doux & longuets.

Les yeux doivent être grands & bien fendus.

Les joües pleines, fermes & rondelettes.

La bouche doit être petite.

Les lévres doivent être médiocrement avancées, & leurs bords bien vermeils.

Les oreilles petites & bien plaquées.

Le menton un peu arondi.

Le col dégagé des épaules.

Les épaules plattes & bien couchées.

La poitrine large, ample, & élevée par-devant en forme de hotte.

Les bras ronds & charnus, un peu plats en-dedans, & allant en grossissant depuis le poignet jusqu’auprès de la jointure du coude.

Les mains un peu grasse & longues, les doigts grêles & dégagés, avec de petites fossettes au bas de chaque doigt sur le dessus de la main quand elle est ouverte, & de petites bosses au-dedans de la main.

La conformation du ventre est d’être élevé aux femmes, & moins élevé aux hommes. Il en est de même de ce qu’on appelle la croupe.

Les cuisses & les jambes sont aussi plus grosses aux femmes qu’aux hommes. La

La taille est plus fine aux femmes, & les hanches sont plus avancées ; les hommes l’ont plus longue que les femmes.

Les jambes, tant aux hommes qu’aux femmes, doivent être médiocrement longues, & garnies d’un gras qui n’ait point trop de saillie, les femmes cependant les ont ordinairement plus grosses que les hommes, ce qui n’est pas une perfection.

Les pieds doivent être menus & dégagés, mais d’une longueur médiocre.

La nature varie beaucoup dans la conformation de chacune de ces parties, & pour commencer par la tête, il y en a de pointuës & pyramidales ; il y en a de quarrées, rondes, d’ovales, de larges, d’étroites, de grosses, de petites ; il y en a de plates par derrière & de celles-là les unes sont tout-à-fait plates, les autres seulement plates en haut, les autres seulement plates en bas, & les autres plates en haut & en bas ; mais de maniere que cet aplatissement est interrompu par une rondeur horisontale ; ensorte que ce sont deux applatissemens l’un sur l’autre.

Les fronts sont ou grands ou petits, ou convexes, ou plats, ou creux ; & parmi les convexes, on en voit de bossus en forme de calebasses. Il y a des fronts quarrés, il y en a de biscornus, de larges, d’étroits, de longs, de courts ; il y en a qui ont une éminence de chaque côté, aux uns plus apparente, aux autres moins.

Les sourcils sont ou droits, ou en arcade, ou longs, ou courts, ou minces, ou épais, ou unis, ou raboteux. Ils sont ou presque joints l’un à l’autre, ou médiocrement séparés, ou très-séparés.

Les nez ne sont pas moins différent entr’eux. Il y en a de longs, de courts, d’enfoncés & de saillans. Il y en a de rabattus jusques sur la lévre superieure, & quelquefois presque jusques sur l’inférieure, comme s’ils alloient entrer dans la bouche. Il y en a de droits, de bossus, de ronds & d’aigus. Il y en a de plats par-dessus comme une régle, & ce sont ordinairement ceux-là que les Sculpteurs imitent dans leurs Statues. Il y en a de gros au milieu, de gros par le bout, de déliés proche les sourcils, de déliés par en bas, & gros par en haut, il y en a d’un peu applatis sur le haut comme un cachet. Il en est de raboteux en cet endroit, comme seroit une petite plaque inégalement élevée plus haut ou plus bas que le milieu, de relevés sur le milieu, ou aquilins, de retroussés en pied de marmite, de recourbés en bec de corbin & de plats ou camus.

Les nez varient aussi beaucoup par rapport aux narines ; car elles sont, ou évasées, ou étroites, ou entre deux. Il y en a de hautes, de basses, de retroussées, de rabatuës. Il y en a dont le dessous, au lieu d’être de niveau avec la colomne du nez, est ceintré en forme d’arcade, & laisse voir presque tout le dedans de la cloison du nez.

Les yeux sont, ou petits, ou grands, ou médiocres. Ils sont, ou enfoncés, ou à fleur de tête, ou comme sortant de la tête, ou tenant le milieu entre ces deux excès. Ils sont ou gris, ou bleus, ou roux, ou noirs.

Les paupieres sont, ou sans cils, ou revêtues de cils, & ces cils sont ou courts, ou longs ; ou toufus, ou clairsemés.

La bouche est, ou grande, ou petite, ou médiocre ; elle est, ou saillante, ou enfoncée.

Les lévres sont, ou rélevées, ou plates, ou entre deux. Elles sont, ou égales, en sorte que l’une n’avance point sur l’autre, ou inégales, ensorte que la supérieure déborde sur l’inférieure, ou l’inférieure sur la supérieure. Il y a des lèvres renversées en dehors, d’autres rabatuës en dedans. Il y en a de grosses & de menues.

Les jouës sont, ou pleines, ou creuses, ou joufluës ; ou fermes, ou mollasses, la pommête des joües est ou médiocrement, ou excessivement saillante.

Le menton est, ou long, ou court ; ou retiré en arrière, ou avancé en devant, ou de niveau avec la lèvre inférieure. Il est avec un petit creux au bout, ou sans ce creux. Il est, ou rond ou pointu. La pointe en est, ou relevée en forme de menton de boüis, ou simplement pointuë.

Les oreilles sont, ou larges, ou étroites ; ou médiocres, ou saillantes ; ou plaquées, ou grosses, ou déliées.

Le col est, ou long, ou court ; ou massif, ou grêle.

La poitrine est, ou ample, ou étroite ; ou plate, ou relevée.

Les épaules sont, ou couchées en arrière, ou voûtées ; ou larges, ou étroites.

La taille est, ou grosse & ramassée ; ou fine & déliée ; ou courte ou longue.

Les hanches sont, ou élevées ou déprimées.

Le derriere est, ou avancé, ou rabatu.

Les jambes sont, ou grêles, ou massives ; ou longues, ou courtes, ou d’une mesure médiocre. Sur quoi il est à remarquer que lorsque le col est long, les jambes & les oreilles sont longues aussi.

Les pieds sont, ou longs ou courts ; ou gros ou menus ; ou larges d’assiette, ou étroits, ou entre deux.

De ces différentes conformations, tant pour la tête, que pour le reste du corps, il n’en est aucune qui ne soit dans l’ordre de la nature par rapport aux autres parties, & qui n’ait avec ces mêmes parties, une proportion nécessaire : si par exemple, une personne est d’une taille grosse & courte, la même forme se remarquera dans chacun de ses membres ; on lui trouvera les bras cours & gros, les mains larges & grosses, les doigts courts & gros[8]. Une personne qui sera grande & déliée, aura les membres longs & menus. Celle qui sera d’une taille médiocre, les aura pareillement médiocres[9].

On admire avec raison, que de tous les hommes, il n’y en a pas seulement deux qui se ressemblent entierement pour le visage, non plus que l’écriture, ni pour la voix ; quelle confusion ne seroit-ce pas tous les jours dans la societé, sans cette différence ? Mais par rapport au visage, un judicieux Auteur, dont nous emprunterons ici les paroles[10], remarque fort à propos, qu’on ne prend pas garde à une merveille qui n’est pas moins digne d’attention, sçavoir que chaque visage est forme de sorte, que, quelque laid qu’il paroisse, pourvû qu’il ne soit point défiguré par quelque accident, on ne sçauroit, sans le rendre difforme, y rien changer pour le rendre plus beau ; parce que dans sa laideur même, la nature a observé une symétrie si exacte, qu’on ne peut raisonnablement y rien trouver à redire. Si par exemple, on prétendoit allonger le nez d’un camus, on ne feroit rien que de difforme, parce que ce nez étant allongé, n’auroit plus de symmétrie avec les autres parties du visage, lesquelles étant d’une certaine grandeur, & ayant certaines élévations, ou certains enfoncemens, demandent que le nez leur soit proportionné. Ainsi, selon certaines régles très-parfaites en elles-mêmes, un camus doit être camus, & selon ces régles c’est un visage régulier qui deviendroit monstrueux, si on lui faisoit le nez aquilin. Il y a bien plus, c’est que quelquefois il est aussi nécessaire qu’un homme n’ait point de nez, qu’il est nécessaire dans l’ordre Toscan, par exemple, que le chapiteau de sa colomne, n’ait point de volute.

C’est un bel ornement que la volute dans l’ordre Ionique, ou dans le Corinthien ; mais ce seroit une irrégularité monstrueuse dans l’ordre Toscan. Cela fait voir qu’on ne doit jamais regarder dans personne, comme des défauts réels, les défauts apparens de son corps ; parce que souvent ce que nous croyons un défaut, est une perfection au jugement de la vérité. Un petit nez, de petits yeux, une grande bouche qui nous choquent d’ordinaire, appartiennent à un ordre de beauté, qui peut bien n’être pas de notre goût, mais que nous ne devons pas, pour cela, condamner ; parce qu’en effet c’est un ordre qui a des régles propres & essentielles ; qu’il ne nous appartient pas de contredire.

Quand la nature forme un visage, elle y garde des mesures qui ne sçauroient composer qu’un tout très-parfait par rapport aux desseins qu’elle a. Que les hommes en jugent ce qu’il leur plaira ; que les François, par exemple, méprisent les nez camus & les petits yeux ; que les Chinois les estiment ; ce sont des bizarreries de l’esprit humain. Mais si l’on en revient aux principes, on trouvera qu’il y a divers ordres de beauté comme il y a divers ordres d’Architecture, & il sera toujours vrai de dire, que la nature ayant gardé ses régles, le plus laid visage du monde à notre égard, est aussi parfait, & aussi régulier, que celui qui nous semble le plus accompli & le plus beau.

Ces régles sont si constantes, que c’est uniquement par la connoissance parfaite qu’en ont les habiles Peintres, qu’ils peuvent rendre très-ressemblans les portraits qu’ils peignent d’après nature, & c’est ce que vouloit dire l’incomparable Nanteüil, quand il se vantoit d’attraper toujours la ressemblance, & de s’être fait pour cela des régles très-assurées. Il disoit qu’il y avoit dans le visage, certains traits qu’il faut extrêmement considérer, parce qu’ils servent de mesure à tous les autres, & il prétendoit que lorsqu’une fois on avoit dessiné exactement ces sortes de traits, le reste étoit immanquable. On lui demanda, un jour, s’il pourroit peindre une personne absente, sur le rapport qu’on lui en feroit ; il répondit qu’il le pourroit, pourvu que l’on fût assez habile pour satisfaire exactement aux questions qu’il feroit sur certains traits[11].

Cela revient à ce qu’écrit Leonard de Vinci sur le moyen de faire le portrait d’une personne sans l’avoir vûë qu’une fois : car il ne demande autre chose pour cela, sinon qu’on retienne bien comment la personne a le menton, le front & le nez. Car il prétend que là-dessus, on peut juger de tous les autres traits, comme si on les voyoit actuellement.

Au reste, tous les peuples ne s’accordent pas sur ce qui fait la beauté du corps. Les Tartares ne trouvent pas qu’une personne soit belle, si elle n’a les yeux petits & enfoncés, le nez large & plat, le visage écrasé, & la taille ramassée, sur-tout pour les femmes[12].

Chez les Maures, les nez le plus à l’uni du visage, sont les plus beaux ; les plus grosses lévres passent aussi pour les mieux faites.

C’est une beauté aux Dames de la Chine, d’avoir le pied plus petit que le naturel ; & pour cela quand une fille a passé trois ans, on lui rabbat les orteüils sous la plante du pied ; on lui applique ensuite une eau qui consume les chairs, & on enveloppe de plusieurs bandages le pied, jusqu’à ce qu’il ait pris son pli. Les femmes se ressentent toute leur vie, d’une telle opération, & elles peuvent à peine marcher ; mais elles souffrent cette incommodité avec joye, rien ne leur étant plus à cœur que d’avoir le pied extrêmement petit. Leurs souliers proportionnés à leurs pieds, sont si courts & si étroits, qu’ils le seroient trop pour un enfant de deux ans.

Les Dames de la Chine se piquent aussi d’avoir de petits yeux ; mais en récompense, elles aiment à avoir de grandes oreilles, bien larges & bien pendantes. Cette prétenduë perfection est tellement du goût des Chinois, qu’une fille en qui elle ne se rencontre pas, trouve difficilement à se marier[13].

Il y a des Peuples où c’est un si grand mérite d’avoir un gros ventre, que quand ils choisissent un Roy, ils prennent garde sur-tout, qu’il soit extrémement ventru.

Il y en a d’autres au contraire, où l’on n’estime que les gens maigres & décharnés[14].

Nous laissons à part, dans le cours de cet Ouvrage, tous ces différens goûts, & sans en condamner aucun, nous nous attachons (comme il est raisonnable) au plus universellement reçu parmi nous.

En voilà suffisamment pour ce premier Livre, qui n’est qu’une introduction aux trois suivans. Passons au Livre second, c’est-à-dire, comme nous nous le sommes proposé, à ce que c’est que la taille en particulier, & aux moyens d’en prévenir & d’en corriger dans les enfans, les difformités.



  1. Ctesias rapporte que ceux des Pandores qui habitent les vallons, ont cela de particulier, que pendant leur jeunesse, leurs cheveux sont blancs, & que dans la vieillesse ils sont noirs.
  2. Veteres Græcos annulum habuisse in digito accepimus senestræ manus, qui minimo est proximus. Romanos quoque aiunt, sic plerumque annulis usitatos. Causam esse hujus rei Appion in Libris Ægyptiacis hanc dicit : Quod insectis, apertisque humanis cadaveribus, ut mos in Ægypto fuit, quas Græci ἀνατομας appellant, repertum est nervum quendam tenuissimum, ab eo uno digito de quo diximus, ad cor pergero, ac pervenire. Proptereà non inscitum visum esse eum potissimùm digitum tali honore decorandum, qui continens & quasi connexus esse cum principatu cordis videretur. Aulu-Gell. Lib. x cap. x.
  3. Second Livre des Rois, chap. 21. v. 20.
  4. Digiti quibusdam in manibus seni. Marci Curatii ex Patriciâ gente, filias duas ob id Sedigitas appellatas accepimus. Plin. Hist. Nat. Lib. xi. cap. 43.
  5. Volcatium Sedigitum illustrem in Poëticâ. Plin. ibid.
  6. Anne de Boulen n’étoit pas de ces beautés où l’on ne trouve point de défauts ; mais elle avoit de grands agrément. Elle était brune & de belle taille, elle avait le tour du visage ovale, le teint blanc, la bouche admirable ; elle donnoit à ses habits, aussi bien qu’à ses manieres, un air dont on étoit charmé, & qu’on ne pouvoir imiter. Enfin il sembloit que tous les agrémens du monde se fussent réunis en sa personne ; mais elle avoit six doigts à la main droite, une dent mal rangée à la mâchoire supérieure, & à la gorge une tumeur qu’elle prenoit soin de cacher avec son mouchoir de col. Henry la soupçonna mal-à-propos d’infidélité, & lui fit trancher la tête. Histoire d’Angleterre, d’Ecosse & d’Irlande, par Larrey.
  7. Monumens de Rome. pag. 344. in-12.
  8. Léonard de Vinci, pag. 210.
  9. Id. ibid.
  10. Mélanges d’Histoire & de Litterature, Tom. 2. pag. 165. & suiv. prem. Edit.
  11. Voyez sur tout cela, Mélanges d’Histoire & de Litterature. Tom. 2.
  12. Voyage du sieur Aubry de la Mortraye en Europe.
  13. Voyage autour du monde, par M. le Gentil.
  14. Les premiers sont les Gordiens, & les seconds les Spartes. Erasm. Adag.