L’appel de la terre/Préface

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Imprimerie de "L’Événement" (p. iii-iv).

PRÉFACE



M. Damase Potvin, qui a été en Afrique, aurait pu, tout comme un autre qui n’a voyagé qu’autour de sa chambre, écrire un roman exotique. Il publie un roman canadien. Il convient de lui en savoir gré. Il convient de lui savoir gré aussi de faire, par le roman populaire, une opportune propagande.

Roman populaire, l’« Appel de la Terre » a les qualités et les inconvénients de ce genre : action rapide, épisodes sensationnels, sentiments simplifiés, ficelles. Un bon jeune homme que son père destinait à la prêtrise, quitte la terre qui manque de bras et n’en tient plus que pour la carrière d’instituteur. Il laisse aux Bergeronnes une fiancée au cœur simple et trouve à Tadoussac une élégante sentimentale dont il s’amourache et à qui, par surcroît, il sauve la vie. La snobinette, la villégiature passée, rentre en ville, dans son milieu. Quant au jeune homme, qui s’était épris un peu vite, il se déprave aussi un peu vite ; mais, rassurez-vous, il se relève aussi vite et, par la plus belle nuit de Noël qu’on eût vue aux Bergeronnes, il revient à sa fiancée au cœur simple. Ils se marieront aux Jours Gras et auront, sans doute, comme il convient… beaucoup d’enfants.

L’intrigue, évidemment, ne laisse pas d’être trépidante. Mais l’aventure de ce campagnard déraciné, troublé par l’élégance d’une citadine, désespéré à sa première désillusion, mais qui n’en meurt point, n’est peut-être pas invraisemblable. Il a entendu l’appel de la terre saguenayenne et — observation judicieuse — c’est au milieu du brouhaha de Montréal qu’il l’a le mieux compris.

On conçoit l’attirance de cette terre rien qu’à lire les descriptions qu’en fait amoureusement M. Potvin qui trouve, pour en parler, malgré des inégalités d’une plume rapide, des mots qui peignent et des images qui illustrent.

LÉON LORRAIN


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