La Bible d’une grand’mère/216

La bibliothèque libre.
L. Hachette et Cie (p. 543-546).

CCXVI

JUDAS MACHABÉE

(160 ans avant J.-C.)



Dans ce même temps, le sage Mathathias, qui était de la race des Prêtres et de la famille des Machabées, ne pouvant plus supporter le joug cruel d’Antiochus, et la vue de tout ce sang versé, de ces impiétés abominables, et de la désolation du Temple, souillé par le culte des idoles et par d’autres abominations, le vieux Mathathias rassembla ses enfants, quelques amis fidèles, et se retira dans la ville de Modin, croyant être à l’abri des sacrilèges d’Antiochus. Mais à peine y fut-il, que le roi y envoya des officiers pour exécuter son édit contre la loi juive et pour favoriser le culte des idoles. Mathathias vit un jour un Juif céder aux persuasions et surtout aux menaces d’un officier du roi, et s’apprêtant à offrir un sacrifice aux idoles. Mathathias, outré de douleur à la vue de cette insulte faite à Dieu, tua le Juif et en même temps l’officier qui le contraignait à sacrifier.

Après cette action, il sortit de la ville en criant dans les rues qu’il s’en allait au désert, et que les Juifs demeurés fidèles eussent à le suivre. Il se retira avec ses cinq fils, Judas, Jean, Simon, Éléazar et Jonathas. Les Juifs fidèles à la loi de Dieu les suivirent, et formèrent un corps d’armée ; ils battirent et chassèrent les idolâtres, ils détruisirent les autels et les idoles, et Dieu favorisa leurs armes en leur donnant toujours la victoire.

Quelque temps après, Mathathias, chef des Machabées, mourut après avoir donné le commandement de sa petite armée à son fils Judas Machabée, digne de succéder à un tel père.

Judas, secondé par ses frères, grossit son armée, et la porta bientôt à six mille hommes, tous restés fidèles à la loi Je Moïse, et n’ayant jamais sacrifié aux idoles. Ils délivrèrent plusieurs villes et petites provinces du joug des idolâtres, en tuèrent plusieurs milliers, et, malgré leur petit nombre, devinrent redoutables aux armées d’Antiochus. Ce dernier résolut alors de former une armée considérable de soixante mille hommes et cinq mille chevaux, sous la conduite de ses trois meilleurs généraux. Les compagnons de Judas Machabée furent d’abord épouvantés de cette nombreuse armée qui devait les détruire ; mais Judas leur redonna du courage, leur rappela que Dieu était avec eux, et qu’avec ce secours tout-puissant, ils ne devaient pas craindre la défaite. Il les mena donc à la rencontre des Assyriens, les attaqua, en tua plusieurs milliers, les poursuivit, et les chassa de la Judée.

Lysias, commandant en chef de l’armée du roi, ayant appris cette honteuse défaite de soixante mille hommes contre six mille, fut désespéré de n’avoir pas pu exécuter les ordres d’Antiochus ; il leva une nouvelle armée plus nombreuse encore que la première ; l’année suivante, il en prit lui-même le commandement.

Pendant qu’il préparait son armée, Judas répara du mieux qu’il put les murs de Jérusalem, et principalement le temple, dépouillé de tous ses ornements. Quand tout fut convenablement rétabli, il donna une fête solennelle pour consacrer le temple et les nouveaux autels. Ensuite, il rassembla sa petite armée, et marcha au-devant des ennemis ; il les battit en plusieurs rencontres ; et, dans une dernière bataille, on vit cinq cavaliers mystérieux d’une beauté et d’une force extraordinaires ; deux de ces cavaliers se tenaient aux côtés de Judas, et tuaient tous les ennemis qui l’approchaient ; les trois autres lançaient continuellement des traits sur les ennemis, et les frappaient d’aveuglement et de terreur. Il y en eut ainsi plus de vingt mille de tués ; le reste de l’armée périt plus tard dans de petits combats que Judas leur livrait tous les jours.

Armand. Qui étaient ces cavaliers ?

Grand’mère. C’étaient des Anges revêtus de formes humaines et envoyés par Dieu pour assister ses fidèles.

Antiochus envoya deux ou trois autres armées nouvelles, pour punir Judas et les siens des victoires qu’ils avaient remportées, mais toutes ces armées subissaient le sort des premières.

Alors Antiochus, transporté de fureur, voulut partir lui-même pour faire de Jérusalem le tombeau de tous les Juifs, disait-il. Mais le Seigneur frappa d’une plaie incurable ce prince impie ; au moment où il achevait de proférer cette menace contre les Juifs, il se sentit pris de violentes douleurs d’entrailles que rien ne put soulager. Plus furieux encore, il voulut monter dans son char pour arriver à Jérusalem ; et il ne cessait d’exciter les chevaux pour arriver plus vite. Cette vitesse extraordinaire lui fut fatale, car le char versa, Antiochus tomba rudement ; tout son corps fut couvert de meurtrissures ; les vers s’y montrèrent par milliers, et se renouvelaient à mesure qu’on les enlevait. Il rejoignit ainsi son armée ; non pas dans son char traîné par des chevaux fougueux, mais dans une chaise portée par ses serviteurs, en proie à des douleurs intolérables. Ses chairs tombaient en pourriture ; elles exhalaient une odeur si affreuse, que toute son armée et lui-même ne pouvaient plus la supporter.

Vaincu enfin dans son orgueil, il fut obligé de reconnaître que le Seigneur était plus puissant que lui ; il espéra l’adoucir en lui promettant d’enrichir le temple, de donner des vases d’or, de paver de son argent les dépenses des sacrifices.

Gaston. Comme c’est bête ! Comme si le bon Dieu avait besoin d’or et de présents ! Puisque c’est lui qui a créé tout cela, il n’a pas besoin qu’on lui en donne.

Grand’mère. Tu as bien raison ; et cependant, quand ces choses sont offertes à Dieu pour l’honneur de son culte, par des cœurs vraiment religieux, il daigne les accepter, et il bénit ceux qui les lui offrent ; ici ce n’était pas le cas : Antiochus ne se repentait pas le moins du monde ; seulement il avait peur ; aussi ne fut-il pas exaucé ; il mourut peu de temps après, misérablement, dans des souffrances atroces, et dans un grand abandon, car personne ne l’aimait ; et on ne le craignait plus, parce qu’on savait qu’il ne pouvait guérir, ni par conséquent exercer de nouvelles cruautés.