La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition critique/Laisse 47

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XLVII

Un faldestoed i out d’un olifant. Un fauteuil d’ivoire était là :
610 Marsilies fait porter un livre avant : Marsile y fait porter un livre
La leis i fut Mahum e Tervagan. Où est écrite la loi de Mahomet et de Tervagan.
Ço ad juret li Sarrasins Espans : Le Sarrasin espagnol y jure son serment :
« Se en rere-guarde truvet le cors Rollant,
« Si, dans l’arrière-garde de Charlemagne, il trouve le corps de Roland,
Cumbatrat sei à trestute sa gent, « Il le combattra avec toute son armée.
615 E, se il poet, murrat i veirement. » « S’il le peut, Roland y mourra... »
Guenes respunt : « Ben seit vostre cumanz ! » Aoi. Et Ganelon : « Bénie soit, dit-il, votre entreprise ! »


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Vers 611.La lei. O. Les noms latins de la 3e déclinaison qui ont un s à leur nominatif singulier, ont donné naissance à des noms français qui ont un s (ou un x, ou un z) à leur cas sujet singulier. Nous avons dû partout appliquer cette règle, même lorsque notre scribe a oublié de l’observer, comme ici. Vingt exemples viennent d’ailleurs à l’appui du principe que nous venons de poser : Sancs, 1762, 3165, 3925 ; olifans, 2295 ; reis, 319, 327, etc. etc. ; sorz, 3665 ; dux, 3937, etc. Le mot leis lui-même est écrit correctement au vers 3338. En revanche, notre scribe n’a jamais su écrire régulièrement les mots gent (590, 3247), mort (2197), noit (737, 3658, 3675, 3991), et il nous a fallu les ramener à leur vraie forme. Il en est de même des participes présents qui, en latin, avaient tous un s à leur nominatif singulier. Trois ou quatre fois seulement, le scribe du Roland a observé la règle essentielle du Roman dans son application spéciale à nos participes présents ou adjectifs verbaux : recreanz (528, 543, 906), vaillanz (3186), luisanz (3345). Partout ailleurs, il a violé ce principe que nous avons dû rétablir. Entre cette erreur d’une part, et, de l’autre, une règle générale, un principe vital de la formation de notre langue, nous ne pouvions pas hésiter un instant. Nous avons fait fléchir le particulier sous le général. Les exemples qui précèdent sont d’ailleurs assez nombreux pour nous persuader que le scribe de notre Chanson connaissait la règle, et qu’elle était admise en son dialecte. Il n’a péché que par négligence, et peu de scribes, en effet, ont été aussi négligents. Nous aurons lieu de le montrer plus d’une fois.

Vers 613. — Lire troevet. O. Cf. 2856, 3025.

Vers 616.Comant. O. Au cas sujet, il faut comanz. Pour le changement de l’o en u, voyez la note du vers 309.

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