La Circulation du sang/Avant-propos

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Traduction par Charles Richet.
Georges Masson (p. i-iii).

AVANT-PROPOS

Peut-être les physiologistes et les médecins se disent-ils quelquefois que l’essor rapide de la science moderne fait négliger injustement l’étude des vieux maîtres. J’ai pensé qu’en donnant la traduction du livre magnifique où Harvey a exposé la circulation du sang, je remplissais une tâche peu glorieuse, mais utile. Le livre d’Harvey n’a jamais été traduit en français, et il est possible qu’on lise plus facilement une traduction qu’un livre latin du xviie siècle.

Je me suis efforcé avant tout d’être un traducteur servile. En général la langue d’Harvey est claire et correcte. Mais, par moments, surtout quand il veut réfuter ou expliquer les théories absurdes de ses adversaires, sa phrase devient ténébreuse et conforme à l’obscurité de la pensée. Ceux qui auront la curiosité de lire Harvey dans l’original constateront — au moins je l’espère — que là où le traducteur a manqué de clarté, l’auteur a peut-être mérité d’abord le même reproche.

On trouvera à la fin de ce livre quelques notes, très brèves, relatives à la physiologie de la circulation du sang et du mouvement du cœur. Je n’ai eu d’autre intention que de faciliter au lecteur la comparaison entre la science d’aujourd’hui et la science du xviie siècle.

Ma traduction est précédée d’une courte introduction historique. J’ai cherché surtout à mettre en lumière les idées physiologiques de Galien et à montrer que son rôle dans l’histoire de la découverte de la circulation a une importance fondamentale. Quoiqu’il y ait peu de choses à dire, après Flourens, sur les prédécesseurs immédiats de Harvey, j’ai pu, relativement à Michel Servet, mettre à profit quelques travaux récents qui contribuent à rendre à cet infortuné homme de génie une part de la gloire qui lui est due.

J’ai eu en vue, pour traduire le traité des mouvements du cœur et du sang, l’édition princeps (Francfort, 1628), l’édition de Leyde avec les notes de Parisanus et de Primerose (1639), l’édition de Leyde avec une préface d’Albinus (1737), et enfin la traduction anglaise de Robert Willis (Londres, 1847). Il y a eu encore d’autres éditions de Harvey que je n’ai pas consultées, celles de Rotterdam (1649), de Rotterdam (1659), et l’édition de Lawrence en deux volumes (Londres, 1766).