La Femme et la démocratie de nos temps/2

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CHAPITRE II.


Et vous, Minerve ! fille de Jupiter, sortie de sa tête, qui ne pouvez comme les hommes accuser les entrailles maternelles où les Hébreux trouvaient l’excuse de leur faiblesse ; Minerve, fille héroïque et savante, mère d’Athènes, déesse de la guerre et de la paix, nos regards vous suivent au haut des cieux. L’imagination des hommes ne vous a pas créée par un caprice ; des femmes illustres vous ont fait prendre rang dans l’Olympe, et quand l’antiquité, renommée par l’intelligence et la justesse, a donné à la sagesse la forme et la beauté d’une femme, elle n’a pas cru se tromper, et elle n’aurait pas consacré la sagesse par une extravagance. Minerve, au milieu des femmes grecques asservies, vous rassurâtes ce petit nombre de femmes ambitieuses qui, ornant vos autels, unissaient l’esprit à l’amour. Vous leur donnâtes l’audace, enchaînant à leurs pieds les héros et les philosophes. Armée de pied en cap, vous assistâtes aux noces de ce chef aimable, fameux dans la guerre et l’éloquence, lorsqu’il épousa la femme la plus accomplie dont l’histoire ait gardé la mémoire. Le poète qui n’a pas trouvé d’égal, vous peignit triomphant de Mars dans les batailles, et partout vous obtîntes des honneurs dont Jupiter fut jaloux. L’Inde aussi vous adora, déesse de la sagesse et du savoir ; et vous régnez encore sur les rivages de l’Indus et du Gange. L’Asie honora la lumière et la fécondité ; une femme représenta la nature puissante ; Bavani calma l’ardeur du dieu en versant l’eau sur sa tête, et lui présenta la coupe d’ivresse sur le mont Cailasa. Si Jehovah paraît seul, l’encens des prophétesses brûle sur ses autels, et si son fils est né d’une fille timide, immortelle par grâce et sans puissance, du moins Marie, vierge et mère, paraît seule avec un enfant dans ses bras ; nul homme ne l’appuie, et elle emprunte à son fils sa gloire sainte.

Les peuples représentant les dieux à l’image des hommes, représentèrent aussi les dieux à l’image des femmes ; et quand de plus grossières idoles tombèrent, les déesses restèrent debout.