La Lanterne en vers de couleur/Bade et Trouville

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Illustration pour Hervilly - La Lanterne en vers de couleur
Illustration pour Hervilly - La Lanterne en vers de couleur

BADE & TROUVILLE

Le bataillon des grues
De Paris disparues
Aux premiers jours d’été,
En ce moment gambade
Dans Trouville ou dans Bade,
Avec légèreté.

À leurs bottines hautes
Elles traînent les hôtes
Farouches des hôtels ;
Grâce à leurs artifices,
Ils font des sacrifices
Sur leurs charmants autels.


La plage ou la roulette
S’émeut à leur toilette
Quotidiennement ;
Les croupiers et les raies,
Seuls, aux robes à raies
Ne font nul compliment.

Mais en vestons splendides,
Des jeunes gens candides
Et d’excellents vieillards
Portent, fiers, devant elles
Leurs manteaux de dentelles,
Si bons pour les brouillards !

Des chiens microscopiques
Éclos sous les tropiques,
Les suivent en toussant ;
Ils flairent, périssables,
Les gazons et les sables
Qu’ils souillent en passant !

Les doigts fins de ces dames
Cueillent toutes les âmes,
Tous les louis aussi ;
On peut voir sur leurs listes
Des noms de journalistes,
Mais c’est rare ceci !

Un bon cru, l’ambroisie !
Charmant la poésie,
Sous les grands arbres verts !
Mais peut-on tirer d’elle
Le bois et la chandelle
Qu’exigent les hivers ?

Donc, le clan des cocotes
Qui trempe des biscotes
À midi, dans son lait,
Loin de la Grande Ville
Dans Bade ou dans Trouville,
Charme le sexe laid !

Ernest d’Hervilly