La Monnaie et le mécanisme de l’échange/11

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Germer Baillière (p. 101-111).

CHAPITRE XI

la monnaie divisionnaire

Il est une question monétaire qu’on ne peut guère se vanter d’avoir, jusqu’à présent, résolu d’une manière satisfaisante ; c’est celle du choix des meilleurs matériaux possibles pour frapper les pièces de faible valeur, appelées en anglais pence, en français monnaie d’appoint. Les monnaies divisionnaires doivent être égales en valeur au dixième environ des monnaies d’argent, pièce pour pièce ; mais malheureusement il n’y a aucun métal propre à cet usage dont la valeur soit actuellement le dixième de celle de l’argent. Du temps des Romains l’or était à peu près dix fois aussi précieux que l’argent, et l’argent dix fois aussi précieux que le cuivre, de sorte qu’il n’y aurait eu aucune difficulté à combiner avec ces métaux un système monétaire parfaitement décimal.

Pour jeter la lumière sur ce sujet, j’ai dressé la table suivante, où l’on trouvera les poids des principaux métaux du commerce dont la valeur est actuellement, égale. Dans une table de ce genre les nombres sont évidemment sujets à de perpétuelles fluctuations, en raison des changements dans le prix des métaux sur le marché. D’un autre côté, il est difficile, dans certains cas, d’obtenir des indications exactes, et le prix dépend souvent du travail particulier qu’on a fait subir au métal. L’or et l’argent sont pris au titre légal, et l’or est pris comme unité de poids.

poids sous lesquels les principaux métaux présentent une valeur égale
Or 1 Étain 912
Platine 3 1/2 Cuivre 1696
Aluminium 7 Plomb 6360
Argent 16 Fer en barres 15900
Nickel 71 Fer en lingots 30880

Il est bon de remarquer que si nous rangeons ainsi ce qu’on peut appeler les équivalents commerciaux des métaux, ils forment une série qui se rapproche, très-grossièrement il est vrai, d’une série géométrique dont la raison commune est 3. L’argent cependant fait exception. Il y a aussi un terme qui manque entre le nickel et l’étain, et comme l’étain n’est pas propre au monnayage, il y a un grand intervalle entre le nickel et le cuivre, et un plus grand encore entre l’argent et le cuivre. À présent l’argent est, presque exactement, cent fois aussi précieux que le cuivre ; par conséquent la valeur métallique de la monnaie de cuivre ne devra être qu’une fraction de sa valeur nominale, ou autrement cette monnaie sera très-pesante et volumineuse. Lorsque de nouvelles pièces de cuivre sortirent en 1797 de la Monnaie anglaise, sous Boulton et Watt, les pièces avaient presque leur valeur réelle, c’est-à-dire environ une once par penny. Il y avait à cela un double inconvénient. Seize pence pesaient une livre, et sur ce pied-là, nous porterions aujourd’hui dans nos poches un poids trois fois aussi considérable qu’avec notre monnaie actuelle. De plus, le prix du cuivre s’étant élevé, les pence de Boulton eurent plus de valeur comme métal que comme monnaies, et furent employés aux usages du métal malgré leur belle exécution.

La première mesure à prendre, et la plus simple, était de réduire le poids du penny et d’en faire une monnaie à valeur conventionnelle, un jeton. Les anciens pence de Victoria ne pesaient déjà plus que 290 grains chacun, au lieu de 433, ce qui était une réduction d’un tiers environ sur les monnaies de Boulton et de Watt. Le penny de bronze a été réduit davantage encore et doit maintenant peser 145 grains et huit dixièmes.

Deux inconvénients peuvent résulter d’une réduction trop grande et trop rapide dans le poids des monnaies jetons. On risque de voir la population repousser les pièces nouvelles comme étant d’une légèreté frauduleuse. C’est ce qui arriva lorsqu’en France, en 1794, le gouvernement révolutionnaire frappa de nouvelles pièces en cuivre de cinq et de dix centimes, au taux d’un gramme par centime, ce qui était la moitié du taux précédent. Le gouvernement fut obligé de retirer la monnaie légère et d’en émettre de nouvelle avec l’ancien poids. Ce fut seulement du temps de Napoléon III que l’on put remettre en circulation des monnaies d’un gramme par centime. Il faut donc habituer le public à recevoir des jetons très-légers, et la réduction doit s’opérer très-graduellement.

En second lieu, si le métal est facile à frapper ou à travailler, comme le cuivre, s’il ne prend pas une très-bonne empreinte, s’il y a pour le bénéfice une marge considérable, la tentation peut devenir forte pour les faux-monnayeurs. Je ne sache pas que cela soit jamais arrivé pour la monnaie de cuivre anglaise ; mais on a fréquemment fabriqué en grande quantité des sous contrefaits, au faubourg Saint-Antoine, à Paris, presque sous les yeux du gouvernement.

Enfin le cuivre pur donne des monnaies médiocres, d’une dureté insuffisante, et qui sont bientôt défigurées ; il a une odeur désagréable qu’il communique aux doigts ; et quand il est exposé à l’air humide il se couvre de vert-de-gris, qui est en même temps sale et vénéneux. Je vais considérer les différents moyens par lesquels on a essayé de substituer aux pièces de cuivre une monnaie plus commode.

monnaie de billon

Les pennys et les pièces de deux pence, si on les faisait maintenant en argent au titre, comme les pièces du Jeudi Saint, seraient trop petites et trop légères pour être commodes, et pèseraient, l’une 7 grains 1/4, l’autre 14 1/2. La pièce même de trois pence, maintenant si commune en Angleterre, et qui pèse 21 grains 8, est d’une petitesse incommode. Pendant très-longtemps on n’a pas frappé en Angleterre de monnaie d’argent dont le titre fût inférieur à l’ancien titre légal de 925 sur 1000. Dans plusieurs pays du continent la petite monnaie a souvent été faite d’un alliage très-bas d’argent et de cuivre, appelé billon. Des monnaies de ce genre, qui ne contenaient qu’une partie d’argent sur cinq d’alliage, avaient autrefois cours en France ; mais depuis longtemps elles ont été retirées.

En Norvège la petite monnaie se compose actuellement en partie de pièces d’un demi-skilling et d’un skilling en cuivre, le skilling équivalant à peu près au demi-penny anglais ; mais elle consiste surtout en pièces de deux, de trois, de quatre skillings, faites d’un billon contenant, suivant une analyse qu’on m’a faite au laboratoire chimique d’Owens Collège, une partie d’argent sur trois de cuivre. Ces pièces de billon ont des dimensions très-commodes, et, comme elles sont pour la plupart nouvellement frappées, elles sont propres et nettes. On frappe encore du billon en Autriche.

C’est dans les états formant aujourd’hui l’empire d’Allemagne que l’usage du billon a reçu le plus d’extension, particulièrement en pièces de trois, de quatre et de six kreutzers ; on retire actuellement la monnaie que les Allemands appellent scheidemünze. Elle est composée d’argent allié avec trois et quatre fois son poids de cuivre, ou même davantage. Avant de faire passer sous le balancier cet argent de bas aloi, on a l’habitude de dissoudre le cuivre à la surface des rondelles de métal, de manière à y laisser une couche blanche d’argent pur. Cette opération, qui s’appelle la mise en couleur, donne aux pièces neuves un bel aspect brillant, et permet de les mettre facilement en circulation, Mais au bout de peu de temps la couche d’argent est usée et les pièces présentent un aspect misérable. La monnaie de billon semble aussi jouir d’un pouvoir extraordinaire pour accumuler à sa surface une couche de malpropreté du caractère le plus désagréable, avec laquelle sont bien familiarisés tous ceux qui ont naguère voyagé en Allemagne. En outre elle offre de grandes facilités à la contrefaçon, et il y a plusieurs raisons sérieuses de n’en pas recommander l’adoption.
monnaie composite

On dit que saint Louis, le grand roi de France, se trouvant fort dépourvu de petite monnaie pour payer ses soldats, imagina de faire tailler de petits bouts de fil d’argent, du poids de neuf et de dix-huit grains, et de les faire attacher sur des morceaux de cuir estampé. L’argent donnait la valeur à ces monnaies, le cuir servait à les manier, et à empêcher que le petit bout de métal ne se perdit. À des époques plus récentes, des pièces composites, dont le centre était formé d’argent avec un anneau de cuivre, ont été exécutées sur des principes semblables. Un modèle de penny de ce genre est d’un aspect agréable et de dimensions commodes, mais parait soulever plusieurs objections. Les frais de monnayage seraient considérables ; il serait difficile d’exécuter les pièces avec assez de perfection pour que la pièce centrale ne se détachât jamais ; le contact de métaux différents produirait une action électro-chimique, et le cuivre serait corrodé ; enfin il serait difficile de distinguer tes pièces fausses d’argent introduites par le faussaire. Des pièces composites d’un genre analogue furent frappées en France sous Napoléon Ier, vers 1810, mais n’eurent jamais cours. Des pennys formés d’un centre de cuivre avec un rebord de laiton ont été employés en Angleterre, et des pence, des demi-penny ou des farthings d’étain, avec un bouton de cuivre inséré au centre, furent longtemps en usage, et se trouvent en abondance dans les cabinets des numismates.

monnaie de bronze

On savait, même dans les âges préhistoriques, qu’une faible quantité d’étain communiquait de la dureté au cuivre, et les nations anciennes étaient familiarisées avec l’emploi du bronze ainsi obtenu. En France le gouvernement de la révolution fondit les cloches des églises, après les avoir saisies, et les sous de cloche, ainsi qu’on les appelait, faits avec ce métal, étaient supérieurs aux pièces de cuivre pur. Cependant, et le fait est assez curieux, aucun gouvernement moderne n’avait pensé à employer, pour la petite monnaie, un bronze bien choisi, lorsque le gouvernement du dernier empereur des Français entreprit en 1852 la refonte des sous anciens. Cette opération eut un grand succès.

Entre les années 1853 et 1867, on frappa une quantité de sous d’une valeur nominale de cinquante millions de francs environ, consistant en huit cents millions de pièces, et pesant onze millions de kilogrammes ; plus tard on y ajouta une émission d’environ deux cents millions de pièces. Le succès de l’expérience ne laissa presque rien à désirer. Les pièces de cinq et de dix centimes qui circulent maintenant en France sont des modèles de bon monnayage, avec une empreinte peu saillante, mais nette et distincte. Elles furent acceptées sans difficulté par le public, quoique leur poids fût celui des sous qui avaient été repoussés lors de la révolution, c’est-à-dire un gramme par centime : enfin elles résistent bien au frai.

Le bronze employé consiste en 95 parties de cuivre, quatre d’étain, et une de zinc. Il est beaucoup plus dur que le cuivre, et cependant il reçoit très-bien l’empreinte du coin, et la conserve longtemps. Il ne peut être frappé qu’à l’aide d’un balancier assez puissant, ce qui rend la contrefaçon presque impossible. À peine se corrode-t-il par l’exposition à l’air ou à l’humidité ; il acquiert seulement une patine naturelle, formée par une couche mince d’oxyde de cuivre, qui fait ressortir les parties usées du dessin et augmente la beauté de la pièce.

Depuis lors, des monnaies de bronze ont été frappées par les gouvernements d’Angleterre, des États-Unis, d’Italie et de Suède, et il parait probable qu’elles remplaceront partout les monnaies de cuivre. Le gouvernement allemand commence maintenant à employer le bronze pour les pièces d’un pfennig.

monnaie de bronze anglaise

Les vieilles monnaies de cuivre du Royaume-Uni ont été remplacées, depuis une quinzaine d’années, par une série beaucoup plus commode et plus élégante de pence, de demi-pence et de farthings, composées exactement du même bronze que les centimes français. Les pièces anglaises, quoiqu’elles soient loin d’être aussi bien exécutées que les françaises, sont propres, et semblent devoir bien résister au frai. La seule objection sérieuse qu’elles puissent soulever, c’est que leur poids et leurs dimensions sont encore trop considérables, bien qu’inférieurs à ceux des anciennes pièces de cuivre. Comme ces dernières sont maintenant toutes retirées, et que, parmi les nouvelles, il ne peut pas encore y en avoir beaucoup de perdues ou de détruites, nous savons fort exactement quelle est aujourd’hui la valeur totale de la monnaie divisionnaire anglaise. Voici les quantités émises de 1861 à 1873 :

Poids en tonnes Nombre de pièces Valeur nominale
en livres sterlings
Pennies 1,585 170,419,000 710,082
Demi-pennies 918 164,503,000 342,719
Farthings 149 53,594,000 55,826

2,652 388,518,000 1,108,627

En y joignant une faible quantité de pièces émises avant 1861, la valeur totale de la monnaie de bronze en circulation à la fin de 1873, était de 1,143,633 livres sterling. Il est à remarquer que la quantité de petite monnaie employée en Angleterre est bien moindre qu’en France, où il circule environ un milliard de pièces, surtout de dix et de cinq centimes. Ainsi, tandis que les Anglais, les Écossais et les Irlandais semblent avoir assez de 8 pence 1/2 par tête, les Français emploient en moyenne 1 franc 60 centimes, les Belges 2 francs 26 centimes, et les Italiens 3 francs 10 centimes.

poids de la monnaie

Il est curieux que les poids des divers genres de monnaie varient en raison inverse de leur valeur nominale : ainsi, en admettant que le numéraire en papier du Royaume-Uni monte à 40 millions sterling, l’or à 100 millions, en chiffres ronds, l’argent à 15 millions, et le bronze à la valeur que nous avons indiquée, je trouve que voici les poids approximatifs :

Numéraire en papier 16 tonnes
Or 786 -
Argent 1,670 -
Bronze 2,652 -

5,124 tonnes

Il est impossible de montrer par une raison satisfaisante que la partie de la monnaie qui a le moins de valeur doit dépasser d’une façon si marquée le poids des autres. Il résulte de là que les pence tendent à s’accumuler dans les mains des détaillants, et particulièrement des cabaretiers, des propriétaires d’omnibus et des éditeurs de journaux. À une certaine époque les brasseurs de Londres avaient entre les mains une telle quantité de pièces de bronze leur venant de leur débit, que la Monnaie trouvait quelquefois son avantage à les leur acheter, au lieu d’en frapper de nouvelles. Dans les grandes villes on a pris des arrangements pour se défaire avec le moins d’embarras et de perte possible des monnaies de bronze qui s’accumulaient ; cette monnaie se transporte chaque semaine dans les usines et les manufacturas, où elle est employée à payer les salaires. Les banquiers refusent de recevoir la monnaie de bronze dès qu’elle dépasse la somme d’un shelling, pour laquelle elle a cours forcé, et l’on voit bien des personnes qui n’aiment pas recevoir en bronze plus de 2 ou 3 pence.

Il y aurait intérêt à chercher si cette tendance de la monnaie divisionnaire à la stagnation ne trouverait pas son remède dans son remplacement par une monnaie beaucoup plus légère et plus élégante composée soit de nickel, soit de quelque alliage qu’il faudrait inventer. En France, on a reconnu que la monnaie de bronze circule beaucoup plus facilement que les anciens sous de cuivre et de métal de cloche, qui tendaient à s’accumuler dans certaines localités. Les pence de bronze anglais sont meilleurs que les anciens pence de cuivre ; mais il ne s’ensuit pas que nous soyons près de la perfection. Des pièces moitié moins pesantes que les pièces actuelles seraient beaucoup plus commodes.
nickel, manganèse, aluminium, et autres métaux ou alliages

Nous avons déjà parlé de l’emploi du nickel pour la fabrication de la petite monnaie (pag. 41) ; si les conditions de l’offre et de la demande de ce métal étaient moins variables, peut-être n’aurions-nous pas besoin d’en chercher un meilleur. L’alliage de nickel et de cuivre ordinairement employé est dur et difficile à frapper ; mais il prend une belle empreinte qui probablement résistera longtemps au frai. Il est donc vraisemblable que la monnaie de nickel ne sera pas contrefaite, et sa couleur particulière difficile à décrire la distingue facilement de la monnaie d’or et d’argent. Cependant les progrès de la métallurgie nous ont fait connaître plusieurs métaux et beaucoup d’alliages nouveaux. Il est fort probable qu’on trouvera dans la suite quelque matière nouvelle pour la monnaie divisionnaire. Le docteur Percy, songeant au prix croissant du nickel, émet l’idée que le manganèse pourrait lui être substitué ; car il donne des alliages d’un caractère similaire, et peut être obtenu en quantités plus considérables.

Le docteur Clemens Winkler recommande fortement l’aluminium comme très-propre à la fabrication de la monnaie. Des pièces d’essai marquées « 1/4 de réal 1872, » ont été frappées, et l’on en peut voir une au Musée monétaire, à la Monnaie de Paris. Ce métal a une couleur caractéristique d’un blanc bleuâtre ; mais son grand avantage est sa faible densité. La pièce d’essai en question, dont un exemplaire m’a été fourni par M. Roberts, le chimiste de la Monnaie de Londres, a deux centimètres de diamètre, c’est-à-dire un peu plus que la pièce de six pence ; elle est beaucoup plus épaisse, et ne pèse pourtant qu’un gramme. Si nos pence et nos demi-pence étaient aussi légers et aussi commodes que cette monnaie, nous en pourrions porter une grande quantité dans la poche sans être incommodés. La principale difficulté qui s’oppose à l’adoption de ce nouveau métal tient à l’incertitude du prix auquel il peut être obtenu. On ne sait pas non plus combien de temps il durerait. Mais quand même on trouverait que l’aluminium pur ne convient pas au monnayage, on pourrait lui substituer quelques-uns de ses remarquables alliages. M. Graham, dernier directeur de la Monnaie, avait une série de pièces d’essai, d’un à dix cents, frappées avec ce qu’on appelle le bronze d’aluminium.

Je ne crains pas de dire qu’une des meilleures substances possibles pour la petite monnaie serait l’acier, pourvu qu’on pût le préserver de la rouille. Des monnaies d’acier seraient difficiles à frapper, mais une fois frappées on pourrait les tromper de manière à les rendre presque indestructibles. Le peu de prix de cette matière permettait de les produire en grandes quantités à peu de frais, tandis que les faux-monnayeurs ne trouveraient aucun profit à les imiter. On pourrait donc n’attacher aucune importance à la valeur métallique des pièces, auxquelles on donnerait les dimensions les plus commodes, c’est-à-dire à peu près celles du six pence et du shelling Sir John Herschel a émis l’idée, — dans sa « Géographie Physique, p. 289 », — que l’acier parait être préservé de la rouille quand il est allié à une petite quantité de nickel ; tel est du moins le cas pour le fer des aérolithes. Il est fort à souhaiter qu’un alliage de ce genre soit soumis à des expériences sérieuses. M. Roberts m’apprend que l’argent peut aussi s’allier avec le fer ou l’acier, et que l’on a proposé pour le monnayage des composés de cette nature. Un alliage d’argent, de cuivre, et de zinc a même été soumis à une expérience complète en Suisse, où il est employé pour des pièces de vingt, de dix et de cinq centimes. Ces monnaies sont de dimensions commodes ; mais leur couleur est un blanc jaunâtre d’un assez pauvre effet. Aucune autre contrée, que je sache, ne les a adoptées, et il semble qu’il soit tout-à-fait inutile d’y introduire de l’argent ; car il serait probablement facile de produire, sans recourir à ce métal, un alliage de même couleur.

Il est malheureux pour ce qu’on pourrait appeler la technologie monétaire, que l’étude de cette science soit presque nécessairement réservée au petit nombre de personnes auxquelles les gouvernements confient l’administration de leurs Monnaies. Nous ne pouvons donc nous attendre à ce que la production de la monnaie fasse les mêmes progrès que les autres industries, que stimule énergiquement la liberté de la concurrence. De plus, on trouve rarement l’occasion de mettre à une épreuve suffisante une monnaie nouvelle quelconque ; dans une circulation aussi active et aussi étendue que celle du Royaume-Uni il est impossible d’exécuter des expériences. Mais on peut émettre l’idée que la Monnaie d’Angleterre, dans les monnaies qu’elle fournit à quelques-unes de nos petites colonies ou de nos possessions, trouve des occasions admirables d’expérimenter de nouveaux projets. Cette expérience ne coûterait rien aux colonies ; car le gouvernement anglais, en frappant pour elles quelques centaines de livres de petite monnaie, pourrait aisément s’engager a les retirer à ses frais si, au bout de quelques années, on les trouvait d’un usage incommode.