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La Plante/Partie II, chapitre II

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Charles Delagrave (p. 263-277).
III. — Périanthe  ►
Partie II.
II. — La Fleur

II
La Fleur.

Nécessité de la graine. — La fleur. — Sa composition générale. — Organes essentiels. — Calyce. — Corolle. — Étamines. — Pistil. — Lois numériques de la fleur. — Multiplication des verticilles floraux. — Loi d’alternance des verticilles. — Diagramme de la fleur. — Végétaux monoïques et végétaux dioïques.

En dehors des moyens artificiels, comme la bouture et la greffe, mis en œuvre par notre industrie, nous avons déjà reconnu dans le végétal la propagation au moyen de bourgeons qui s’isolent de la tige mère et deviennent des plants distincts. Il suffit de rappeler à ce sujet les stolons du fraisier, les yeux de la pomme de terre, les bulbilles de l’ail, les tubercules des orchidées. Mais ces moyens de perpétuer l’espèce sont loin d’être généraux : la grande majorité des plantes ne les emploie jamais. D’ailleurs seraient-ils universellement répandus, ils seraient insuffisants pour le maintien d’une prospérité indéfinie. Les bourgeons aptes à s’isoler doivent être approvisionnés de vivres ; ils sont donc toujours trop peu nombreux à cause de leur volume. Je n’insisterai pas davantage sur ce point, discuté déjà, et je passerai à un autre ordre d’idées.

Un bourgeon, simple démembrement du tout dont il faisait partie, répète, avec une monotone fidélité, les caractères de son origine, sans avoir en lui de nouvelles tendances, de nouvelles énergies. Il maintient tout au plus intacte la puissance vitale dont il est le dépositaire, sans pouvoir la rajeunir par une nouvelle impulsion. Aussi la filiation indéfinie par bourgeons aurait pour inévitable conséquence d’abord la monotonie, puisque, privée de la faculté de varier dans les détails, l’espèce se composerait de plants identiques. En second lieu, chose plus grave, cette filiation, apte à dépérir à travers les mille accidents d’une longue descendance, mais impuissante à ranimer une vitalité qui languit, amènerait tôt ou tard la dégénérescence et finalement l’extinction de l’espèce.

Il faut donc à la plante un autre mode de propagation qui multiplie l’espèce en nombre suffisant pour faire face aux chances de destruction, et qui donne vigueur toujours rajeunie et tendances spéciales pour les variations de détail. Cette reproduction se fait par la graine ou semence. Tous les végétaux, sans exception aucune, se multiplient par des semences, et c’est ainsi que les diverses espèces se conservent prospères et riches d’un avenir indéfini. À ce mode général de reproduction, quelques-unes adjoignent la propagation accessoire par bourgeons isolés. Nos plantes cultivées, trop longtemps multipliées de bourgeons, de boutures, finissent par dépérir ; pour ranimer en elles la puissance de vie qui s’éteint, il faut recourir au semis de la graine.

Ici se répète la double organisation des naïs, la double forme des méduses et de certains polypes. Deux sortes d’individus, avec des structures et des attributs différents, composent l’association végétale de la plante. Les uns, plus nombreux, plus robustes, colorés de la modeste teinte verte, décomposent au soleil le gaz carbonique, élaborent la séve et alimentent la communauté. Ces nourriciers, obscurs travailleurs, ne sont autre chose que les bourgeons ordinaires, s’allongeant en rameaux feuillés. Les autres, parés comme pour une fête, embellis d’un vif coloris, imprégnés de parfums et doués des formes les plus élégantes, ont pour mission de produire la graine. Ils sont pour la plante ce qu’est, par rapport au polype hydraire, la gracieuse méduse, au dôme de cristal ; ce que sont, par rapport à leurs vulgaires compagnons, les élégants animalcules qui étalent, sur le même polypier, le luxe des formes et de la coloration. Inhabiles à décomposer le gaz carbonique, ils ne prennent aucune part au travail de la séve et sont alimentés aux frais de la communauté. Ces bourgeons somptueux, procréateurs des semences, s’appellent les fleurs.

Malgré sa richesse de coloris et son élégance de forme, la fleur n’est donc au fond qu’un rameau, mais un rameau très-court et dont les feuilles sont métamorphosées en vue de nouvelles fonctions. Pour cette gracieuse et délicate production, la vie, incomparable artiste qui se joue des difficultés, met en œuvre les mêmes matériaux que pour un vulgaire et grossier rameau, un axe et des feuilles. Rien de nouveau n’est créé ; ce qui existe déjà devient fleur par une exquise transformation. Le rameau se contracte sur lui-même, rassemble en une rosette ses feuilles métamorphosées, et la merveille est accomplie. Il y a de la sorte, associés sur le même végétal, deux ordres de rameaux. Les uns sont préposés aux intérêts du présent, à la conservation de l’individu, c’est-à-dire à la nutrition ; ce sont les rameaux ordinaires, à feuilles vertes. Les autres sont préposés aux intérêts de l’avenir, à la conservation de l’espèce, c’est-à-dire à la reproduction ; ce sont les rameaux à feuilles métamorphosées, enfin les fleurs.

Examinons maintenant en quoi consiste la structure générale de la fleur, et prenons pour sujet d’observation la fleur du lis, qui, par son ampleur, se prête à un examen facile. La partie qui tout d’abord frappe les regards consiste en six grandes pièces d’un beau blanc, qui, la floraison finie, se détachent séparées l’une de l’autre. Chacune de ces pièces prend le nom de pétale, et leur ensemble s’appelle corolle. Viennent après six filaments allongés qui portent au sommet, transversalement suspendu sur leur pointe, un sachet à double loge, plein d’une abondante poussière jaune. Chacun de ces organes en son entier se nomme étamine. Le sac à double loge est l’anthère, la poussière jaune est le pollen, le filament
Fig. 111. Fleur du Lis blanc.
A, étamines et pistil. B, pistil seul.
est le filet de l’étamine. Au centre de la fleur, au milieu du faisceau des six étamines, est le pistil. Dans celui-ci, on distingue, à la base, un renflement à trois côtes arrondies ; c’est l’ovaire, contenant les semences en voie de formation, c’est-à-dire les ovules. Au-dessus de l’ovaire se dresse un long filament appelé style ; enfin le style se termine par une tête divisée en trois par des échancrures et nommée stigmate.

Cette structure de la fleur du lis se retrouve dans beaucoup de monocotylédonées, par exemple dans la tulipe et la jacinthe ; mais un très-grand nombre de plantes, appartenant surtout aux dicotylédonées, ont en outre, en dehors de la corolle, une enveloppe protectrice verte à laquelle on donne le nom de calyce. Ainsi nous trouvons dans la rose, tout au dehors, cinq lanières anguleuses vertes, qui, sur la fleur en bouton, se rejoignent exactement pour envelopper et protéger les organes intérieurs, plus délicats ; puis s’ouvrent et s’étalent quand la corolle s’épanouit. Chacune des parties du calyce prend le nom de sépale. Dans une fleur complète, on trouve donc, en allant de l’extérieur au centre : 1o le calyce, composé de sépales ; 2o la corolle, composée de pétales ; 3o les étamines ; 4o le pistil.

Les parties essentielles de la fleur, les seules vraiment nécessaires pour la production des graines, sont les étamines et le pistil ; le calyce et la corolle ne sont que des enveloppes protectrices ou des ornements ; ils peuvent manquer, l’un ou l’autre, ou tous les deux à la fois, et la fleur n’en existe pas moins. C’est ainsi que nous venons déjà de voir le lis dépourvu de calyce. Il y a fleur partout où se trouvent les organes nécessaires à la formation de graines fertiles, ne serait-ce que le pistil, ne serait-ce qu’une seule étamine. C’est ainsi qu’une foule de plantes considérées vulgairement comme privées de fleurs en possèdent réellement, mais réduites au nécessaire, sans les élégants accessoires qui d’habitude attirent seuls nos regards. Sans exception aucune, tout végétal a des fleurs, aptes à produire des semences, mais souvent de peu d’éclat il est vrai. Ajoutons que, dans les végétaux acotylédonés, mousses, algues, fougères et les autres, les appareils propagateurs diffèrent tellement des fleurs ordinaires, qu’ils exigent une description tout à fait à part. Nous les passerons sous silence pour nous occuper uniquement de la fleur telle qu’elle est dans les végétaux supérieurs, les dicotylédonés et les monocotylédonés.

L’enveloppe la plus extérieure d’une fleur complète est le calyce, composé de sépales. Sa coloration est ordinairement verte, et sa consistance plus ferme, plus grossière que celle des organes intérieurs, qu’il a pour fonction de protéger, d’abriter même en entier dans la fleur en bouton. Le nombre des sépales est variable d’une espèce à l’autre Il y en a deux dans le coquelicot, très-faciles à observer sur la fleur en bouton, mais d’une durée éphémère, car ils se détachent et tombent dès que la fleur étale ses grands pétales rouges et chiffonnés. Il y en a quatre dans la giroflée, cinq dans la rose.

Quel que soit leur nombre, les sépales sont tantôt distincts et nettement séparés les uns des autres ; tantôt ils sont plus ou moins soudés entre eux par les bords et simulent alors une pièce unique, mais en laissant, dans le haut du calyce, des dentelures libres, qui permettent de reconnaître sans peine le nombre des sépales assemblés.

Fig. 112. Calyce polysépale
d’un Lin.
Fig. 113. Calyce monosépale
d’un Silène.

Quand les sépales sont en entier distincts l’un de l’autre, le calyce est dit polysépale ; tel est le cas du lin. Quand ils sont plus ou moins soudés l’un à l’autre, le calyce est dit monosépale ; c’est le cas des silènes. Qu’ils soient distincts ou soudés, les sépales sont groupés autour de l’axe de la fleur et l’entourent de même que les feuilles verticillées entourent le rameau. Pour rappeler cette parité de groupement, on dit que le calyce forme le verticille extérieur de la fleur.

Les pétales forment le verticille suivant ou la corolle. Ce sont de grandes lames minces, délicates, à coloration vive, d’où le vert est presque toujours exclu. Il y en a quatre dans le coquelicot, quatre encore dans la giroflée, cinq dans la rose sauvage, le cerisier, le pommier et nos divers arbres fruitiers. Comme les sépales du calyce, les pétales peuvent être distincts l’un de l’autre, ainsi qu’on le voit dans la rose sauvage, le coquelicot, l’œillet ; ou soudés entre eux par les bords sur une longueur plus ou moins grande, comme dans le tabac, la campanule, le liseron Dans ce dernier cas, les dentelures, les sinuosités, les plis de la corolle, font connaître le nombre de pétales assemblés. Lorsque les pétales sont libres, la corolle est dite polypétale ; quand ils sont soudés entre eux, elle est dite monopétale.

Fig. 114. Fleur polypétale de l’Œillet.

A, fleur complète ; B, un des cinq pétales isolé.

Fig. 115. Fleur monopétale de Campanule.

Malgré l’ampleur, la vive coloration et l’élégance de forme, qui en font, pour le regard superficiel, la partie principale de la fleur, la corolle ne remplit cependant qu’un rôle très-secondaire, moindre même que celui du calyce, propre du moins, par sa robuste contexture, à protéger contre les intempéries les parties plus centrales. C’est une enveloppe de luxe qui manque dans beaucoup de végétaux, dont les fleurs alors passent inaperçues. La plupart de nos arbres forestiers, le chêne, le hêtre, l’orme par exemple, sont dépourvus de corolle, et n’ont pour enveloppes florales que de petites écailles vertes, derniers vestiges d’un calyce. Quand la fleur est dépourvue de corolle, elle est dite apétale.

L’ensemble des enveloppes florales, calyce et corolle, porte le nom de périanthe. Si l’une ou l’autre des deux enveloppes manque, la fleur est qualifiée de monopérianthée. Elle est monopérianthée par défaut de calyce dans le lis, et par défaut de corolle dans nos arbres forestiers. Dans quelques cas plus rares, les deux enveloppes manquent à la fois ; la fleur est alors apérianthée ou nue. Ainsi la fleur des lentilles d’eau se compose uniquement soit d’une étamine soit d’un pistil.

Les étamines forment la troisième rangée circulaire ou le troisième verticille de la fleur. La partie indispensable d’une étamine est l’anthère, avec son contenu poudreux de pollen, dont la fonction est de fertiliser les semences et d’éveiller en elles la vie quand, sous le nom d’ovules, elles commencent à se former dans l’ovaire. Il suffit donc d’une anthère pour constituer une étamine. Le filet qui la porte est d’intérêt secondaire ; il peut être plus ou moins court, ou même, quoique assez rarement, manquer en entier. La soudure des étamines entre elles, surtout par leurs filets, se présente quelquefois, mais moins fréquemment que celles des sépales ou des pétales.

Le quatrième et dernier verticille de la fleur est celui du pistil. À cause de leur position centrale, qui les met en contact les unes avec les autres par de grandes surfaces, les diverses pièces dont le pistil se compose sont soudées très-fréquemment entre elles et forment un tout simple en apparence quoique en réalité complexe. Examinons d’abord une fleur où les diverses pièces du pistil soient isolées l’une de l’autre, celle du pied d’alouette, par exemple. Nous y trouverons trois petits sacs ventrus et membraneux, à l’intérieur desquels les jeunes semences ou ovules sont rangés le long de la paroi. Chacun d’eux est surmonté d’un court filament que termine une tête peu apparente mais de structure spéciale. Chacune de ces trois pièces prend le nom de carpelle. Le sac membraneux contenant les ovules est l’ovaire du carpelle, le prolongement filiforme est le style, et la tête terminale est le stigmate. Le pistil d’une fleur se compose donc d’un verticille de carpelles, qui, lorsqu’ils ne sont pas soudés entre eux, ont chacun leur ovaire distinct, leur style et leur stigmate.

Mais pressés l’un contre l’autre à cause de leur position au centre de la fleur, les carpelles habituellement se soudent entre eux.
Fig. 116. Pistil de Pied d’Alouette.
n, ovaire ; t, style ; s, stigmate.
Tantôt la réunion a lieu par les ovaires seulement, les styles et les stigmates restant séparés ; tantôt la soudure porte à la fois sur les ovaires et les styles et ne laisse libres que les stigmates ; tantôt enfin les carpelles sont assemblés dans toutes leurs parties en un organe qui paraît simple. Cependant, en ce dernier cas même, il est facile de constater la nature complexe du pistil et de reconnaître le nombre de carpelles dont il se compose, soit par le stigmate commun, divisé par des échancrures en autant de lobes qu’il y a de carpelles assemblés ; soit par l’ovaire commun, qui indique au dehors, par le nombre de ses renflements, de ses plis, de ses sillons, le nombre d’ovaires simples entrant dans la structure du tout. Ainsi dans le pistil du lis, on reconnaît un stigmate à trois lobes, nettement accusés, et un ovaire à trois renflements obtus. Malgré ce qu’il y a de simple dans sa structure d’ensemble, ce pistil est donc formé par la réunion de trois carpelles.

Alors même que ni le stigmate ni l’ovaire commun ne feraient connaître, par leur configuration, le nombre de carpelles assemblés, un moyen resterait encore de déterminer sûrement ce nombre. Coupons en travers l’ovaire du lis. Nous verrons qu’il est creusé de trois compartiments ou loges, dans chacune desquelles des ovules sont rangés. Chaque loge est la cavité d’un carpelle ; de leur nombre,
Fig. 117. Pistil du lis.
a, stigmate ; b, style ; c, ovaire.
on conclut donc celui des carpelles réunis pour constituer le pistil. Soit encore une pomme, qui est l’ovaire mûri et grossi de la fleur du pommier. En la coupant en travers, nous y reconnaissons cinq loges, entourées d’une paroi coriace et contenant les graines ou pépins. Ces cinq loges nous indiquent cinq carpelles assemblés. La règle est générale : autant de compartiments ou de loges présente l’ovaire commun, autant il entre d’ovaires élémentaires dans sa composition, et par conséquent autant de carpelles comprend le pistil.

Nous venons de reconnaître dans une fleur quatre verticilles, savoir : celui du calyce, dont les pièces élémentaires sont les sépales ; celui de la corolle, composé de pétales ; celui des étamines ; celui du pistil, formé de carpelles. Sous le rapport de leur nombre et de leur position respective, les pièces dont se composent ces quatre verticilles suivent certaines règles,
Fig. 118. Ovaire du Lis coupé transversalement.
à exceptions très-nombreuses du reste. Mentionnons d’abord les règles et laissons les exceptions pour les signaler à mesure qu’elles se présenteront.

Dans les végétaux dicotylédonés, le nombre des pièces de chaque verticille floral fréquemment est cinq ; et dans les végétaux monocotylédonés, ce nombre est fréquemment trois. Le nombre cinq caractérise pour ainsi dire l’architecture florale des végétaux à deux cotylédons ; et le nombre trois, celle des végétaux à un seul cotylédon. Cette loi est la conséquence d’un principe relatif à l’arrangement des feuilles. La fleur, vous ai-je déjà dit, est un rameau d’une structure à part ; ses diverses parties sont des feuilles métamorphosées. Nous devons donc retrouver dans l’arrangement des parties de la fleur quelques traces des lois qui président à l’arrangement des feuilles sur le rameau. Or dans les végétaux dicotylédonés, les feuilles très-fréquemment se superposent de cinq en cinq, et reprennent, sur la spirale, la coordination des cinq premières ; dans les monocotylédonés, elles se superposent de trois en trois. Si le rameau se raccourcit à l’extrême pour devenir la fleur, les feuilles de chaque série de cinq ou de chaque série de trois se rassemblent en un verticille, et c’est ainsi que les pièces des divers verticilles floraux se comptent par cinq dans les dicotylédonés et par trois dans les monocotylédonés.

Chaque genre d’organes, notamment les pétales et les étamines, ne forme pas toujours une rangée circulaire unique autour de l’axe, enfin un seul verticille, comme le suppose l’exposé qui précède. La corolle, par exemple, peut comprendre deux verticilles de pétales, ou davantage, disposés à l’intérieur l’un de l’autre ; de même les étamines peuvent former deux ou plusieurs rangées. Or, il est de règle que dans ces verticilles répétés, le nombre de pièces se maintient le même, ce qui double, triple le total des pétales, des étamines. Vous voyez par là que le nombre cinq peut être remplacé par l’un de ses multiples dans les fleurs dicotylédonées, et le nombre trois par l’un de ses multiples dans les fleurs monocotylédonées.

Comme exemples prenons la fleur du pommier et celle du lis. La première, appartenant à un végétal dicotylédoné, comprend cinq sépales au calyce, cinq pétales à la corolle, des étamines au nombre de vingt environ, enfin cinq carpelles reconnaissables aux cinq loges de la pomme. La seconde, appartenant à un végétal monocotylédoné, comprend un double verticille d’enveloppes florales, chacun de trois ; un double verticille d’étamines, chacun de trois aussi ; enfin un pistil composé de trois carpelles.

N’oublions pas que cette loi numérique comporte de fréquentes exceptions, sinon toujours dans l’ensemble des verticilles floraux, du moins dans quelques-uns. Ainsi la fleur de l’amandier, construite comme celle du pommier sur le type quinaire, n’a cependant qu’un seul carpelle au pistil, comme nous le montre l’ovaire mûr ou l’amande.

La seconde loi concerne l’arrangement des parties de la fleur. Nous avons reconnu que, sur le rameau, les feuilles verticillées alternent, c’est-à-dire que les feuilles d’un verticille quelconque sont placées en face des intervalles du verticille immédiatement inférieur, afin que l’accès de la lumière soit gêné le moins possible. Il y a une semblable alternance dans les organes floraux, chaque verticille qui suit alterne avec le verticille qui précède. Ainsi les pétales sont placés en face des intervalles des sépales ; les étamines, en face des intervalles des pétales ; les carpelles enfin, en face des intervalles des étamines. Cette loi d’alternance ne souffre qu’un petit nombre d’exceptions.

Pour représenter la distribution d’un édifice, les architectes imaginent une section qui couperait les murs horizontalement. Le dessin de cette section est le plan de l’édifice. La botanique obtient de la même manière le plan de la fleur ; elle en représente les divers organes par une section perpendiculaire à son axe, ce qui permet de figurer, avec une netteté géométrique, l’arrangement des parties florales entre elles. Un tel dessin se nomme diagramme de la fleur. Voici, pour une fleur dicotylédonée et pour une fleur monocotylédonée, les diagrammes généraux qui mettent sous les yeux la loi numérique et la loi d’alternance.

Dans le diagramme de la fleur dicotylédonée, les cinq traits extérieurs s représentent les cinq sépales du calyce. En face de leurs intervalles sont placés les cinq pétales p ; viennent ensuite, en alternant toujours, les cinq étamines e, que l’on représente par un trait bouclé à cause de la double loge de l’anthère ; enfin les cinq carpelles c, avec leur contenu d’ovules, font face aux intervalles des étamines.

Dans le diagramme de la fleur monocotylédonée, p et p′ représentent deux verticilles d’enveloppes florales, alternant entre elles, et généralement douées toutes les deux de la coloration propre aux corolles. C’est ainsi que dans le lis et la tulipe, on trouve, presque également riches en coloris, trois pétales intérieurs.

Fig. 119. Diagramme d’une fleur dicotylédonée.

s, sépales ; p, pétales ; e, étamines ; c, carpelles.

Fig. 120. Diagramme d’une fleur monocotylédonée.

p et p′, pétales ; e, étamines ; c, carpelles.

À ne tenir compte que de leur position, les trois pièces extérieures sont assimilables aux sépales d’un calyce, mais la couleur verte leur manque la plupart du temps. Néanmoins quelques fleurs monocotylédonées, telle est l’éphémérine de Virginie, ont les trois pièces extérieures vertes et sont alors réellement douées d’un calyce. Quelques autres associent, dans ce verticille extérieur, les caractères du calyce et ceux de la corolle. Ainsi l’ornithogale en ombelle, fréquente dans tous nos champs cultivés, a les trois pièces extérieures blanches au dedans et vertes au dehors. Par sa face externe, ce verticille de l’ornithogale est un calyce ; par sa face interne, c’est une corolle. Quoi qu’il en soit §de l’indécision où nous laisse parfois le verticille extérieur du périanthe dans les végétaux monocotylédonés, avec les trois pétales intérieurs alternent trois étamines e. Quelquefois, comme dans le lis et la tulipe, à ces trois étamines s’en adjoignent trois autres, un peu plus intérieures et alternant avec les premières. Enfin trois carpelles c font face aux intervalles du dernier verticille d’étamines. Dans une fleur, les organes absolument indispensables sont le pistil, dont l’ovaire contient les ovules, et en second lieu les étamines,
Fig. 121.
A, fleur staminée de la Citrouille ; e, étamines ; B, fleur pistillée de la Citrouille ; vo, ovaire ; s, stigmate ; c, corolle.
dont le pollen vivifie ces ovules et les fait se développer en graines fertiles. La grande majorité des plantes possède les deux genres d’organes réunis dans la même fleur, le pistil au centre, les étamines autour du pistil. Mais quelques végétaux ont deux espèces de fleurs qui mutuellement se complètent, les unes donnant les ovules, les autres le pollen. À l’intérieur de leurs enveloppes florales, les fleurs uniquement destinées à produire du pollen ne contiennent que des étamines, sans pistil. On les nomme fleurs à étamines ou fleurs staminées. Les autres, uniquement destinées à produire des ovules, ne contiennent que le pistil, sans étamines. On les nomme fleurs à pistil, ou fleurs pistillées. Tantôt les fleurs staminées et les fleurs pistillées viennent à la fois sur la même plante, sur le même pied. Pour désigner cette communauté d’emplacement, d’habitation en quelque sorte, on dit que la plante est monoïque. La citrouille et le melon, par exemple, sont monoïques. Sur la même plante, sur le même rameau, Se trouvent à la fois des fleurs à étamines et des fleurs à pistil. Les premières, après l’émission du pollen, se fanent et se détachent de la plante sans laisser de traces ; les secondes, tout d’abord reconnaissables à leur gros renflement inférieur, ne tombent pas en entier, une fois flétries : elles laissent en place leur ovaire fertilisé, qui devient le fruit. Tantôt enfin, les fleurs staminées et les fleurs pistillées se trouvent sur des pieds différents, de manière que, pour la fructification, deux plantes distinctes sont nécessaires, l’une fournissant les ovules et l’autre le pollen. La plante est dite alors dioïque. Tels sont le chanvre et la bryone. Seule, la plante pistillée fructifie et donne des graines. La plante staminée n’en donne jamais, mais elle n’est pas moins indispensable, car, en l’absence de son pollen, la fructification serait impossible.