La Route du Simplon/Préface

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J.G. Neukirch (p. iii-iv).

Les descriptions de la route du Simplon ne manquent pas. — Celle publiée en 1809 par Mr. Mallet[1] a d’abord fixé l’attention, tout en rendant avide d’une autre, plus détaillée. Mess. Lory et Osterwald ont satisfait depuis le public par un monument, vraiment national, sous le rapport pittoresque[2]. Ce magnifique ouvrage qui, vu son prix élevé, ne peut être que dans les mains de peu de monde, a été refondu dans un autre qui a paru l’année dernière chez Mess. Akermann à Londres[3]. Cependant ces descriptions laissent encore beaucoup à désirer, faisant mieux connaître la beauté des ouvrages que les efforts qu’ils ont coûté. Les éditeurs des monumens français[4] n’ont également rempli qu’imparfaitement cette dernière tâche ; ils ont fourni toutefois à l’homme qui pouvait en parler avec le plus de connaissance, le prétexte de publier des renseignements curieux sur la construction de cette route[5]. Si de mon côté je me suis occupé à réunir dans un même cadre toutes les données que j’ai pu me procurer sur cette entreprise mémorable, je n’ai eu en vue que les voyageurs qui, non contens de voir, veulent en même tems s’instruire ; et mon travail ne sera peut-être pas sans mérite à leurs yeux, en attendant qu’il plaise aux hommes de l’art de faire paraître un ouvrage plus digne du sujet[6].


  1. Lettres sur la route de Genève à Milan par le Simplon, écrites en 1809. Paris et Genève chez Paschoud. 1 Vol. 8.
  2. Voyage pittoresque de Genève à Milan par le Simplon, 1 Vol. fol. avec 33 gravures enluminées. Paris chez Didot, 1811. Prix d’un exemplaire ordinaire 15 Louis.
  3. Pitturesque Tour from Geneva to Milan by way of Simplon. Imperial octavo. London 1821, chez Akermann. Prix 2 et demi Guinées. Le texte est de Mr. Schoberle.
  4. La route du Simplon. Premier cahier des monumens des victoires et conquêtes des Français. Paris 1819, chez Pankouke.
  5. Mémoire et observations historiques et critiques sur la route du Simplon et autres objets d’art adressées à Mr. Ch. Dupin par Mr Céard, directeur des ponts et chaussées, en retraite ; in 4. 1820. Paris, chez Goeury.
  6. Mr. Cordier, un des ingénieurs français employés à la construction de la route, a publié une carte topographique du Simplon, dressée sur le dessin original de Mr. Céard. Elle ne comprend toutefois que la lisière des montagnes que la route parcourt, et sera, je présume, suivie d’une autre sur une plus grande échelle dans le genre des belles cartes du Mont-Cenis, par Mess. Ramond et Derrien.
    Mr. Céard avait fait faire un relief du Simplon pour être mis sous les yeux de Napoléon ; mais l’artiste qui travaillait à ce relief, dans le bureau de Mr. Céard à Genève, en escamota les principales dimensions et en fabriqua un second qui fut envoyé à l’empereur de Russie, avant que Napoléon en ait eu connaissance. On peut se figurer les inquiétudes de Mr. Céard et du Ministre qui avait sous lui le département des ponts et chaussées ; cependant Napoléon se borna à leur dire au lieu de tout reproche : « Si l’empereur Alexandre a le relief, moi, j’ai le Simplon. »
    En 1807 le gouvernement a fait frapper une médaille pour éterniser l’ouverture de la route. D’un côté se trouve le buste de Napoléon, gravé par Andrieux, et sur le revers une figure colossale, assise sur des montagnes qui semblent s’affaisser sous son poids.