La bourse ou la vie/04

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L. H. Huot (p. 11-12).

Du travail et du pain.


Voilà ce qu’ils vous demandent, et ce qu’il faut absolument leur donner.

Nos manufactures ne pourront en recevoir qu’un petit nombre. Il faut encourager, favoriser par tous les moyens l’établissement de nouvelles industries afin qu’un plus grand nombre de bras y trouvent de l’emploi. Mais quel que soit le progrès que vous réalisiez sous ce rapport, il ne faut pas que l’industrie accapare la majorité des travailleurs.

C’est donc vers l’agriculture que vous devrez diriger ce courant d’immigration canadienne, et pour atteindre cette fin, il faudra multiplier les facilités et les avantages à l’entrée de cette carrière.

Nous avons des terres en abondance. Ne les vendez pas, mais donnez-les aux immigrants à certaines conditions qui les empêcheront de les ruiner et de les abandonner ensuite.

Si cet encouragement ne suffit pas, allez plus loin, et payez une prime au colon pour chaque arpent de terre inculte qu’il mettra en état de culture, et pour la maison ou la grange qu’il bâtira sur son lot.

Car, ne l’oubliez pas, messieurs, l’agriculture est la grande nourrice des nations, et c’est elle qu’il faut protéger avant tout. On exalte l’industrie, et c’est avec raison par ce qu’elle est pour les peuples une grande source de richesse et de bien être. Mais il y a dans la protection de l’industrie une certaine mesure qu’il ne faut pas dépasser ; sinon l’équilibre est rompu, et l’agriculture est ruinée par l’industrie.

Voyez ce qui arrive en ce moment aux États-Unis : cet équilibre a été rompu dans les États de l’Est, et l’industrie y a pris aux dépens de l’agriculture une extension exagérée. Or la prospérité agricole est seule solide, à l’abri des crises financières. Aussi, regardez aux conséquences : la crise actuelle ne se fait pas sentir dans l’Ouest où l’Agriculture est la source principale de prospérité ; elle se borne aux États de l’Est où l’industrie a pris le premier rang. Il faut éviter cette faute que nos voisins ont commise, et maintenir l’équilibre rationnel entre ces deux grandes sources de la richesse générale.

Donc il faut faire des agriculteurs du plus grand nombre de nos nouveaux immigrés, et si vous me le permettez, je vous indiquerai vers quel point de notre pays nous devons diriger cet accroissement de population

Ici, messieurs, se rattache à la question du rapatriement une autre question de la plus grande importance et dont je veux particulièrement vous entretenir, c’est celle de la construction d’un chemin de fer.