Le Cri de Toulouse, numéro 1/Un Monsieur qui me fait la cour

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MONOLOGUES ORIGINAUX

Un Monsieur qui me fait la Cour

Depuis quelque temps, un monsieur
Me fait la cour ; la chose est sûre.
Je le trouve partout ; bien mieux,
J’ai remarqué sur sa figure
Un petit air très expressif
Lequel, je ne m’y trompe guère,
Dit, mieux que je ne saurais faire,
Combien ses sentiments sont vifs.

En cachette je le regarde
Quand je promène avec maman.
Pour rien laisser voir, Dieu m’en garde,
Je me surveille énormément.
Un coup d’œil à la dérobée,
Le temps de l’observer un brin
Lorsque mère, très absorbée,
Près de moi poursuit son chemin !

Quel que soit notre itinéraire,
Je le retrouve sur mes pas :
Il suit à cent mètres derrière.
Très à l’aise, sans embarras.
Lorsque devant une vitrine
Nous nous arrêtons un instant,
Il s’arrête aussi, m’examine,
Nous reparlons en même temps.

Je n’aurais pas cru, je vous jure,
Que l’on pût ainsi, chaque jour,
Pencontrer partout la figure
Du monsieur qui vous fait la cour ;
C’est un petit jeu que j’adore,
J’y prends un plaisir infini
Et je voudrais qu’il dure encore,
Même lorsqu’il sera fini.

Hélas ! au train dont sa cour marche,
Il est tout à fait évident
Qu’il va tenter une démarche
Ou faire agir quelque parent.
Je lui plais : la chose est certaine
Et je crois même deviner
Qu’avant la fin de la semaine
Avec nous il viendra dîner.

Or j’éprouve quelque tristesse
À penser que prochainement
Ce petit jeu qui m’intéresse
Va comporter un dénouement.
Car on dit que le mariage
Est loin d’offrir aux amoureux
Le bonheur pour lequel l’usage
Exige qu’on fasse des vœux.

Alors ?… Alors, je vais vous dire :
Lorsqu’il demandera ma main,
Avec mon plus joli sourire
Je lui répondrai, c’est certain :
Monsieur, puisque tel est l’usage,
Faites-moi la cour, s’il vous plaît,
Mais renoncez au mariage
Et mon bonheur sera complet.

Maxim.