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Le Cri de Toulouse, numéro 19/Nouvelles sur le pouce

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NOUVELLES SUR LE POUCE



Encore un terrible accident :

Un maraicher d’Aucamville, M. B… en est la victime. Il laisse malheureusement onze enfants et la fenêtre du premier ouverte. Au souper, il avait mangé comme d’habitude, mais il lui prit fantaisie d’ajouter à son repas un salsifis placé devant lui sur la table.

Ce légume, ordinairement inoffensif, contenait un pois fulminant qu’un de ses gosses y avait caché.

Une explosion se produisit. On trouva des morceaux du maraicher à cent mètres de distance. Ce qu’il y a de plus singulier, c’est qu’il n’a pas cassé sa pipe.

Le cocher Jean Labistouille, qui conduit un omnibus traîné par deux chevaux, voulut serrer le frein près d’une bifurcation. Il appuya tellement fort sur la mécanique, qu’il aplatit complétement le devant de la voiture et écrasa le derrière des deux chevaux. De plus, la secousse lui renvoya ses deux genoux dans les yeux. Maintenant, il est obligé de regarder son patron avec des coquilles de noix percées.

À Lardenne, au cours de la cavalcade, un hercule pris d’un délire inexplicable, croyait lutter contre un amateur, alors qu’il était seul. Pensant tenir un adversaire, qui n’était qu’imaginaire, il s’est écrasé lui-même entre ses bras.

Sa pauvre veuve est inconsolable. Pour adoucir son chagrin, elle souffle dans des verres de lampe, entre midi et le passage à niveau.

À la foire, aux salaisons, de la place Saint-Sernin, jeudi dernier, un jambonneau s’est enfui par la rue du Taur. Dans sa fuite, il a renversé deux modistes et un huissier. En présence de cet accident, il se pourrait que M. Bosc, le plus central des commissaires de police, fit museler les jambonneaux à moins qu’on ne les emploie à prévoir le temps qu’il a fait la veille.

On nous annonce à l’instant que la pêche à la ligne va être interdite à partir de la seconde quinzaine d’avril.

On remarquera que cette mesure annuelle est tardive cette année. Depuis deux mois on voyait les goujons dépérir. Ils avaient demandé, sans l’obtenir, à M. Joulin, l’envoi de raies, ces poissons plats — dans la Garonne. Cependant, le président de la Société des pécheurs consentit a envoyer les raies demandées, mais, tandis que M. Joulin ne voulait accorder que la « raie facultative », les goujons exigeaient la « raie obligatoire. »

Les pourparlers furent rompus.

Les pescofis pourront se rattraper sur la pêche aux moules artificielles dont on va peupler le fleuve et le canal du Midi. Ces sortes de mollusques sont fabriquées avec de la colle de peau étirée et salée au jus de pipe. Elles sont jaunies par l’haleine de douze vieilles concierges…

Oh ! la science ! Ça vous fait tomber les cheveux !…

M. Jarousseau, l’inspecteur de la police municipale, cherche tous les moyens de perfectionner la tenue de son personnel. On dit qu’il va changer maintenant la coiffure des sergents de ville.

Il paraîtrait que la visière du képi serait mise par derrière parce que cela les empêche de voir les malfaiteurs lorsqu’ils sont par devant.

Le nombre des étrangers venus pour assister au Championnat était si grand que la plupart d’entre eux ne purent trouver de gite.

Pour notre part nous connaissons un monsieur et une dame qui logèrent dans une contre-basse. Leur fille coucha dans un violoncelle. Depuis ce moment, celle-ci pousse des soupirs en fa dièze.

L’Association symphonique va s’occuper de ce cas exceptionnel.

Dans les milieux artistiques on croit que si la jeune fille voulait se laisser frotter avec de la colophane, on finirait par lui faire jouer des morceaux classiques, mais il faudrait lui gratter les pieds.

Fantasio.