Le Dhammapada/XII

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Traduction par Fernand Hû.
Ernest Leroux (Bibliothèque orientale elzévirienne, XXIp. 41-42).

CHAPITRE XII




LE MOI


157 Si l’on se tient pour cher à soi-même, soigneusement on doit veiller sur soi-même. Des trois veilles, que le sage veille au moins une[1] !

158 Si, après s’être cantonné soi-même dans l’observance de la loi, le sage instruisait son prochain, il ne serait plus tourmenté.

159 S’il mettait en pratique sur lui-même ce qu’il enseigne à son prochain, après s’être convenablement dompté lui-même, il dompterait celui-ci facilement. Ce qui est difficile, c’est de se dompter soi-même.

160 Le moi est le maître du moi. Quel autre maître y aurait-il ? Un moi bien dompté est un maître qu’on se procure difficilement.

161 L’action mauvaise, faite par le moi, fille du moi, produite par le moi, broie l’insensé, comme le diamant l’enveloppe de la pierre précieuse.

162 Celui qui fait le mal sans relâche, celui-là, semblable à la liane qui a renversé l’arbre, se met lui-même dans l’état où son ennemi désire le voir.

163 Facile à faire est ce qui est mal, et nuisible au moi. Mais ce qui est salutaire et bien est difficile à faire.

164 Celui qui fait fi des préceptes des Arhats, des Aryas, des justes, est un insensé qui suit un enseignement funeste, et qui amène, pour sa propre destruction, des fruits semblables à ceux du kâshthaka[2].

165 On souffrira soi-même d’une mauvaise action qu’on aura faite. En ne la faisant point, on se purifiera soi-même. Pur ou impur, c’est par soi-même que chacun l’est ; on ne se purifie point l’un l’autre.

166 Nul ne doit sacrifier son propre intérêt (l’intérêt de son salut) à l’intérêt d’autrui, quelque considérable qu’il puisse être. Une fois bien pénétré de son intérêt propre, on doit s’y appliquer sans relâche.

  1. Omnibus dico : Vigilate. (Marc XIII, 37.)
  2. Le kâshthaka (espèce de rosea) meurt après avoir donné son fruit.