Le Jardin des dieux/Sous l’œil des hublots/Une flûte en mer

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Le Jardin des dieuxEugène Fasquelle (p. 281-282).



UNE FLÛTE EN MER



Oh ! souviens-toi, la nuit tombait sur l’entrepont
Où les chevaux liés tremblaient entre leurs planches
Et brassant leur odeur, savonneuses et blanches,
Les lames franchissaient les rambardes, d’un bond…

Aux lampes des hublots allumant ses écumes,
          La mer se révéla dans sa lividité,
          Et devant son gouffre nous eûmes
Le regret des jardins que nous avions quittés.


Alors comme fut douce, à cette heure de peine,
          Pour nos cœurs d’angoisse envahis
          L’humble flûte de ce spahi
Cueillie et peinte un soir sous les palmes lointaines

Qui, sous les yeux profonds des chevaux, élevant
Son émouvant murmure où tant d’âme s’exhale,
Vint mêler au fracas de la mer et du vent
Le souvenir des feux sur les dunes natales.