Le Laurier Sanglant/15

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Le Laurier SanglantCalmann-Lévy, éditeurs (p. 51-52).

JOUR DE LA CAPITULATION




Paris, janvier 1871.


Ainsi tout est fini… Sous le vent de tempête,
Ô France, ô mon pays, il faut courber la tête,
Sous la fatalité baisser ton front d’airain ;
L’ennemi triomphant a brisé ta couronne ;
Sous le poids du malheur la force t’abandonne,
Et sur tes bras meurtris pèse le fer germain.

En vain, grande d’espoir et folle de souffrance,
As-tu jusqu’à la fin conservé l’espérance ;

En vain as-tu levé ton regard vers les cieux :
Le cri s'est arrêté dans ta gorge oppressée,
Et, comme tu rêvais de ta gloire passée,
Des larmes de douleur ont obscurci tes yeux.

Ah ! les temps ne sont plus où l’Europe, inquiète,
À tes vaillants soldats ne pouvant tenir tête,
Pour se venger plus tard implorait ton appui ;
Avec les temps nouveaux vient la nouvelle guerre ;
Ils frappent maintenant, ceux qu’on frappait naguère :
Les vaincus d’autrefois sont vainqueurs aujourd’hui.

Mais va ! tu peux braver l’ennemi qui te tue :
Avec trop de valeur, France, tu t’es battue
Pour qu’aujourd’hui ton front s’abaisse en rougissant ;
Tu fus brave toujours, si tu fus malheureuse,
Et jamais une paix ne peut être honteuse
Quand la main qui la signe est couverte de sang.