Le Laurier noir/III/Vers Saint-Dié
VERS SAINT-DIÉ
Des cendres parmi les bruyères
Et du sang contre les sapins.
Des fils de fer entre les pierres,
On s’est battu dans ces chemins.
Un pâle soleil de décembre,
Que la pluie veut encor mouiller,
Met des rayons de neige et d’ambre
Sur la ville de Saint-Dié.
L’auto roule dans la montagne.
Un paysage désolé,
Des toits crevés sur la campagne,
Des déserts que l’on a brûlés.
C’est une fuite dans la boue,
Dans l’espace de la douleur.
La vitre où se penche ma joue
Est ruisselante de mes pleurs.
La cité devient moins lointaine,
Mais plus j’approche de ses murs
Plus je sens que mûrit ma peine,
Plus je sens qu’au manteau d’azur
Dans lequel gèle ma pensée,
Il va falloir recoudre encor,
Cette agraffe qui s’est cassée
En voulant éloigner la mort.