Le Littré de la Grand’Côte/3e éd., 1903/Lettre L

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Chez l’imprimeur juré de l’académie (p. 207-216).
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L


LA, art. — Devant un petit nom de femme : La Dodon, la Glaudine. Les gens « distingués » considèrent cela comme du dernier « mauvais genre ». Cependant, en Italie, l’article se met devant les plus grands noms : In sono la Pia, dit Dante en ses vers immortels.

Le se place également devent un petit nom d’homme : Le Pierre, Le Tienne. — Il en est de même chez les paysans allemands : Der Franz, Die Monika (voyez Auerbach, dans les Schisartswaelder Dortgeschichten).

Le, au lieu de mon, notre, en parlant de parents. Nous avons diné chez l’oncle… La cousine est malade, etc.

LABOURER. — Labourer du dos, Reposer au cimetière.

LACETTE, s. f, — Ruban de fil, qui est en laine ou en coton, parfois en soie, le plus souvent de couleur noire, et dont nos ménagères se servent surtout pour border les vêtements. Quand une lévite ou un panneau a le bout des manches use, on lui refait une virginité au moyen d’une lacette repliée qui cache l’effranjure.

LÂCHER. — 1. v. a. Lâcher en douceur, lâcher très doucement, peu à peu. Voy. douceur.

— 2, v. pr. Se lâcher. Vilaine expression pour une vilaine chose. Se lâcher en douceur. La douceur n’y fait rien ; ce n’est pas plus joli.

LÀ-HAUT. — Là-haut en haut… Par là-haut en haut. Se dit d’un point très élevé. Qu’est-ce que je vois, c’est Ganachon par là-haut en haut sur les glaciers ! Le redoublement de là-haut n’est pas un pur pléonasme, il est au contraire très intensif.

LAID. — Laid à faire retourner une procession. Le fait est qu’il faut être joliment laid.

LAISSER. — Je me suis laissé dire que… « Mauvaise expression, s’écrie Molard ; dites simplement, on m’a dit. » Mais ce n’est pas du tout la même chose ! Se laisser dire marque le doute, la défiance à l’endroit de ce qu’on vous a dit. On m’a dit ne marque aucun sentiment personnel.

LAIT. — Vin sur lait rend le cœur gai. Je n’y contredis pas, mais je ne m’en suis jamais aperçu.

Lait sur vin fait vilain. (P.-B.).

Il n’y a rien d’ennuyeux por une femme comme d’attendre son lait bouillir et son mari mourir. Pour le lait, c’est sùr.

Lait de carpe, Laitance. Marie, c’est vendredi, vous achèterez une carpe. — Faudra-t- la prendre au lait ou aux œufs ?

Lait de poule. Ce brave Molard, qui sans doute avait oublié de consulter son Dict. de l’Acad., veut qu’on dise brouet (!) ou chaudeau (!). Mais comme le lait de poule ne ressemble guère au brouet (dont le fond est du bouillon), et que nous ne savons pas ce que c’était qu’un chaudeau, il ajoute avec candeur : « Cependant ces mots ne remplacent pas tout à fait l’expression dont il s’agit. » — Alors pourquoi les dire ? — Il y aurait à faire un bien joli dialogue avec les expressions recommandées par Molard. Marie, apportez-moi un brouet ! — Mecieu veut pt’ête dire une brouette ?

LAITE, s. f. — Laiteron, sonchus oleraceus. La laite est au lapin ce qu’est la truffe à l’homme civilisé.

LAMBINOCHER, v. n. — Très agréable fréquentatif de lambiner.

LAMPER, v. a. — Boire, en parlant du vin, des liqueurs, etc. Le gosier est comparé à une lampe qu’il faut alimenter d’huile.

LANCE. — La lance de saint Crépin, Une alène, saint Crépin étant le patron des bijoutiers sur le genou.

LANCÉE. Voy. élancée.

LANCEUR, s. m. — De mon temps, c’était un gone qui, dans les brochés en grande largeur, c’est-à-dire dépassant l’amplitude des deux bras du canut, recevait la nvette d’un côté, puis la relançait. Avec le battant à double boite, il n’y a plus besoin de lanceur.

LANCIS, LANCÉ, terme de construction. — Pierre de taille mince et longue qui se pose à plat dans un dosseret ou un jambage de baie, en alternant avec les crosses sur chant (voyez crosse). — De ce que la pierre est lancée dans le mur (au sens de pénétrer).

LANÇONNIER, LARÇONNIER, s. m., terme de construction. — Petit soliveau placé transversalement dans l’épaisseur d’un mur de pisé en construction, et qui sert à maintenir les banches entre lesquelles on pise la terre. La forme larçonnier est la plus commune. — Trous de larçonnier, trous laissés dans le pisé par le larçonnier et qui sont bouchés plus tard. — Du vieux franç. lançon, branche d’arbre, par extension petite pièce de bois, de lancea.

LANGUE. — Langue de chat, Mensonge, pellicule qui croit autour des ongles.

Langue de femme, Amourette des prés, briza media. Ainsi nommée parce qu’elle remue toujours.

Avoir la langue bien pendue. Se dit de quelqu’un qui parle beaucoup et longtemps.

Une langue à faire battre la sainte Vierge avec saint Joset. Se dit d’une personne qui rapporte et envenime les choses.

Avoir la langue double. Se dit de l’homme ivre qui, par suite d’une semi-paralysie de la langue, parle avec difficulté.

Pour avoir de bons grollons, il y faut une semelle en langue de femme. Parce que c’est inusable.

LANGUETTE, s. f. — 1. Bande d’étoffe ajoutée pour élargir. Faut mettre une languette à la ceinture de mes caneçons.

2. Morceau très mince. Donne-me don une languette de fromage de cochon.

3. Terme de construction, Cloison en briques séparant deux gaines de cheminée. — Fait sur langue.

LANLAIRE. — Va te faire lanlaire. Euphémisme poli pour « Va te faire… ! » — Mot comique forgé de toutes pièces.

LANTERNE, s. f. — 1. Briller (parlant par respect) comme un étr… dans une lanterne. Voy. étr…

2. Personne lambine. La mère Galuchard à son fils qui porte une bouteille de vin dans un panier à salade et s’amuse à le branlicoter : Vances-tu, lanterne ? — Voui, m’man ! — Lanterne est ici un subst. verbal de lanterner.

3. Estomac, surtout quand il est vide. As-tu quèque chose à me mettre dans la lanterne ?

4. Organe de la Jacquard, dans lequel, avec beaucoup de bonne volonté, on peut voir quelque ressemblance avec une lanterne. C’est une plaque de fer, fixée à l’extrémité du cylindre sur quatre tiges de fer. C’est sur ces tiges que mordent les loquets qui font accomplir au cylindre un quart de révolution à chaque fois que le canut enfonce la marche. De mon temps la lanterne était toujours placée sur le devant du métier, côté de l’ouvrier. De là les expressions côté de la lanterne (devant) ; côté opposé à la lanterne (derrière). — Au fig. Je suis tombé du côté opposé à la lanterne. Le dicton ne peut plus s’appliquer aux nouvelles mécaniques en 1100 crochets qui ont deux lanternes, une devant, une derrière.

5. Terme de canuserie, Feuille de carton blanc placée sous la medée, près du remisse (ou corps) afin de permettre au canut, dans les couleurs foncées, de voir facilement les écorchures des fils.

LAPIDER, DELAPIDER, v. a. — Lapider, delapider quelqu’un, L’importuner, le persécuter pour en obtenir quelque chose. Il me lapide pour lui prêter de l’argent. Dans la forme delapider, de est intensif.

LARD. — Moitié lard moitié cayon. Répond au dicton français Moitié chair, moitié poisson. Cela paraît singulier, car lard et cayon, ça se ressemble beaucoup, mais ici le dernier mot est pris dans le sens de chair, de maigre, par opposition au lard.

On ne sait si c’est du lard ou du cayon, On ne sait trop qu’en dire.

LARDÈNE, s. f. — Mésange, parus major de Linné. — De larder, piquer. La lardène est celle qui larde les oreilles à cause de son cri strident et répété comme celui d’une lime déchirant les oreilles. C’est pour cela qu’à Nyons on la nomme le serrurier.

LARDURE, s. f., terme de canuserie. — Défaut dans une pièce, qui provient de ce que la navette a pris dessous ou dessus des fils qu’elle ne devait pas prendre. La navette a lardé les fils.

LARGE, s. m. — Donner du large, Avoir du large, Donner de l’espace, avoir de l’espace. Chez Garcin : Mettons-nous à cette table, nous aurons plus de large pour lever le coude… Écartez-vous un peu, ça nous donnera du large. Ces expressions me paraissent excellentes de tout point.

Large, adj. des 2 g., Libéral, généreux. C’est un homme large. Il se trouve déjà en ce sens dans Froissart.

Il entend la vie large, Il fait des dépenses et des générosités.

N’en mener pas large, Se faire petit parce qu’on se sent dans ses torts ou qu’on redoute un danger.

Large… des épaules, Avare, grigou.

LARGEUR, s. f. — 1. Largeur des étoffes de soie. Dans les anciens temps les étoffes se mesuraient à l’aune. Or l’aune de Lyon (pas plus d’ailleurs que l’aune de Paris) n’était un multiple du pied. Elle mesurait 43 pouces 10 lignes 6/10e, soit 1m187. Pour indiquer la largeur, il fallait donc l’exprimer par un nombre fractionnaire. Le dénominateur, dans ce cas, était 8, 12, 16 ou 24. On avait des étoffes en 3/8, 5/8, 7/16, etc. d’aune. L’étoffe en 7/12, par exemple, mesurait ainsi 69 cent. 2 mill. 1/3 ; celle en 5/12, 49 cent. 4 mill. 1/2, etc. Après l’adoption du système métrique, on arrondit la mesure de l’aune pour la faire coïncider avec les mesures nouvelles ; on fixa l’aune à 1m20 et on la divisa par 12. Dont résultait que 5/12 représentait 50 cent. ; 7/12, 70 cent., etc. C’est ainsi que l’on désignait les largeurs de mon temps. On s’aperçut sans doute que le dénominateur 12 était bien inutile, et l’on dit aujourd’hui une étoffe de 50, de 70 cent., etc. — Toutefois, à côté de l’aune de 120 c., il y avait une aune de 116 c., et certains marchands, hélas ! mesuraient à 120 c. pour la façon du canut, et à 116 c. pour la vente.

2. Terme de couturière, Largeur d’une étoffe en général. Vous ajouterez une largeur à cette robe.

LARMIER, s. m. — Soupirail de cave (voy. abat-jour). — De lacrymarium. Pas douteux qu’à l’origine le larmier ne fût un trou destiné à évacuer les eaux pluviales (comp. larmier, moulure pour les eaux pluviales). Le sens s’est ensuite étendu à des trous qui n’avaient pas la même fonction, tels qu’un soupirail.

LARMISE, s. f. — Lézard gris, laceria muralis. — Vivre dans un trou de larmise, Vivre d’une vie retirée et solitaire.

LARÇONNIER, s. m. Voy. lançonnier.

LARIDET, s. m. — L’index (voyez sous cortiaud).

LASSE, s. f. — Lassitude. Prendre quelqu’un à la lasse, Le lasser au point de l’obliger à céder. Ce rogneux de Marius a pris la pauvre Fine à la lasse. Subst. verbal de lasser. Comparez la mouille, la purge, la casse, l’abonde, etc.

LAURELLE, s. f. — Laurier-rose, nerium oleander. En 1871, une vieille bonne, qui servait depuis quarante ans dans une famille légitimiste, me disait avec indignation : C’est ce queux de Cabestan (Gambetta) qui a vendu aux Prussiens l’Alcazar et la Laurelle (l’Alsace et la Lorraine).

LAVAILLE, s. f. — Rinçure de vaisselle. S’emploie souvent au fig. C’est pas de bouillon que nous a fait la Marie, c’est de la lavaille.

LAVANDERIE, s. f. — Buanderie, pièce ou petit bâtiment destiné aux lessives. J’ai entendu quelquefois appliquer ce nom aux souillardes. En ce sens, il a une origine dauphinoise.

LAVEMENT. — Pressé comme un lavement. En visite : Vous nous quittez déjà, Madame la comtesse ! Mais vous êtes pressée comme un lavement ! — Oh, je suis obligée de faire mes visites en courant d’air, j’ai tant de commissions ! Puis le comte tient à ce que je soye rentrée quand lui.

LAVER. — Elle laverait l’eau, pour dire d’une femme qu’elle est de le propreté la plus poussée.

LE devant un prénom d’homme, Voy. la.

LÈCHE, s. f. — Tranche extrêmement mince. « Longues et larges lesches du gras jambon, » dit le débonnaire Eutrapel. Au fig. Un tant soit peu. « Des ce qu’il illucesce quelque minutule lesche de jour, » dit le tant gracieux Rabelais. — Coco, veux-tu de viande ? — Voui, p’pa, donnez-me n’en un troc. — Veux-tu de pain ? — Voui, p’pa, donnez-me n’en une lèche. — Il semble naturel de voir dans lèche un subst. verbal de lécher, la lèche étant si mince qu’elle peut être considérée à l’égal de la trace de la langue. Il n’en est rien. L’s du vieux franç. aussi bien que des formes provenç. indique pour origine le vieux haut allem. lisca, roseau, laiche, « carex ». La lèche est considérée comme aussi mince qu’une feuille de laiche ou de roseau.

LÈCHE-C… (parlant par respect). — 1. Individu qui sait gratter la rogne ; flagorneur. Je vois bien des gens dans les bonnes places qui n’y ont d’autre titre que celui de ce paragraphe.

2. Voy. biscuit.

LÉCHER. — Lécher le miel sur l’épine, Prendre un plaisir dans un moment critique ou dans le malheur. M. X…, le marchand, va lever le c… un de ces quatre matins, et sa femme qu’a mis au levain ! — I lèche le miel sur l’épine !

S’en lécher les cing doigts et le pouce. Se dit d’une friandise que l’on apprécie. S’emploie au fig. La Catherine n’est pas jolie. — Pas jolie ! Je m’en licherais les cinq doigts et le pouce !

LENCANER (SE). Voy. lenticaner (se).

LENDES, s. f. pl. — (Parlant per respect), Œufs de poux. — De lendem, même sens.

LENTIBARDANER, v. n. et réfléchi. — Flâner avec « volupeté ». — « Quand on se n’aime, — C’est si canant, — Qu’on va toujours se lentibardanant, » dit la célèbre chanson de Fanchon. — Hier à soir, l’un de nous, le norable Barthazard Claqueposse, en se lentibardanant sur le quai des Puces… (Cirqulaire). — Composé de lent et d’un fictif bardaner, fait sur bardane. Se lentibardaner, marcher lentement et agréablement à la façon d’une bardane qui se promène. D’ailleurs les bardanes ne sont pas des cerfs.

LENTICANER, v. n. et réfl. — Flâner avec indolence. Ét. Blanc donne la forme lencaner, qui me paraît inusitée. C’est jord’hui dimanche. Nous vons nous lenticaner un m’ment vè Saint-Clair. — Composé de lent et d’un fictif caner, marcher lentement et en se balançant comme une cane, parce que le flaneur se dandine.

LENTILLÉ, ÉE, adj. — Qui a des taches de rousseur. La Tiennette serait jolie si elle était pas tant lentillée qu’on dirait une indienne à pois !

LESSIF, s. m. — Lessif sec. C’est le nom que ceux qui veulent bien parler donnent aux cristaux de potasse. Chez maint espicier vous pouviez lire jadis sur un carton pendu : lessif sec. On appelle cela plus simplement du lissieu sec, mais aujourd’hui tout le monde dit du cristaux. — Lessif est un masculin fait sur lessive. Le v final s’est durci en f par la spontanéité des lois phonétiques. Comp. veuf, de veuve.

LEVAIN. — Mettre au levain, Devenir enceinte.

LÈVE, s. f., terme de charpenterie. — Tranche d’une pièce de bois enlevée pour l’équarrir. — Subst. verbal de lever, au sens d’enlever.

LEVÉE, s. f. — C’est le nom qu’on donne à la corée lorsqu’elle est cuite. À Nyons, on dit levadette.

LEVER, v. a. — Enlever. Lever la petariffe. Se dit d’un mets très épicé qui emporte le palais. Au figuré : I nous a dégobillé un discours qui levait la petariffe.

Lever le couvert, la nappe, la table. Bien qu’on ne rencontre pas ces expressions dans le dictionnaire, je les crois correctes. Table est une métonymie pour « ce qui garnit la table ». On connait le vers de Boileau : « En vain à lever tout les valets sont fort prompts. »

Lever le coude. Voy. coude.

Lever la flotte. Voy. flotte.

LÈVE-GROIN, s. m. — Fille évaporée qui a toujours le groin en l’air.

LÉVITE, s. f. — Redingote. Je me suis fait faire une lévite pour ces fêtes. Ce mot était très courant dans mon enfance.

LÈVRES. — Des lèvres en rebord de pot de chambre. Image gracieuse qui n’a pas besoin d’explication.

LEVRETTE, s. f. — Mâche, valeriana olitoria. Je ne vois d’autre raison à ce nom, sinon qu’il n’y a pas de raison.

LEZ (lèss), s. m. — Lé, largeur d’une pièce d’étoffe, d’un rouleau de papier peint, etc. — Je ne peux m’expliquer l’s finale dans la prononciation que par suite de l’erreur d’orthographe lez pour , puis par la fausse prononciation, d’après la lecture, de ez, comme dans Rhodez, Ravez, Buchez, Suez, etc.

LIACHE, s. f. — Tique des chiens, ixodes ricinus. De lagasta, forme de locusta.

LIAGE, s. f., terme de canuserie. — Lorsque, à la fin d’une pièce, la chaine va quitter le rouleau de derrière, on passe la soie dans une sorte de pince en bois, qui a la largeur de l’étoffe. Les deux règles qui la composent sont serrées au moyen de poulets (voy. ce mot). Cette pince se nomme liage. Elle a pour but de maintenir la régularité dans la tension des fils de la dernière longueur.

LIAQUE, s. f. — Avoir le ventre en liaque, parlant par respect, L’avoir dérangé. — Onomatopée délicate. Beaucoup de dialectes ont exprimé la chose par des onomatopées du même genre. Comp. le normand clliche, même sens.

LIARDS. — Avoir des liards, Être riche. Rochide, est-i si riche comme on dit ? — Oh, il a de liards ! Le populaire, pour symboliser la richesse, prend toujours les monnaies les plus petites. Comp. Avoir des escalins, des espinchaux (voy. ces mots).

Les liards sont de fois plus amis de la joye que les écus, disait mon bourgeois.

À deux liards le pot, À très bon marché. Il a acheté c’te maison à deux liards le pot.

Fendre les liards en quatre, Être très économe.

LIASSE. — Une liasse d’oignons, Une glane d’oignons. Une liasse de poireaux, Une botte de poireaux. Une liasse de pattes, Une trousse de linge. Une liasse de clefs, Un trousseau de clefs.

On a peine à comprendre que des expressions si naturelles ne figurent pas dans les dictionnaires, et, de plus, qu’il faille changer de qualificatif à chacun des objets pour lesquels un qualificatif général convient si bien. Oignons ou poireaux, ils sont toujours en liasse.

LIAUDE. — Claude, nom d’homme. C’est un Liaude, C’est un sot, un nigaud. Comp. Un grand Benoît, Un Jean-Jean, Un Colas, et le vieux franç. Un Jeanin, Un mari trompé. Je crois que le sens péjoratif de certains noms propres vient de ce que ces noms étaient plus spécialement portés par certaines classes inférieures, manants, paysans, etc.

LIAUDE. — Claude, nom de femme. Le secret de la Liaude, Le secret de Polichinelle, que tout le monde sait. Sais-tu que le Benoît va marier la Fanchette ? Faut pas le dire. — C’est le secret de la Liaude ; ma fenne l’a-t-apprenu hier à la plate. Liaude est pris au sens de sotte, niaise, qui ne sait rien dissimuler.

LIBOURNE. — De quel côté que je me tourne, je ne vois que la ville de Libourne. Se dit lorsqu’on ne voit aucune issue à une situation difficile ou embarrassée. Le dicton, qui me paraît surtout appelé par la rime, doit avoir été importé, car il existe dans la Saintonge.

LICHARD, s. m., LICHOIRE, s. f. — Homme, femme qui aime à faire la noce. — Vieux franç. lecheor, glouton, parasite.

LICHECASSE, s. m, — Gourmand. — Composé de licher et casse, casserole. Mot à mot, Qui lèche Les casseroles.

LICHET, s. m. — Petite patte dont on fait une poupée au bout d’un morceau de bois et qui, enduite de graisse blanche, sert à frotter la poêle, à seule fin que matefains et omelettes n’y arrapent pas. Au besoin, cela sert de quindure. — De licher, sensiblement, parce que la patte liche la poêle,

LICOTTE, s. f. — Brin d’osier ou d’un arbuste flexible, servant à lier. — Du prov. liguar, lier.

LICOU. — Je ne connais pas l’âne qui n’a pas le licou, Je ne connais pas le maire quand il n’a pas l’écharpe. Noble parole à la Mirabeau, dite un jour par un bon canut à un maire de la banlieue qui se réclamait de sa magistrature pour faire de l’esbrouffe.

LIÉES. — Avoir les dents liées, Les avoir agacées. J’ai mangé de griottes, j’ai les dents liées. — Faut te les frotter avè de sel.Liées, qui ne peuvent pas mordre en liberté.

LIER. — Il ne sait ni lier ni délier. Se dit de quelqu’un d’incapable, qui ne sait prendre aucun parti.

LIEUE, s. f. — Lieue de pays. Nous la comptons ordinairement pour cinq kilomètres, et la lieue de poste pour quatre. Mais la lieue de pays est comme les mètres en caoutchouc ; elle s’étend indéfiniment. — Combien de lieues d’ici à Tarare ? — Quatre. Elles ne sont pas larges, mais elles sont longues. Aimable plaisanterie que l’on fait au voyageur lassé.

LIÈVRE. — Il est comme les lièvres, il perd la mémoire en courant.

LIGNEU, LIGNU, s. m. — Ligneul. À l’inverse du franç. nous ne prononçons jamais l final. Nous prononçons d’ailleurs comme les cordonniers eux-mêmes.

LIMACES. — Parmi les remèdes populaires en vogue dans mon jeune temps, il faut compter l’avalement des limaces toutes vives. C’était considéré comme infaillible pour les pulmoniques. Bossan, qui joignait à un immense talent un grand faible pour le merveilleux, avait dans sa jeunesse une santé délicate, pour laquelle il consultait souvent une femme de la rue Saint-Jean, que magnétisait un nommé Poulard. Elle lui avait ordonné d’avaler force limaces. Mais tandis que le peuple croyait simplement à une action adoucissante du remède, Bossan m’expliquait que l’efficace consistait surtout dans l’action magnétique exercée par un être descendu vivant dans l’estomac, et dont on s’assimilait la vie. Donc nous allions le matin, dans la rosée, nous promener aux Étroits avec une bonbonnière de sucre pilé dans la poche, et malheur aux énormes limaces que l’on rencontrait ! On les saupoudrait, et kiouf ! — J’avoue que, si fortement qu’on m’ait conseillé le remède, je n’ai jamais eu le courage de le tenter. Je préférais tousser.

Limace, Personne lente et molle. Arrives-tu, limace ?… C’te limace de Pétrus qu’a pas encore rendu !

LIME. — Lime douce.Y a la Babet qu’a dit comme ça que la Glaudine en faisait porter à son mari. — C’est assez connu que la Babet est une lime douce. Pour dire une mauvaise langue, facilement calomnieuse.

LIMOGES, s. m. — Sorte de coton rouge. Delaïde, achète don du limoges pour marquer mes mouchenez. — Je suppose que ce fil vient ou est censé venir de Limoges.

LIMONADIER. — Allons, limonadier de la Passion, porte-nous une bouteille ! Se dit volontiers au cabaretier chez qui l’on va boire. Le limonadier, c’est le soldat qui porta à la bouche de Jésus du fiel mêlé de vinaigre.

LIMOUSIN. — Manger comme un Limousin, Manger énormément (comp. étr… de Limousin). Limousin est pour nous synonyme de maçon.

Document de Limousin, parlant par respect. Voy. sous étr…

LINGE. — De par Callet, Linge à barbe pour linge à essuyer le rasoir n’est pas correct, il faut dire un frottoir. Quoique Littré donne linge à barbe avec cette acception, Callet a raison, car le linge à barbe, c’est proprement le linge dont on s’essuie le groin quand la barbe a été faite, et il est bon d’avoir un autre mot pour linge à essuyer le rasoir.

Reconnaître son linge, Le compter en l’examinant quand la buyandière le rapporte.

LINGE-SALE, s. m. — Garde-linge. Mecieu l’architecte, vous n’oublierez pas de me faire un linge-sale au-dessus des commodités ? — Oui, madame. — Avec une porte qu’on ouvrira en tirant la ficelle, pour que ça soye plus commode pour mettre le linge au sale ? — Oui, madame. L’expression mettre le linge au sale est singulière, car enfin on n’a pas besoin de le mettre au sale, il l’est déjà.

LINGER (SE), v. pr. — Se monter en linge. Une bôye qu’a de la pourvoyance doit se linger à fleur et à mesure qu’elle gagne quèques liards, pour ne pas se marier sans chemises.

LIQUERNE, s. f. — Lucarne. « Vous autres, farmé donc la liquerne ; i vient z’un air chanin que l’y gèle le cotivet. » (Ressit.)

LIRE, v. a. — Lire un dessin, terme de fabrique. Voy. liseur de dessins.

LISAGE, s, m., terme de fabrique. — Action de lire un dessin.

LISEUR. — Liseur de dessins. C’est lui qui est chargé de percer les cartons de la mécanique conformément à la mise en carte, de façon que les trous laissent pénétrer les aiguilles (voy. ce mot) voulues pour l’exécution du dessin.

LISSE, s. f., terme de canuserie. — C’est la réunion d’une série de mailles en soie suspendues à une règle de bois qu’on nomme lisseron, et dans lesquelles passent une partie des fils de la chaîne. L’ensemble des lisses constitue le remisse. En levant ou baissant, la lisse élève ou abaisse les fils qu’elle a reçus. — De l’italien liccia, de licium, trame.

LISSERONS, s. m. pl. — Lattes de bois léger auxquelles sont attachées, haut et bas, les mailles composant la lisse. Le poids du lisseron inférieur fait tenir la lisse tendue. Le lisseron supérieur est suspendu au carête.

LISSIEU, s. m. — Eau des cendres de lessive. Lissieu sec, Potasse. La Catherine est si tellement sale que le jour de ses noces, sa m’man a été obligée de la laver au lissieu, de la racine de la chavasse jusqu’à la planche des pieds. — La propreté du petit Champagne, quoi ! — De lirivum, forme de livivium.

LISTE, s. f. — Bande ou règle de bois mince et plate. Le lisseron est une liste. Il faut dire au menuisier de mettre une liste à cette porte. — Vieux haut allem. lista, bordure.

LIT. — Lit d’enfant, Placenta.

À plat de lit. Expression très pittoresque pour alité. Le pauvre Poulachon A croqué une pourmonique. Îl est à plat de lit depuis jeudi.

LITANIE. — Litanie des filles à marier devers chez nous :

Sainte Marie, je vous n’en prie ;
Sainte Colette, je suis toute prête ;
Sainte Perpétue, je n’en puis plus.

LITEAU, s. m. — Chez nous, Latte mince, longue et travaillée. Il faut clouer un liteau contre ce joint de fenêtre pour empêcher l’air de passer. Ce n’est pas le sens des dictionnaires pour lesquels le liteau paraît être une pièce de bois plus forte, telle qu’une longrine recevant le pied d’un briquetage.

LIVRE. — Livre de magasin, Carnet appartenant au canut, et sur lequel le fabricant enregistre au débit les matières livrées au canut, avec leur poids, et au crédit les pièces ou matières rendues. Ce carnet est tenu en double au magasin.

LIVRET, s. m. — Table de Pythagore, Glaudius, sais-tu ton livret ? — Oui, p’pa. — Combien font 2 fois 3 ? — P’pa, j’en suis pas encore là.

Le Grand livret, table de Pythagore jusqu’à 12 par 12. Autrefois, le Grand Messager boiteux de Berne avait le Grand livret sur la dernière page de la couverture. Heureusement que je n’ai eu à apprendre que le petit livret ; je ne me serais jamais tiré du grand. — De livret, petit livre.

LOCATIS, s. m. — Cheval qu’on loue d’un marchand de chevaux pour aller faire une promenade. Vois don ces chiques cavaliers ! Ça doit être des gones de la haute ! — Te vois pas que c’est de melachons sur de locatis à vingt sous l’heure ! — Le mot est fait par un savant sur locatus.

LOIN. — Être loin, être parti. J’arrive pour pincer ma canante avè le Maquia, mais le gone était déjà loin ! Il n’y a ici d’incorrect que la conduite de la canante, si j’entends que le gone était parti depuis un moment suffisant pour qu’il fût à une assez grande distance. Mais l’idée de distance ne figure pas ordinairement dans la pensée de celui qui emploie la locution. Le gone était à peine loin quand je suis arrivé, pour venait de partir, se dit très bien. Cette dérivation du sens de loin est curieuse, quoiqu’on sente qu’elle ait dû s’opérer tout naturellement.

LÔNE, s. f. — Bras de rivière où l’eau est dormante. Autrefois le Rhône formait, à la Guillotière et à la Mouche, des lônes adorables où se reflétaient les saules et les vourgines. C’est là qu’en sa jeunesse, Allemand venait peindre. — De lagona, forme de lacuna.

LONG, LONGUE, adj. — Lent, lente. Le Pierre est si long dans tout ce qu’il fait, qu’après trois ans de mariage, sa femme n’a pas encore mis au levain. Ce n’est que bien après être arrivé à l’âge d’homme que j’ai su que long en ce sens n’était pas français. Non seulement je l’avais écrit, mais je l’avais imprimé, et nous y sommes si accoutumés à Lyon que personne n’y avait vu une faute.

Long feu.Je suis allé à Marseille, mais je n’y ai pas fait long feu, Je n’y ai pas séjourné longtemps. Long feu, dans ce sens, ne s’emploie qu’avec la négative. Métaphore du fusil qui fait long feu, c’est-à-dire qui est « long » à partir.

LONGIN. — De notre Pierre de tout à l’heure, on dira : Son patron est saint Longin. Saint Longin est, oculairement, le patron des mollasses qui sont « longs » dans ce qu’ils font.

LONGIÔLE, s. f. — Se dit de toute chose longue et étroite. Quand j’ai vu devant moi c’te longiôle de route, la lasse m’a descendu dans les canilles… As-te vu la fenne à Picotin ? Quelle longiôle ! — Fait sur long, avec un suffixe ole, devenu ôle, sans autre raison apparente qu’une intention comique.

LONGUE-DAME, s. f. — Le médius (voyez sous cortiaurd).

LONGUEUR, s. f., terme de canuserie. — Partie de la chaîne entre le rouleau de derrière et le remisse.

De longueur. S’emploie pour très long. Le Jean-Marie a un nez de longueur ! Tournure très pittoresque.

LOQUET. — Avoir le loquet, Avoir le hoquet. Pour le faire passer, il n’est rien tel qu’une forte surprise. Une fois que je voyais une dame en proie à un violent loquet, je lui dis brusquement : Vous trompez votre mari ! Malheureusement, cela ne la surprit pas du tout, de sorte qu’elle continua à loqueter tant qu’il plut à Dieu. — De hoquet devenu l’hoquet par suppression de l’aspiration, puis le loquet, comme l’ierre est devenu lierre, le lierre.

LOQUET, s. m. — Organe de la Jacquard. Ce sont deux lames de fer, armées chacune d’un crochet, qui, en saisissant les tiges de fer de la lanterne, font accomplir au cylindre son quart de révolution. — Ces deux loquets sont reliés entre eux par une corde qui est elle-même fixée au battant. Le loquet supérieur fonctionne dans la marche normale. Le loquet inférieur fonctionne lorsqu’on marche à rebours pour défaire une portion d’étoffe mal faite.

LOQUETIÈRE, s. f. — Passe-partout, clef qui ouvre la porte d’entrée (ne pas confondre avec la clef d’allée). — De loquet, parce que, primitivement, la loquetière était la clef qui soulevait le loquet. Puis elle a été la clef ouvrant la serrure à pêne mobile, qui se ferme en la poussant, par opposition à la clef de la serrure à pêne dormant. Puis, comme il n’y a quasi plus de serrure sans demi-tour, le sens de loquetière s’est restreint à la clef de la porte extérieure. On trouve déjà loquetière au xive siècle.

Perdre sa loquetière. Sur ce fâcheux état d’âme, voy. clef. Pierre Dupont était superbe lorsque, légèrement en train, il rejetait se chevelure en arrière et entonnait sur le sublime air d’Orphée (« J’ai perdu mon Eurydice ») : J’ai perdu ma loquetière !!

LOUIS. — On n’est pas louis, on ne saurait plaire à tout le monde. Je m’en suis aperçu toute ma vie.

LOUP. — Je crois ben que la Fanchon a vu peter le loup, c’est-à-dire connaît l’amour. D’où vient cette bizarre idée ? Est-ce parce que les amoureux, se donnant rendez-vous dans les bois, courent fortune d’y rencontrer des loups et par conséquent de les voir, ou plutôt de les entendre se soulager ?

Beaucoup disent : Elle a vu peter le loup sur la pierre de bois. Cette addition ne me paraît qu’une forte bêtise. Dans mon enfance elle était inconnue. — Ajoutons cependant qu’au Gourguillon, nous disons couramment : Elle a vu peter le loup sur la pierre d’évier, expression qui ne manque pas de saveur.

Connu comme le loup blanc. Se dit d’une chose aussi nouvelle que la soupe à l’oignon. Pour que le proverbe soit exact, il faut qu’il y ait beaucoup de loups blancs. Je n’en ai pourtant jamais vu.

C’est aussi vrai comme il n’y a qu’un loup, c’est-à-dire c’est un mensonge.

Quand on parle du loup, on en voit la queue. Se dit lorsque l’on parle de quelqu’un et qu’il arrive inopinément.

Si vous voulez dompter le loup, mariez-le. Proverbe énergique pour indiquer que rien ne résiste à la force féminine. Un petit cheveu d’une femme a plus de force que cent chevaux, disait mon maître d’apprentissage. Un proverbe italien dit la même chose, mais trop crûment.

Des contes à tuer les loups à coups de bonnet, c’est-à-dire des contes si sots que les loups en seraient abrutis au point de pouvoir les tuer avec cette arme peu dangereuse ? Ou bien des contes où l’on tue les loups de cette façon ?

Loup de poivre, Colin-Maillard. Quelle singulière métaphore !

LOUPE, s. f. — 1. Argile, terre grasse, terre adhérente. Par extension toute matière fortement agglutinée. — Origine celtique : cornique loob, vase, limon.

2. Bras-neufs, fainéant, avec un sens très péjoratif. — Subst. verbal de louper.

LOUPER, v. n. — 1. Fainéanter, flâner. Sens très péjoratif. — Origine german. : norique lubbaz, « segniter volutari, » flâner ; anglais looby, nigaud, paresseux, pesant. Vieux franç. louper, se livrer à la boisson.

2. Abîmer ce que l’on façonne.

LOUVE, s. f., torme de construction. — Forte patte en fer, en forme de queue d’aronde, que l’on introduit dans un trou de louve, creusé en forme de cône dans une pierre de taille. La louve est ensuite serrée par deux coins de fer, et on soulève la pierre par un câble auquel est accrochée la louve. Plus le poids est lourd, plus la louve presse sur les coins. — La façon dont l’instrument serre est comparée à la morsure tenace d’une louve.

LOYER. — Autrelois l’on ne changeait pas de logement comme de chemise, et les familles se perpétuaient souvent dans le même appartement de père en fils. Lorsque, dans une maison d’ouvriers, un locataire avait payé son loyer pendant cinquante ans, l’usage était qu’il continuât d’habiter le même local sans rien payer jusqu’à sa mort. J’ai même vu appliquer l’usage au bout de quarante ans d’habitation.

LUC. — Adroit comme l’oiseau de saint Luc. Voy. adroit.

LUCE. — Bois de Sainte-Luce. Bois de Sainte-Lucie, palissandre. Lucie ou Luce, ce n’est pas une affaire.

LUISERNER, v. imp. — Il luiserne. Se dit lorsqu’il fait des échappées de soleil entre deux nuages. — De lucernare.

LUMIÈRE. — Faire lumière. N’est pas admis par les bureaux d’esprit. Voy. faire.

Éclairer la lumière. Voy. éclairer.

LUNE, s. f. — Lunaison. Humbert blâme l’emploi de lune en ce sens, par exemple dans la phrase : Il pleuvra toute cette lune, et il ajoute que « c’est une fauto générale dans le Midi ». — Lune signifiant Mois Lunaire, je ne vois pas en quoi son emploi dans cette circonstance serait incorrect. La phrase incriminée est égale à : « Il pleuvra tout ce mois lunaire. »

Étre dans ses lunes, Être de mauvaise humeur, avoir des lubies, des humeurs noires.

LUNÉ. — Du bois luné, Du bois coupé en bonne lune, d’après la croyance populaire que le choix du quartier de la lune, pour l’abattage des bois, excerce une grande influence sur leur conservation. On dit de même d’un enfant bien réussi, Un enfant bien luné, pour dire qu’il a été semé en bonne lune. On attribue à la lune bien d’autres influences, et, sur le Grand Messager boiteux de Berne, on lisait, à l’aide de signes figurés, à certains jours : « Bon pour se couper les ongles… » — « Bon pour se couper les cheveux, etc. » Nous avions même une édition sur laquelle on lisait : « Bon pour battre sa femme. »

Bois de lune, Bois volé de nuit.

LUS, s. m. — D’après Gras, on dit à Lyon gros lus, gros farceur. Je n’ai jamais entendu cette expression, qui a d’ailleurs des congénères en forézien et en provençal. Elle peut néanmoins exister. Il y a à Lyon des mots confinés dans certains milieux. — De lusare, forgé sur lusum.

LUSES, s. f. pl. — Pierres plates taillées servant à recouvrir les aqueducs, les murs de clôture, etc. — Du bas latin lausa.

Dauphiné, Ardèche et Midi disent lauses. (M. D.)

LUSTUCRU. — Nom amical et familier que l’on donne volontiers aux petits gones. Viens çà, Lustucru !

LUXURE, s. f. — Luxe. J’ai rencontré en rue Impériale une dame qui conduisait des chevaux de luxure. Elle doit être habituée à conduire les bêtes.

LYON. — Qui perd Lyon perd la raison.

Femme du Puy, homme de Lyon font bonne maison (Voy. femme).

Sais-tu lire ? — Non — Sais-tu nager ? — Je suis de Lyon ! Dicton dont les Lyonnais sont très fiers.

LYONNAIS. — Lyonnais, niais. C’est un proverbe inventé par nos voisins du Forez, du Dauphiné, de la Bresse, pour se venger de ceux que nous avons faits sur leur compte. — En Poitou, Lyonnais est synonyme de scieur de long.

LYONNAISE (LA). — C’est la Marseillaise de Lyon, qu’un grand poète anonyme a faite en 1848, et qu’on chantait avec enthousiasme. Elle rend l’esprit lyonnais tout entier dans sa pureté et dans sa bonhomie. Rien de plus amical, de plus pacifique, de moins sanguinaire que cette Marseillaise d’un nouveau genre, surtout lorsqu’elle est chantée avec un fort accent canut :

Aux armes, Ly-onnais !
Égalité z’et Paix !
Marchons, marchons, bons citoyens !
Amis republicains !