Le Livre pour toi/Je ne sais pas de chant plus suave

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LVII


Je ne sais pas de chant plus suave, de musique plus divine que les paroles d’amour qui montent de ton âme.

J’ai écouté le vent des jours, le vent des nuits, son cantique ou ses plaintes me transportaient. Je l’ai entendu gémir sur la ruine, délirer de joie dans la forêt, aux heures ravies du printemps et murmurer avec tendresse dans les noyers renaissants.

Mais je sais à présent que le vent ne pourrait tout dire.

J’ai écouté les cloches mélodieuses qui rient et se lamentent comme nos joies et nos douleurs, les cloches qui battent avec mon cœur et qui l’enlèvent sur leurs grandes ailes, et j’ai versé des larmes à les entendre.

Mais je sais maintenant que les cloches ne peuvent tout exprimer.

J’ai écouté l’eau inconsciente de la source réveillée, l’eau féroce des torrents éternels. J’ai souri au chant du flot mince qui va, sous les spirées, dérouler sa chaîne d’argent ; j’ai tremblé devant la colère des ondes brutales qui usent le roc et charrient la mort.

Mais je sais aujourd’hui les mots que l’eau ignore.

Et, tandis que tes mains réunies soutiennent ma tête charmée, c’est ta bouche adorée qui les dit lentement sur mes lèvres.

Ô Sylvius, il n’est pas de chant plus doux, de musique plus divine et je me sens mourir à t’écouter.