Le Pèlerin passionné (trad. Hugo)/« Jolie est ma bien-aimée, mais moins jolie que capricieuse »
Œuvres complètes de Shakespeare, Texte établi par François-Victor Hugo, Pagnerre, , XV : Sonnets – Poëmes – Testament (p. 306).
Jolie est ma bien-aimée, mais moins jolie que capricieuse ; douce comme une colombe, mais ni fidèle, ni digne de confiance ; plus brillante que le verre, mais, comme le verre, fragile ; plus molle que la cire, et pourtant, comme le fer, sujette à la rouille.
Pâle lis, embelli de nuances rosées ! En éclat nulle ne l’éclipse, nulle en fausseté !
Que de fois elle a joint ses lèvres aux miennes, proférant entre chaque baiser un serment d’amour ! Que de contes elle a forgés pour me plaire, redoutant mon amour, mais sans cesse en craignant la perte !
Pourtant, au milieu de toutes ces pures protestations, sa parole, ses serments, ses larmes, tout était dérisoire.
Elle a brûlé d’amour, comme la paille prend feu ; elle a brûlé l’amour, aussi vite que le feu brûle la paille. Elle a édifié l’amour, et pourtant elle en a dégradé l’édifice. Elle a fait vœu d’amour durable, et pourtant elle est tombée dans l’inconstance.
Était-ce là une amoureuse, ou une libertine ? Elle était mauvaise en ce qu’elle avait de meilleur, sans exceller en rien.