Le Pèlerin passionné (trad. Hugo)/« Si l’amour me rend parjure, comment puis-je jurer d’aimer ? »
Œuvres complètes de Shakespeare, Texte établi par François-Victor Hugo, Pagnerre, , XV : Sonnets – Poëmes – Testament (p. 307-308).
Si l’amour me rend parjure, comment puis-je jurer d’aimer ? Ah ! les serments ne sont valables qu’adressés à la beauté. Bien qu’à moi-même parjure, envers toi je serai constant. La pensée, chêne pour moi, devant toi plie comme un roseau.
L’étude, cessant de dévoyer, fait son livre de tes yeux qui recèlent toutes les jouissances que peut contenir l’art. Si la connaissance est le but, te connaître doit suffire. Bien savante est la langue qui sait bien te louer.
Bien ignorante est l’âme qui te voit sans être éblouie. Il suffit à ma gloire d’admirer tes mérites. L’éclair de Jupiter est dans ton regard ; sa foudre, dans ta voix qui, quand elle est sans colère, est musique et douce flamme.
Divine comme tu l’es, oh ! tu es sans pitié pour l’insolent qui chante les louanges du ciel dans une langue si terrestre !
1. Dans Peines d’amour perdues, ce poème est récité par Nathaniel, Acte IV, sc. ii.