Le Parnasse contemporain/1876/La Volupté et l’Amour

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Le Parnasse contemporainAlphonse Lemerre [Slatkine Reprints]III. 1876 (p. 327).



LA VOLUPTÉ ET L’AMOUR



Ô belle, dont le corps semble un vivant poëme,
Pourquoi m’ouvrir les bras, sans me dire : Je t’aime ?
Même à l’heure d’amour, contre ton sein pâmé
Tu ne me presses pas ainsi qu’un bien-aimé ;
Tu ne dis pas le mot envié des dieux même ;
Tu soupires : je meurs ; tu ne dis pas : Je t’aime !
Et pourtant ton œil darde un feu délicieux.
Tel un ange tombé qu’un songe emporte aux cieux,
Mais qui ne pourrait pas, courbé sous l’anathème,
Y proférer le mot angélique : Je t’aime !

Eh bien, reste muette, et, dans ta volupté,
Brûle comme une rose aux flammes de l’été,
Des baisers du soleil s’emplissant ivre et blême.

La rose ne dit rien ; le soleil dit : Je t’aime !