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Le Paysan et la paysane pervertis/Tome 1/27.me Lettre

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27.me) (Urſule, à ſes Père et Mère.

[Conme deja elle ſe-trouve bién à la Ville.]

1750.
14 octobre.


Mon très-chèr Père ét ma très-chère Mère :

Je vous écris ces lignes, pour vous presenter mes reſpects, ét pour vous remercier de la bonté que vous avez-eue de m’envoyer ici, où j’ai-trouvé une Dame aimable ét reſpectacle, qui m’a-prise en-amitié, ét qui aime bién-auſſi mon Frère-Edmond, qui eſt un bon-cœur, ét qui nous aime comme notre chère bonne-Mère lui a-recommandé de nous aimer, quand il ſerait à la Ville : ét comme elle nous recommandait à tous de ſonger à nous pouſſer tous les Uns les Autres, en-nous attirant où il ſerait, pour nous rendre ſervice, ét nous procurer ſes Connaiſſances, quand il en-aurait de bonnes, auſſi fait-il ; ét je puis bién-dire que ce n’eſt point à-cause de mon merite que l’aimable m.me Parangon m’aime, mais à-cause d’Edmond, qui ſe fait-aimer ét biénvenir de tout le monde par ſa douceur ét ſes bonnes-façons ; dont je ſouhaite que vous receviez le contentement ét la joie, mon très-chèr Père ét ma très-chère Mère, que Dieu-beniſſe, comme votre Fille ſouhaite que vous lui donniez votre heureuse benediction : ét je vous dirai qu’il y-a ici une bonne-Dame Canon, qui m’aime bién-auſſi, ét qui eſt la Tante de m.me Parangon, qui m’a-mise chés elle, où je ſuis fort-bién, avec deux autres Jeunes-demoiselles, en-attendant une Troisième, que je desire beaucoup, car c’eſt m.lle Panchette C★★, la Sœur de m.me Parangon, qui eſt jeune, comme le ſait bién ma bonne-chère Mère, car je crais qu’elle n’a que onze-ans ; ét c’eſt tantmieux ! car les deux Demoiselles d’ici ſont trop-ſpirituelles pour moi, ét il me-ſemble que je ſerai plus à mon aise, quand j’aurai la jolie petite Demoiselle Fanchette, pour causer ; car elle doit être bién-jolie, ſi elle tiént de ſa Sœur, ét bién-bonne ! ce qui me-ſera d’autant plus-agreable, que les deux Demoiselles, qui ſe-nomment m.lle Robin, ſ’en-vont-retourner chés leurs Parens, ét que je n’aurai plus que la Nouvelle ; ét je vous dirai, que mon Frére eſt-venu chés m.me Canon, ét que j’avais-entendu auparavant ſon arrivée qu’on ne parlait pas en-bién de m.lle Manon Paleſtine, ét que nous alons partir avec m.me Parangon pour Seignelais, où m.r Parangon veut qu’elle aille avec ſa Tante-Canon qui y-va vendre un bién, avant d’aler demeurer à Paris. Autre chose ne vous puis mander, mon Frère vous ayant-écrit mon arrivée ici, ét le pauvre petit frère Bertrand vous l’ayant-contée. Je ſuis avec une reſpectueuse ét filiale tendreſſe, très-chèr Père ét très-chère Mère,

Votre toute-obéiſſante Fille Urſule Rameau.

28.me) (Pierre à Edmond.

[Son changement commence à me-frapper.]

1750.
15 octobre.


Il n’a pas été en-être que j’aye-pu te-dire un