Le Petit Savoyard/À Madame de la Prade, née Guiraud

La bibliothèque libre.
Alphonse Lemerre, éditeur (p. i-ii).

À MADAME DE LA PRADE

NÉE GUIRAUD


Qui ne sait par cœur, madame, les vers que vous rééditez ? Qui n’a cherché jadis, en passant la frontière de Savoie, « le pauvre petit qui partait pour la France » ?

..........Chante, pauvre petit !
Chante, tant que la vie est pour toi moins amère ;
Enfant, prends ta marmotte et ton léger trousseau :
Répète, en cheminant, les chansons de ta mère,
Quand ta mère chantait autour de ton berceau.

Mais, voilà que depuis bientôt quarante ans nos vieilles frontières ont disparu, et la légende créée par votre père demeure vivante comme au jour où il la rimait.

Quelques-uns s’en affligent, d’autres s’en offensent, moi je m’en réjouis et remercie ceux qui si joliment a su dire la pauvreté honnête et l’amour de nos gens pour leur pays natal.

Voyez ce qu’il advient d’une « Savoyarde » trop ambitieuse. Petite cloche, elle carillonnerait joyeusement chez nous, tandis qu’elle est muette dans son beau clocher de Paris.

Bien sot, après cela, qui ne porterait gaiement la suie originelle dont ni Vaugelas, ni saint François de Sales, ni Joseph de Maistre n’ont pu nous débarbouiller.

… C’est pour vous obéir, madame, que j’ose écrire mon nom sur la marge de ce petit chef-d’œuvre. Chacun vous dira que le vôtre suffisait.

Mrs COSTA.
Paris, 8 novembre 1896.