Le Puits de la vérité/Musées et Bibliothèques

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MUSÉES ET BIBLIOTHÈQUES



Je ne suis partisan en rien des choses gratuites, et s’il devait y en avoir, je ne vois pas pourquoi ce serait le musée plutôt que la boulangerie. Si d’ailleurs on met des tourniquets à l’entrée des musées, pourquoi n’en mettrait-on pas à l’entrée des bibliothèques ? Il n’y a qu’une réponse. C’est que ce n’est pas l’usage et que, pour les musées, c’est, au contraire, l’usage, à l’étranger, de dépenser quelque monnaie pour être admis à contempler toiles et statues. Mais laissons les comparaisons et raisonnons selon l’esprit français. Y a-t-il à Paris un nombre appréciable de gens, en dehors des copistes et des vagabonds, qui ait besoin d’aller au Louvre tous les jours ou même plus d’une ou deux fois par semaine ? Je ne crois pas qu’on puisse raisonnablement le soutenir. Donc la gratuité du Louvre n’est pas une chose indispensable même pour ceux qui ne pourraient dépenser le prix, même minime, d’une entrée. Il suffit qu’il soit ouvert à tous un ou deux jours par semaine, par exemple le jeudi et le dimanche. Ce sont les jours où se promènent les familles pour lesquelles on peut trouver onéreux un paiement quelconque. On a parlé de réserver un jour cher pour les gens du monde, mais cela ferait bien des catégories et d’ailleurs le Louvre est bien loin d’être un endroit à la mode. Je doute qu’il suffise de faire savoir que le vendredi on ne peut pas à moins de vingt francs contempler le panneau était la Joconde pour faire affluer la gent mondaine. Il ne faut pas s’exagérer la bêtise humaine. Elle a des limites. Pour concilier le sentimentalisme avec le bon sens, il semble que cinquante centimes ou un franc d’entrée, cinq jours par semaine, et deux jours gratuits conviendraient très bien aux intérêts du musée, en même temps qu’à ceux du public. Il y aurait lieu d’exclure les copistes, les jours gratuits, et de ne pas les exempter de la taxe les autres jours. Les copistes sont le fléau du Louvre.


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