Le Retour de l’hiver

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LE RETOUR DE L’HIVER



Faisons nos adieux à la verdure
Qui favorisa nos gais loisirs,
Et charmons le deuil de la nature
Par l’attrait de mille autres plaisirs.
Le plaisir ne fond-il pas les glace
Du farouche hiver et des vieux ans.

Et partout où paraissent les grâces,
Ne retrouve-t-on pas le printemps ?
Faisons nos adieux, etc.

L’arbre jaunissant va de ses feuilles
Nous retirer l’ombrage léger ;
Mais, Suzon, la grappe que tu cueilles
Saura bien nous en dédommager.
Faisons nos adieux, etc.

Sous le domino de la folie,
Le dieu malin, cachant son carquois,
Attaque et soumet la plus jolie :
Que fait-il de plus au fond du bois ?
Faisons nos adieux, etc.

Lise, sur la neige éblouissante,
Offre-t-elle à nos yeux moins d’appas !
Et là, comme sur l’herbe naissante.
Ne peut-elle pas faire Un faux pas !
Faisons nos adieux, etc.

Un joli sein, quand le schall s’entr’ouvre,
Charme en été les yeux de chacun :
Mais la palatine qui le couvre
Ne s’écarte en hiver que pour un
Faisons nos adieux, etc.

Tandis qu’Orgon, oubliant sa femme,
Pleure au coin du feu l’argent qu’il perd,
Un lieutenant fait rire madame
Pour égayer son quartier d’hiver.
Faisons nos adieux, etc


En hiver, sous la voûte éthérée,
La foudre jamais ne murmura ;
Et qui craint le souffle de Borée,
Retrouve Zéphire à l’Opéra.
Faisons nos adieux, etc.

Quittons Cérés pour Iphigénie
Le garçon de ferme pour Pasquin,
Les saules pleureurs pour Mélanie,
Et les mérinos pour Arlequin.
Faisons nos adieux, etc.

Si les fruits dont l’été nous régale
Sont ravis à nos friands transports,
Pour nous consoler, amis, Cancale
De son sein nous ouvre les trésors.
Faisons nos adieux, etc.

Non, jamais vents, grêle, pluie et neige
N’auront le droit de nous alarmer,
Tant que nous aurons le privilège
De chanter, et de boire et d’aimer.

Faisons nos adieux à la verdure
Qui favorisa nos gais loisirs,
Et charmons le deuil de la nature
Par l’attrait de mille autres plaisirs.