Le Sanglot de la Terre/Intarissablement

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Le Sanglot de la Terre
Le Sanglot de la TerreMercure de FranceI. Poésies (p. 55).


INTARISSABLEMENT


(Sonnet)


Dire qu’au fond des cieux n’habite nul Songeur,
Dire que par l’espace où sans fin l’or ruisselle,
De chaque atome monte une voix solennelle,
Cherchant dans l’azur noir à réveiller un cœur !

Dire qu’on ne sait rien ! et que tout hurle en chœur
Et que pourtant malgré l’angoisse universelle !
Le Temps qui va roulant les siècles pêle-mêle,
Sans mémoire, éternel et grave travailleur,

Charriant sans retour engloutir dans ses ondes
Les cendres des martyrs, les cités et les mondes,
Le Temps, universel et calme écoulement,

Le Temps qui ne connaît ni son but, ni sa source,
Mais rencontrant toujours des soleils dans sa course,
Tombe de l’urne bleue intarissablement.