Le Secret de Frédéric Marcinel/03

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Éditeur Veuve Larcier (p. 37-48).


III


Les paroles surprenantes qu’avait prononcées le Président Louvrier, ce matin d’hiver où les magistrats attendaient en la chambre du Conseil, l’ouverture de l’audience correctionnelle, étaient restées sans réponse. Jacquart, que ce propos déconcertait, surtout dans la bouche du Président, avait regardé celui-ci d’un air surpris et n’avait point osé l’interroger. Quant à Louvrier, il s’était senti troublé d’une sorte de pudeur morale, mal à l’aise, presque honteux, comme s’il eût involontairement et brusquement découvert quelque partie de l’intimité secrète de son être. Il y eut un moment de silence contraint, pendant lequel tous deux s’efforcèrent de chasser comme indifférente et importune la pensée qui allait si fortement marquer dans leur vie. Seul, Adonis ne perçut rien de ces palpitations de l’invisible. Puis, on parla des affaires en cours, des cancans du Palais et la conversation roula légèrement son flot de banalités coutumières.

Pendant des jours, pendant des semaines, le souvenir de cette minute singulière impressionna le juge Jacquard. Il y avait là un aspect nouveau des choses, sur lequel son attention n’avait jamais été appelée. Et à mesure qu’il y réfléchissait, ce point de vue lui semblait de plus en plus important. L’idée nouvelle n’avait point chez lui à vaincre les résistances qu’elle avait rencontrées dans le cerveau du président Louvrier : Jacquard était jeune, sensible et d’intellectualité libre. Il ne s’était point habitué encore à placer au-dessus de toute discussion quelques notions conventionnelles, à considérer l’ordre établi comme sacro-saint, l’organisation actuelle comme nécessaire, la Magistrature comme intangible. Ayant beaucoup d’esprit naturel, il n’avait point l’esprit de corps. Son œil perspicace et observateur voyait dans l’activité judiciaire bien des tares et des imperfections et parfois sa verve caustique se plaisait à souligner les travers de ses collègues et les ridicules des avocats en des plaisanteries fines et nuancées dont les cerveaux lourds des auditeurs n’appréciaient point toujours la grâce complexe. Ses remarques narquoises l’étaient sans méchanceté, car son ironie savait se borner à donner à sa conversation un agréable piquant et son âme était sans fiel. Sous ses dehors railleurs, il cachait un cœur tendre, presque faible. Il n’aimait point punir. Il rendait la justice correctionnelle parce qu’il le fallait bien, qu’il n’y avait aucune raison plausible pour se refuser à faire ce que faisaient les autres magistrats, à participer à une œuvre dont nul, autour de lui, n’avait mis en doute la légitimité et l’utilité. Mais, encore qu’il eût été, comme tant d’autres, dressé par degrés à étouffer en lui ses répugnances et ses scrupules, qu’il se fût accoutumé par des suppléances, par les expériences en petit que sont les audiences de police, condamner lui restait désagréable.

Dans les premiers temps, lorsqu’une instruction d’une affaire délicate avait abouti, après des débats fiévreux, à un châtiment terrible édicté en trois phrases par le Président, cela voilait d’ombre et d’inquiétudes le restant de sa journée. Il lui arrivait de se réveiller la nuit pour se demander s’il ne s’était pas trompé. Il lui arrivait d’accourir oppressé au greffe pour refeuilleter le dossier et vérifier tel ou tel détail. Il lui arrivait de frémir en songeant combien la manière dont se poursuivent, dans le mystère, les instructions préparatoires, présente pour le prévenu qui comparaît et pour le magistrat qui juge, peu de garanties contre l’erreur. Ah ! combien la justice civile était plus sûre et plus paisible, avec ses dossiers communiqués, ses plaidoiries complètes, son délibéré sérieux et son jugement appréciant un à un tous les arguments du débat.

Puis, insensiblement, la répétition des mêmes actes, la succession monotone des affaires sans qu’il se produisît jamais (à sa connaissance du moins) les catastrophes redoutées, endormit ses scrupules. Il accepta docilement la routine et condamna tout comme un autre. Mais il restait indulgent. Il avait une tendance à l’acquittement dans les affaires douteuses et abusait de la condamnation conditionnelle. Le Président le trouvait faible, alors que Jacquard l’était surtout vis-à-vis de lui et d’Adonis, avec lesquels il essayait parfois de discuter, mais auxquels il cédait toujours, dans un désir de paix et d’entente cordiale.

On comprendra à présent quel trouble pouvait apporter, dans une telle mentalité, la réflexion du Président Louvrier. Les défaillances et les gaffes de certains magistrats, les erreurs possibles, les punitions imméritées, tout cela n’avait paru, pour Jacquard, que des accidents isolés, des « espèces » dont rien de général ne se pouvait déduire. Et jusqu’ici, il n’avait point mis en doute que malgré ces défauts et ces lacunes, imperfections inévitables aux entreprises des hommes, le majestueux ensemble de la Justice répressive ne fût excellent et nécessaire.

Il avait, sans doute, à l’Université suivi avec les autres étudiants des cours sur la Philosophie du Droit. Mais les discours du professeur lui avaient paru des verbalités creuses. De semblables dissertations n’ont vraiment de valeur que lorsqu’elles sont la figuration dans l’abstrait de réalités perçues, comprises et senties dans la vie. À l’époque de l’Université, les adolescents sont trop loin encore de ces réalités pour pouvoir en saisir la philosophie ; et plus tard, lorsqu’ils se trouvent confrontés avec elle, il ne reste en général, dans le souvenir de l’homme qui juge, que le souvenir vague que la conclusion des théories enseignées est la justification de ce qui existe, et absorbés dans les tâches quotidiennes, bien peu ont le loisir de réétudier le pourquoi de ces tâches et la force de méditer à nouveau sur les directions essentielles de leur labeur.

Or, voici que la réflexion du président Louvrier dépassait soudainement les contingences, posait une interrogation grave, non plus quant à tel ou tel jugement, mais quant à l’efficacité de toutes les décisions qu’ils avaient rendues ou rendraient, lui, Jacquard et Adonis.

Jacquard en restait perplexe et désorienté. Pourtant, la justesse de l’observation lui semblait évidente. À quoi bon punir, si on n’améliorait point ? À quoi bon frapper, si le coup n’était point bienfaisant ? Punir pour punir, cela paraissait à cet esprit cultivé une sacrilège usurpation du pouvoir des forces supérieures et obscures qui mènent le monde, un stupide et brutal mouvement réflexe de vengeance de la part d’une société rendant le mal pour le mal, et d’autant moins excusable en sa violence qu’elle a le plus souvent une très lourde part de responsabilité dans les origines du mal qu’elle prétend châtier. Tout ce formidable mécanisme, broyeur d’énergies humaines, dévorateur de liberté, d’honneur et de fortune, n’avait donc de sérieuse raison d’être que s’il corrigeait les coupables.

Les corrigeait-il ? Qu’était demain pour ceux dont il entrevoyait les silhouettes furtives sur les bancs des accusés ? Quelles étaient, pour ceux-là et pour les autres, les conséquences sociales de la peine ? Voilà ce que Jacquard voulut savoir. Il eût fallu, pour être dûment renseigné, suivre les condamnés dans la vie, car il était indispensable, pour apprécier en son entier le problème, de mesurer l’influence d’un acte, non seulement sur celui qui en est l’objet, mais sur tous ceux sur lesquels la complication nécessaire de la société le répercute. Le juge Jacquard n’y pensa même pas : il passa, sans la voir encore, à côté de la forte et simple vérité qui avait illuminé la conscience de Frédéric Marcinel.

Il demanda aux livres des réponses et scruta les statistiques. Celles-ci sont bien rarement démonstratives : on en cite souvent les conclusions à l’étourdie, car elles n’ont vraiment de sens que si l’on s’est préalablement entendu de façon claire sur les définitions qu’elles comportent et la manière dont on établira les calculs. Jacquard trouva donc un grand fatras de chiffres qui lui parurent propres à étayer des thèses contradictoires, et des diagrammes ingénieux dans lesquels il ne put admirer que la patience de leurs auteurs. Néanmoins, quelques faits émergeaient et l’on pouvait tenir pour certaines les propositions suivantes : la criminalité augmentait ; — l’emprisonnement paraissait d’une efficacité contestable ; — la récidive s’affirmait inquiétante, — elle était manifeste surtout pour les condamnés de 16 à 21 ans.

Ces constatations n’apportèrent point la paix intérieure au magistrat. Quand il se fut bien convaincu de l’insuffisance, sinon de la totale banqueroute, des systèmes actuels de répression, il s’éprit d’idées réformatrices. Il admira l’ampleur de vues avec laquelle un ministre belge, M. Jules Le Jeune, avait envisagé les trois aspects fondamentaux de la question : adoucissement vis-à-vis des amendables, aggravation vis-à-vis des incorrigibles, protection de l’enfance abandonnée ou coupable. Certes, c’était bien là le triple problème et il déplorait que la myopie des politiciens n’eût point permis au ministre de le résoudre.

… Un jour, les trois juges délibéraient en chambre du Conseil. J’entends qu’Adonis toussotait, l’air hébété, dans un fauteuil et que Louvrier et Jacquard discutaient au sujet d’un prévenu, contre lequel la plus grave présomption était ses fâcheux antécédents.

Le Président était assis, face à la fenêtre. Le jour, qui éclairait fortement sa figure, en dessinait les lignes austères, les nombreuses rides dans le visage glabre, accentuait la blancheur des cheveux aussi blancs que le ruban d’argent de sa toque, lui donnait du prestige et de la dureté. Jacquard, debout, allant et venant, l’observait avec intérêt. Son regard monta, derrière le Président, jusqu’au mur où était appendue une estampe colossale de Xavier Mellery. On connaît la composition harmonieuse et grave par laquelle ce noble artiste consacra la solennité d’une réunion internationale organisée par la Fédération des Avocats. Reproduite à des milliers d’exemplaires, elle fut distribuée aux divers Palais de Justice et, faute d’emplacement adéquat, elle avait échoué dans la solitude de cette chambre du Conseil. Jacquard ne put s’empêcher de sourire du contraste entre la beauté souple de l’adolescent qui s’apprête à délaisser la charrue pacifique pour prendre des mains de la Force sociale le glaive de la Justice, et la pauvre vieille figure caricaturale du Président. Une ironie flotta, fugace, en ses yeux malicieux. En vérité, l’Art et la Réalité étaient par trop loin l’un de l’autre. Le magistrat qu’il respectait lui parut un vieux singe grimaçant, feuilletant avec un autoritarisme imbécile les grimoires du dossier.

Et tandis qu’Adonis, de plus en plus hébété, vagissait puérilement, que Louvrier exposait, de façon lucide et docte, les circonstances de l’affaire, Jacquard s’abandonnait au charme de son enthousiasme pour l’affiche auguste. Quel rythme et quelle sérénité dans ces figures ! Elles avaient la majesté tranquille des statues antiques. De la force et de la bonté en descendaient intarissablement. Au centre de la composition, une Déesse, assise sous une arcade, semblait bénir la Famille humaine. Dans sa dextre, elle tenait l’épée, appuyée sur les tablettes de la loi, où une de ses filles dociles inscrivait : La plus noble force sociale est le droit ; son bras gauche s’étendait doucement prometteur de protection vers une jeune mère et deux enfants, tandis qu’elle s’apprêtait à baiser au front le jeune homme, beau comme un jeune athlète vaillant, à qui elle semblait assurer la paix du travail et la garantie des faibles. Dans les reliefs de l’arcade, on pouvait lire, d’un côté : La base du droit est la fraternité ; de l’autre : Sans bonté la Justice forfait à sa mission.

Jacquard sourit de nouveau et, courageusement, répondit au Président qui réclamait son avis :

— Ma foi, Monsieur le Président, cela me paraît bien peu établi. Je n’ai jamais eu beaucoup de confiance dans le raisonnement que nous ont apporté les témoins : ce doit être le prévenu, parce que personne d’autre n’est entré dans la boutique, après lui. Qu’en savent-ils ?

— De ce qu’ils savent, ils concluent que le coupable c’est le prévenu. Ça me paraît très sérieux, d’autant plus que cet homme a déjà été condamné pour vol.

— Hum ! fit Jacquard, Res judicata pro veritate…, c’est entendu. Mais qu’est-ce que nous connaissons de cette première condamnation ? À la supposer même hors de critique, n’est-elle pas un des éléments qui ont contribué à faire la conviction des témoins ? D’ailleurs, permettez-moi une question, Monsieur le Président, cet homme venait de purger sa peine, n’est-ce pas ?

— C’est exact ; il y avait quelques jours seulement qu’il sortait de prison ; c’est moi-même qui, l’an passé, le condamnai. Je l’ai bien reconnu.

— Alors, demanda Jacquard avec un nouvel éclair de malice dans les yeux, vous avez bien peu de confiance dans les conséquences de votre décision, Monsieur le Président ?

— ?

— Certes, vous l’avez condamné à trois mois de prison, parce que vous estimiez que c’était là la durée nécessaire pour l’amendement du malfaiteur. Vous supposiez donc qu’à l’expiration de sa peine l’homme serait amendé, fortifié par le traitement moral qui lui avait été appliqué, prémuni contre toute rechute plus qu’un homme normal. Si vous avez bien apprécié les choses il y a un an, il doit donc y avoir une très forte probabilité actuelle contre la culpabilité. Comment se fait-il qu’au contraire, ce soit une probabilité « pour » que je découvre en votre raisonnement ?

Le Président regarda son interlocuteur bien en face, afin de s’assurer s’il parlait sérieusement. Et, devant le flegme à l’affût de Jacquard, il chercha une réponse victorieuse, n’en trouva point et répondit piteusement :

— Il est tout naturel qu’un voleur vole, me semble-t-il.

— Eh ! non, Monsieur le Président, il n’est pas naturel qu’un voleur, convenablement puni, se remette à voler. S’il vole de nouveau, c’est que le châtiment a été mal conçu ou mal appliqué. Et voilà, sur le vif, l’erreur agaçante de nos substituts quand ils invoquent les antécédents judiciaires : le fait de la condamnation antérieure prouve contre le prévenu, je le veux bien, mais le fait de l’accomplissement de la peine devrait prouver en sa faveur, à moins que vous n’admettiez que les peines, au lieu d’amender, corrompent. Chaque fois que vous comptez comme présomption de culpabilité le fait d’avoir été en prison, vous confessez que votre système répressif engendre des criminels. Et vous êtes si bien convaincu de l’inefficacité, je dirai plus, de la nuisance des peines que vous prononcez, que vous éclateriez de rire devant l’avocat qui invoquerait en faveur de son client une récente sortie de prison !

— C’est bien spécieux tout cela !

— Je ne le crois pas, et je vous défie de me montrer en quoi je me trompe. J’ai beaucoup songé à cette question de la récidive et j’en suis à penser que chaque fois que nous condamnons un récidiviste, c’est surtout notre système pénal, notre vie de tous les jours, que nous condamnons. Tenez, quand vous reprochiez tantôt à cet individu ses condamnations, vous me faisiez songer à un médecin qui reprocherait à un de ses malades de ne pas avoir été guéri par les drogues qu’il lui aurait prescrites. Croyez-moi, Monsieur le Président, lorsqu’un malade n’est point guéri, c’est qu’il est incurable, que le médecin est inhabile ou le remède mauvais — je ne vois pas d’autres hypothèses et toutes trois me font croire que nous sommes pareils à des semeurs aux mains vides, pour ne pas dire pis.

— Mais c’est extravagant, tout cela, mon cher ami. Vous n’empêcherez jamais la récidive !

— C’est malheureusement certain, Monsieur le Président. Et j’ajouterai même que si à la rigueur on peut espérer améliorer le système des peines et l’intelligence des juges, à cet égard maintes tendances fécondes s’indiquent tous les jours, nos méditations s’arrêtent effrayées devant les incorrigibles. La récidive a, sans doute, des causes sociales et le progrès social pourra l’atténuer, mais elle a surtout des causes naturelles vis-à-vis desquelles nous sommes bien désarmés. Il en est qui vont au crime et y retombent sous des impulsions presque fatales ; ce sont ceux que la civilisation ne parvient pas à s’assimiler, les uns parce qu’ils sont en retard, d’autres peut-être parce qu’ils sont en avance, d’autres enfin parce qu’ils sont en dehors, relativement à l’évolution de l’humanité. Ces êtres en révolte permanente contre nos conceptions et nos habitudes, il conviendrait d’abord de les connaître et de les discerner avec soin. Le procédé actuel est empirique et hasardeux. La récidive légale est infiniment trop restreinte en sa définition. Elle n’atteint point des gens qui sont des délinquants professionnels. D’autre part, les juges saisis du second fait n’étant point admis à s’inquiéter des conditions du premier peuvent se trouver obligés de classer comme récidiviste un occasionnel malchanceux.

Je suis convaincu qu’on ne fera rien d’utile, rien de sérieux, aussi longtemps qu’on n’aura point considéré la récidive comme un phénomène spécial, devant être régi, établi et jugé selon des règles spéciales.

Je voudrais, par exemple, que lorsqu’un individu aurait encouru un nombre de condamnations suffisant pour le faire présumer incorrigible, il fût déféré à une Cour de justice spécialement chargée d’examiner son cas. Cette juridiction serait composée de manière à présenter un maximum de garanties ; je voudrais voir son personnel incessamment renouvelé, choisi parmi les illustrations du barreau et de la magistrature. J’y voudrais voir des médecins et des sociologues. Elle aurait les pouvoirs d’enquête les plus étendus, avec la contradiction permanente ; elle pourrait scruter les antécédents, remettre en question les condamnations antérieures, se faire apporter les dossiers ; et elle serait investie de la redoutable mission d’apprécier et de décider, en tenant compte de toutes les circonstances de la vie de l’inculpé, s’il convient, oui ou non, de le séparer de la société des hommes. Dans l’affirmative, les insociables seraient envoyés dans des asiles spéciaux pour une durée indéterminée. Je leur laisserais à des intervalles éloignés, tous les cinq ans par exemple, la faculté de ressaisir la Cour de leur cause et de réclamer leur réintégration dans l’existence normale. À ceux qu’effrayerait cette mise au tombeau de l’incarcération perpétuelle, j’offrirais la liberté dans les colonies, le service dans certaines troupes d’outre-mer, la possibilité d’utiliser sous d’autres climats, dans d’autres conditions sociales, des énergies pernicieuses ici, peut-être salutaires là-bas…

— Ah ! Jacquard, vous nous offrez de rétablir l’exil, le bannissement. Et vous appelez ça un progrès ? Pourquoi pas la confiscation et la torture ?

— Vous plaisantez, Monsieur le Président. Vous savez clairement que ce que je propose est bien différent du vieil exil ! Qu’importe les mots, après tout ! Ce qu’il faut, et chaque jour la nécessité est plus urgente, c’est se borner à organiser la défense sociale vis-à-vis des individus anormaux inassimilables, renoncer une bonne fois à toute contrainte, à toute violence qui ne soit pas impérieusement et évidemment réclamée par cette défense ; il faut cesser de Punir !…

— Alors, nous acquittons ? fit le président Louvier, en indiquant le dossier qui avait été l’occasion de l’entretien, avec un sourire de bienveillante indulgence pour la passion que Jacquard avait mise à exposer ses idées.

Adonis, qui s’était assoupi, se réveilla et répéta machinalement :

— Acquittons…