Le dernier des Trencavels, Tome 3/Livre vingt-troisième

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Traduction par Henri Reboul.
Tenon (Tome 3p. 115-149).


LIVRE VINGT-TROISIÈME.

Les Pyrénées.


Revenons à Cécile : depuis le départ d’Adon, elle ne cessait de prier pour lui, s’entretenait avec son image, et écrivait chaque jour les pensées que lui inspirait son amour.

La nouvelle qu’Adon n’était plus un simple chevalier, mais le fils d’un prince, lui causait plus de crainte que de joie, non qu’elle eût moins de confiance dans l’amour de Trencavel, mais une inquiétude vague se mêlait à toutes ses méditations sur l’avenir.

Ermessinde parut frappée de cet événement, et son âme fut en proie à mille soucis : ils redoublèrent lorsqu’elle apprit, quelques jours après, que Foulques, évêque de Toulouse, était arrivé à Foix. Sa santé était affaiblie depuis long-temps ; la langueur la saisit, et à sa suite entrèrent dans son esprit toutes les terreurs qui peuvent assiéger une conscience timorée. Elle invoqua le secours de Philibert, lui confia le secret de Béatrix, et lui demanda si Dieu pourrait pardonner à une femme qui s’était faite mère à la place d’une autre, pour soustraire un enfant aux recherches de son père. — Le bon chapelain fit de vains efforts pour la rassurer, s’appuyant sur l’innocence de ses intentions et sur la miséricorde divine. Il ne parvint à mettre un peu de calme dans ses pensées qu’en lui promettant de révéler à Foulques ce qu’elle se reprochait si amèrement.

Philibert n’hésita point à accepter cette mission ; il y voyait un devoir à remplir, et se livrait à la pieuse espérance de ramener l’évêque de Toulouse à des sentimens de charité, et de paix, par l’intérêt de sa fille et des nouveaux liens qui l’attachaient à Trencavel.

Il alla trouver Foulques dans les murs de Foix, l’informa de la conservation de Cécile et des regrets d’Ermessinde.

Foulques se souvenait à peine qu’il eût été père ; ce qui ne fut jamais dans son cœur était presqu’effacé de sa mémoire. Son premier mouvement le porta à n’envisager que l’intérêt de la cause ecclésiastique : sa pensée se dirigea ensuite vers les avantages personnels qu’il pouvait retirer d’un événement inouï. Bientôt il jugea utile et convenable, soit comme père, soit comme évêque, de se rendre maître de celle qui lui devait la vie. Il adressa au pasteur de Bompas des paroles mielleuses, propres à combler de joie le bon vieillard. Il parut n’être animé que du désir de réconcilier avec l’Église celui que la providence lui avait donné pour gendre, mais voulut, sans tarder davantage, venir auprès de sa fille, et lui rendre un père long-temps, perdu pour elle.

Le comte de Foix l’avait laissé libre et muni d’un sauf-conduit ; ses compagnons et lui suivirent Philibert et reçurent l’hospitalité chez ce digne pasteur. Ils trouvèrent à leur arrivée Ermessinde mourante.

Avant de perdre connaissance, elle avait dit à Cécile ; « Sachez que vous n’êtes point ma fille ; Dieu me punit de vous avoir soustraite à votre père : quand vous lui serez rendue, obtenez de lui le pardon de ma faute. »

Sa bouche s’était ensuite fermée, et elle ne donnait plus que de faibles signes de vie, qui cessèrent aussitôt que ses yeux à demi éteints furent fixés sur le visage de Foulques.

Cécile fondait en larmes ; elle se jeta aux genoux de Philibert : « Ma mère. » lui dit-elle, « vient de m’annoncer que je n’étais point sa fille. Quel est donc ce père à qui je dois être rendue ? »

« C’est moi, » dit Foulques d’un ton sévère. — Cécile tourna ses regards vers l’évêque et tomba évanouie comme si la foudre l’avait frappée.

Quand elle revint à elle-même, elle se trouva dans sa chambre, avec les femmes de la maison qui lui prodiguaient leurs soins.

L’une d’elles alla avertir Philibert. Le pasteur vint adresser à Cécile des paroles douces et consolantes, et tâcha de la préparer aux explications qu’elle attendait de lui. « Le ciel, » dit-il, « ne vous abandonnera point ; il vous prive d’une mère qui ne vous a pas donné le jour, mais en vous faisant retrouver un père véritable : ce père a renoncé à la vie mondaine et non aux sentimens qui lui font souhaiter le bonheur de ses enfans. » Philibert fit alors à Cécile le récit qu’elle désirait et craignait tout à-la-fois. Elle apprit ce que fut sa mère et quel était son père ; elle sut que son frère aîné vivait dans un cloître, et que, le plus jeune était encore errant dans les pays habités par les Musulmans. Ses larmes coulaient en abondance, et ses sanglots interrompirent souvent la voix du pasteur.

« Pourquoi, » lui dit-elle, « mon père n’est-il pas auprès de moi ? Je sais qu’il est l’ennemi des comtes de Toulouse ; voudra-t-il reconnaître dans sa fille l’épouse de Trencavel ? » Foulques, qui entendait tout sans être vu, entra en ce moment : « Ma fille, » dit-il d’une voix qu’il s’efforçait d’attendrir, « ne craignez point votre père : les nœuds qui nous unissent sont les premiers de tous, et rien ne peut les rompre. Puisque Dieu a permis que vous soyez mariée au fils d’un ennemi de l’Église, j’aime à me persuader qu’il a voulu se servir de vous pour sauver ce jeune prince des malheurs qui ont affligé la vie de son père. Vous m’aiderez à le ramener dans les sentiers de la loi et de l’obéissance chrétienne, et je vous aiderai à le réconcilier avec l’Église, qui seule peut maintenir les princes dans leur puissance mondaine, et leur ouvrir les portes du ciel quand ils ont vécu. Reposez-vous sur cette idée consolante ; calmez l’émotion qui vous agite, et priez Dieu qu’il vienne à notre secours. Notre conduite doit être désormais dirigée par ses inspirations. Qu’il nous éclaire et soyons obéissans. »

Cécile demeura plusieurs jours livrée à mille idées confuses qui se succédaient dans son esprit. Son unique ressource était de prier, ; elle invoquait surtout la Vierge mère de Dieu, qui avait reçu ses premiers vœux, et en qui elle voyait la dispensatrice des grâces et des miséricordes. Elle priait plus pour Trencavel que pour elle-même : elle demandait la conservation de son époux, et son salut avant toutes choses. Quand elle eut repris ses forces. Foulques lui dit ; « Ma fille, celle qui vous a servi de mère n’est plus ; l’époux à qui vous vous êtes donnée, sans vous connaître ni l’un, ni l’autre, marche en ce moment sous les bannières de l’hérésie : sa présence vous est prohibée ; mon état ne permet point que vous restiez auprès de moi. J’ai choisi pour votre séjour une maison sainte, où des filles pieuses ont consacré leur vie aux exercices de la pénitence. Vous serez auprès d’elles, non pour imiter en tout leur exemple, puisque vous êtes dans les liens du mariage, mais pour vivre sans tache, au milieu du troupeau du Seigneur, jusqu’au moment où votre époux aura mérité de vous recevoir des mains de l’Église. »

Tout était préparé pour le voyage, et, dès le lendemain, Cécile, accompagnée de Foulques et de ses affidés, fut conduite sur le chemin qui mène à Mirepoix, à travers les montagnes.

Le monastère de Ste.-Marie-de-Prouille, choisi par Foulques, avait été fondé à la suite d’une donation d’Ermengarde-Godolin, et de Sanche Gasc, son mari, qui s’étaient voués l’un et l’autre à la vie monastique(1).

L’Espagnol Dominique, et Foulques lui-même, ses fondateurs, y avaient réuni, auprès d’une communauté de frères prêcheurs, une maison de retraite, pour les filles des chevaliers qui voulaient se consacrer à Dieu. Celles des bourgeois n’y étaient point admises à faire vœu d’humilité et de pauvreté. Quinze ans ne s’étaient pas écoulés depuis que la première pierre de l’édifice avait été posée, et déjà sa magnificence annonçait la richesse des offrandes qui lui avaient été faites.

Foulques et ses compagnons avaient franchi l’arête des montagnes qui séparent la vallée de l’Ariège de celle du Lectouire ; ils avaient dépassé Lavelanet et s’approchaient de Mirepoix, lorsqu’ils voient venir vers eux un cavalier fort empressé, et pourtant mal assis sur la mule dont il serre les flancs.

Plus il approche, et plus Foulques croît le reconnaître. Enfin, il n’a plus de doute, et allant au-devant de lui : « Est-ce vous, » dit-il, « Sanche Gasc ? Quel motif vous fait marcher avec tant de hâte ? » Sanche s’arrête, descend de sa monture et embrasse les pieds de l’évêque. « Seigneur, » lui dit-il, « j’allais à Montferrier informer le maréchal Guy de Lévis de nos pertes et de nos malheurs. »

« Quels malheurs ? » dit Foulques. « Pouvez-vous ignorer, » répondit Sanche, « la défaite de l’armée de la foi devant Toulouse, la fuite d’Amalric, le triomphe des comtes hérétiques ? »

L’évêque dissimula sa douleur. « La volonté de Dieu soit faite, » dit-il, « sa cause ne sera jamais abandonnée. Donnez-moi, seulement, des nouvelles de Prouille. »

« J’en étais absent depuis quelques jours, » dit Sanche ; « le prieur ; m’avait envoyé avec d’autres-frères pour prendre possession de l’église de St.-Martin de Limoux. Vous savez que depuis long-temps cette possession nous est disputée par l’abbé et les religieux de St.-Hilaire de Carcassonne. À peine y étions-nous établis, qu’une troupe de paysans est venue nous attaquer.

On a vu des religieux de St.-Hilaire à leur tête. Les assaillans ont franchi les murs ; ils ont menacé notre vie ; deux de nos frères ont été frappés avec violence, la fuite a sauvé les autres de ce cruel traitement(2). À notre retour, nous avons trouvé la population des campagnes de Monréal et de Fanjeaux en grande fermentation. Les hérétiques faisaient publiquement leurs prédications et tenaient leurs assemblées. Les paysans, occupés à la moisson, refusaient d’acquitter la dîme. Un grand miracle, que Dieu nous a accordé, n’a pu les ramener à l’obéissance. Pendant une journée entière les moissonneurs voisins du monastère, qui nous bravaient et nous défiaient, ont vu couler du sang des épis de blé, à mesure qu’ils les coupaient. Cette leçon a été perdue pour des pêcheurs endurcis(3), qui ont feint de l’ignorer. On a annoncé ensuite l’arrivée prochaine des routiers ; des tourbillons de flammes et de fumée ont apparu du côté de Bram et de Castelnau ; l’abbesse s’est renfermée à Fanjeaux avec les sœurs. Les religieux se sont dispersés, et je me suis hâté de venir trouver le seigneur maréchal pour qu’il apporte quelque remède à nos maux. »

« Allez, » lui dit Foulques, « ne perdez pas de temps, et dites au maréchal que l’espérance ne doit jamais abandonner les vrais fidèles. »

Sanche remonta, en chancelant, sur sa mule, et, après s’y être mis en équilibre, pressa ses flancs et s’éloigna. En arrivant à Mirepoix, Foulques apprit que deux députés étaient arrivés de Rome, et se rendaient en Bigorre. Il envoya Réginald auprès d’eux pour s’informer de l’objet de leur mission, et des nouveaux ordres émanés du St.-Siège.

Bientôt il vit les députés venir à lui avec le moine de Citeaux. Ils lui remirent une lettre du pape Honorius, relative à l’objet de leur mission, qu’ils se hâtèrent de lui expliquer.

« Nous sommes, » dirent-ils, « deux prud’hommes choisis, dans le pays d’Arréaigues de la vallée de Lavedan, Un fléau déplorable afflige nos habitans depuis six années. Notre terre ne porte plus de fruits, ni femme enfant, ni vache veau, ni jument poulain, ni bétail d’aucun poil. La justice divine nous punit d’avoir recouru à des voies diaboliques pour nous délivrer de nos ennemis. C’est l’abbé de St.-Savin(4) qui nous a induits à ce péché, et qui s’est chargé lui-même du soin de l’accomplir. Il s’est placé sur un sureau, et, après avoir lu quelques lignes d’un livre soustrait à Salomon par l’entremise de l’esprit malin, ce chapelain a fait tomber sur les gens de la vallée d’Aspe, nos ennemis et dévastateurs de nos hameaux, un maléfice puissant, qui les a conduits à la mort, en desséchant leurs chairs et consumant leur sang. Nous avons connu trop tard l’énormité de notre faute, et, c’est après en avoir, pendant long-temps, supporté la douloureuse punition, que nous avons pris le parti de déposer aux pieds du saint père, nos regrets et nos larmes, et de lui demander son absolution. Tel a été l’objet de notre voyage. Le pape a eu égard, à notre repentir, et, voulant nous octroyer notre demande, c’est à vous-même qu’il a adressé ses instructions et ses ordres, conjointement avec les évêques de Tarbes et de Lescar. Ce n’est point le hasard, mais plutôt la bonté divine qui a voulu nous faire rencontrer, en cheminant, celui de qui, désormais, nous attendons notre salut. Nous vous supplions, révérendissime père, de ne mettre aucun retard, à notre délivrance. »

Foulques reçût la lettre pontificale des députés, et les congédia avec des paroles affectueuses et rassurantes.

Dès qu’ils furent retirés, le templier Ferreol dit à Foulques : « Vous pouvez accomplir à la fois la mission qui vous est déléguée par le St-Siège et le dessein, qui vous conduisait à Prouille. Le comté de Bigorre est à l’abri des incursions et des tentatives de nos ennemis. La comtesse Pétronille, qui le gouverne, n’aura pas oublié qu’elle a été l’épouse d’un fils, de Montfort ; les seuls enfans qu’elle ait obtenus de tous ses maris(5) sont issus du sang d’un héros catholique. D’ailleurs les vallées profondes et les hautes montagnes de cette contrée offrent des abris presque ignorés, où la guerre pénètre difficilement. Une gorge étroite, creusée, entre deux montagnes inaccessibles, conduit au bassin de Luz, où le monastère des filles de Ste.-Marie est bâti sous la protection d’un fort château occupé par nôtre milice. La maison des templiers est à peu de distance, au centre du bourg qui nous appartient ainsi que toute la vallée de Barèges. Votre fille trouvera en ce lieu un asile assuré, et vous pourrez vaquer sans inquiétude aux fonctions de votre ministère, en laissant à nos frères le soin de préserver votre enfant de tout mal. »

Foulques goûta ce conseil, et, dès le lendemain, il prit avec son cortège et les deux prud’hommes la route du Lavedan.

Ayant passé l’Ariège au dessous de Pamiers, ils suivirent le chemin qui conduit à St.-Girons, à-travers les montagnes où l’Arise s’engouffre dans une caverne, et renaît en quittant sa marche souterraine auprès du mas d’Azil.

Ils franchirent les eaux du Salat à St.-Lizier et celles de la Garonne au-dessous de Monrejau, près du lieu où les torrens, qui sont descendus par plusieurs gorges des Pyrénées, roulant des cailloux et couverts, d’écume, se réunissent en retardant leur cours dans un lit sinueux, où leur surface unie commence à réfléchir l’azur des cieux et les teintes variées des arbres plantés sur leurs rives.

Les voyageurs traversèrent ensuite le plateau verdoyant, quoique stérile, qui sépare les eaux de la Garonne de celles de l’Adour. Ils vinrent se reposer dans l’abbaye de l’Escale-Dieu, construite au fond d’un vallon, dont les pentes sont tapissées d’une éternelle forêt ; séjour voué aux prières et à la pénitence, qu’ont embelli les comtes de Bigorre.

Arrivés au bord de l’Adour, ils virent cette riante Bagnères où les nymphes Oréades entretiennent des feux souterrains pour échauffer le torrent de leurs eaux bienfaisantes. La fille d’Esculape y a placé son temple au milieu des prairies émaillées de fleurs, des coteaux ondoyans, et des bosquets touffus. Ces vallons bocagers empruntent un charme nouveau de l’effrayante bordure formée derrière eux par les noires forêts de sapins, les rochers élancés, et les dômes gigantesques parsemés de neiges éternelles.

Cécile gardait un profond silence, toutes ses pensées étaient dirigées vers Trencavel. Elle méditait sans cesse sur les moyens de lui faire connaître sa situation, et n’était distraite de sa rêverie, que par les grands et magiques tableaux qui venaient surprendre ses regards. Ils lui rappelaient le pèlerinage d’Appi ; elle éprouvait le désir de revoir toutes ces merveilles avec celui sans lequel sa vie était incomplète.

Avant de quitter Bagnères, le templier dit à Foulques : « Il me semble que les prud’hommes du Lavedan n’ont rien de mieux à faire que de se rendre directement à Tarbes, et de-là à Lescar, pour achever leur mission auprès des deux évêques, et leur proposer de se réunir au monastère de St.-Savin. Les uns et les autres peuvent y être rendus dans trois jours. Quant à nous, en suivant la route la plus directe, nous aurons franchi, avant le déclin du soleil, le passage qui sépare la vallée de l’Adour de celle de Barèges, et vous pourrez attendre à Luz, auprès de votre fille, que vos collègues de Tarbes et de Lescar soient arrivés à St.-Savin. »

L’avis du templier fut adopté ; les prud’hommes s’agenouillèrent devant l’évêque de Toulouse, implorèrent de nouveau son assistance et reçurent sa bénédiction.

Ils se dirigèrent vers Tarbes, en suivant la rive gauche de l’Adour sur un chemin ombragé par les chênes et les ormes, et entrecoupé de hameaux.

Le templier conduisit ses compagnons vers les sources de ce fleuve, à-travers les prairies et les vergers de Campan et de Beaudéan, qui s’élèvent du fond de la vallée sur les penchans des collines. — Au-dessus des premières hauteurs se succèdent par gradins inégaux des montagnes couvertes de pâturages et couronnées de forêts jusqu’aux murailles nues et déchirées du grand Pic du Midi.

Les voyageurs eurent bientôt dépassé cette contrée riante et bocagère ; ils ne virent plus, autour d’eux que des rochers escarpés, les uns arides, les autres revêtus d’une mousse humectée, et nourrissant dans leurs fentes les racines des hêtres ou des sapins, dont les lichens barbus surchargeaient les branches.

Dans cette région sauvage, les torrens se précipitent en cascades depuis les amas de neiges où ils prennent naissance, jusques dans les sombres forêts où leurs eaux semblent s’engouffrer, puis s’en échappent en entraînant les débris des arbres déracinés.

Le sentier qui est tracé entre les rochers se prolonge sur les pentes rapides de la forêt qui le couvre d’une ombre impénétrable.

En retrouvant la lumière du jour, on ne voit-plus autour de soi qu’une pelouse verte, variée par quelques arbustes dont les fleurs imitent les couleurs et les formes de la rose(6). De nombreux troupeaux de brebis errent dans ces pâturages élevés sous la garde des chiens et des enfans. Les humbles cabanes des pâtres sont formées de quelques assises de pierres et de gazon, entassées sans équerre et sans ciment. Auprès d’elles un ruisseau est conduit avec art dans un canal recouvert par des dalles d’une roche fissile. C’est là que le lait des brebis, rafraîchi par l’eau toujours nouvelle, se sépare d’une crème épaisse et parfumée qui, à la fin du jour, est introduite dans des outres et convertie en beurre.

Le lapis de verdure où paissent les troupeaux s’étend jusqu’au plateau du Tourmalet, qui termine la vallée entre la masse des rochers pyramidaux d’Espade et le dôme majestueux du Pic du Midi. Deux rameaux de l’Adour s’échappent vers le nord des flancs entr’ouverts de ces montagnes, et sur leurs pentes opposées, glissent les eaux du Bastan dans le vallon de Barèges. Du haut du plateau, le spectateur voit avec surprise sous ses pieds les escarpemens, les abîmes qu’il a franchis ; et derrière l’amas des montagnes qu’il a traversées, la plaine se montre à ses yeux comme une mer couverte de fumée. Quelquefois les nuages, s’élevant du fond des ravins, recouvrent les rochers et les forêts remplissent toutes les cavités ne laissent apercevoir que des sommets entourés de cet océan vaporeux et semblent séparer de la terre le voyageur étonné, pour le ravir au ciel, dont l’azur est devenu plus éclatant.

Le templier enseignait à ses compagnons les noms des montagnes et des vallées. Il en parlait sans émotion, comme d’un objet rendu familier par l’habitude. Le moine de Citeaux voyait tout d’un œil insensible et hébété. Cécile admirait soupirait et se taisait, mais le vieux Foulques ne pouvait se soustraire au mouvement d’enthousiasme que ranimait dans son âme ce magnifique spectacle. Il sentait sa verve se rallumer les souvenirs de sa jeunesse venaient l’assaillir, et lui faisaient chercher involontairement sa lyre de trouveur. Il oubliait dans l’élan de ses nouvelles pensées les calculs de l’ambition les soins de l’avarice les fumées de l’orgueil et les conseils impitoyables de la politique.

Une descente dont la rapidité était ménagée par les contours et les replis du sentier conduisit les voyageurs sur la prairie inclinée où coule le Bastan. Ils y arrivèrent devant la gorge aride d’Escoubous, terminée au midi par une immense terrasse de roche cristalline formée de plusieurs gradins spacieux et couronnée par les sommets aigus de Néouvieille, dont les glaces et les neiges distillent sans cesse une eau limpide, qui parcourt douze lacs avant de tomber au fond de la vallée.

Ils s’arrêtèrent et prirent quelque repos à l’hospice élevé par les templiers(7), auprès d’une caverne qui vomit avec une eau brûlante des vapeurs chargées de soufre. Cette eau, retenue sous des voûtes artificielles, y dépose son limon et sa chaleur superflue. Elle est ensuite employée à guérir et purifier les malades souillés par la lèpre ; à cicatriser les ulcères et à fermer les plaies dont le démon de la guerre afflige les habitans de ces montagnes. On a vu souvent les eaux de cette caverne produire les mêmes merveilles qu’on ne saurait obtenir ailleurs sans l’invocation des saints, l’attouchement des reliques et l’intervention des hommes de Dieu.

Guiraud de Salivo(8), procureur de la milice des templiers de la vallée, était alors à l’hospice. Instruit par son confrère, il accueillit l’évêque de Toulouse avec tous les égards dûs à son rang, feignit de ne pas voir le moine de Citeaux, s’inclina profondément devant Cécile, et, en se relevant, ne put regarder sans quelque trouble ce visage charmant, coloré par la pudeur. Il offrit à Foulques de lui servir de guide, et le conduisit au monastère de Ste.-Marie, sous le couvert que forment à la rive gauche du Bastan les branchages entrelacés des peupliers et des ormes.

Guiraud fit avertir l’abbesse, lui présenta l’évêque et sa fille, et se retira avec son confrère et le moine, non sans jeter un regard curieux sur la silencieuse Cécile.

Foulques instruisit l’abbesse du motif qui l’avait, conduit dans cette solitude éloignée. Il demanda un asile pour sa fille, non pour la consacrer à la vie religieuse, mais pour la préserver des dangers de la vie mondaine jusqu’au moment où sa destinée serait fixée sans retour.

L’abbesse reçut Cécile des mains de son père avec tous les signes d’une tendresse maternelle. La fille de Foulques se livra sans peine, et presque sans regrets, à une gardienne de son sexe. Après le voyage qu’elle venait d’achever, elle éprouvait quelque contentement à ne plus se voir entourée par des hommes qui n’étaient point les amis de Trencavel.

L’évêque et ses compagnons furent ensuite hébergés dans le couvent, ou plutôt dans le château des templiers de Luz ; car l’église, le cloître et la retraite de ces religieux-guerriers, étaient enfermés dans une enceinte de fortes murailles, flanquées de tourelles et couronnées de crénaux.

Foulques sentit en se séparant de Cécile un serrement de cœur auquel il ne s’attendait point. Ses pensées prenaient depuis quelques jours une direction nouvelle. Les désastres de l’armée sacerdotale lui avaient inspiré du découragement : la présence de son enfant faisait renaître, par momens, quelques étincelles de l’amour paternel. L’aspect des montagnes, et l’air qu’on respire dans les régions supérieures de l’atmosphère, avaient préparé son âme aux impressions que donne la nature ; enfin les suggestions flatteuses de l’ambition lui faisaient trouver quelque charme à l’élévation de sa fille au rang de princesse. Il se disait que Trencavel, devenu son fils, serait le soutien de l’Église, et qu’on pouvait, sans aucun blâme, déserter la cause des Montfort puisque eux-mêmes étaient prêts à l’abandonner. Ensuite il méditait sur les moyens de cimenter la puissance de celui qui s’était fait son gendre, en l’arrachant au joug de l’hérésie. Plein de ces idées, il avait conçu et abandonné divers projets, et se détermina enfin à se rendre lui-même auprès de Trencavel. Dans ses adieux à Cécile, il lui tint le langage le plus tendre, lui promit de consacrer tous ses soins à l’accomplissement des vœux qu’elle avait formés, et fit renaître en elle l’espérance d’être bientôt réunie à l’époux de son choix.

Cependant les évêques de Tarbes et de Lescar étaient arrivés dans le Lavedan. L’un des prud’hommes vint lui-même en informer Foulques, qui se mit aussitôt en marche pour le lieu du rendez-vous. Il quitta les prairies du bassin de Luz pour entrer dans une gorge étroite au fond de laquelle les eaux du Gave roulent avec fracas, retenues et brisées par les rochers qui obstruent leur passage.

Un sentier taillé sur les saillies du rocher serpente le long des talus inégaux et sinueux des hautes murailles qui resserrent le torrent. Cette échelle pierreuse se replie en montant, et conduit le voyageur à une corniche élevée, qui lui dérobe la vue des eaux dont il entend le murmure ; le sentier descend ensuite lentement jusqu’au fond de l’abîme, auprès des cascades bruyantes et des flots écumeux qu’il faut franchir, pour passer à l’autre rive, sur un pont rustique formé de tiges de sapin mal ajustées.

Après avoir marché pendant deux heures dans ce défilé, Foulques vit tout-à-coup les parois de la montagne s’écarter, et le Gave, suspendant la vitesse de ses eaux, pénétrer dans un vaste bassin dont le sol inégal, entremêlé de plaines et de coteaux, de prairies et de vergers, est bordé d’une enceinte de hautes collines émaillées par les teintes diverses de la verdure des pâturages et de celle des forêts. De nombreux villages sont parsemés sur ces pelouses inclinées. Quelques masses de rochers isolés s’élèvent du fond du bassin ; elles montrent au-dessus des touffes d’arbres leurs plate-formes bordées de murailles crénelées et dominées par des châteaux hérissés de tours. Vers le couchant, une immense forêt se prolonge en amphithéâtre sur les gradins d’une haute colline adossée aux montagnes.

Des roches en saillie, qui interrompent les pentes doucement inclinées des collines supérieures, servent de base à plusieurs chapelles et à des oratoires rustiques. Du sein de la forêt le clocher de St.-Savin élance sa pointe aiguë au-dessus des cimes des chênes et des noyers.

Le prud’homme fit remarquer à Foulques le monastère où il devait trouver ses collègues. « Vous n’y verrez point, » lui dit-il, « le coupable abbé, qui a fait notre malheur : il avait, depuis deux ans, voué le reste de sa vie à la pénitence ; mais il est retombé dans son péché, il y a quelques mois, et une maladie mortelle l’a surpris conversant avec le démon. C’est en vain que les religieux ont réuni leurs prières et réclamé celles de tous nos villageois.

« Pendant trois jours les sons de la cloche ont sollicité le concours de tous les fidèles à implorer la miséricorde divine, le malheureux abbé n’a pu recouvrer la parole, ni le mouvement. Les démons tenaient sa voix et ses mains enchaînées, et, se jouant des exorcismes, ils réclamaient impérieusement l’exécution du pacte par lequel l’abbé s’était donné à eux. Enfin, sur le déclin du jour, on a vu Satan s’introduire par la fenêtre entrouverte, sous la forme d’une grande chauve-souris, voltiger quelque temps autour du flambeau qui éclairait les derniers regards du moribond, et, se plaçant ensuite au-dessus de son chevet, s’envoler rapidement, emportant avec lui l’âme du défunt sur ses ailes membraneuses(9). »

Foulques se plaisait à contempler les beautés de cet Eden des Pyrénées, la richesse du sol, la variété du paysage, l’éclat de la verdure, la multitude des habitations, l’étendue des forêts et des pâturages. Ce tableau enchanteur était rehaussé par le contraste de la bordure rocheuse, hérissée de pics et de crêtes inaccessibles, dont les ouvertures laissaient entrevoir les glaciers du Mont-Perdu, et des autres sommets qui séparent la France de l’Espagne.

Après avoir passé le torrent dont les eaux descendent de Vignemale, à travers le vallon de Cauteretz, il entra dans une longue avenue de noyers, qui, s’élevant par divers contours sur le penchant de la colline, conduit aux portes du monastère de St.-Savin.

Il y trouva ses collègues, ainsi que les gens de la vallée qui avaient amené leurs bestiaux, et, réunis auprès du temple, adressaient au ciel leurs prières.

Les trois prélats se hâtèrent de leur faire connaître les ordres du St.-Siège : « Il vous est prescrit, » dirent-ils, « de choisir parmi vous dix hommes de sainte vie, et de les envoyer vers monseigneur, St.-Jacques en Galice ; ils y feront chanter quatre messes d’évêques, dix messes d’abbés avec crosses, et cent messes à prêtres, ou frères. Vous acquitterez chaque année, et à perpétuité, entre les mains du messager d’Aspe, le jour et fête de St.-Michel de septembre, et avant que l’étoile paraisse, les sommes dont le tarif a été réglé pour chacun de vos villages. À ce prix, la paix sera établie irrévocablement entre vous et les habitans d’Aspe, et celui des deux partis qui la rompra encourra la malédiction du St.-Père. »

Une acclamation unanime annonça l’acceptation des conditions imposées.

Alors l’évêque de Tarbes, comme diocésain, se montra revêtu de ses habits pontificaux et prononça du haut de la chaire la formule d’absolution, dans laquelle il embrassa les terres, gens, bestiaux et autres choses du Lavedan.

Le service divin fut ensuite célébré. Les prières des habitans étaient souvent interrompues par les larmes du regret et de la reconnaissance.

On fit avec largesse la distribution du pain bénit, et on la renouvela plusieurs fois, afin que chaque villageois pût en réserver une partie pour ses bestiaux, à qui la fécondité venait d’être rendue(10).

Dès que la cérémonie fut achevée, Foulques, préoccupé de ses nouveaux projets, fit les préparatifs de son départ. Le lendemain il se sépara de ses collègues, et se rendit à Lourdes, d’où il vint à Bagnères pour reprendre la route qu’il avait suivie en partant de Mirepoix.

Avant d’entrer dans les terres du comte de Foix, il jugea prudent de ne point se faire connaître, et se joignant à St.-Girons avec une troupe de marchands qui allaient du Couserans à Carcassonne, il prit soin de se revêtir d’habits semblables aux leurs.

Les marchands avaient dépassé Monréal et n’étaient qu’à une lieue de Carcassonne, lorsqu’ils virent de loin deux hommes fuyant en toute hâte, et poursuivis à coups de pierres par des femmes et des enfans.

Les fugitifs vinrent se réfugier entre les jambes des chevaux des voyageurs. « Prenez pitié de nous, » dit l’un d’eux, « nous sommes des malheureux israëlites que le peuple de Carcassonne se croit en droit de poursuivre et lapider. C’est une coutume établie dans cette ville que chaque année l’évêque monte en chaire pour exhorter les catholiques à nous maltraiter, puis il les bénit en leur donnant la permission de nous attaquer et d’abattre nos maisons à coups de pierres(11) pendant la durée de deux semaines. Nous étions entrés à Carcassonne ignorant cette cruelle coutume ; ce sont les cris de ces forcenés et les souffrances de nos frères qui nous en ont instruits. Tout notre crime est d’être fidèles à la religion de nos ancêtres. »

La présence des marchands ralentit la poursuite des habitans de Carcassonne ; les deux juifs se jetèrent dans un bois voisin et disparurent, Les voyageurs entrèrent dans la ville avec la troupe ameutée ; ils passèrent devant une maison assaillie par la populace, et dont les fenêtres étaient déjà brisées du choc des cailloux lancés par les assiégeans. En ce moment, un héraut fit entendre la volonté du prince et de l’évêque qui ordonnaient au peuple de laisser en paix les israëlites, et les mettaient sous la protection de la loi commune.

On apprit ensuite que les juifs avaient racheté par un tribut la peine qui leur était infligée.

Raimbaud avait négocié cet accommodement ; une somme considérable fut versée dans le trésor du vicomte. L’évêque en reçut une moindre, et les juifs s’assujettirent à payer une redevance annuelle.

L’évêque, assisté de son chapitre, révoqua la permission d’insulter les juifs, et menaça d’excommunier ceux qui s’opiniâtreraient à les poursuivre.


NOTES
DU LIVRE VINGT-TROISIÈME.
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(1) La fondation du monastère de Prouille date de l’année 1207. La donation de Sanche Gasc et de sa femme est du mois d’août de cette année. Dominique, après la mort de l’évêque d’Osma, et le départ des missionnaires de l’ordre de Citeaux, étant resté presque seul, avait établi sa demeure auprès de Fanjaux. Il réunit à Prouille les filles de gentilshommes pauvres qu’il avait soustraites aux instructions des femmes hérétiques et qui s’étaient déterminées par ses exhortations à embrasser la vie monastique avec la clôture perpétuelle.

Hist. de Langued., t. 3, p. 148.

(2) Ces détails sont conformes à l’histoire et concordent assez bien avec la chronologie ; ils appartiennent à l’année 1222.

Hist. de Langued., t. 3, p. 329.

(3) Ce fait raconté par le moine de Vaucernay a été conservé par Fleuri.

Hist. ecclés. I. 76, §. 17.

(4) Voici une nouvelle preuve que l’âge de cet écrit est postérieur au treizième siècle. Cette histoire de sortilèges est tirée presque textuellement d’un acte du premier juin 1348, qui se trouve dans l’ouvrage intitulé : Lous privileiges franquises etc., imprimé à Pau, par Dupoux, en 1694, et dont M. Palassou a inséré la traduction dans son essai sur la minéralogie des Pyrénées, Paris, 1784, in-4o, p. 81. L’acte est intitulé : Contrat de la paix faite entre les vallées d’Aspe et de Lavedan, par l’ordre du pape qui avait absous la terre, les habitans et les bestiaux du Lavedan, du péché commis par l’abbé de St.-Savin, en faisant mourir par art magique grand nombre d’habitans d’Aspe, pour les courses et ravages qu’ils faisaient en Lavedan. En punition duquel péché la terre, ni les femmes, ni les bestiaux de Lavedan n’avaient porté aucun fruit durant six années. Ce qu’il y a de vraiment miraculeux dans cette affaire, c’est, sans contredit, l’excessive crédulité et l’aveuglement obstiné des habitans du Lavedan, à se croire pendant six années ensorcelés. Ce fait, attesté officiellement et qui appartient au quatorzième siècle, fait voir que le trouveur n’a rien exagéré en peignant la barbarie du treizième.

(5) Pétronille, comtesse de Bigorre, fut fiancée, en 1192, à Gaston, vicomte de Béarn, qu’elle épousa en 1196.

En 1215, elle épousa don Nugnès Sanche, comte de Cerdagne. Simon de Montfort parvint à faire annuler ce mariage, et à substituer à Nugnès Sanche, Guy son second fils. Pétronille en eut deux filles. Après la mort de Guy, elle épousa en quatrièmes noces Aimar de Rançon et ensuite Gozon de Marras, seigneur de Cognac. Elle eut une fille de ce Gozon et lui survécut, mais ne se remaria plus ; elle mourut, en 1251, au monastère de l’Escale-Dieu.

Voy. l’art de vérifier les dates. Chronol. des
comtes de Bigorre.

(6) Rhododendrum ferrugineum, plante alpine très-commune aux Pyrénées.

(7) Les templiers avaient un monastère à Luz et un hospice à Gavarnie. Mais aucune tradition ne leur attribue un établissement à Barège, dont les sources n’ont commencé à être fréquentées par les malades que dans le dix-septième siècle.

(8) On trouve un templier de ce nom commandeur à Pézenas en 1170.

Hist. de Langued., t. 3, p. 25.

Cette date fait présumer que celui dont il est ici question a pu être son neveu.

(9) La mort de l’abbé de St.-Savin n’est point mentionnée dans l’acte cité à la note 4.

(10) Cette cérémonie de la bénédiction des bestiaux et de leur participation au pain béni s’est conservée jusqu’à notre temps dans quelques communes, et je l’ai vue en usage dans l’ancienne Bourgogne.

(11) En 1160, le vicomte de Béziers reçut une somme considérable des juifs de Béziers pour l’abolition de cette cruelle coutume. Le jour des rameaux, l’évêque faisait un discours au peuple pour l’exhorter à tirer vengeance des juifs qui avaient crucifié J.-C. Il leur donnait permission de les attaquer, et d’abattre leurs maisons à coups de pierres. Cette permission s’étendait depuis la première heure du samedi avant les rameaux, jusqu’à la dernière heure du samedi après Pâques. Guillaume, évêque de Béziers, consentit avec son chapitre à l’abolition de cette coutume par acte du 2 mai 1160 ; et menaça d’excommunier ceux qui voudraient en user. Les juifs lui payèrent 200 sous melgoriens, et s’engagèrent à compter, tous les ans, quatre livres en monnaie de Malgueil pour les ornemens de la cathédrale.

Voy. Hist. de Langued., t. 2, p. 485.


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