Le fort et le château Saint-Louis (Québec)/17

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Texte établi par Librairie Beauchemin, Limitée (p. 233-244).


APPENDICE




petite étude historique sur les
chevaux canadiens




Le premier cheval qui ait galopé sur la terre canadienne fut débarqué à Québec le 25 juin 1647. La Compagnie des Habitants l’avait fait venir pour en faire cadeau au gouverneur, le chevalier de Montmagny, et ce fut un spectacle absolument nouveau pour le petit poste de Québec (dont les rues venaient d’être tracées, mais qui ne portait pas encore le nom de ville) que de voir le gouverneur chevauchant le long des sentiers, comme les « gendarmes » de Gustave Nadaud.

Les « habitants » de ce temps-là avaient de l’esprit comme ceux d’aujourd’hui : ils jugeaient qu’un chevalier sans cheval, cela n’avait pas le sens commun.

M. de Montmagny partit de Québec l’année suivante. Que devint son cheval ? Il n’est guère probable qu’on ait songé à lui faire traverser de nouveau l’Océan. Cependant il est à peu près certain qu’il n’était pas à Québec en 1650, puisque les Hurons qui y descendirent cette même année, pour se fixer dans le voisinage, semblaient n’avoir jamais vu d’animal de cette espèce lorsqu’arrivèrent les premiers chevaux envoyés par le roi de France, quinze ans plus tard.

Peut-être le pauvre animal est-il mort de nostalgie peu de temps après son arrivée. Il était seul ici de son espèce, et devait s’ennuyer à mourir. Mettons-nous un peu à sa place…

De quelle race était-il ? Si on avait une photographie de sa tête ou d’une de ses pattes, nos savants zootechniciens de Québec ou de Montréal auraient bien vite fait de reconstituer tout l’individu ; mais l’intéressante bête vécut trop tôt dans un monde trop jeune : lorsqu’elle allait brouter l’herbe des prés, à l’ombre des grands ormes des Ursulines ou près du jardin de Guillaume Couillard ; lorsqu’elle allait s’abreuver au ruisseau qui coulait en face du terrain donné aux Jésuites par la compagnie des Cent Associés, Daguerre n’était pas né encore, et les Notman et les Livernois n’étaient pas même soupçonnés.

L’année 1647 — qui vit le premier blanc pénétrer jusqu’au lac Saint-Jean — fut pour Québec une année remarquable. La résidence des Jésuites, le château Saint-Louis et l’église paroissiale — plus tard la cathédrale de Québec — furent commencés cette année-là. Mais ce fut en 1648 que se firent les principaux travaux de maçonnerie de ces édifices, et il y a lieu de croire que le cheval de M. de Montmagny eut à peiner plus d’une fois dans le voisinage de la rue des Carrières à cette occasion. M’est avis qu’il ne s’est fait aucun travail important dans Québec en ces temps-là sans que le noble animal y ait mit la main, je veux dire la patte.

Le 16 juillet 1665, on débarqua à Québec douze chevaux envoyés par le roi de France. Il y avait à bord du navire qui les transportait un pauvre petit diable qui devait fournir une carrière aventureuse dans la flibusterie. Il se nommait Jean Doublet, et il a laissé des mémoires qui ont été imprimés il y a quelques années (en 1883). D’après son journal, le roi de France avait envoyé vingt chevaux en Canada. Huit seraient donc morts pendant la traversée, puisqu’il n’en arriva que douze à Québec. Ces premiers chevaux — tirés des écuries royales — firent le voyage de la vieille à la nouvelle France en brillante compagnie. Voici comment s’exprime Doublet :

« Nous trouvâmes ce navire extrêmement embarrassé par 18 cavales et 2 étalons, des Harnois du Roi, et dont les foins pour les nourrir occupaient toutes les places. Dans l’entrepont étaient quatre-vingts filles d’honneur pour être mariées à notre arrivée à Québec, et puis nos 70 travaillants avec équipage, formant une arche de Noé. La traversée fut assez heureuse, quoiqu’elle durât trois mois et dix jours pour arriver au dit Québec. »

Cette même année 1665 vit arriver dans la Nouvelle-France M. de Tracy, M. de Courcelles, l’intendant Talon et huit compagnies du régiment de Carignan-Salières, dont plusieurs officiers devaient être d’excellents cavaliers. Les Hurons campés près du fort Saint-Louis furent émerveillés du faste déployé par les nouveaux venus, et surtout de voir les orignaux de France, comme ils appelaient les chevaux, si admirablement dressés et se pliant si volontiers aux fantaisies de ceux qui les montaient. Des vaches et des moutons furent aussi débarqués à Québec (où il y en avait déjà) dans l’été de 1665, et il se trouva dès lors dans la colonie autant de bêtes et de gens qu’il en fallait pour que le pays fut considéré comme tout à fait civilisé.

Tous ces animaux se propagèrent avec une rapidité incroyable.

La Mère Marie de l’Incarnation écrivait, en 1667 : « Sa Majesté a encore envoyé des chevaux, et on nous a donné, pour notre part, deux belles juments et un cheval, tant pour la charrue que pour le charroi. »

Ces chevaux étaient vifs, rustiques, pas trop lourds et pouvant passer facilement de la charrue à la voiture légère, traverser les bancs de neige sans enfoncer très profondément, braver la poudrerie, se tirer d’une rencontre en hiver avec agilité et sans trop d’efforts.

En 1670, Louis XIV fit encore envoyer des chevaux dans la colonie, et il les fit distribuer chez les gentils-hommes du pays qui avaient le plus favorisé le défrichement et la culture des terres. Deux juments et un étalon furent donnés à M. de Chambly ; deux juments à M. de Lachesnaye ; une à M. de Sorel ; une à M. de Contrecœur ; une à M. de Saint-Ours ; une à M. de Varennes ; une à M. LeBer ; une à M. de Latouche, une à M. de Repentigny ; une à l’intendant Talon : — treize bêtes en tout.

Le roi tenait en estime particulière ceux qui cultivaient la terre. Dans les lettres de noblesse que le monarque accorda à un certain nombre de colons qui avaient travaillé avec zèle à l’établissement du pays, « il donna pour motif de cette faveur l’empressement qu’ils avaient fait paraître pour la culture de la terre. »

Colbert s’occupait spécialement de la colonisation du Canada, mais non en éparpillant les forces du pays, comme cela s’était fait auparavant, et surtout comme cela se fit plus tard, sous Louis XV. Il écrivait, le 18 mars 1664, à Monseigneur de Laval :

« Sa Majesté a pris résolution de faire lever des hommes qui seront conduits en Canada ; mais elle estime tout à fait indispensable que le Conseil Souverain distribue des terres à ces nouveaux venus, et qu’on les oblige à défricher de proche en proche, afin que, n’étant plus épars comme autrefois, ils soient mieux en état de se défendre contre les surprises des Iroquois. »

Relativement à la distribution des chevaux envoyés ici en 1670, l’abbé Faillon s’exprime en ces termes : « Voici les conditions auxquelles le Roi faisait ces sortes de dons aux particuliers : ils devaient les nourrir (les chevaux) pendant trois ans ; et si, par leur faute, quelqu’un de ces animaux venait à mourir, celui à qui il avait été donné était obligé de payer au receveur du Roi la somme de deux cents livres. Dans l’autre cas, il pouvait le vendre après les trois ans expirés, ainsi que les poulains qu’il aurait pu avoir ; mais avec charge, au bout des trois ans, de donner au receveur de Sa Majesté un poulain d’un an pour chaque cheval, ou la somme de cent livres. Il était pareillement ordonné que, lorsque ces poulains que le Roi faisait élever et nourrir seraient parvenus à leur troisième année, on les distribuerait à d’autres particuliers, et toujours aux mêmes conditions. Comme on le voit, ces conditions ne pouvaient être plus avantageuses aux particuliers ni au pays en général. Aussi Colbert, qui avait tant à cœur de voir fleurir la colonie, écrivait à M. Talon, le 11 février 1671 : « Je tiendrai la main à ce qu’il soit envoyé au Canada des cavales et ânesses, afin de multiplier ces espèces si nécessaires à la commodité des habitants. » De tous les animaux domestiques envoyés par le Roi dans la Nouvelle-France, les chevaux furent, en effet, ceux qui s’y multiplièrent le plus, quoique le nombre des autres y augmentât d’une manière étonnante. »

Excepté les ânes. Ces animaux si utiles n’ont guère fait souche en Canada.

C’est bien dommage.[1]

M. de Gaspé parle, dans ses Mémoires, d’un certain âne — « une bête curieuse » — qu’il était allé voir au Cap Blanc, étant enfant, avec quelques camarades. En petit espiègle qu’il était, il dit gravement à l’animal : — Comment vous trouvez-vous de votre séjour à Québec ? L’âne leva une oreille et baissa l’autre. — Je vous comprends, reprit le spirituel enfant : votre oreille levée veut dire : « le Canada est un beau pays » ; votre oreille baissée veut dire : « mais je m’y ennuie terriblement, y étant tout seul de mon espèce. » — Consolez-vous, ajouta le futur auteur des Anciens Canadiens, avant longtemps vous pourrez constater qu’il y a plus d’ânes qu’on ne pense sur nos rives.

Je ne cite pas ; je raconte de mémoire.

Lecteurs qui avez l’âme sensible et qui aimez les chevaux, il est un nom que je livre à toute la rigueur de vos jugements : celui de l’intendant Antoine-Denis Raudot (Raudot fils) — un brave homme pourtant sous certains rapports ; demandez plutôt au docteur Dionne.

Donc, en l’année 1709 — le 13 juin — l’intendant Antoine-Denis Raudot émit une ordonnance aux termes de laquelle il était défendu aux habitants de la région de Montréal de garder plus de deux chevaux et un poulain, — ceux qui en avaient davantage devant les tuer ou les vendre. Voici le texte même de cette ordonnance :

« antoine-denis baudot, etc.

« Étant informé que les habitants de Montréal nourrissent une trop grande quantité de chevaux, ce qui les empêche d’élever des bêtes à cornes et à laine, ne connaissant point en cela leur véritable intérêt, puisqu’ils ne retirent aucun profit des dits chevaux qu’ils élèvent, et qu’au contraire ils en retireraient beaucoup des bêtes à cornes et à laine qu’ils élèveraient avec les fourrages que consomment les dits chevaux ;

« Et attendu que cette trop grande quantité de chevaux produirait par la suite le manque des autres bestiaux, ce qui irait au détriment de cette colonie ; et comme notre principale attention doit être à son augmentation et à y procurer autant qu’il est en notre pouvoir l’abondance ;

« Nous ordonnons que chaque habitant des côtes de ce gouvernement (de Montréal) ne pourra avoir plus de deux chevaux ou cavales et un poulain, et ce, à commencer après les semences de l’année mil sept cent dix, leur donnant le dit temps pour pouvoir se défaire des chevaux qu’ils ont au-delà de ce nombre, et après lequel ils seront tenus de tuer ceux qu’ils auraient au-delà.

« Mandons au sieur Deschambault, lieutenant-général de la prévôté de cette ville, et au sieur Raimbault, procureur du roi d’icelle, de tenir la main, chacun en droit soi, à l’exécution de la présente ordonnance, laquelle sera lue, publiée et affichée dans cette ville, et envoyée par le dit sieur procureur du roi dans les côtes de ce gouvernement, aux capitaines des dites côtes, auxquels nous mandons de tenir la main à son exécution et de faire publier par trois dimanches consécutifs, à issue de messe paroissiale, à la porte de l’église, à ce que personne n’en ignore ; de laquelle publication ils seront tenus d’informer le dit sieur procureur du roi.

« Entendons cependant ne point comprendre dans la dite ordonnance ceux qui font profession de charrier pour le public, auxquels nous permettons d’avoir la quantité de chevaux qui leur est nécessaire.

« Fait et donné à Montréal, en notre hôtel, le treize juin mil sept cent neuf. »

Signé : « Raudot. »


Évidemment M. Raudot, Antoine-Denis, était digne de devenir membre de la Société d’industrie laitière si cette noble institution eût alors existé. Les habitants ne retirent aucun profit des dits chevaux, dit-il. Dans une brochure intitulée La Crise, l’honorable M. Royal dit que le Canada a exporté des chevaux, en 1894, pour la somme d’un million de piastres. Les temps ont bien changé !

Le savant suédois Peter Kalm, qui fit un voyage en Canada dans l’été et l’automne de 1749, écrivait ce qui suit, à la date du 25 août de cette même année :

« Tous les chevaux canadiens sont forts, vifs, bien faits, aussi grands que nos chevaux de cavalerie, et d’une race importée de France. Les habitants ont la coutume de couper la queue à leurs chevaux, ce qui est une vraie cruauté, puisqu’on les prive ainsi de leur unique moyen de défense contre les moucherons, les taons et les hippobosques. Cette coutume vient peut-être de ce que les Canadiens attellent leurs chevaux l’un devant l’autre : et, pour empêcher celui de devant de blesser les yeux de celui qui est dans les timons en agitant sa queue, ils auront pris le parti d’écourter tous leurs chevaux.

« Le gouverneur-général et quelques-uns des principaux (de la ville de Québec) ont des carosses, mais le reste du peuple se sert de cabriolets. On se plaint généralement que le peuple de la campagne commence à élever un si grand nombre de chevaux que les bestiaux manquent de fourrage en hiver.[2] »

Le 27 septembre 1749, Kalm écrit, de Montréal : « Un cheval de moyenne encolure coûte maintenant quarante francs et plus. Un beau cheval vaut cent francs. Une vache vaut cinquante francs… Un mouton coûte cinq francs à présent ; mais l’année dernière, alors que tout était cher, il coûtait de huit à dix francs. Un cochon d’un an, pesant 150 à 200 livres, se vend quinze francs… Un poulet vaut de dix à douze sous, un coq-d’inde vingt sous. Un minot de blé se vendait trois francs l’an passé, mais à présent il coûte quarante sous… Un minot d’avoine vaut quelquefois quinze à vingt sous… Les pois ont toujours la même valeur que le blé. Le beurre coûte ordinairement huit à dix sous la livre… Une douzaine d’œufs ne coûte généralement que trois sous, cependant on en donne maintenant cinq sous (fin de septembre). Il ne se fabrique pas de fromage à Montréal, et pour en avoir il faut le faire venir d’ailleurs… »

L’auteur continue, sans transition : « Personne ne se marie sans le consentement de ses parents. » Il aurait pu ajouter : « Les jeunes gens, en Canada, n’attendent pas toujours pour se marier qu’ils aient fini de grandir. »

J’étais bien jeune lorsque j’entendis faire l’éloge des chevaux canadiens pour la première fois. Dans ce temps-là, il n’y avait pas de chemin de fer, pas de télégraphe, mais il y avait des officiers anglais à Sorel et aux Trois-Rivières, et des mauvais chemins partout. Un officier de la garnison de Sorel, — un capitaine pour le moins, — racontait que, parti de Berthier, un matin du mois de janvier, pour se rendre aux Trois-Rivières, il avait été arrêté par une affreuse tempête, obligé de laisser ses chevaux pur sang à Maskinongé et de les remplacer par des « marche donc ! » (sic), des chevaux canadiens, les seuls, disait-il, qui pussent tenir sur la route par un temps et des chemins pareils.

Le cultivateur canadien était autrefois si fier de son cheval que, pour le faire valoir, il courait le risque de tuer les gens. Une ordonnance de l’intendant Michel Bégon, datée du 29 février 1716, se lit comme suit :

« Sur ce qui nous a été représenté, que dans les grands chemins et particulièrement à la sortie de l’église, quelques habitants poussent les chevaux attelés à leurs carrioles, ou ceux sur lesquels ils sont montés, avec tant de vitesse qu’il arrive souvent que, n’en étant plus les maîtres, ils renversent les carrioles qui se trouvent dans leur chemin, et même des gens auxquels ils ne donnent pas le temps de se ranger, d’où il est arrivé déjà plusieurs accidents fâcheux ; à quoi étant nécessaire de pourvoir, nous faisons défense à toutes personnes, tant ceux qui conduiront des carrioles que ceux qui monteront leurs chevaux, de les faire trotter ou galoper quand ils sortiront de l’église, avant d’en être éloignés de dix arpents : ensuite pourront donner à leurs chevaux le train qu’ils voudront, lorsqu’il n’y aura personne devant eux, ni charrois ni traîne ; leur ordonnons lorsqu’ils trouveront des gens de pied dans leur chemin, de s’arrêter et même de se détourner afin de leur donner le temps de se retirer, le tout à peine de vingt livres d’amende contre chacun des contrevenants, applicable à la fabrique des paroisses où sera faite la contravention… etc., etc. »

Une ordonnance analogue, pour la ville de Québec, fut émise par l’intendant François Bigot, le 28 décembre 1748.

La vanité, qui est un vice de tous les pays, fut sans doute la cause de la préférence excessive que les habitants d’autrefois accordaient à leurs chevaux, au détriment de leurs vaches, pourtant si utiles et si excellentes. Aujourd’hui, le cultivateur canadien entend mieux ses intérêts et soigne également bien tous ses animaux, — ce qui ne veut pas dire que la vanité soit disparue de la terre.

Quelques chiffres pour finir.

Le Canada possédait 12 chevaux en 1665. Il en possédait 145 en 1679 ; 218 en 1688 ; 400 en 1692 ; 580 en 1695 ; 684 en 1698 ; 1872 en 1706 ; 4024 en 1719 ; 5270 en 1720 ; 5603 en 1721 ; 5056 en 1734.

Dans cette statistique il n’est pas question de l’Acadie, où des chevaux furent envoyés de France dès l’année 1612.

Un rapport du général Murray, daté de 1765, dit qu’il y avait alors 12,757 chevaux en Canada.

En 1784, il y avait 9,166 chevaux dans le district de Québec, 3,155 dans le district des Trois-Rivières, et 17,825 dans le district de Montréal. — 30,146 en tout.

La province de Québec possédait 225,006 chevaux en 1881.

Lors du recensement de 1891, il y avait 344,290 chevaux de tout âge dans la province de Québec et 1,470,575 dans toutes les provinces de la confédération canadienne.

L’unité de race de la famille chevaline canadienne, qui existait au temps de Kalm, c’est-à-dire vers le milieu du dix-huitième siècle, n’existe plus aujourd’hui. Les importations de chevaux étrangers, d’abord ; puis de nombreux croisements ; puis une exportation considérable de chevaux canadiens aux États-Unis, ont altéré et décimé la race primitive ; de sorte que les marche donc ! sans alliage constituent une minorité parmi leurs congénères de cette partie du pays. Heureusement que les minorités vivent heureuses et sont entourées de tous les égards dans la province de Québec.

Serait-il désirable d’augmenter le nombre de ces chevaux canadiens dont les qualités répondent si bien aux besoins de nos classes rurales ? Serait-il possible d’améliorer cette race sans avoir recours aux croisements, et de donner à la plupart de ses sujets de l’avenir la taille ordinaire des chevaux canadiens d’autrefois ? Le moyen d’atteindre rapidement ce double but serait de créer une ou plusieurs jumenteries à direction unique et où la sélection, — cette clef de voûte de toute régénération de ce genre, — serait pratiquée avec zèle, intelligence et persévérance.

E. G.


  1. « En 1696. — dit M. Benjamin Sulte, — lors de l’expédition contre les Onnontagués, M. de Frontenac montait une bourrique et M. de Callières un cheval qu’ils avaient amenés sur des bateaux. »
  2. L’auteur continue : « Les vaches, de la taille de notre vache de Suède, viennent de France aussi. Il est admis que le bétail né ici d’animaux importés d’Europe, n’en atteint jamais les proportions. Cette dégénération est attribuée à la rigueur excessive des hivers canadiens, qui oblige le cultivateur de tenir ses bestiaux renfermés dans l’étable et pauvrement nourris… En Canada les bœufs tirent avec leurs cornes, mais dans les colonies anglaises ils tirent par le garrot comme les chevaux. Les vaches varient de couleur, mais la plupart sont rouges ou noires. »