Le livre des petits enfants/09

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Anonyme
Le livre des petits enfantsJohn Wiley (p. 27-32).


L’AIGLE ET L’ENFANT.


Un Paysan des Pyrénées habitait une petite cabane au haut de ces montagnes. Il avait trois enfants : le fils aîné, âgé de huit ans, était imbécile ; le deuxième, qui avait cinq ans, était muet ; et le troisième, tout petit encore, se nommait Jacques. Un jour les deux frères aînés emmenèrent promener le petit Jacques loin de la cabane. On ne s’aperçut pas d’abord de leur absence ; mais la Mère commença bientôt à être en peine de ses enfants.

Elle courut après eux, et ne trouva que les deux fils aînés : le plus petit n’était plus avec eux. L’imbécile riait bien fort, et le muet se chagrinait. Les pauvres Parents ne purent pas savoir ce qu’était devenu leur cher petit Jacques, et ils s’affligèrent beaucoup en pensant qu’il était peut-être perdu ; alors ils prièrent Dieu de ne pas l’abandonner. Vous allez voir ce qui arriva.

Durant tout le jour et toute la nuit, on n’eut point de nouvelles de l’enfant ; mais pendant que les Parents couraient de côté et d’autre, ils aperçurent un Aigle qui volait au-dessus d’eux…

Savez-vous ce que c’est qu’un Aigle, mes chers amis ? C’est un oiseau fort grand et fort beau ; on l’appelle le roi des oiseaux. Quand ses ailes sont étendues, il y en a qui ont huit pieds de large. Son bec est recourbé et très fort, et ses ongles sont noirs et pointus. Il a de grands yeux jaunes, qui sont aussi brillants qu’une lumière, et qui ressemblent à deux diamants. Il vole très vite. Il construit sur les rochers un grand nid qu’on appelle aire, et il emporte dans ce nid des lièvres, des agneaux, et quelquefois de petits enfants, qu’il enlève dans ses serres.

Quand le Père et la Mère de Jacques virent cet Aigle voler au-dessus de leurs têtes, le fils imbécile recommença à s’agiter et à rire ; mais le muet se désola de nouveau. Alors les Parents pensèrent que cet énorme oiseau pourrait bien avoir enlevé leur cher petit. Jugez de leur chagrin ! mais écoutez encore qui arriva.

Le jour où le petit Jacques avait disparu, un Chasseur se tenait près du nid de l’Aigle, et cherchait à tuer l’oiseau. Il le vit, et en même temps il entendit les cris de l’enfant, qui se débattait dans les serres de l’Aigle. Alors le Chasseur pensa que s’il était assez adroit pour tuer l’animal sans toucher l’enfant, il sauverait la vie à ce pauvre petit. L’Aigle se montra, et le Chasseur, après avoir prié Dieu, coucha en joue l’oiseau et lâcha son coup ; la balle frappa la poitrine de l’Aigle, et celui-ci tomba aussitôt.

Vous comprenez, mes chers amis, la joie du Chasseur. Il enleva du nid le petit Jacques, qui était couvert de sang ; mais heureusement ses blessures n’étaient pas dangereuses, et il le remit entre les bras de sa Mère, qui fut bien heureuse et bien reconnaissante.

Vous avez cru, mes petits amis, que ce pauvre enfant ne pourrait pas être sauvé, qu’il était perdu pour toujours ? mais Dieu est si bon, si puissant, que nous devons toujours croire qu’il nous sauvera, même lorsqu’il semble qu’il n’y a plus d’espoir. Vous voyez combien nous devons l’aimer.