Le mendiant noir/09

La bibliothèque libre.
Éditions Édouard Garand (40p. 53-58).

IX

BATAILLE DANS LA NUIT


Pour le meilleur enchaînement des faits de ce récit il importe de revenir sur nos pas d’une heure environ, c’est-à-dire au moment où Philomène était enlevée au père Turin par Verteuil, et après que le Lieutenant de Police eut été désarmé par Maubèche.

Le Lieutenant de Police et Verteuil s’étaient retrouvés plus loin, près de la résidence du commerçant, et tous deux s’étaient dit…

— À demain !

Gaston d’Auterive avait aussitôt repris le chemin du Château.

Là, un domestique l’informa que son oncle désirait le voir sans faute. Le jeune homme monta aux appartements du Marquis de la Jonquière.

Le gouverneur se trouvait dans un état d’épuisement dont s’inquiétait fort le médecin qui se tenait à ses côtés. Il avait repris sa connaissance depuis quelques instants, et de suite le souvenir du Mendiant Noir lui était revenu. Il s’était rappelé en même temps le papier ordonnant l’arrestation de M. de Verteuil et qu’il avait signé par contrainte. Immédiatement il avait mandé son neveu. Mais nous savons que ce dernier était parti avec Verteuil et une escorte de gardes.

Gaston d’Auterive trouva le marquis effondré sur sa chaise-longue, avec le médecin d’un côté et le valet de chambre de l’autre, tous deux pâles et anxieux.

Le vieillard râlait. Il n’entendit pas entrer son neveu.

Le médecin alla à la rencontre de ce dernier et lui murmura :

— Monsieur, Son Excellence est très mal ; je vous conseille de ne lui rien dire qui puisse l’affecter. Un rien de contrariant pourrait le tuer.

— Bien, monsieur répondit le jeune homme.

Le médecin retourna près du malade et lui dit doucement :

— Excellence, voici votre neveu que vous avez mandé.

— Qu’il approche, murmura le gouverneur dans un souffle.

Le jeune homme vint se placer devant le vieillard dont le menton demeurait appuyé sur sa poitrine.

— Mon oncle, dit Gaston d’Auterive, me voici à vos ordres.

Le vieux souleva difficilement la tête et balbutia :

— Ah ! Gaston, je suis content de te voir. Eh bien ! cette lettre que j’ai reçue… ce mendiant… et cette arrestation… Me comprends-tu, Gaston ?

— Je vous comprends, mon oncle.

— Alors, c’est donc vrai… j’ai signé… ce mendiant m’a fait signer !… Eh bien ! veux-tu faire prévenir… notre ami de se tenir sur ses gardes ?… Ah ! je ne voulais pas signer… mais il m’a forcé !

— C’est bien, mon oncle, répondit le jeune homme en tremblant, je le préviendrai.

— Bien, bien. Et puis, ajouta le malade d’une voix à peine distincte, si tu pouvais mettre la main sur…

Un hoquet l’empêcha de finir sa phrase, et sa figure tirée, livide, s’affaissa de nouveau sur sa poitrine.

— J’ai compris, mon oncle, j’ai compris, répéta Gaston d’Auterive, et vos ordres seront exécutés.

Le marquis râlait plus lourdement.

Le médecin se pencha à l’oreille du Lieutenant de Police et chuchota :

— Monsieur, il faut le laisser. Un autre effort de sa part lui serait fatal.

Le Lieutenant de Police s’inclina et sortit sans faire de bruit de l’appartement. Il gagna rapidement son cabinet de travail qui se trouvait dans une autre partie du château et écrivit à la hâte le billet que nous connaissons. Lorsque cette missive eut été expédiée, il se mit à marcher de long en large, très méditatif, sombre, agité.

— Ah ! se disait-il, mon oncle va-t-il enfin trépasser ? Pardieu ! il ne vaut plus grand chose en ce monde ! A-t-il fait son testament ? Et s’il l’a fait, qu’y suis-je au juste ? Je compte sur un legs, parce que je crains de ne pouvoir épouser la dot de Mademoiselle de Verteuil. Elle semble préférer un autre que moi. Mais qu’elle prenne garde, je pourrai me venger cruellement ! Chose certaine, elle n’aura pas Saint-Alvère, ou plutôt Saint-Alvère ne l’aura pas, moi vivant ! Et Verteuil, qu’en faire ?… Je commence à croire que cet homme est un fieffé coquin ! Mais, bah ! qui le saura, s’il réussit à faire disparaître ceux qui s’acharnent à lui ? Je lui aiderai même à faire rentrer sous terre ces importuns ou ces ennemis. Car j’ai besoin de cent mille écus ! Je suis actuellement endetté de vingt-cinq mille livres auprès de Monsieur l’Intendant-royal… dette d’honneur ! Et si mon oncle allait commettre la sottise de ne me rien laisser par son testament ? Oh ! le vieil avare, il en est capable ! Oh ! si j’en étais sûr…

Il faut penser que quelque terrible projet venait de naître dans son cerveau, car il esquissa un geste de menace et de désespoir en même temps.

Puis sa pensée retourna vers Mlle de Verteuil.

Il eut cette idée :

— Si Verteuil me confiait sa nièce durant son absence, comme je le lui ai demandé ? Et ne vaudrait-il pas mieux de me rendre chez lui et offrir à Philomène l’hospitalité ici ? Je lui ferai préparer des appartements et en ce château elle régnera comme une reine, en attendant notre mariage qui ne pourra tarder. Oui, c’est une idée…

Et, brusquement, la démarche saccadée, le Lieutenant de Police quitta son cabinet de travail et se rendit en bas dans le vestibule. Là, il ne se trouvait que vingt gardes de service et la domesticité qui enlevait les couverts de la salle du banquet. Ce banquet avait été contremandé, à cause de l’état critique du gouverneur, et les invités étaient partis sans avoir pu goûter aux mets succulents dont ils avaient un moment respiré l’arôme.

Gaston d’Auterive choisit dix gardes et leur dit :

— Suivez-moi à distance, et surtout pas de bruit !

Il prit le chemin de la résidence de Verteuil.

Là, il vit, comme l’avait vu Constance, l’unique rayon de lumière traversant une fenêtre du rez-de-chaussée. Et Gaston d’Auterive, qui était un habitué de la maison, savait que cette fenêtre était celle du salon.

— Bon, pensa-t-il avec espoir, je parie que mon futur beau-père est en train de dicter ses volontés à sa nièce ; je ne saurais arriver plus à propos.

Il donna à ses gardes l’ordre de surveiller les abords, puis il se dirigea vers la grille de la palissade.

À l’instant même il perçut vaguement dans l’obscurité plusieurs ombres humaines venir à lui. Par crainte de se trouver en face d’ennemis trop nombreux il recula jusqu’à ses gardes, et observa la manœuvre des ombres humaines qui, sans bruit et avec mille précautions, se rapprochaient de la maison du commerçant. L’instant d’après il vit un homme qui s’apprêtait à franchir la grille. Cet homme, il crut le reconnaître, et tout son sang brûla ses veines.

Il cria :

— Alerte, gardes !… Au Mendiant Noir !…

Et il lança ses gardes à l’attaque.

— Maubèche !… jeta la voix sonore de Philippe Vautrin.

Celui-ci venait de tirer sa rapière et parait les premières attaques des gardes.

Peu après Maubèche survenait avec cinq mendiants armés de rapières que tous, chose curieuse, manœuvraient avec une rare habileté.

L’action, commencée près de la grille de la palissade, se continua dans la rue, et Vautrin et Maubèche, secondés par les cinq mendiants, repoussaient les dix gardes dont deux déjà avaient été blessés.

Gaston d’Auterive, l’épée nue à la main, se tenait à l’écart, surveillant le combat, la maison et ses alentours. Tout à coup il crut voir une ombre de femme passer dans le rayon de lumière qui tombait dans le jardin.

— Philomène !… murmura-t-il avec un battement de cœur.

À l’instant précis la lumière de la maison s’éteignit et cette partie du jardin était plongée dans la noirceur.

N’importe ! le Lieutenant de Police courut à la grille et au jardin. Là, il se heurta à la silhouette de femme qu’il avait aperçue la minute d’avant.

Un cri partit de la bouche de cette femme.

— Philomène !… murmura d’Auterive.

Mais un autre cri de femme retentissait à l’arrière du jardin.

— Philomène, dit le Lieutenant de Police qui n’avait pas paru entendre l’autre cri, suivez-moi au château où vous serez en sûreté, car on en veut à votre oncle et à vous-même… venez !

Il saisit une main brûlante et nerveuse.

— Laissez-moi, monsieur, laissez-moi ! cria la jeune fille avec épouvante.

Gaston d’Auterive la sentit défaillir. Alors, obéissant à une première idée, il enleva la jeune fille dans ses bras, courut à la grille et à toute course prit la direction du château. À ce moment ses gardes étaient mis en déroute par Vautrin et sa bande, et tous prenaient la fuite, poursuivis par les cinq mendiants. Seuls Vautrin et Maubèche demeuraient sur le lieu du combat.

— Mon ami, dit alors le jeune homme, j’ai vu quelqu’un prendre la fuite du côté de la Porte du Palais, quelqu’un qui semblait fuir de cette maison. Je veux donc voir qui vient de fuir par là, car, comme moi, tu as entendu ces deux cris de femme.

— Oui, maître.

— Eh bien ! entre dans la maison. Si Verteuil est là, empare-toi de lui et attends-moi.

— Et s’il n’y est pas ?

— Demeure là quand même et protège Mademoiselle de Verteuil contre tout attentat.

— C’est bien, maître !

Philippe Vautrin s’élança aussitôt vers la Porte du Palais, tandis que Maubèche essayait de pénétrer dans la maison. La porte principale était verrouillée.

— Bon, murmura le nain, voilà que ma propre porte m’est fermée ! Décidément, on n’est plus chez soi nulle part !

Ce disant, il quitta le perron et fit le tour de la résidence. À l’arrière il trouva, légèrement entr’ouverte, la porte basse par laquelle Verteuil et sa nièce étaient sortis.

— Ah ! ah !… ricana le nain, de nos jours on quitte sa maison par la grande porte et l’on y rentre par la petite.

Il entra, monta à l’étage supérieur où tout était obscur et silencieux.

Et tout en ce faisant, dans sa pensée trottait ce nom :

— Mademoiselle de Verteuil !…

Il parcourut la longueur du vestibule, prêtant l’oreille.

— Non ! murmura-t-il au bout d’un moment, il n’y a personne ici. N’importe ! puisqu’on m’a dit d’attendre, j’attends !

Et marchant dans l’obscurité aussi facilement qu’en plein jour, il traversa une salle et pénétra dans le salon. Il avisa un divan. Il s’y jeta et se mit à dormir.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Verteuil, tirant après lui Philomène toute pâmée, courait vers la basse-ville, vers la Cité des Mendiants. Il allait au travers de ruelles noires et puantes, comme s’il en eût connu tous les tours et détours. Puis, soudainement, il s’arrêta devant une cambuse.

— Ah ! grinça-t-il en se penchant sur le visage livide et défait de la jeune fille qui hoquetait hors d’haleine, tu veux voir ton père… le voici !

Il frappa rudement dans la porte.

— Qui va là ? demanda une voix sourde de l’intérieur.

Et Philomène, tremblante, épouvantée, crut reconnaître cette voix d’homme qui, une heure avant, l’avait appelée « sa fille », oui, la voix de cet homme qui l’avait comme bercée dans ses bras.

— Ouvrez ! commanda Verteuil, c’est pour affaire urgente.

La porte s’ouvrit. Dans l’embrasure parut la haute silhouette du père Turin, toujours vêtu de ses loques de mendiant, la tête entourée d’une bande de toile blanche rougie de sang.

La lumière de la cambuse éclaira nettement le visage décomposé de Philomène.

— Constance !… fit le père Turin en reculant.

Un ricanement résonna dans la gorge de Verteuil qui, à son tour, mit sa face terrible dans le rayon de lumière.

— Oh ! s’écria le père Turin avec stupeur, Jacques…

Un nouveau et plus fort ricanement de Verteuil couvrit la voix du mendiant.

Chancelante, hagarde, Philomène jetait un regard éperdu sur le vieux loqueteux et l’intérieur misérable de sa cabane.

— Viens ! commanda Verteuil en entraînant de force la jeune fille.

Il entra.

Interdit, le mendiant s’était reculé jusque dans le fond de la pièce.

Verteuil parla :

— Mendiant, ce n’est pas Constance que je t’amène, c’est ton autre fille, Philomène…

— Philomène !… murmura le mendiant, égaré et tremblant.

Puis, il fit un bond, enfonça d’un coup de pied la porte de la pièce voisine et clama cet appel :

Constance !…

Le fracas et le cri réveillèrent la vieille mendiante qui accourut en jetant des cris perçants.

Mais à la vue de la jeune fille, elle se tut, frissonna, recula et tomba sur un siège, le sein en tumulte et les yeux désorbités.

— Tiens, Philomène, reprit Verteuil avec un rire sarcastique, voici ta mère… et là ton père… comme tu le vois ce sont de vils mendiants… Va donc à eux !

Il poussa brutalement la jeune fille vers les deux mendiants qui n’osèrent lui tendre les bras.

Mais Philomène venait de tomber. Elle se releva, et, affolée, elle courut à Verteuil, criant :

— Non… non… ce n’est pas mon père ! Ce n’est pas ma mère !… Emmenez-moi ! Emmenez-moi !…

Verteuil éclata d’un long rire.

Une deuxième fois il poussa la jeune fille vers les deux mendiants qui demeuraient stupéfaits.

Alors, le père Turin, d’une voix méconnaissable, interrogea sa femme :

— Où est Constance, pauvre femme ?

— Je ne sais pas… bredouilla la femme. Elle est partie !

Philomène revenait vers Verteuil. Elle lui cria, avec un accent de folie :

— Arrière !… ce n’est pas mon père… ce n’est pas ma mère ! Oh ! c’est assez de cette terrible comédie !…

De nouveau le père Turin fit un bond et tout en rugissant comme une bête blessée. Il saisit un énorme gourdin dans un angle de la pièce et marcha contre Verteuil en criant :

— Ah ! bandit, à nous deux !…

Saisie de peur, Philomène recula dans un angle.

La vieille mendiante se jeta à genoux devant le Christ d’ivoire accroché au-dessus du manteau de la cheminée. D’une voix éteinte elle balbutia, mains jointes :

— Mon Dieu !… Mon Dieu !… venez à notre secours !

Verteuil venait de saisir un de ses pistolets et en ajustait froidement le père Turin qui approchait, le gourdin levé.

Une ombre humaine franchit tout à coup la porte demeurée ouverte, et une main vigoureuse saisit le poignet de Verteuil.

— Tirez ! commanda une voix forte.

Le canon du pistolet se trouvait tourné vers le plafond.

Philomène pressa ses yeux de ses deux mains, elle croyait faire un rêve…

Verteuil regarda l’homme qui maintenait son poignet comme un étau.

Il vit un jeune homme au teint hâlé, mais pâle, tête nue, avec de longs cheveux bruns dont les boucles tombaient sur le collet de sa cape noire, et il prononça avec une stupeur indicible :

— Saint-Alvère !…

— Oui, Saint-Alvère ou Philippe Vautrin, blessé, ensanglanté, mais solide encore.

Le père Turin, avec son bâton levé, demeurait comme statufié. Sa femme continuait à prier en gémissant. Philomène, enfin, regardait cette scène tragique de ses yeux où passaient des lueurs de folie. Elle murmurait :

— Monsieur de Saint-Alvère !

Un nouvel incident se passa avec la rapidité de la foudre. D’un geste prompt Verteuil glissa sa main gauche, demeurée libre, sous ses vêtements, tira son autre pistolet, le posa sur la poitrine du jeune homme et fit feu. Une détonation légèrement assourdie éclata, puis la fumée de la poudre enveloppa tous ces personnages qui, pour une minute, ne purent se voir. Puis la fumée se dissipa. Alors Verteuil fit entendre un cri de rage en voyant, debout et souriant, Philippe Vautrin qui n’avait pas lâché le poignet droit du commerçant. Lui, non moins rapidement que la minute d’avant, saisit son pistolet déchargé par le canon et de la crosse frappa un dur coup sur le front du jeune homme. On entendit un bruit mat… puis un filet de sang jaillit… Sans une plainte, Philippe Vautrin desserra sa main, puis doucement il s’affaissa sur le plancher.

Philomène jeta un cri terrible et se rua au dehors, criant à tue-tête :

— Au meurtre !… Au secours !…

Elle se perdit dans le noir dédale des ruelles.

Le père Turin bondit sur Verteuil… Mais lui braqua sur le mendiant l’arme qui demeurait chargée :

— Un pas de plus, Nolet, menaça-t-il d’une voix sourde, et je te tue comme un chien !

En même temps il recula vivement vers la porte toujours ouverte.

Alors la mendiante se leva et jeta ce cri :

— Pierre Nolet, tue-le donc ce chien-là !

Voulant obéir à la voix de sa femme, le père Turin s’élança encore une fois… Mais déjà Verteuil, se jetait dans la noirceur de la ruelle et disparaissait.

Suivons le commerçant.

Il courait à toutes jambes vers la haute-ville, et en même temps il ricanait comme en proie à un triomphe terrible.

— Ah ! ah ! ma chère nièce, murmurait-il, je pense qu’à l’avenir vous aimerez mieux votre oncle et son argent que vos père et mère mendiants ! Allons ! j’ai hâte qu’elle me donne son avis sur ses chers parents ! A-t-elle eu assez peur ? A-t-elle été assez horrifiée ?…

Il riait parfois si fort qu’on eût dit un fou déchaîné.

Il arriva ainsi courant à sa maison. Il monta le perron et tenta d’ouvrir la porte qui résista.

— Bon, fit-il, j’avais oublié que je l’ai verrouillée avant de partir. En ce cas, Philomène aura dû entrer par la porte basse de la cave.

Il fit le tour de la maison et pénétra dans la cave pour monter au rez-de-chaussée. Là, nulle lumière et nul signe de vie.

— Philomène ! appela-t-il, oubliant de faire de la lumière.

Soudain, un être quelconque et invisible dans l’obscurité, une bête affreuse peut-être se jeta sur le commerçant, le saisit à la gorge et le renversa sur le tapis du salon où il venait de pénétrer.

Verteuil entendit un sourd ricanement de démon… Et, croyant qu’il allait entrer dans l’enfer, il ferma les yeux.

— Ah ! monsieur, disait une voix ironique, je n’ai pas accoutumé de recevoir ainsi mes serviteurs, mais vous m’avez fait peur avec votre cri de loup, moi qui dormais si bien !

Verteuil ouvrit les yeux. Il distingua vaguement une ombre humaine qui, à l’aide de cordelette, le ficelait avec une belle adresse.

— Là ! dit l’homme mystérieux avec une satisfaction manifeste quand il eut terminé sa besogne. Maintenant, cher monsieur, faisons connaissance !

À l’aide d’un briquet il mit le feu à une mèche de poudre, et avec cette mèche il alluma le candélabre à trois branches. Puis, souriant et croisant les bras, il se tourna lentement vers son prisonnier.

Verteuil jeta sur cet homme un regard rempli d’épouvante, et proféra ce nom :

— Maubèche !…

Le nain, toujours souriant, s’inclina avec une politesse moqueuse.