Le parfait bouvier/01

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anonyme
Imprimerie de Louis Perrault (p. 3-61).

LE PARFAIT

BOUVIER.

DU TAUREAU, DE LA VACHE, DU BŒUF ET DU VEAU.



LE Taureau est le mâle ; la Vache est la femelle ; le Bœuf est un taureau mutilé ou châtré ; les petits se nomment veaux ; on nomme génisses les jeunes femelles.

Le taureau, ou l’animal destiné à la propagation de l’espèce, doit être gros, bien fait et en bonne chair, ayant l’œil noir, le regard fixe, le front ouvert, la tête courte, les cornes grosses, courtes et noires ; les oreilles longues et velues ; le mufle grand, le nez court et droit, le cou charnu et gros, les épaules et le poitrail larges ; les reins forts, le dos droit, les jambes grosses et charnues, la queue longue et bien garnie de poils ; le fanon pendant jusque sur ses genoux ; l’allure ferme et sûre, le poil rouge, et de l’âge de trois ans jusqu’à neuf.

Le choix de la vache ne mérite pas moins d’attention que celui du taureau. Il faut, pour qu’elle puisse donner de belles races, qu’elle soit de quatre ans jusqu’à neuf, docile, forte, élevée dans les montagnes fertiles en pâturages, ou dans les plaines éloignées des eaux marécageuses ; que les os du bassin soient évasés, la tête ramassée, les yeux vifs, les cornes courtes et fortes ; l’espace compris entre la dernière fausse côte et les os du bassin un peu long ; le poitrail et les épaules charnus, les jambes grosses et tendineuses, la corne bonne, le poil rouge et uni.

Le temps de la monte ou de la chaleur commence en avril, et dure jusqu’à la fin de juillet.

La vache mugit alors fréquemment, et avec plus de force que dans les autres temps ; elle saute sur les vaches, sur les bœufs, et même sur les taureaux ; la vulve est gonflée et saillante en-dehors. Le taureau, à cette époque, est indocile ; on doit le ménager si on veut obtenir une race forte et vigoureuse ; il doit être nourri à l’étable avec un mélange de paille et de foin. Il est encore essentiel, pour empêcher la dégénération de l’espèce, de croiser les races en les mêlant, et surtout en les renouvelant par des races étrangères : on verrait aussi bientôt le grand nombre et la belle espèce des bœufs se rétablir en Canada.

La vache, devenue pleine, demande des soins et des précautions. Il faut la défendre de l’intempérie de l’air, telle que la pluie, le froid, les grandes chaleurs ; la faire peu travailler dans les pays où on la met à la charrue ; l’empêcher de courir, de sauter les haies, les fossés, et ne lui donner aucun coup : les pâturages gras lui conviennent. Deux mois avant l’accouchement on augmente la nourriture ; il se fait ordinairement vers la fin du dixième mois. On doit la séparer des autres vaches, lui donner une bonne litière, la garantir du froid ; un quart d’heure après l’accouchement, lui donner de la farine de froment délayée dans de l’eau commune ; la nourrir pendant huit jours, avec du foin de bonne qualité, et lui donner, pendant ce temps, pour boisson, de l’eau blanche avec de la farine d’orge ; après cela, on la met, par degrés, à sa vie ordinaire.

Quant au veau, il faut le tenir chaudement et commodément ; il doit téter aussi souvent qu’il en est besoin, dans les premiers jours de sa naissance ; vers le sixième, on le sépare de la mère, dans la crainte de l’épuiser. S’il doit être livré au boucher, on ne le laisse téter que trente ou quarante jours ; si, au contraire, il est destiné à la charrue, il doit téter trois ou quatre mois. Beaucoup de veaux meurent des coliques qu’ils éprouvent peu de temps après leur naissance ; souvent ils périssent au bout de peu d’heures qu’ils en sont attaqués. Nous ne parlons point de la colique qu’accompagne un dévoiement dysentérique, qui, dans certaines années humides et froides, détruit beaucoup de ces animaux ; mais seulement de la colique simple, qu’on doit attribuer à l’usage du lait cru, ou à d’autres mauvaises nourritures.

Si les boissons et les lavements adoucissans, rafraîchissans, avec le son, le miel, le nitre, ne les guérissent pas promptement, il faut se hâter de leur faire prendre quelque laxatif ou du laudanum, ou même encore les deux ensemble. Par exemple, il est à propos de leur faire prendre plein une cuiller à thé de laudanum, et ensuite environ trente grains de soufre, ou de sel de nitre en poudre, que l’on mêlera dans du lait, ainsi que le laudanum. Le soufre ou sel de nitre sera réitéré au bout de six heures ; ce qui se fera encore le jour suivant, si la colique subsiste, malgré l’usage répété des boissons et des lavemens.

Le premier hiver est le temps le plus dangereux de la vie du veau, et par conséquent celui où il demande le plus de soins. On doit le sevrer par degrés ; on lui donne, en commençant, du foin choisi ou de la bonne herbe, afin de l’accoutumer insensiblement à cette nourriture ; quand il mange, c’est alors le moment de le séparer pour toujours de sa mère. Il ne doit rester au pâturage qu’une heure le matin, et autant le soir, lorsque les froids commencent à se faire sentir. Il faut le caresser, lui manier souvent les cornes, et principalement les pieds ; ne jamais l’irriter, le contrarier, ni lui donner des coups ; car l’expérience prouve que les mauvais traitements rendent ces animaux vicieux et indociles.

C’est à l’âge de deux ans et demi que l’on prive ces animaux des organes destinés à la reproduction ; l’animal prend alors le nom de bœuf. Dès lors on ne s’occupe plus qu’à l’habituer aux travaux des champs.

Dans les pays pierreux et montagneux, quand on destine le bœuf à la charrette, on l’accoutume, à l’âge de deux ans et demi, à se laisser ferrer. Il arrive souvent qu’il se soumet à cette opération dès la première fois ; mais, s’il est difficile, c’est de le flatter, de le caresser, d’être très-patient, de ne jamais le battre, car ce serait le rendre furieux et indomptable.

À trois ans et demi, on accoutume le jeune bœuf au joug, encore par la douceur, la patience et les caresses, en lui donnant, de temps en temps, de l’orge bouillie, des fèves concassées, et d’autres alimens semblables, dont il est très-friand. On l’attèle à la charrue avec un autre bœuf de même taille, et qui soit déjà dressé ; on les conduit ensemble au pâturage, afin qu’ils se connaissent et s’habituent à n’avoir que des mouvemens communs. Il faut prendre garde de se servir de l’aiguillon dans les premiers momens, dans la crainte de le rebuter et de le rendre indomptable. On le ménagera au travail, de peur qu’il ne se fatigue trop. Si le jeune bœuf est très-difficile à retenir, s’il est impétueux, s’il donne du pied, ou est à heurter de ses cornes, tous ces défauts disparaissent en attachant l’animal bien ferme à l’étable, et en l’y laissant jeûner pendant quelque temps. S’il est peureux, si la moindre chose l’effraie, le travail et l’âge, en diminuant la crainte, remédieront à ce vice ; s’il est furieux, le moyen le plus sûr de le rendre docile, est de l’attacher à une charrette bien chargée, au milieu de deux autres bœufs qui aient un pas lent, et de lui donner souvent de l’aiguillon.

Nous n’avons jusqu’à présent considéré la vache que relativement à son veau ; nous allons voir quels sont les autres avantages qu’on retire de cet animal. La vache est la source première de la richesse du cultivateur ; c’est elle qui répand l’aisance parmi les habitans de la campagne, et qui fournit a la société une grande partie des douceurs de la vie. Les vaches sont utiles, non-seulement par les veaux et le laitage qu’elles donnent ; mais il y a des pays où on les met encore au travail et à la charrue, et où on les fait travailler comme les bœufs.

La grosseur du pis ne constitue pas la bonté d’une vache ; il y en a qui l’ont très-petit, et qui, néanmoins, donnent beaucoup de lait ; le pis n’est quelquefois gros, que parce qu’il est charnu.

Dans les trois saisons où l’herbe est abondante, la traite des vaches se fait deux fois le jour, le matin et le soir ; en hiver, il suffît de la faire une fois seulement. La bonne façon de traire, est de conduire la main depuis le haut du pis jusqu’en bas, sans interruption, ce qui produit une mousse haute dans le seau ; au lieu qu’en pressant le pis comme par secousses, le beurre se sépare du lait.

Quand une vache donne peu de lait, c’est souvent la faute des alimens qu’on lui donne. Il faut, dans ce cas, lui en donner de plus succulens, tels que la bonne herbe, la paille d’avoine, le foin, le trèfle, le sainfoin et la luzerne ; par ce moyen, on parvient à augmenter et entretenir le lait.

C’est aussi souvent aux mauvais pâturages que le lait doit sa mauvaise qualité. Si ce sont des bas-fonds, des marrais, le lait participe du mauvais goût de ces herbages ; mais, en général, si l’herbe est douce et l’eau bonne, le lait est excellent, et toujours abondant.

Pour être bon, le lait doit être tel que, lorsqu’on en prend une petite goutte, elle conserve sa rondeur sans couler, et qu’elle soit d’un beau blanc ; celui qui tire sur le jaune, sur le bleu ou sur le rouge ne vaut rien. Sa saveur doit être douce sans amertume, sans âcreté, de bonne odeur ou sans odeur. Le lait est meilleur en mai, en été qu’en hiver, et n’est parfaitement bon que quand la vache est jeune et saine.

Le lait contient trois parties différentes, la partie butireuse, la partie séreuse et la partie caseuse. Celui qui est trop clair, abonde en parties séreuses ; le lait trop épais est celui qui en manque, et le lait trop sec n’a pas assez de parties butireuses et séreuses.

Le lait perd ses bonnes qualités, quand la vache est en chaleur, lorsqu’elle approche de son terme, ou qu’elle a mis bas depuis quelque temps : il est aussi de mauvaise qualité, quand l’animal est malade.

Pour connaître l’âge du bœuf et de la vache, on a recours aux dents incisives et aux cornes. Les premières dents tombent à dix mois, et sont remplacées par d’autres, qui sont moins blanches et plus larges. À seize ou dix-huit mois, les dents voisines de celles du milieu, tombent pour faire place à d’autres ; toutes les dents de lait sont renouvelées à trois ans ; elles sont pour lors égales, longues, blanches, et deviennent par la suite, inégales et noires.

Vers la quatrième année, il paraît une espèce de bourrelet vers la base de la corne ; l’année suivante, ce bourrelet s’éloigne de la tête, poussé par un cylindre de corne, qui se forme et qui se termine aussi par un autre bourrelet, et ainsi de suite ; car, tant que l’animal vit, les cornes croissent, et tous les bourrelets qu’on observe, sont autant d’anneaux qui indiquent le nombre des années, en commençant à compter trois ans par la pointe de la corne, et ensuite un an par chaque anneau. Il est bon aussi d’observer que les cornes du bœuf et de la vache deviennent plus grosses et plus longues que celles du taureau.

Le bœuf mange vite, et prend, en peu de temps, toute la nourriture qu’il lui faut, après quoi il cesse de manger, et se couche pour ruminer. Cet animal a quatre estomacs : la panse ou l’herbier, le réseau ou bonnet, le feuillet ou myre feuillet, et la caillette, qu’on appelle encore franche-mulle. Il remplit d’abord les deux premiers estomacs, qui ne forment qu’un même sac, d’une très grande capacité ; après cela il rumine et digère à loisir. La contraction du premier estomac fait passer dans le second une partie des alimens ; celui-ci se contracte à son tour, enveloppe la partie d’alimens qu’il reçoit, l’arrondit, l’humecte, et la dispose à entrer dans l’œsophage, où elle reçoit un nouvel acte de déglutition, pour revenir ensuite à la bouche y être broyée de nouveau.

Il est d’observation que les bœufs qui mangent lentement, résistent plus long-temps au travail que ceux qui mangent vite ; qu’ils sont plus forts lorsqu’on les nourrit au sec, que lorsqu’on les nourrit au vert : ceux des pays élevés et secs sont aussi plus forts, plus vigoureux et plus sains que ceux qui sont élevés dans les pays bas et humides.

Quant au climat, il a une telle influence sur cet animal, qu’il change sa constitution, son caractère et sa structure. La preuve en est dans la différence énorme entre le bœuf anglais et le bœuf italien : celui-ci est petit, lâche ; il a la tête moins ramassée, les épaules moins musculeuses, la poitrine plus étroite, les cuisses et les jambes moins grosses, les pieds plus délicats et moins fermes, tandis que l’autre est charpenté fortement, comme nous l’avons dépeint ci-dessus.

Les pays froids conviennent mieux aux bœufs que les pays chauds ; c’est pourquoi les bœufs de Danemark, de la Polodie, de l’Ukraine, sont les plus gros ; ensuite ceux d’Irlande, d’Angleterre, de la Hollande, et de Hongrie, et les nôtres sont plus petits ; aussi les Hollandais tirent-ils tous les ans des taureaux du Danemark, pour obtenir de belles races et les croiser. C’est une attention que nos cultivateurs n’ont pas en Canada, mais que le gouvernement aura pour eux, quand il aura propagé les connaissances utiles à l’agriculture.

La transition subit d’un climat chaud à un climat froid, fait ordinairement éprouver à ces animaux des maladies inflammatoires ; l’arrangement organique, à la vérité, ne change pas ; mais il faut que les solides et les liquides éprouvent une révolution qui les mette, pour ainsi dire, au ton du climat. En général, plus le degré de chaleur qu’ils quittent est considérable, plus les affections sont grandes, lorsqu’ils passent sous un climat froid.

DES MALADIES
DU BŒUF, DE LA VACHE, &c.


Le bœuf est exposé à un assez grand nombre de maladies internes et externes. Les premières sont, pour la tête, l’apoplexie et l’abattement ; pour la poitrine, l’esquinancie, la toux, la péripneumonie, la courbature, la pulmonie et l’hydropisie de poitrine ; pour le bas-ventre, les tranchées ou coliques, les indigestions, la dysenterie, le dévoiement, le pissement de sang, la rétention d’urine, la suppression, la constipation, la jaunisse, les vers et l’égagropile.

Quant aux maladies externes, celles de l’avant-main sont : le durillon, la fracture des cornes, l’enflure des lèvres, du col de la tête ; l’engorgement des glandes de la ganache, les aphtes, le chancre à la langue, le charbon, l’avant-cœur, l’emphysème, la loupe au coude, l’entorse à la bleime. Les maladies du corps sont : la gale, les dartes, les verrues, la fraction des côtes, l’effort des reins, l’œdème sous le ventre et la brûlure. Les maladies de l’arrière-main sont : l’effort de cuisse, l’éparvin, la tumeur au jarret, le clou de rue, les chicots et l’ulcère.

On saigne le bœuf : 1o de la langue, pour l’appétit perdu, pour les ulcères de la langue, et pour les enflures de la bouche et du palais ; 2o de l’œil, pour les taies, poireaux et blancs sur l’œil ; pour les nuages, enflures et eaux qui s’y forment ; 3o du front, pour les douleurs de tête et autres maux qui y surviennent ; 4o à la racine de la corne, pour les cornes rompues ou foulées par le joug ; 5o à côté de l’oreille, pour les foulures et enflures du cou ; 6o au-dessous de la gorge, pour les étranguillons, l’esquinancie et les sangsues avalées ; 7o au-dessus du cou, pour le chignon pelé, endurci ou enflé ; 8o à l’épaule, pour la dislocation ; 9o au milieu du dos, quand la peau tient aux côtes ; 10o du bas des flancs, pour les douleurs de ventre ; 11o au-dessous de la queue, pour les boyaux gâtés, pour la paresse et pour la dysenterie ; 12o de la cuisse, quand elle est foulée ou déplacée ; 13o du jarret, pour les jambes rompues ; 14o au-dessus de la corne, pour les enflures, endurcissemens, foulures et déboîtements du pied ; 15o du talon, quand l’ongle tombe, ou qu’il est cassé ou fondu ; 16o du fourreau, quand il ne peut pisser, ou qu’il pisse le sang ; quand il a le fourreau ou la verge enflé, ou quelques pierres dans ces parties.

DE LA FIÈVRE.

On s’aperçoit qu’une bête à cornes a la fièvre, en plaçant la main dessous l’épaule entre le coffre, vis-à-vis du cœur ; on sentira alors le battement irrégulier du cœur et des artères.

Dans toute fièvre, on doit saigner hardiment, à proportion de la force de l’animal et de la fièvre. Dans l’intervalle de ces saignées, il faut donner à l’animal forte tisane de benoîte pour le flux noir ou le flux sanguin. Mais si la fièvre se prolongeait jusqu’au troisième jour, on donnerait un breuvage composé d’une demi-poignée, moitié rue, moitié savigny, bouillies dans une chopine de cidre, qu’on laisse diminuer d’un tiers, puis on la coule et on la fait prendre à l’animal.

DES PLAIES.

On doit panser les plaies des bêtes à cornes une fois par jour, et même deux fois en été, à cause de la chaleur ; il faut les panser promptement et doucement, sans meurtrir les chairs, tenir les plaies couvertes, que l’air n’y entre point, jusqu’à ce que l’on voie que la réunion s’opère avec facilité. Les plaies ordinaires, telles qu’apostumes, coupures, boutures, et celles que l’on fait pour aider ou provoquer la suppuration, se pansent de la manière suivante :

On prend une seringue à injection pour lancer dans les plaies de l’eau-de-vie camphrée[1] quand il y a à redouter la gangrène, ou bien du jus de morelle.

Dans les plaies nouvelles l’on emploie de l’eau dont voici la composition. Mettez dans un pot d’eau de fontaine :

4 sous de couperose blanche,
4 blancs d’œufs durcis au feu,
4 pincées du rue.

Faites infuser le tout 24 heures sans bouillir ; l’eau faite, passez-la dans un linge, puis mettez-la dans une bouteille que vous aurez soin de bien boucher. Cette eau se conserve, et même est meilleure ancienne que nouvelle.

L’eau faite avec cynoglosse ou langue de chien, est aussi très-bonne ; mais on ne peut s’en servir qu’en été. En voici la recette :

Mettez 4 poignées de cynoglosse ou langue de chien frottée et écrasée avec les poings, dans trois pots d’eau de fontaine, en y laissant le marc. Cette eau prend la couleur de lessive sous 24 heures. Elle ne se conserve que sept à huit jours, suivant les chaleurs.

Il ne suffit pas seulement de laver les plaies, il faut aussi chaque fois les panser avec de la charpie de corde goudronnée, imbibée de térébenthine, dont on prend un quarteron, et dans laquelle on délaye deux jaunes d’œufs, mettant dans les plaies plusieurs petites lentes, suivant le besoin, sans trop les entasser ; mais cependant de manière qu’elles aillent jusqu’au fond ; il suffit d’y seringuer deux fois par jour l’une de ces eaux, après quoi on met de la poudre à dessécher, dont nous indiquerons la recette à l’article du fourchet (voyez ce mot). On en saupoudre les plaies qu’on veut dessécher, une fois le jour, pendant quatre à cinq jours de suite, sans les envelopper. S’il était trop difficile d’en arrêter le cours, l’on mettrait dans le fond, par plusieurs fois, gros comme un grain de blé de pierre de vitriol de Chypre.

Si dans une plaie il y a apparence de beaucoup de matière, on la dépure avec de la poix noire et de la poix de Bourgogne mêlées ensemble, moitié l’une et moitié l’autre, changeant de cataplasme tous les jours, lequel, tirant beaucoup, calme la douleur.

Dans le cas où il surviendrait hémorragie, on arrête le sang avant de faire aucun pansement, et l’on se sert, à cet effet, de l’herbe à mille fleurs et de la grande éclair pilées ensemble avec du sel, et mises dans la plaie.

DE LA PÉRIPNEUMONINE,

ou inflammation de la poitrine.

Cette maladie épizootique, qui exerce souvent de cruels ravages parmi les bêtes à cornes, se reconnaît aux signes suivans dans l’animal qui en est attaqué.

Une toux plus ou moins sèche, qui quelquefois se fait entendre peu fréquemment dans le commencement, et qui redouble sur la fin.

Une fièvre très-sensible et très-caractérisée.

Une oppression plus ou moins grande, qui augmente lorsque l’animal a mangé, et qui quelquefois n’existe pas ; ce qui néanmoins est très-rare.

Le dégoût que l’on aperçoit à mesure que le mal fait des progrès.

Le défaut de rumination dans les bœufs et autres animaux ruminans comme eux ; mais ce signe est souvent équivoque.

La puanteur de l’haleine.

La sécheresse des naseaux à leurs orifices, et celle de la bouche et de la langue.

Quelquefois un écoulement de matières plus ou moins épaisses, ou plus ou moins blanchâtres.

Mais ni le sixième signe ni les suivant ne sont pas toujours constans.

Remède. — Il est de la plus grande nécessité de saigner à la jugulaire les animaux qui en sont atteints, et même de leur tirer une assez grande quantité de sang, et de répéter la saignée le premier, le second et le troisième jour, s’il en est besoin.

Faire usage de lavements émolliens et rafraîchissans, donnés et réitérés deux et même trois fois dans la journée, pendant cinq à six jours.

La boisson ordinaire sera l’eau blanche ; on y ajoute, si la toux est violente, le mélange suivant :

Prenez : fleurs de violettes et de coquelicot, de chacune deux poignées, versez sur le tout six livres d’eau d’orge bouillante. Faites infuser pendant une heure, coulez, ajoutez à la colature, trois onces de miel commun, mêlé avec la boisson qui sera toujours tiède. Au défaut de ce mélange, l’eau blanche sera miellée.

Des billots placés une ou deux fois par jour dans la bouche de l’animal, produiront de bons effets.

Prenez six figues grasses, 5 onces de miel commun et rosat ; pilez les figues, mêlez, triturez avec le miel ; ou bien 4 onces de sirop violat, 6 jaunes d’œufs, 5 onces d’eau distillée de roses ; mêlez et garnissez-en un billot.

Quand la toux est trop forte et répétée, on peut, outre l’addition faite à la boisson ordinaire, administrer le bol suivant :

Prenez : 3 grammes, blanc de baleine,
3 grammes, poudre de réglisse,
1 dragme, pilules de cynoglosse ;

Mêlez le tout avec une suffisante quantité de conserve d’althæa pour un bol béchique et anodin.

POUMON ALTÉRÉ.

La toux et une grande maigreur sont les signes de cette maladie.

Donnez de temps en temps à l’animal malade du son mouillé, avec une once de sperme de baleine, et une demi-once de soufre, de cinabre et d’antimoine ; ou bien, faites-lui avaler une chopine de vin blanc, avec un peu de miel assaisonné de deux onces de poudre de muscade, deux onces de safran, une demi-once de gingembre, un quart d’once de cannelle et un peu de réglisse ; mêlez et coulez le tout avant de le donner.

BŒUFS ou VACHES
JETANT PAR LES NASEAUX.

Ce jet par les naseaux provient de l’engorgement du poumon. S’il y a ulcère, il n’y a point de guérison ; s’il n’y en a point, on peut guérir l’animal avec la recette suivante :

Remède. — Prenez un quarteron de beurre frais que vous faites noircir sur le feu, comme celui de la friture. Ce beurre retiré du feu, ajoutez-y une très-petite mesure d’eau-de-vie, la même quantité de vinaigre de vin, et deux liards de poivre blanc moulu. Faites avaler ce breuvage à l’animal, et le lendemain faites-lui boire ce qu’il rendra d’urine, dans la matinée, cela pendant quatre ou cinq jours de suite, pendant lesquels et encore trois jours après, vous lui donnerez chaque jour dans de l’avoine, une once, moitié foie d’antimoine et moitié fleur de soufre en poudre. Ayez soin de le faire boire tous tes jours, environ une heure après midi, et de lui donner sa nourriture ordinaire.

DU DÉGOÛT.

Si le bœuf n’est que dégoûté, on le ragoûte avec des poireaux, des ciboules, ou du céleri infusé dans du bon vinaigre et du sel, qu’on lui donnera pendant deux jours ; il faut lui tenir le mufle élevé, pour qu’il ne laisse rien perdre de cette salade pendant qu’il la broie. Il est encore bon de lui donner des feuilles de raves ou raiforts, ou des betteraves cuites et marinées dans du bon vinaigre. Quelques-uns font manger aux bœufs dégoûtés, une rôtie de pain bis, frotté de miel et trempé dans du vinaigre, dont on leur lave le palais et la langue. Il y en a aussi qui ne se servent pour leur frotter la bouche, que de gousses d’ail concassées et infusées dans deux verres de vinaigre ou de verjus, avec un peu de sel et de miel. Une once de thériaque ou d’orviétan, est encore un bon remède contre le dégoût ; on les lui fait prendre dans du vin.

Les remèdes suivans contre le même mal, sont purgatifs. 1° Du marrube avec de l’huile de noix et du vin rouge. 2° Des grains d’encens, de la sabine ou de la rue, qu’on fait avaler dans du vin. 3o Le serpolet pilé et mêlé avec du vin. 4o L’ognon marin, coupé et détrempé dans l’eau. On donne ces remèdes, durant trois jours, dans une pinte de vin.

MALADIES DU COU.

Si l’enflure du cou vient de contusion, appliquez-y un cataplasme fait de miel, de saindoux et de son, le tout bouilli dans du vin blanc.

Si elle vient d’un abcès, prenez de l’onguent althæa, de l’huile de laurier et du beurre frais, deux onces de chacun, battez le tout à froid ; puis frottez le cou du bœuf, et l’enveloppez de linges ; il s’y formera une tumeur que vous ouvrirez avec des ciseaux, l’abcès étant mûr ; pansez tous les jours la plaie, et mettez-y de la racine d’ortie.

Pour les écorchures du cou, employez de la graisse de porc avec de la cire neuve, fondues et mêlées ensemble.

Pour résoudre les duretés du chignon, faites cuire dans de l’eau où il y aura les trois quarts d’huile d’olive, deux onces de racines de lis et autant de guimauve ; faites bouillir le tout pendant une heure, après quoi, ajoutez-y mauve, violette et pouliot bien hachées ; de chacune de ces herbes deux poignées : laissez bien cuire le tout, et appliquez-le tout chaud sur la dureté.

Si le chignon est déplacé, examinez de quel côté il penche ; et tirez du sang à l’opposé, ce qui se fait en battant avec un bois de vigne la grosse veine qui paraît dans cet endroit, et qu’on perce lorsqu’elle est gonflée.

Si le chignon ne perce d’aucun côté, on saigne l’animal aux deux oreilles ; et après la saignée on fait cuire dans un pot, à poids égal, moëlle de bœuf, poix-résine, suif de bouc et vielle huile d’olive, et on en frotte l’enflure après l’avoir lavée avec de l’eau ; après quoi on la laisse sécher.

LA TAUPE, ou ENFLE.

On donne ce nom à un mal qui vient ordinairement aux bêtes à cornes, sur le cou, depuis les cornes jusqu’auprès des épaules. Ce mal est occasionné souvent par quelques meurtrissures, ou par un sang trop épais, qui, y séjournant, forme un dépôt.

Remède. — Il est essentiel d’attendre que la taupe, ou enfle, soit bien formée, pour opérer. Alors on ouvre la peau en quatre, on lève les quatre parties, pour en bien connaître la grosseur ; après quoi on la coupe en entier avec un rasoir, si toutefois le sang ne cache pas le travail ; il faut surtout prendre garde aux nerfs et aux gros vaisseaux sanguins, dont il est quelquefois difficile d’arrêter l’écoulement. S’il arrive que le sang gagne, on cesse l’opération, et on met dans la plaie des orties pillées avec du sel pour arrêter le sang, et mettre à même de couper, le lendemain, le restant jusqu’à la bonne chaire ; après quoi, on répète la pareille dose d’orties et de sel. Si c’est en hiver au lieu d’orties, on se sert d’amadou, qu’on met seulement sur les vaisseaux qu’on voit saigner. Quant à la plaie, on la lave tout les deux jours deux fois avec l’eau forte dont nous avons donné la recette à l’article des plaies des bêtes à cornes, en mettant de la térébenthine, avec de la charpie de corde goudronnée, après avoir incorporé deux jaunes d’œufs dans un quarteron de térébenthine. Si les chairs poussent trop vite, on peut mettre un peu de vert-de-gris dans la térébenthine.

Si c’est en été, il suffit de laver la plaie avec de l’eau de cynoglosse ou langue de chien, dont nous avons donné la recette à l’article des plaies des bêtes à cornes.

Il est essentiel d’attacher un bout de ficelle à chacun des quatre coins de la peau, puis les nouer ensemble pour tenir l’appareil dans la plaie. Souvent il arrive que les chairs poussent vite, et qu’il se forme des bubons de chair gourmande qui empêcheraient la réunion solide ; alors on la saupoudre avec de l’alun calciné en prenant bien garde d’en faire tomber dans la plaie ; ce qui s’opère facilement, en la portant dessus avec un plumasseau. La plaie venant à se former, les quatre lambeaux de peau se retirent, ils tombent, ou on les coupe avec des ciseaux. Ensuite on laisse la plaie découverte ayant soin de la laver deux fois le jour, jusqu’à parfaite guérison, avec une des eaux indiquées ci-devant. Sur la fin du traitement, on saupoudre toute la plaie, avec de la poudre à dessécher, dont la recette est ci-après, à l’article du fourchet. Pour faire revenir le poil, on frotte la place de miel un peu chaud.

ESTRANGUILLONS
ou étranguillons.

On appelle ainsi les glandes qui se forment sous la gorge du bœuf ; elles proviennent des humeurs qui découlent d’un certain refroidi.

Remède. — Saigner l’animal sous la langue et au cou, et ayez soin d’ouvrir soir et matin les glandes avec une lancette. Frottez le dessous de la gorge avec de l’huile de laurier et du beurre frais battus ensemble à froid. La tête de l’animal doit être bien couverte et tenue chaudement.

DU QUARTIER TACHET.
ou Lovet.

Pour connaître si un bœuf ou une vache a le quartier, il faut chercher sous le gosier si on y trouve une glande comme une petite noix ; si cette glande existe, c’est une preuve qu’ils sont attaqués de cette maladie, qui est commune aussi aux chevaux. On cherche aussi dans tous les membres si la peau de la bête ne feuillette point, et s’il n’y a point d’enflure ; si ces symptômes existent, faites ce qui suit.

Remède. — Prenez un bon verre d’huile d’olive ; idem, de bon vin, une tête d’ail ou un peu de poivre ; pilez le tout ensemble, et faites-le avaler à l’animal. S’il a une des jambes tirante, qu’il ait de la peine à marcher, saignez-le aux petits onglons de la jambe malade. Si vous vous apercevez que le mal soit dans le corps de la bête, faites-lui deux ouvertures derrière chaque épaule, et mettez dans les ouvertures de la racine d’ortie avec un peu de sel. L’on ne donne à la bête que peu de nourriture, jusqu’à ce qu’elle se porte mieux.

POMMES
ou poires dans le gosier.

Comme cet accident empêche l’animal de respirer, il enfle, bave et étouffe. On peut avec la main sentir la pomme ou poire à travers du gosier ; il n’y a que de forcer avec la main, en poussant le fruit pour le faire entrer à force dans le corps, ce qui arrive fort souvent ; dans le cas où elle n’entrerait point, il faudrait pousser avec la queue d’une pelle à feu, le tenir ferme, et pousser le plus droit qu’il serait possible.

DE LA TOUX.

Les causes ordinaires de la toux du bœuf sont le froid, la poussière, la sécheresse des poumons.

Remède. — Faites une décoction d’hyssope pour la lui faire boire, et donnez-lui des poireaux pilés avec du froment. Si ce remède ne réussit pas, prenez deux verres de miel, autant d’huile, avec deux onces de vieux-oing et autant de beurre frais ; faites bouillir le tout et avaler au bœuf : si la toux s’opiniâtre, faites avaler à l’animal une verrée du suc de l’herbe appelée marrube, mêlé avec autant d’huile de noix, autant de vin rouge et moitié sel.

DES MALADIES DES PIEDS.

L’enflure se guérit en y appliquant des feuilles de sureau broyées avec du sain-doux.

Pour l’entorse, on fait bouillir ensemble du miel, du sain-doux et du vin blanc, puis on en frotte le mal quatre fois par jour. S’il y a dislocation, il faut remettre l’os et se servir du remède ci-dessus ; s’il y a rupture entière, il n’y a plus de remède.

Pour l’enclouure, on ôte du pied le clou ou chicot, puis on met sur la plaie de l’huile toute chaude, et par-dessus des étoupes qu’on enveloppe de linges.

Le soc de la charrue blesse souvent le bœuf aux pieds. Dans ce cas on prend du vieux-oing, de la poix noire et du soufre qu’on mêle ensemble, et qu’on applique sur la plaie, avec de la laine et du linge par-dessus.

Le froid fait quelquefois boiter le bœuf ; pour lors il faut lui laver le pied malade, y faire une ouverture avec la lancette, laver la plaie avec de l’urine, ensuite la saupoudrer de sel, y infuser de l’huile chaude simplement, ou avec de la cire, et l’envelopper de linges.

Le sang extravasé fait aussi boiter le bœuf. Dès qu’on s’aperçoit du mal, on doit visiter la corne du pied, frotter l’endroit où l’on sent de la chaleur, et l’animal de la douleur, et déscarifier pour en faire sortir le sang ; mais si ce sang a déjà pénétré l’ongle, il faut (crainte d’un plus grand désordre) fendre l’ongle dans le milieu de la fourchette, ensuite imbiber des étoupes de vinaigre mêlé de sel, et les appliquer sur la plaie avec un bandage. Le bœuf ne doit pas mettre son pied dans l’eau, ni dans rien d’humide. Le premier appareil levé, on nettoie bien la plaie, puis on applique de nouveau des étoupes imbibées de vinaigre, d’huile et de sel.

Si on s’aperçoit que le sang soit descendre jusqu’à l’extrémité de la corne, il faut la couper par le bout jusqu’au vif, afin que le sang en sorte.

Si le genou du bœuf boiteux enfle, il faut le lui frotter avec du vinaigre chaud, et y mettre de la graine de lin imbibée d’eau et de miel ou de vieux levain, de l’urine d’homme, ou autres semblables résolutifs.

LE FOURCHET.

Il s’amasse assez souvent dans le fourchet des pieds, soit de devant, soit de derrière des bêtes à cornes, du pus qui se racornit comme un peloton jaunâtre de chair morte, quelquefois de la grosseur d’un jaune d’œuf, et qu’il faut extirper dans la suite. Ce mal fait boiter considérablement l’animal qui en est atteint.

Remède. — Faites de la bouillie avec de l’eau, de la farine de froment, deux blancs de poireaux pilés, et gros comme un jaune d’œuf de graisse de porc fondu ; mettez cette bouillie sur des étoupes, et enveloppez-en la partie malade deux fois en deux jours ; après quoi, mettez dessus le mal parties égales de vert-de-gris, sucre blanc et poivre, le tout en poudre, et un restringent en cataplasme sur des étoupes, composé de suie grasse broyée et passée au tamis, incorporée dans des blancs d’œufs, procédé que l’on suivra, tous les jours, jusqu’à ce que l’on puisse décharner le peloton de mauvaise chair : il se tire avec le doigt ou le couteau, après quoi il reste un creux dans lequel mettez deux ou trois fois, sans enveloppe, du tare. Incorporez ici de la poudre à dessécher dont voici la recette :

½ Once de mine de plomb,
3 Gros de vert-de-gris,
½ Once de blanc de céruse,
2 Gros de sucre blanc,
3 Gros de litarge d’or,
½ Once de poivre ;

Le tout réduit en poudre et mêlé ensemble.

Clou dans le pied, épine, esquille de bois, ou petit amas de pus.

Après avoir tiré d’abord tous les corps étrangers, faites ouverture à la corne sur le mal, afin de laisser les matières s’écouler, au lieu de séjourner dans cette partie. Introduisez dans cette ouverture de l’huile d’aspic chaude, ou suif avec du poivre, que vous faites bouillir dedans avec des pinces à feu rouges : répétez l’opération jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de matière.

Dans le cas où la matière aurait séjourné, et viendrait à sortir par la couronne du pied, on mettra autour de la couronne le restringent désigné à l’article Gros galet, ayant soin de tenir l’ouverture faites sous le pied, toujours ouverte pour en faciliter l’écoulement. Dans le cas où les matières seraient trop abondantes, l’on ne mettrait point d’abord le feu, ni d’huile d’aspic, mais bien parties égales de vert-de-gris, sucre blanc et poivre, le tout en poudre ; on fera ce pansement tous les jours, jusqu’à ce que l’abondance des matières soit tarie, après quoi on y mettra suif et poivre, et on fera bouillir comme nous venons d’expliquer.

DES GROS GALETS.

La plupart des maladies des animaux employés aux usages de l’homme, proviennent de la fatigue et de travaux forcés. Il arrive souvent que l’animal ayant marché plusieurs jours de suite, il se forme une courbature dans le gros galet, ce qui le fait tomber, si l’on n’y apporte prompt remède.

Remède. — Quand on voit que l’animal boite fort bas, il faut lui envelopper le pied dans un cataplasme fait des oignons cuits et de la graisse de porc, appliquer le tout ensemble chaud, une fois chaque jour, pendant trois jours ; ce qui amène la guérison.

Quand le galet est tombé, il faut mettre dessus parties égales de vert-de-gris, sucre blanc et poivre, le tout en poudre, pour empêcher qu’il ne croisse de petits boutons de chair vive : le galet ainsi saupoudré, appliquez-y un restringent, tel que de la suie grasse broyée, passée au tamis, incorporée dans des blancs d’œufs et un peu de vinaigre de vin. Faites le pansement de cette manière pendant quatre ou cinq jours, d’après la disposition des chairs. Lorsqu’il ne paraît plus de chair trop vive, ni d’excroissance, pansez seulement avec le cataplasme restringent, et sur la fin n’y mettez que du tarc chaud, sans envelopper le pied, en prenant garde qu’il ne mette ce pied dans l’eau, jusqu’à parfaite guérison.

DE LA FOURBURE.

Le bœuf attaqué de la fourbure, à peine à marcher ; et en marchant il avance ses pieds l’un près de l’autre, par la peine qu’il a de les mouvoir, surtout s’il est fourbu du devant et du derrière.

Le pansement est égal pour une partie comme pour deux.

Remède. Coupez les huit petits galets ou cafignons qui saigneront beaucoup ; cette saignée suffit quelquefois pour guérir l’animal ; répétez la, si elle est insuffisante, mais que ce soit à la jugulaire, en observant que si les jambes sont enflées, il faut les graisser avec partie d’huile d’aspic et d’huile de laurier un peu chaudes.

MAL DE TÊTE.

Les signes des maux de tête sont lorsque le bœuf a cette partie enflée et plus chaude que de coutume, et qu’il jette par les yeux et les naseaux beaucoup d’humeurs.

Remède. Il faut le saigner au cou, et faciliter l’écoulement des humeurs. À cet effet, pilez de l’ail que vous mettrez infuser à froid dans du vin, l’espace de deux heures et le lui seringuez dans les naseaux.

On peut aussi lui frotter la langue avec du thym, de l’ail, du sel, broyés ensemble et mêlés dans du vin rouge.

Remède. — Faites bouillir dans deux pintes d’eau, réduites à trois chopines, deux poignées des herbes suivantes : centaurée, cardamome, pouliot, guimauve, ellébore et fenouil ; joignez-y une once de séné, que vous laissez infuser sans bouillir, demi-livre de miel, un peu de sel, trois Cuillerées d’huile de noix, deux onces de poudre d’agaric et trois onces de casse : mêlez, coulez et donnez le tout en lavement.

Si c’est en été, sa nourriture doit être rafraîchissante, comme feuilles de vigne, laitue, chicorée sauvage, et de l’eau blanchie avec de la farine de seigle ; en hiver on le nourrira d’orge, d’avoine et du meilleur foin, d’eau blanchie de farine d’orge.

ABCÈS À LA TÊTE.

On connaît qu’un abcès se forme à la tête, lorsque l’animal porte sa tête basse ; les paupières s’enflent, les yeux sont bordés de rouge et larmoyans, et il s’exhale une grande chaleur par les naseaux.

Remède. — Saignez, dans les vingt-quatre heures, les huits petits galets, et si le mal continue, faites deux saignées au cou en douze heures : donnez des breuvages rafraîchissans, tel qu’un pot d’eau dans laquelle aura bouilli du son ; joignez-y une demi-livre de miel et deux onces des quatre semences froides pilées ; si c’est en été, mettez dans votre eau de son, deux poignées de pourpier pilé ; répétez ce breuvage deux ou trois fois le jour.

CORNES CASSÉES
ou trop recourbées.

S’il arrive qu’une bête à cornes se casse une corne, et qu’elle ne soit pas tombée tout-à-fait, il faut la faire sauter à l’endroit par où elle est cassée, pour avoir plus de facilité à en arrêter l’hémorragie, que l’on fait cesser avec une poignée d’orties grièches ou orties à fleurs blanches, pilées avec une demi-poignée de sel, et l’envelopper avec des étoupes. Il arrive aussi souvent que les cornes recourbées rentrent vers la tête et blessent l’animal, alors on les coupe par le bout avec un fer tranchant que l’on a fait rougir.

HÉMORRAGIES DU NEZ.

On arrête ces hémorragies au moyen d’une ou deux saignées, suivant la force de l’animal, et la quantité du sang qu’il a perdu. On le met ensuite dans l’eau jusqu’au ventre, un quart-d’heure en hiver, et une heure en été.

MAL D’YEUX.

Si le bœuf a les yeux enflés, mettez-y dessus de la farine de froment détrempée clairement avec de l’eau et du miel. Si on aperçoit quelques blancheurs dans l’œil, servez-vous du sel ammoniac pulvérisé et mêlé avec du miel ; et si les yeux pleurent, servez-vous du premier remède, mais employez la farine d’orge cuite au four, au lieu de celle de froment.

La graine de panais sauvages, mêlée avec le suc de raifort et de miel, est encore un bon remède pour ce mal.

DE L’ONGLÉE
et autres maux des yeux.

On désigne ainsi une taie qui part du coin de l’œil, et vient couvrir la prunelle. On extirpe ce mal avec un sou marqué qu’on introduit doucement pardessous ; ensuite, avec une aiguille et du fil, on perce la taie, en prenant les deux bouts du fil qu’on tire à soi, l’on coupe avec les ciseaux la circonférence de cette taie, il faut avoir soin de tenir bien ouvertes les paupières de l’animal. L’opéraaon faite, soufflez un peu de sucre blanc ou de sel de verre une fois seulement.

Quant aux coups et meurtrissures de l’œil, il faut y appliquer une compresse imbibée de bon vin vieux rouge chaud.

Pour les autres maladies des yeux, telles que fluxions et autres humeurs et taies qui se forment dessus ou dans la prunelle, il faut saigner dans le commencement à la veine du cou jusqu’à deux fois en 24 heures, et souffler tous les jours une fois, dans les yeux, du sel de verre calciné de lui-même ; et, à défaut de ce verre, de la poudre de tuile ou cloportes.

DE L’ARAIGNÉE OU ÉRAIGNIE.

Cette maladie survient aux bestiaux, pour avoir avalé, soit une araignée ou un autre insecte venimeux, et encore pour avoir mangé de l’herbe imbibée de rosée. On la distingue ordinairement par une enflure générale qui paraît promptement, et qui est précédée d’une pesanteur de tête, d’une faiblesse qui les empêche de se tenir sur leurs pieds, et d’un tremblement universel ; il leur sort par les yeux, les naseaux et la bouche, une sérosité visqueuse et corrosive, presque toujours accompagnée d’une toux violente.

Remède. — Faites prendre aux bœufs ou vaches attaqués de cette maladie, une bouteille de vin blanc chaud, avec un quarteron de sucre et une pincée de sel, en deux fois, et à une heure d’intervalle : une heure après, prenez une bouteille de lait sortant du pis de la vache, sans être coulé, avec un quarteron de miel fondu dedans, que vous leur ferez prendre aussi en deux fois, et à une heure d’intervalle.

Administrez-leur ensuite, matin et soir des fumigations faites avec des savates ou des herbes aromatiques. Ventousez, s’il est nécessaire, et lavez la plaie avec du vinaigre de vin, du sel, du poivre et de l’ail pilé.

SANGSUES AVALÉES.

Il arrive quelquefois qu’une bête à corne, en buvant dans un ruisseau ou une rue, avale une sangsue : alors il faut mettre dans la bouche de l’animal le tuyau d’un entonnoir qui reçoit la vapeur des punaises qu’on brûle dessous ; ou bien si la sangsue est attachée au palais, il faut prendre une feuille de figuier, ou un morceau de drap rude, pour la détacher : mais si elle est descendue dans l’estomac, et qu’elle se soit attachée à son orifice, qui se gonfle de façon que le bœuf ne puisse plus prendre de nourriture, alors on peut faire avaler à l’animal une grande quantité d’huile, ou de vinaigre, ou de la saumure.

DE L’ENFLURE.

La peau du bœuf qui a avalé un insecte, ou qui a été piqué par une bête venimeuse, enfle quelquefois si fort qu’elle retentit comme un tambour.

Remède. — Placez dans le fondement du bœuf, trois ou quatre doigts en avant, une corne percée ; puis promenez l’animal jusqu’à ce qu’il rende des vents. Frottez la piqûre d’orviétan ou de thériaque ; vous pouvez même lui en faire avaler, en faisant précéder une décoction émolliente.

BARBES OU BARBILLONS.

Ces barbes ou barbillons ne sont autre chose qu’une excroissance de chair qui vient sous la langue du bœuf, et qui l’empêche de manger ou de paître ; c’est pourquoi il faut les lui couper avec des ciseaux, et laver ensuite la plaie avec du vinaigre et du sel ; à défaut on peut se servir de sain-doux et de sel écrasé fort menu.

De la maladie appelée

SUR-LANGUE OU CHANCRE-VOLANT.

Ce mal se manifeste par une espèce de pustule ou vessie, qui survient au bétail au-dessus ou au-dessous de la langue, ou plus bas contre le gosier, où il s’établit une pourriture qui leur fait tomber la langue en vingt-quatre heures, si l’on n’y apporte promptement le remède suivant :

Remède. — I. Il faut racler la plaie, vessie ou crevasse, avec une cuiller ou une pièce d’argent, jusqu’à ce qu’elle saigne bien, en prenant garde surtout que la bête n’avale ce qui se détache en raclant.

II. Laver la plaie avec de l’eau fraîche.

III. Prendre une pièce ou coupon de drap rouge ou écarlate, la tremper dans du vinaigre et du sel, et en frotter la plaie plusieurs fois, la trempant chaque fois ; puis on aura soin de brûler la dite pièce de drap, pour éviter l’infection, et ce morceau de drap ne pourra servir que pour une seule bête malade.

IV. Prendre de l’ail, de la sauge, artichauts sauvages, qu’on appelle autrement joubarbe, et en latin, sempervivum majus, qui croît sur les toits ou murailles ; du plantain, de la racine d’impératoire ; piler le tout ensemble, puis le mêler avec du sel, de l’alun et du vinaigre, et en frotter la plaie et toute la gorge assez longtemps.

Préservatif. — Lorsque ce mal survient dans un pays, les propriétaires des bestiaux doivent avoir soin de visiter souvent la langue et la gorge du bétail et les lui laver de temps en temps avec du vinaigre et du sel, et donner à manger tant au bétail sain que malade, du pain avec de bonnes herbes hachées et mêlées avec du sel.

ENFLURE DU PALAIS.

Faites une petite incision au palais, ou saignez-le à la veine du palais, que vous frottez ensuite de sel ou de vinaigre, ou donnez-lui une fois de l’ail bien pilé ; il faut alors avoir soin de nourrir d’herbes tendres, comme feuille d’orme, de vigne ou de foin.

DU FLUX DE SANG,

ou de la maladie appelée vulgairement le sang
rouge ou le sang blanc.

Le flux de sang se manifeste quand les animaux ne peuvent fienter qu’avec peine. Ils rendent par intervalle quelques matières glaireuses, qui ne tardent pas à dégénérer en un flux de sang très-douloureux.

Remède. — Prenez une bouteille de lait sortant du pis de la vache avant d’être coulé ; joignez-y un quarteron de miel, une demi-poignée de sel, et la valeur d’une petite noix de crasse de cheminée réduite en poudre : mêlez bien le tout ensemble ; faites-le chauffer et avaler tiède ; immédiatement après, donnez air par le fondement. Si cela ne suffit pas, au bout de quelques heures donnez un lavement de petit-lait bouilli avec une poignée de putrelle, herbe toujours verte, et qui croît communément dans les jardins. Quant le petit-lait aura bouilli, passez et réduisez-en la quantité à une bouteille par lavement ; ajoutez-y une pincée de sel bien grugé, trois onces de miel et un petit gobelet d’huile douce ; ayez soin que le tout soit bien mêlé : en exécutant bien cette recette, vous êtes certain de la prompte guérison de l’animal malade.

DU FLUX DE SANG DES BESTIAUX.

Lorsque l’on s’aperçoit que le bétail est attaqué du flux de sang, il faut lui administrer promptement le breuvage suivant :

Prenez 1 chopine de vin,
2 gros, roses de provins,
½ once, poudre de coque de gland,
3 gros, poudre très-fine de brique, ou de tuile.
1 demi-muscade ;

Faites infuser le tout une demi-heure sur la cendre chaude, puis donnez ce remède à l’animal, et laissez-le reposer pendant quatre heures sans lui rien faire prendre. On peut mettre dans le dit breuvage une demi once de sumac ; réitérez ce remède selon le besoin.

Il est une autre espèce de flux de sang, nommé lente, pour la guérison duquel prenez une grosse poignée de verveine que vous faite bouillir dans un pot de vin, jusqu’à ce qu’il soit réduit à moitié ; faites avaler cette boisson à la bête malade, le plus chaud que vous pourrez, et immédiatement après, faites-lui manger un picotin de seigle. Ayez soin de la bien couvrir, et de ne lui donner de nourriture que deux heures après.

RÉTENTION D’URINE.

Les efforts que fait le bœuf pour uriner, sans le pouvoir faire, sont un signe évident de cette maladie. Pour la guérir, faites bouillir ensemble de la pariétaire, du séneçon et des racines d’asperges ; mêlez-y du beurre frais, et appliquez le tout aux bourses du bœuf dans un linge. Continuez ce traitement jusqu’à ce qu’il urine aisément.

Pour nourriture on lui donne des feuilles de raves copieusement et souvent, à midi un picotin de son mouillé, et autant le soir, et pour breuvage (pendant trois matins), une chopine de vin blanc qu’on fait bouillir avec deux cuillerées d’huile.

La graine de céleri bien pilée et avalée avec du vin blanc est encore un bon remède.

Ou bien encore, trois onces de colophane mise en poudre, dans une livre de vin blanc.

PISSEMENT DE SANG.

Aussitôt que l’on s’aperçoit que le bœuf pisse le sang, il faut lui retrancher toute boisson, et ne lui donner que le breuvage suivant :

Prenez une chopine d’urine d’homme, autant d’huile d’olive, six œufs frais et une pleine main de suie de four : battez le tout ensemble et faites le lui avaler : après quoi, liez-lui les oreilles, que vous battez avec une petite baguette, jusqu’à ce qu’elles soient toutes rouges ; alors, percez-lui les petites veines que vous verrez, il en sortira du sang presque vert. Cela fait, mettez-lui du sel dans la bouche, et promenez-le ; ou bien, prenez deux pintes d’eau de jus de plantain, moitié vinaigre et huile d’olive, joignez-y gros comme un œuf de pigeon de concombre sauvage pulvérisé, avec autant de coques d’œuf ; mêlez le tout et faites-le lui avaler.

Il est bon de donner au bœuf quelques lavemens rafraîchissant, dont voici la recette :

Prenez du mélilot, de la pariétaire et de la camomille, de chacun trois poignées. Faites-en une décoction dans deux pintes d’eau, laissez-la réduire à une, et coulez ; ajoutez-y une demi-livre d’huile de lin ou de noix, du miel, deux onces de casse, et une chopine de verjus ; le tout ainsi incorporé, administrez-le tiède à l’animal.

TESTICULES ENFLÉS.

Frottez les parties affligées de saindoux ou de la fiente de l’animal même, mêlé avec des fleurs de camomille et de mélilot.

Si le mal vient d’inflammation, il est dangereux : alors servez-vous d’huile rosat, blanc d’œuf, eau rose, et de lait, mêlez le tout et frottez-en les testicules.

Ou bien du suc de plantin, ou du pourpier mêlé avec l’huile rosat et des blancs d’œufs : il est bon de mener le bœuf à la rivière, pour lui faire baigner à l’aise les parties enflées.

DE L’INDIGESTION.

On connaît qu’un bœuf ne digère point, lorsqu’il a les nerfs tendus et roides, les yeux pesans ; qu’il ne remue point ; qu’il rote et que son ventre gronde.

Remède. — Nourrissez le bœuf de choux bouillis, arrosés de vinaigre ; si l’enflure survient au ventre, fourrez dans le fondement de l’animal, votre main frottez d’huile, pour en tirer la fiente ; promenez-le ensuite un peu. Si la douleur continue, prenez des figues sauvages sèches, broyez-les, et les lui donnez avec neuf fois autant pesant d’eau chaude ; ou bien, faites manger au bœuf des oignons coupés et mêlés avec une livre de miel, deux onces de sel, et promenez-le ensuite.

DE LA BOUCHURE DU DEVANT.

Cette indisposition se manifeste en ce que l’animal ne pouvant respirer, bave, enfle et tombe comme mort. Ce qui arrive assez souvent à une bête qui mange goulûment, sans mâcher suffisamment son manger, qui reste en pelote dans son gosier. Quelques fois à force de se débattre la pelote passe. On peut aussi aider avec la main, la coulant le long du gosier, depuis la gorge jusqu’à la poitrine, pour l’aider à descendre. Mais si elle refuse, ou reste dans le gosier, ou dans la poitrine :

Remède. — Donnez promptement un breuvage composé de vingt-cinq blancs d’œufs, dans lequel vous mettrez un demi-quart d’huile d’olive ; ajoutez-y deux ou trois onces de gros plomb à tirer ; faites prendre le breuvage et promenez ensuite l’animal.

DU FARCIN ET DE LA GALE.

Quand l’animal est attaqué de farcin, il faut lui donner chaque jour un breuvage composé d’une chopine d’eau dans laquelle auront bouilli, un demi quart-d’heure, deux onces de racines de patience ; continuez de donner ce breuvage pendant six jours.

Pour le farcin comme pour la gale, il faut saigner la veille de la friction, qu’on fera avec la graisse suivante :

Graisse. — Prenez pour 1 fr. 20 c. de vif argent, que vous incorporez dans une livre de graisse de porc, que vous jetez dans un mortier ; remuez bien le tout ensemble, jusqu’à ce qu’il soit transparent.

Cela fait, ajoutez-y une demi-once de vert-de-gris, deux onces de blanc de céruse, le tout en poudre ; mêlez-les bien ensemble, et faites-en la friction sur toutes les parties attaquées, avec un petit morceau d’étoffe ; graissez légèrement au feu ou au soleil, ayant soin surtout que l’animal, pendant trois jours, n’aille pas à la pluie. Si c’est une vache, ne graissez point la mamelle.

DE LA JAUNISSE.

La jaunisse se connaît par le tour de la prunelle des yeux qui est jaune, ainsi que le dedans des lèvres. Elle est assez souvent occasionnée par le défaut de bonne nourriture, ou parce que l’animal aura souffert long-temps, faute d’avoir été saigné.

Remède. — Saignez deux fois en quatre jours, et donnez deux breuvages dans le courant de ces quatre jours. Ces breuvages s’administrent le jour qu’on ne saigne pas ; ils sont composés d’une chopine de poiré, dans laquelle on met une once de safran et une once de foie d’antimoine ; après quoi, faites herber de la manière indiquée au mot Pienne, page 44.

DE L’INFLAMMATION DES MUSCLES.

Si le bœuf, par accident, s’est laissé tomber en quelqu’endroit dur et pierreux, et que cette chute lui ait causé de l’inflammation dans les muscles, soit intérieurs, soit extérieurs, il faut que, rendu à l’étable, on l’empêche de remuer de place : il faut lui bassiner la partie offensée avec de l’eau froide, après il faut user de linimens confortatifs qui ne soient pas trop chauds.

On reconnaît ce mal, lorsque les reins du bœuf s’endurcissent, que les testicules se raccourcissent, en sorte qu’il n’en paraît presque plus ; lorsqu’il ne remue la cuisse à son aise, et qu’il ne se relève qu’avec peine lorsqu’il est couché.

MAL DE CŒUR.

Les signes de cette maladie sont les yeux tristes, ou le battement fréquent des flancs, avec un penchement de tête occasionné par les nausées.

Remède. — Faites avaler au bœuf une chopine de vin rouge avec gros comme une noisette d’orviétan ou thériaque, et frottez-lui le mufle avec de l’ail. Deux heures après, faites-lui prendre des rôties au vin, ou une copieuse salade de poireaux, cives, ciboules, céleri, ou autres, herbes fortes bien assaisonnées de vinaigre et de sel.

Si l’animal ne se remet pas, ou que le mal empire, on lui fera prendre une décoction de bourrache, violette, buglosse et mélisse ; on lui lavera souvent la bouche avec du vinaigre. En hiver, autant de girofle pulvérisé et mêlé dans du vin avec un peu de sucre, ou simplement du girofle avec du suc de marjolaine.

LE MAL DE CERF.

L’animal atteint de ce mal, a le cou raide, médiocrement enflé, ainsi que la tête : cette maladie provient d’une eau rousse qui circule entre cuir et chair, tant au cou qu’à la tête, et qui le rend furieux, fou et comme égaré. Cette eau rousse corrode et corrompt presqu’aussi promptement que la gangrène. Ce mal est pestilentiel et se communique aisément. Avant que l’animal ait les symptômes ci-dessus désignés, on lui administre le remède suivant :

Remède. — Tirez de l’œil gauche, environ trois onces de sang, de chacune des bêtes à cornes, à l’exception des génisses, desquelles on en tire moins. Le lendemain matin, mettez sur le feu, dans une chaudière, autant de chopines de vin blanc ou du bon vieux poiré, que vous aurez de bêtes, autant de deux têtes d’ail pilées, autant de muscades aussi pilées, autant de deux gros d’extraits de genièvre, le tout infusé dans votre vin ou poiré, que vous laisserez sur le feu sans bouillir : après quoi, donnez à chacune des bêtes une chopine de ce breuvage, observant d’en donner moins aux génisses.

DE LA PIENNE.

La pienne, dans les bêtes à cornes, provient d’un sang trop sec et trop chaud, qui, desséchant la peau, la resserre de façon qu’on a peine à la détacher avec les mains ; lorsqu’on la touche, elle craque comme du bois sec. L’animal est toujours maigre quand il est attaqué de ce mal.

Remède. — Faites à l’animal une saignée à la veine du cou, dite jugulaire ; le lendemain, tenez-lui, pendant douze heures environ, un drap de lessive imbibé d’eau sur le corps, ayant soin de le remouiller souvent ; puis donnez-lui deux breuvages, pendant les douze heures. Ces breuvages doivent être composés d’une chopine de vin blanc ou de bon poiré, dans laquelle on met une once et demie de cumin, et une once et demie de manignette en poudre ; après quoi, faites herber l’animal.

Herber l’animal, c’est lui pincer environ deux pouces et demi de large la peau de dessus la poitrine, et la percer d’un quart-d’heure à l’autre avec une grosse allène ; et, après, y passer une racine d’ellébore noir, appelé dans le public pas-de-corbeau, de la grosseur d’un fil de fer, de laquelle on aura extirpé avec un couteau, la petite pellicule noire ; ensuite on la passera dedans, de façon que chaque bout sorte par les deux trous que l’on a faits, tirant la peau par les deux côtés, afin que cette racine appuie sur la poitrine. On la laisse ainsi pour amasser en cette partie le trop d’humeurs que pourrait contenir l’animal ; humeurs, qui, par la suite, doivent disparaître d’elles-mêmes.


DES TUMEURS ET APOSTUMES.

Commencez par la saignée, pour diminuer le volume du sang dont le cours est arrêté dans la partie attaquée ; examinez ensuite, dans les vingt-quatre heures, si l’humeur est fixée : car, après la saignée, elle peut changer de place et se dissiper peu à peu. Graissez la partie enflée une fois le jour avec de l’onguent de basilicum chaud, pour provoquer la suppuration ; et, s’il est nécessaire, faites ouverture quelques jours après pour faire écouler les matières, si toutefois il y en a ; pansez ensuite la plaie, comme nous l’avons indiqué à l’article, Plaies, page 14.

DES VERS DE BOUVIER

Ces vers se forment ordinairement entre cuir et chair, et sont presque de la grosseur du pouce, quelquefois en si grande quantité que l’animal en a jusqu’au cou et aux jambes, ce qui produit toujours l’étisie.

Remède. — Saignez l’animal deux fois en huit jours, à la jugulaire ; et à mesure que les vers ont fait un trou au cuir, imbibez-le d’huile d’olive, deux fois par jour. Ne pouvant supporter l’huile et ne tardant pas à percer le cuir, ces insectes s’empressent de sortir. On fait sortir les vieux par les trous déjà faits, en pressant le cuir avec les doigts.

DU CHARBON.

On a remarqué généralement sur la maladie, dite le charbon, qu’elle se manifestait extérieurement par des tumeurs de la grosseur d’une noix : souvent il n’en paraît qu’une qui prend au flanc, et qui s’augmente insensiblement en se communiquant par des fusées jusqu’aux bourses, qui grossissent prodigieusement. Cette tumeur est dure et noire, et ne contient point de pus. Les vaisseaux voisins de cette tumeur enflent, s’engorgent, et deviennent durs et tendus comme des cordes ; quand ces tumeurs paraissent au poitrail et aux lieux les plus voisins de la tête, à peine a-t-on le temps de secourir l’animal. Quelquefois la peau se sillonne et se fend en divers endroits, et particulièrement aux pieds.

Remède. — Aussitôt qu’une tumeur paraît, il faut ventouser en avant du mal, et continuer la même opération en avant des autres tumeurs, s’il en reparaît. On ouvre ensuite chaque tumeur avec un rasoir, et on lave la plaie jusqu’au vif avec du vinaigre de vin, mêlé de sel, d’ail pilé et de poivre. On continue ces soins jusqu’à l’extinction du venin.

La saignée que se permettent certains praticiens, est pernicieuse, parce qu’elle ne sert qu’à faire circuler plus promptement le venin et à aggraver le mal.

ABCÈS DANS LE CORPS

Il serait difficile de distinguer ce mal si ce n’est par la force de la fièvre, et quand l’animal ne mange point. Si d’autres causes n’occasionnent point ce désordre, il faut faire de suite ce remède.

Remède. — Saignez à la jugulaise deux fois par jour, même trois fois si l’animal a beaucoup de fièvre, et même répétez le lendemain, s’il en est besoin : donnez-lui chaque jour un breuvage rafraîchissant, composé d’eau de son, dans lequel vous pilez un quarteron des quatre semences froides. Ayez soin aussi de lui donner force de benoîte, que l’on prépare ainsi :

Prenez six poignées de benoîte, feuilles et racines, et faites-les bouillir pendant un quart d’heure dans six pots d’eau.

BATTEMENT DE FLANCS.

Le battement de flancs dénote une grande inflammation d’entrailles. Il faut alors laisser reposer le bœuf, et lui administrer un lavement composé d’une décoction de bourrache, chicorée sauvage et bettes, le tout bouilli dans du petit-lait de vache ; on y ajoute quatre onces de miel, et autant d’huile de noix. Le lendemain on lui fait avaler une pinte d’eau tiède avec du suc de poireaux ; enfin, on lui applique sur les parties affligées un cataplasme fait avec de l’amidon et des graines de choux, le tout pilé ensemble et délayé dans l’eau froide. Après quoi, il faut laisser reposer l’animal.

DU MAL DE VENTRE,
ou de la Colique.

On reconnaît que l’animal souffre du mal de ventre ou de la colique, lorsqu’il se tord, piétine, se couche : quand, en se relevant, il tremble, c’est que le mal est causé par le froid.

Remède. — Prenez une quantité convenable d’huile de rabette, chauffée par trois fois sur le feu, dans une poêle, comme de la friture : la laissant refroidir un peu dans l’intervalle des trois fois qu’il faut qu’elle soit chauffée, de peur que le feu n’y prenne ; étant tiède, faites-la prendre à l’animal, que vous tiendrez chaudement pendant quatre heures.

DES TRANCHÉES DU BŒUF.

On reconnaît que le bœuf en est attaqué, lorsqu’il se plaint, allonge le cou, se lève et se couche souvent, change de place et sue : c’est une maladie du printemps, qui provient d’une grande abondance de sang, ou de toutes autres causes générales, comme de la nourriture, de la boisson, etc.

Pour faire cesser ces tranchées, fendez les extrémités de la queue et des oreilles, et frottez rudement son ventre avec un bâton ; après quoi promenez-le une heure, et couvrez-le ensuite pour le tenir chaudement à l’étable. Donnez-lui pour nourriture du bon foin ; et à midi un picotin d’avoine, une poignée de farine de froment dans de l’eau tiède pour boisson.

Si ce remède n’opère pas, faites-lui avaler des oignons cuits trempés dans du vin ; et chauffez-lui le ventre avec une boisson, ou une poêle bien chaude.

Une poignée de graines de céleri et autant de concombre, mêlées avec du miel et du vin, sont aussi un bon remède à opposer à ce mal, qui se guérit ordinairement en administrant à l’animal malade les lavemens dont voici la composition.

Prenez une poignée de mauve, guimauve, mercuriale, violette, chicorée sauvage et bourrache, de chacune la même quantité ; faites-en une décoction dans trois pintes d’eau, laissez réduire à moitié ; ajoutez-y

2 onces d’huile viola,
2 onces de casse.

Coulez le tout, et donnez-le en lavement ; s’il n’opère pas, mêlez-y une chopine de vin émétisé. Tenez le bœuf bien couvert, et lorsqu’il aura rendu son lavement, donnez-lui pour breuvage une pinte de la décoction indiquée ci-dessus.

Si les tranchées proviennent des vents retenus dans les intestins, servez-vous du lavement suivant. À une pinte de la décoction précédente, ajoutez :

2 onces d’huile de noix,
2 onces de suc de rue,

Et un peu de sel commun ; mêlez le tout et coulez.

DES POUX.

Les bêtes à cornes sont quelquefois sujettes aux poux, alors pour les en délivrer on use de la recette suivante

Remède. — Prenez un pot de fort vinaigre dans lequel vous mettrez tremper deux onces de staphisaigre et une demi-once ce poivre, le tout moulu, pendant vingt-quatre heures, au bout desquelles vous en lavez l’animal. L’arsenic employé par quelques bouviers est dangereux, parce qu’il brûle le cuir.

DU MAL DE CUISSE

Ce mal qui est dans l’intérieur de la cuisse, contraint l’animal de boiter d’un pied de derrière. C’est une espèce de gangrène ou tarc, maladie presque toujours incurable.

Remède. — Faites de fréquentes saignées, et graissez la cuisse avec du saindoux dans lequel il y aura un tiers d’huile d’aspic ; ensuite frottez bien toute la partie avec du savon d’Alicante ; répétez ce traitement deux fois en vingt-quatre heures ; le succès n’en est pas toujours assuré.

DES GALES QUI SURVIENNENT

aux traites ou trayons des vaches.

Pour remédier à ce mal, prenez :

Une demi-once de blanc de céruse,
Une demi once de mine de plomb,
Une demi-once de litharge d’or.

Réduisez le tout en poudre, et mêlez-le dans de la graisse de porc fondue ; graissez la vache avec cette composition après l’avoir tirée. Répétez cette opération deux fois par jour jusqu’à parfaite guérison.

DE LA PETITE-VÉROLE POURPRÉE.

Voici les signes par lesquels cette maladie s’annonce. Le bœuf a la tête basse, les yeux rouges, chassieux, troubles, tristes et larmoyans ; il paraît engourdi et abattu ; sa tête est lourde, pesante et penchée ; ses oreilles sont froides et pendantes. Il lui découle une chassie purulente, une bave gluante et épaisse des naseaux et de la bouche ; il sort de son poumon une haleine très-puante ; difficulté de respirer, accompagnée quelquefois de battemens de flancs et de toux très-violente : il lui vient, plusieurs fois le jour, des frissons irréguliers et si violens, qu’à peine peut-on le réchauffer. Les vaches tarissent peu à peu ; dans les excrémens des bœufs on voit, les premiers jours de la maladie, des filets de sang. Les uns ont le flux de ventre considérable, d’autres ne fientent qu’avec des tranchées. On remarque un mouvement convulsif de l’épine, depuis la tête jusqu’à l’extrémité du dos ; ils ne se soutiennent plus sur leurs jambes ; en appuyant la main sur leurs reins, on sent la peau presque séparée de la chair, et on s’aperçoit d’un froissement semblable à celui d’un parchemin sec. Il leur sort des boutons à la langue, au fondement, et même de tout le corps.

Le premier soin que l’on doit avoir est de séparer la bête malade des bêtes saines pour éviter la contagion, et de la mettre dans une étable bien éloignée, où elle soit à l’abri du froid et de la pluie, et où elle soit tenue chaudement.

Saignez promptement l’animal malade à la veine du cou, mais jamais dans l’instant des frissons.

Tirez aux bœufs deux livres de sang ; aux vaches, une livre et demie ; aux jeunes taureaux et aux génisses, une livre. On réitère la saignée deux ou trois fois, à douze heures de distance, s’il en est besoin, et selon la force de la bête ; mais il faut s’en abstenir dès que les boutons de la petite vérole commencent à s’augmenter. Entretenez alors l’irruption par l’usage du cristal et de la suie de cheminée.

Le cinquième jour où les pustules sortent, on peut faire des scarifications ou incisions à la peau de l’animal, et lui donner de la gelée faite avec de gros os de bœuf.

Faites plusieurs fois par jour, sur-tout avant l’éruption, et durant les frissons, des frictions avec des draps grossiers, ou avec des bouchons de paille humectés de quelque huile pénétrante.

Demi-heure après la saignée, faites avaler à l’animal le breuvage dont voici la recette.

Faites bouillir pendant un quart-d’heure, une poignée d’absynthe, de sauge, de cresson d’eau, coupée bien menu dans une pinte de vin et autant d’eau ; après avoir coulé à travers un linge, on ajoute à la liqueur une demi-once de safran coupé bien menu, on partage le tout en quatre parties égales qu’on donne à la bête malade de 4 heures en 4 heures après l’avoir fait chauffer, ayant soin de ne rien lui donner dans l’intervalle des prises. Si la maladie augmente, administrez-lui ce

Breuvage. — Prenez une chopine de bon vin, demi-once de fiente de pigeon fraîche ; et, à son défaut, de celle de poule, mais un peu plus ;

2 gros de soufre,
1 gros d’hellébore noir en poudre,
3 gros de salpêtre,
1 gros de sabine, pour les bœufs,

mais demi-gros pour les jeunes taureaux et pour les vaches. Si les vaches sont pleines, il ne faut donner ni ni sabine.

Une poignée un peu forte de graines de genièvre bien écrasées ; laissez infuser le tout pendant une demi-heure sur la cendre chaude, sans le faire bouillir. Partagez ce breuvage en deux prises, que vous donnez à douze heures de distance l’une de l’autre. Réitérez ce remède selon le besoin. Pendant toute la maladie, ayez soin de leur faire boire souvent de l’eau dans laquelle vous aurez fait bouillir de la bourrache et de la buglosse.

Autre Remède. — Après avoir tiré au bœuf malade une certaine quantité de sang, mettez dans un vase de terre, contenant environ un demi-setier,

3 cuillerées de fleur de soufre,
1 cuillerée de sel commun,
1 cuillerée de graines de genièvre vertes ;


mêlez le tout ensemble, et donnez-en chaque jour une pincée à chaque bête, avant qu’elle sorte de l’étable. On peut encore lui faire avaler par-dessus deux verres d’urine d’enfant.

Autre Remède. — Faites une forte décoction avec de la racine de scorsonère et de caryophyllata ou racise, de chacune quatre poignées, dans vingt-quatre livres d’eau, que l’on réduit à seize, y ajoutant quatre onces de corne de cerf ; deux ou trois fois par jour, durant tout le temps de la maladie, donnez deux grandes écuellées de cette décoction le plus chaudement que l’animal la pourra souffrir.

Dès le second jour de la maladie, faites un séton à la partie du cou, appelée le fanon ; on peut encore en faire un à la crinière et au haut de la queue.

La manière d’appliquer ces sétons, c’est d’élever la peau de dessus le cou, le plus qu’on le peut, en la pinçant, ensuite la percer avec un fer rouge de la grosseur du doigt ; alors passez à travers le trou, une corde ou mèche qui sera frottée ou trempée dans un onguent nommé suppuratif ; à son défaut on se servira de vieux oing : quand les sétons suppurent, il faut les panser tous les jours en tirant doucement la mèche, crainte de la lui passer entièrement. À chaque pansement, mettez de l’onguent suppuratif à l’entrée de chaque trou, et renouvelez la corde, quand la première sera hors d’état de servir ; car il faut entretenir les sétons le plus long-temps que l’on pourra.

Les glandes qui sont proches et derrière l’oreille étant enflées, il faut y appliquer le bouton de feu, et y faire un cautère qui suppure abondamment.

Dès qu’on s’aperçoit de la salivation, il faut passer dans la gueule de la bête malade un bâton de saule en travers, afin de faire couler la bave, et lui tenir la tête penchée, afin qu’il n’avale pas ces matières.

À l’égard des pustules de la langue, durant la petite-vérole, il faut faire à peu près les mêmes remèdes que pour le chancre-volant (voyez cet article, page 34). Ces remèdes, pour les pustules de la langue, peuvent aussi servir pour celles du dos.

Seringuez du vin chaud dans leurs naseaux, lavez-en aussi les cavités et les yeux de ces animaux. S’il leur vient au fondement des pustules, à peu près semblables à celles de la langue, raclez-les jusqu’à ce qu’elles saignent, prenez ensuite une poignée de lierre terrestre ; après l’avoir pilé, frottez-en les endroits raclés ; mettez ensuite à l’animal un poireau dans le fondement.

Donnez à l’animal, pendant toute la maladie, un breuvage fait avec de la farine d’orge ou de froment, à laquelle vous pouvez ajoutez du gramen ou du chiendent, des feuilles de violette et de chicorée. Donnez-lui du foin sec auquel vous mêlez de la bourrache et de la buglosse.

VENIN DORMANT.

On désigne sous le nom de venin dormant, une humeur froide qui court entre cuir et chair, soulevant un tant soit peu la peau. L’animal ne mange que peu. En promenant les doigts sur le dos, on l’entend craquer comme s’il était soufflé.

Remède. — Saignez à la jugulaire une fois, et deux heures après donnez un breuvage composé d’une chopine d’urine d’homme, dans laquelle vous aurez fait dissoudre, avec le pouce, dans une cuiller, en plusieurs fois, une cassolée de poudre à tirer ; ajoutez deux têtes d’ail pilées. Si ce remède n’opère pas selon vos désirs, et que ce soit en été, il faudra faire suer l’animal aux orties ; ce qui se fait de la manière suivante :

Faites un trou dans un fumier à l’endroit le plus sec, de telle façon qu’on puisse y faire entrer l’animal par un bout, lequel étant arrivé à l’autre bout, ait du fumier à la hauteur du dos. Cette opération faite, ayez des orties dont vous l’entourerez et l’en couvrirez, mettant un peu de fumier par dessus, lui laissant la tête seulement à l’air : quand il aura sué environ trois heures, selon sa force, retirez-l’en.

En hiver, on fera suer l’animal, dans le fumier, de la même manière.

VENIN HÂTÉ

On reconnaît que l’animal est attaqué de cette maladie, quand il ne mange point, qu’il enfle promptement et d’une manière très-sensible ; quelquefois l’écume lui sort par le fondement, et il urine souvent.

Remède. — Faites-lui promptement une bonne saignée à la jugulaire ; et si le sang ne vient pas assez vite d’un côté, il faut saigner de l’autre tout de suite, lui jeter promptement un drap de lessive mouillé sur le dos, jeter trois ou quatre seaux d’eau dessus et dessous le drap, en récidivant de temps en temps ; lui mettre un bâton de la longueur d’un pied, et gros de cinq à six pouces, dans la gueule, par les deux bouts duquel on fera passer une corde par-dessus les cornes, faisant monter le bâton jusqu’au coin de la gueule ; ce qui s’appelle bavoir. Pour que l’animal bave bien, il faut l’attacher bas, afin que la gueule soit vers la terre ; pendant qu’il bavera, apprêtez le breuvage suivant : une chopine de vin blanc ou poiré, dans laquelle vous dissoudrez une cassolée de poudre à tirer, dans une cuiller, avec le pouce, y ajoutant deux têtes d’ail pilées ; donnez le breuvage ; retirez le bavoir ; retirez le drap quand il sera guéri.

DU BŒUF QUI NE MANGE POINT,

ou qui a perdu l’appétit.

Lorsque l’on s’aperçoit que l’animal ne veut point manger, on lui met autour du col, une corde à laquelle sont attachées cinq ou six gousses d’ail ou des oignons. Ces gousses ou oignons, à demi cuits, ôtez-les alors, pour en substituer des frais ; jetez-les dans un creux, que vous recouvrez de suite, afin que la volaille ne les trouve point, car ce serait pour elle une nourriture dangereuse.

Peu de jours après qu’on a mis les gousses au cou de la bête on verra couler des narines une grande quantité de glaires ou de pus ; ordinairement les jambes enflent et deviennent raides ; mais peu à peu l’enflure et l’écoulement de glaires diminuent, les symptômes disparaissent totalement, et l’animal est guéri.

MOYENS DE FAIRE TARIR

le lait des vaches.

Voici les moyens les plus ordinairement employés pour arriver à ce but.

Tirez environ une écuellée de lait dans un pot, ajoutez-y pour un sou de térébenthine de Venise, que vous faites chauffer devant le feu, jusqu’à ce qu’elle soit fondu sans bouillir ; après quoi, lavez-en bien la mamelle partout deux ou trois fois le jour, pendant trois ou quatre jours.

Ou bien, prenez du bon vinaigre de vin, dans lequel vous faites détremper de la vieille argile, en y ajoutant pour trois sous de sang-dragon, après quoi barbouillez-en la mamelle deux ou trois jours de suite.

DE LA RAGE.

Si une bête à corne est attaquée de la rage, faites le remède qui suit :

Remède. — Prenez une demi-poignée de petite sauge, autant de rue, une poignée de pâquerettes ou marguerites sauvages, la plante entière, une pincée de racines d’églantier les plus grandes, une racine de scorsonère longue et grosse à peu près comme le doigt, une tête d’ail, faisant à peu près cinq ou six gousses comme une noisette, et du sel gris comme un œuf de pigeon.

Nettoyez, épluchez sans laver les simples, ôtant la terre et les mauvaises feuilles ; jetez dans un mortier de marbre la sauge, la rue, la racine d’églantier ou rosier sauvage, et de scorsonère, mettez dessus les pâquerettes, les gousses d’ail et le sel : pilez le tout ensemble, et mettez la moitié d’un demi-setier de bon vin blanc, et le broyez de nouveau ; après quoi broyez cette espèce de bouillie dans un linge fort, pour extirper en tordant, tout le jus, qu’on recevra dans un verre ou écuelle. Donnez deux verres le matin à jeûn aux bestiaux enragés ; s’ils sont furieux et qu’ils ne veulent pas les prendre, il faut les suspendre par une chaîne ou collier, et les leur faire avaler avec une corne.

BEURRE AROMATIQUE,

anodin résolutif et émollient.

Ce beurre s’emploie avec succès pour la tension des nerfs, la descente des boyaux et enfle ; en un mot, il résout, calme la douleur, ramollit, aide la circulation, et donne nourriture à la partie ; en voici la recette :

Cueillez à la fin de mai, ou au commencement de juin, plein deux mains de chacune, les plantes dont suit la nomenclature :

Mouron à fleurs rouges, benoîte ou caryophillata, basilic, pouliot on pouliotin, thym, romarin, sauge, lavande, hysope, sarriette, marjolaine, laurier, baume du Pérou, baume ou espèce de menthe ; mélisse, pariétaire, séneçon, épinard, oignons de lis, racine de consoude ou oreille d’âne, mille-pertuis, grande scrofulaire ou herbe du siège, linaire ou lin sauvage, chardons aux ânes, ciguë, morelle, persicaire, camomille, mélilot, fleurs de safran, fleurs d’yèble ou de sureau, bardane, jusquiame, mauve, joubarbe, mandragore, bouillon-blanc ou molène, cynoglosse ou langue de chien, guimauve, mercuriale ou foirolle.

Desquelles plantes épluchez les grosses tiges, pour mettre le tout dans une chaudière ; ajoutez-y douze livres de bon beurre frais et douze pots de grosse lie de bon vin ou de bon cidre, que vous ferez cuire sur le feu, pendant 7 à 8 heures. Retirez du feu, et à moitié refroidies, pressez lesdites herbes dans un gros linge pour en exprimer le liquide, qui sera mis dans des cruches sans les remplir (car la fermentation s’y établirait dans les chaleurs), et qu’on aura soin de bien couvrir.

Observez qu’il ne faut pas graisser avec ce beurre sur les plaies, mais bien autour, et sur l’enflure seulement.

CONSEILS ET PRÉCAUTIONS

vétérinaires pour préserver les bestiaux des
maladies épizootiques.

On a observé que les maladies des bestiaux les plus graves, susceptibles de contagion, et capables d’infecter bientôt tout ce qui les entoure ou les approche, tiraient souvent leur origine de la malpropreté dans laquelle on laisse les bestiaux, et de l’infection de l’air corrompu qui règne dans leurs écuries. En conséquence, on recommande aux propriétaires des bestiaux d’avoir soin :

1o. D’aérer fréquemment leurs écuries, sans craindre d’y laisser entrer l’air frais, qui est infiniment moins nuisible que les exhalaisons renfermées et échauffées.

2o. D’en enlever fréquemment le fumier, et d’en renouveler souvent la litière.

3o. D’en laver de temps en temps les crèches et les râteliers, avec de la lessive de cendres. Ils peuvent aussi se servir d’un vernis fait avec de l’huile d’aspic, et chargé de camphre.

4o. De faire sortir le bétail une ou deux fois par jour, lorsque le temps et la saison le permettent, pour qu’il puisse prendre l’air et du mouvement.

5o. De le faire frotter tous les jours, matin et soir, avec un bouchon de paille, et de le laver même de temps en temps.

6o. De l’abreuver hors de l’écurie, toutes les fois qu’il n’y aura pas d’obstacle majeur.

7o. De lui donner habituellement la nourriture à dose réglée, de manière que son estomac n’en soit pas surchargé.

8o. Enfin, de ne pas le laisser paître dans des lieux marécageux ou humides après le coucher du soleil.

Séparateur

  1. La recette ordinaire est de 12 sous de camphre dans une chopine d’eau-de-vie.