Les Actes des Apôtres/3

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Librairie de L. Hachette et Cie (p. 13-17).

III

MATTHIAS EST NOMMÉ APÔTRE POUR REMPLACER JUDAS.



Alors, les Apôtres et les disciples descendirent du mont des Oliviers et revinrent à Jérusalem. Étant entrés au Cénacle où Notre-Seigneur avait fait avec eux la sainte Cène…

Armand. Qu’est-ce que c’est la sainte Cène ?

Grand’mère. Tu as oublié ce que nous avons vu dans l’Évangile, que la sainte Cène était le dernier repas que fit Notre-Seigneur avec ses Apôtres avant sa Passion, et que dans ce repas il institua le Sacrement de l’Eucharistie.

Armand. Ah ! oui ; je me souviens.

Grand’mère. Les Apôtres montèrent au Cénacle où se réunirent Pierre et Jean, Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques fils d’Alphée, Simon et Judas fils de Jacques.

Jacques. Comment ce coquin de Judas était-il là, puisqu’il était mort après avoir trahi le bon Jésus ?

Grand’mère. Ce n’était pas Judas fils de Jacques qui avait trahi Notre-Seigneur, mais Judas Iscariote. Pour distinguer le bon du mauvais, on ne l’appelle plus Judas, mais Jude ou bien encore Thadée ; c’était un surnom qu’on lui avait donné.

Jacques. Comment compte-t-on douze Apôtres, puisqu’il n’y en avait que onze depuis la trahison du méchant Judas ?

Grand’mère. Aussi il n’y en avait que onze dans ce moment-là ; plus tard, les Apôtres en élurent un douzième, comme vous le verrez tout à l’heure.

Louis. Qu’est-ce que c’est élurent ?

Grand’mère. Élu veut dire choisi.

Valentine. Et comment fait-on pour élire ?

Grand’mère. Chacun écrit le nom de celui qu’il a choisi. On compte celui qui a le plus de voix et c’est celui-là qui est élu.

Les Apôtres étaient donc tous réunis avec la Sainte-Vierge Marie, Mère de Jésus, avec les saintes femmes et avec les parents de Jésus.

Saint Pierre, se levant au milieu des disciples qui étaient au nombre de cent vingt environ, leur parla à peu près ainsi :

« Mes frères ! L’Esprit-Saint a parlé par la bouche du Roi David qui a prédit que Judas trahirait Jésus, et qu’il serait à la tête de ceux qui viendraient saisir notre Maître. Ce Judas était compté parmi nous ; il était le douzième Apôtre. Il a acheté un champ avec l’argent de sa trahison ; il s’est pendu de désespoir dans ce même champ ; son ventre s’est crevé par le milieu et toutes ses entrailles se sont répandues sur la terre. »

Louis. Pourquoi donc son ventre a-t-il crevé ? C’est horrible !

Grand’mère. Sans doute, c’est horrible ; mais tout était horrible en cet homme. Son ventre s’est ouvert par suite d’une malédiction particulière de Dieu, car habituellement le ventre des pendus ne crève pas. L’âme de Judas était du reste encore plus horrible que son corps.

« Tous les habitants de Jérusalem ont su ces choses ; ils ont appelé ce champ : Haceldama, c’est-à-dire Champ du sang. Je dis donc, que nous devons choisir, pour le remplacer, un de ceux qui ont déjà été avec nous tout le temps que le Seigneur Jésus a passé parmi nous, depuis son baptême par Jean-Baptiste jusqu’au jour où il nous a été enlevé pour monter dans le Ciel. Qu’un de ceux-là devienne avec nous le témoin de sa Résurrection. »

Et ils prirent deux des disciples qui avaient toujours suivi Jésus ; l’un appelé Joseph, le Juste ; et l’autre, Matthias.

Et tous se mirent à prier, disant :

« Seigneur, vous qui connaissez les cœurs de tous, montrez-nous qui de ces deux vous avez choisi pour recevoir le Ministère et l’Apostolat duquel l’indigne Judas est sorti pour aller dans son lieu. »

Marie-Thérèse. Grand’mère, qu’est-ce que c’est Ministère ?

Grand’mère. On appelle Ministère, un office, un emploi. Le Ministère dont devait être chargé le remplaçant de Judas, était de prêcher Notre-Seigneur Jésus-Christ en parcourant le monde au milieu des persécutions et de mille dangers, comme les autres Apôtres.

Henriette. Grand’mère, qu’est-ce que c’est Apostolat ?

Grand’mère. Apostolat est précisément la mission ou le Ministère des Apôtres. C’est l’Apostolat qui donnait aux Apôtres le droit d’enseigner tous les hommes et de leur commander au nom de Dieu.

Jeanne. À qui pouvaient commander les Apôtres ? Ils étaient si pauvres, si dédaignés !

Grand’mère. Les Apôtres étaient appelés à commander au monde tout entier, à tous les hommes ; car tous les hommes sont appelés à connaître le vrai Dieu qui est Notre-Seigneur Jésus-Christ ; le Dieu que prêchaient les Apôtres.

Jacques. Quand donc Notre-Seigneur leur a-t-il donné ce pouvoir ?

Grand’mère. C’est quand il leur a dit : « Recevez le Saint-Esprit. De même que mon Père m’a envoyé, moi je vous envoie. Allez donc. Enseignez tous les peuples ; baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, et apprenez-leur à observer mes lois. Prêchez l’Évangile à toute créature. Celui qui vous croira sera sauvé ; celui qui ne vous croira pas sera condamné. Celui qui vous écoute, m’écoute. Celui qui vous méprise, me méprise. Et voici que je suis avec vous jusqu’à la fin du monde. »

Louis. Grand’mère, dans quel lieu est allé Judas ? Saint Pierre dit qu’il est allé dans son lieu.

Grand’mère. Le lieu du malheureux et infâme Judas est l’enfer où il s’est précipité en se tuant, au lieu de se repentir et de compter sur la miséricorde de son bon Maître.

Armand. Grand’mère, vous voyez que ce n’est pas moi qui parle : ils vous interrompent tous ; et moi, pauvre petit, tout jeune, je ne dis pas un seul mot.

Grand’mère, l’embrassant. Mon pauvre petit, tu peux parler comme les autres ; quand tu ne comprends pas, tu fais très-bien de demander comme les autres.

Armand. Bon, alors je demanderai comme pour l’Évangile.

Grand’mère. Certainement, cher enfant. Mais continuons l’histoire des Apôtres.

Quand Pierre eut fini sa prière, ils commencèrent à écrire le nom du disciple qui devait être choisi pour remplacer Judas, et le sort tomba sur Matthias.

Armand. Est-ce qu’il a été content ?

Grand’mère. Cher enfant, je n’en sais rien ; mais il a dû être heureux de partager les travaux et les dangers des onze Apôtres.