Les Causes de la révolution/Discours préliminaire

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LES CAUSES

de la

REVOLUTION DE FRANCE, &c.

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DISCOURS PRELIMINAIRE


La révolution de France étant un de ces événemens marquans, qui frappent et demeurent à jamais dans la mémoire des hommes, les causes qui l’ont produite, sont dignes de la recherche des gens instruits où sensibles, que les crimes dont elle a été le prètexte, ont afligés et étonnés.

Etant sur les lieux dans ces momens de crise qui l’ont précédée, je suis en état de présenter au public, un grand nombre d’anecdotes peu connues et quelques détails intéressans, qui pourront par la suite faciliter au peinceau habile de l’historien la déscription de ce phénomêne politique. Ils serviront à exposer, dans un plus grand jour, l’esprit dominant de cette noblesse (dont je me glorifie d’être membre), qu’on a si injustement calomniée, et à qui ses malheurs mêmes doivent servir de nouveau lustre.

On la verra, ferme et courageuse, lorsqu’unie avec le peuple, pour défendre les loix de son pays, contre les innovations du ministère ; inébranlable dans ses principes, lorsque par des intrigues criminelles, on fut parvenu à lui enlever l’affection, et enfin fidelle et entièrement dévouée, abandonner ce qu’elle avait de plus cher, pour soutenir la cause défaillante de la monarchie.

Je parlerai succintement des événements qui ont amené la révolution, et j’en suivrai le fil jusqu’au 14 juillet. Je ne m’arrêterai ensuite que sur les faits dont j’ai été moi-même témoin, ou que j’ai entendu raconter par des personnes dignes de foi, dans les différens lieux où les circomstances m’ont conduit.

Je donnerai une légere esquisse den la cour des princes, à Turin et à Coblentz ; je rendrai compte des expéditions infructueuses qui les occupaient alors, et qui presque toutes ont manquées au moment de l’exécution, par une fatalité inconcevable, qui semblerait faire croire que les hommes avaient été frappés d’aveuglement et que cette époque fatele était marquée, pour donner au monde une grande et terrible leçon.

Je présenterai ensuite les causes qui ont rendu l’émigration générale, et j’ose dire presque indispensable pour l’homme d’honneur isolé, et souhaitant employer son courage à rétablir le thrône, les trois différentes armées composées de gentilshommes émigrés, la première campagne de cette guerre, et la retraite du Duc de Brunswick ; j’ai cru devoir aussi, ajouter la constitution de la Bretagne, et ses rapports avec la France, cela peut jeter beaucoup de lumière sur l’origine de la guerre des Chouans, et de celle que les Royalistes ont soutenu si long tems dans la Vendée. Je donnerai assi quelques détails sur cette lutte terrible, qui ne s’est enfin terminé que par l’anéantissement des habitans de ce malheureux pays.

Je ne parlerai surtout, que de ce dont, j’ai été témoin oculaire, où dont j’ai eu des rapports assez fidelles, pour qu’il me soit impossible d’en douter ; je ne m’attacherai point à suivre le fil des événements, mais seulement les accidents partiels, qui se sont passés dans les pays, où je me suis trouvé, cela donnera peutêtre plus de lumiere, que si je rapportais avec emphase des mensonges brillans, où des faits incertains.


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