Les Chants du bivouac/Kénavo, Bretagne !
KÉNAVO, BRETAGNE[1] !
Kénavo ! Kénavo, Bretagne !
Ton cœur tiède est trop loin du « front »,
Je pars ; les Belges font campagne :
Avec eux ils m’enrôleront.
« Les Bretons ont des cœurs fidèles »
Leur ai-je dit sur tous les tons :
Prouvons, en ces heures cruelles,
La Fidélité des Bretons !
Kénavo ! Kénavo, ma « douce » ;
Que tes pleurs de tes yeux rougis
Roulent, tout doux et sans secousse
Comme au fond de tous nos logis ;
Mais que l’âpre Désespérance
N’amollisse jamais ton cœur :
Dieu protège à nouveau la France
Et la France sera Vainqueur !
Kénavo ! Kénavo, ma Muse
Reste en Bretagne et, de ce jour,
Jamais, jamais plus ne t’amuse
À rimer de doux vers d’amour.
Un grand « Chant de Geste » commence
Dont tu n’entends qu’un faible écho :
Le Canon couvre la romance !
La lyre a fait place au flingot !
Jusques à la fin de la Guerre
(la, vat : bete finn ar Brezel)[2]
Adieu, ma Bretagne si chère !
(Kénavo d’it, ô Breiz-Izel !)[3]
Prépare un laurier de Victoire
À chacun de tes fiers enfants
Pour le jour où, soûlés de Gloire,
Nous te reviendrons, triomphants !