Les Chroniques de Sire Jean Froissart/Livre I, Partie II/Chapitre XXXV

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Texte établi par J. A. C. Buchon (Ip. 345-346).

CHAPITRE XXXV.


Comment le prince ordonna ses gens pour combattre ; et cy s’ensuivent les noms des vaillans seigneurs et chevaliers qui de-lez lui étoient.


L’ordonnance du prince de Galles étoit auques telle comme les quatre chevaliers de France dessus nommés rapportèrent en certaineté au roi, fors tant que depuis ils avoient ordonné aucuns apperts chevaliers pour demeurer à cheval contre la bataille des maréchaux de France ; et avoient encore, sur leur dextre côté, sur une montagne qui n’étoit pas trop roide à monter, ordonné trois cents hommes à cheval et autant d’archers tous à cheval, pour costier à la couverte toute cette montagne et venir autour sur aile férir en la bataille du duc de Normandie qui étoit en sa bataille à pied dessous celle montagne. Tout ce étoit qu’ils avoient fait de nouvel. Et se tenoit le prince et sa grosse bataille au fond de ces vignes, tous armés, leurs chevaux assez près d’eux pour tantôt monter, si il étoit besoin ; et étoient fortifiés et enclos, au plus foible lez, de leur charroy et de tout leur harnois : si ne les pouvoit-on approcher de ce côté.

Or vous vueil-je nommer des plus renommés chevaliers d’Angleterre et de Gascogne qui étoient là adonc de-lez le prince de Galles. Premièrement le comte de Warvich, le comte de Suffolch maréchal de l’ost, le comte dé Sallebrin et le comte d’Oskesufforch[1], messire Jean Chandos, messire Richard de Stanford, messire Regnault de Cobehen[2], messire Édouard seigneur Despenser, messire Jacques d’Audelée[3] et messire Pierre son frère, le seigneur de Bercler[4], le seigneur de Basset, messire Guillaume Fitz-Warine[5], le seigneur de la Ware, le seigneur de Manne, le seigneur de Villebi[6], messire Berthelemy de Bruwes[7], le seigneur de Felleton, messire Richard de Pennebruge, messire Étienne de Consenton, le seigneur de Braseton et plusieurs autres : Gascons, le seigneur de Labret, le seigneur de Pommiers, messire Helie et messire Aymon de Pommiers, le seigneur de Langueren, messire Jean de Grailly captal de Buch, messire Jean de Chaumont, le seigneur de l’Esparre, le seigneur de Mucidan, le seigneur de Curton, le seigneur de Rozem, le seigneur de Condom, le seigneur de Montferrant, le seigneur de Landuras, monseigneur le Souldich de l’Estrade[8] et aussi des autres que je ne puis mie tous nommer : Hainuyers, messire Eustache d’Aubrecicourt et messire Jean de Ghistelles ; et deux autres bons chevaliers étrangers, messire Daniel Pasele et Denis de Morbeke.

Si vous dis pour vérité que le prince de Galles avoit là avec lui droite fleur de chevalerie, combien qu’ils ne fussent pas grand’foison ; car ils n’étoient, à tout compter, pas plus haut de huit mille hommes ; et les François étoient bien cinquante mille combattants, dont il y avoit plus de trois mille chevaliers.

  1. Oxford.
  2. Cobham.
  3. Audley.
  4. Fils de lord Maurice Berkley, mort à Calais neuf ans auparavant.
  5. John lord Warren, fils aîné de J. Plantagenet, fut comte de Warren, Strathern et Surry par sa première femme lady Maude de Hereford.
  6. Willoughby.
  7. Burghersh.
  8. Anstis parle de ce chevalier, comme membre de l’ordre de la Jarretière, dans son histoire de cet ordre. Il pense que Souldich répondait comme captal au titre de comte. Le Souldich de l’Estrade ou de la Trau, terre dans le Bazadois, était de l’ancienne maison de Preissac, plus connue aujourd’hui sous le nom d’Esclignac.