Les Confessions d’un révolutionnaire/VII

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VII.


17 MARS :


RÉACTION DE LOUIS BLANC.


Question. — Étant donnée pour un pays la situation suivante :

La révolution du mépris a renversé le gouvernement qu’avait établi le principe matérialiste des intérêts. Cette révolution, qui condamne le capital, inaugure par cela même et porte au gouvernement le travail. Or, d’après le préjugé généralement répandu, le travail, devenu gouvernement, doit procéder par les voies gouvernementales ; en autres termes, c’est au gouvernement de faire désormais ce qui s’était toujours fait sans lui et contre lui, de prendre l’initiative et de développer la révolution. Car, dit le préjugé, la révolution doit venir d’en haut, puisque c’est en haut que se trouvent l’intelligence et la force.

Mais l’expérience atteste, et la philosophie démontre, contrairement au préjugé, que toute révolution, pour être efficace, doit être spontanée, sortir, non de la tête du pouvoir, mais des entrailles du peuple ; que le gouvernement est plutôt réactionnaire que progressif ; qu’il ne saurait avoir l’intelligence des révolutions, attendu que la société, à qui seule appartient ce secret, ne se révèle point par des décrets de législature, mais par la spontanéité de ses manifestations ; qu’enfin, le seul rapport qui existe entre le gouvernement et le travail, c’est que le travail, en s’organisant, a pour mission d’abroger le gouvernement.

Dans cette situation, un certain nombre de citoyens, emportés par le commun préjugé, et cédant à une légitime impatience, veulent contraindre le gouvernement à marcher, c’est-à-dire à commencer la révolution et organiser le travail ; prétention fort juste, d’après le préjugé, mais insoutenable, d’après la philosophie et l’histoire. De son côté, le gouvernement, sentant son incapacité et appuyé d’une autre partie des citoyens, refuse d’agir, ou plutôt il réagit contre les solliciteurs : réaction légitime, au point de vue du véritable droit démocratique et social, mais souverainement injuste d’après le préjugé, auquel les empiètements du pouvoir prêtent sans cesse une nouvelle force.

On demande ce qu’il adviendra de ce conflit.

Réponse. — Le seul moyen d’accorder les parties serait de leur démontrer l’incompétence naturelle du Pouvoir, et sa dissolution nécessaire. Aucun avis ne se produisant, la lutte est inévitable. La force de résistance sera donc en raison de l’intensité du mouvement : de plus, s’il arrive que la lutte se prolonge, la révolution, au lieu de se développer dans le Gouvernement suivant le sens de son impulsion primitive, lui fera parcourir une série de positions diamétralement inverses de celle que, d’après le vœu du peuple, il aurait dû suivre. En sorte que plus les hommes du mouvement chercheront à entraîner le pouvoir, plus ceux de la résistance le feront reculer.

Voilà ce que dit la théorie : voyons l’histoire.

Quinze jours s’étaient à peine écoulés depuis la proclamation de la République, que déjà l’inquiétude s’emparait des esprits. D’après les idées reçues, le Gouvernement pouvait tout, et l’on ne lui voyait rien entreprendre. Les plus ardents du côté du peuple se plaignaient qu’il ne fît rien pour la Révolution ; les plus trembleurs parmi les bourgeois l’accusaient, au contraire, d’en faire trop. Les décrets sur les heures de travail et les marchandages, bien plus que les fameuses circulaires de Ledru-Rollin, étaient de nature à alarmer profondément la classe bourgeoise. Toutefois, ce n’était pas tant au Luxembourg que l’opinion réactionnaire s’adressait alors qu’à l’Hôtel-de- Ville. Les ouvriers n’ignoraient pas que Louis Blanc et Albert n’avaient aucun moyen de donner suite à leurs audacieux projets, et que leur influence sur le gouvernement provisoire était à peu près nulle ; mais la bourgeoisie, pour quelques circulaires échappées du ministère de l’intérieur, s’imaginait que la République allait faire main-basse sur les revenus et les propriétés. De toutes parts c’était donc vers le gouvernement, c’était vers Ledru-Rollin que montaient les appréhensions et les vœux. Tout le monde cherchant une occasion, elle ne pouvait longtemps faire faute ; un prétexte puéril la fournit.

Le 16 mars, quelques centaines de gardes nationaux se présentent à l’Hôtel-de-Ville pour protester contre l’ordonnance qui supprimait les compagnies d’élite, et défendait en conséquence le port des bonnets à poil. Cette manifestation, dirigée surtout contre Ledru-Rollin, se trompait d’adresse : il n’y avait alors rien de commun entre les idées politiques du ministre de l’intérieur et les théories socialistes du président du Luxembourg. Mais le branle était donné, les destins allaient s’accomplir.

Le gouvernement tint bon contre les bonnets à poil : aidé de quelques patriotes rassemblés à la hâte, il refoula la manifestation. Le bruit ne s’en fut pas plus tôt répandu, que l’alarme fut donnée aux faubourgs. On avait osé attaquer le gouvernement provisoire : une contre-manifestation fut assignée au lendemain pour le soutenir. Or cette nouvelle manifestation ne fut bientôt elle-même, comme avait été la première, qu’un prétexte. Dans l’esprit d’un certain nombre de chefs, il ne s’agissait pas moins que de modifier la composition du gouvernement, de le forcer à prendre une initiative vigoureuse, et, pour donner toute latitude à son action, d’obtenir d’abord un ajournement plus ou moins éloigné des élections. Des listes circulaient de main en main, et Huber, mon voisin à la Conciergerie, l’un des fauteurs du mouvement, m’a assuré que mon nom se trouvait sur quelques-unes !... La pensée de la manifestation était donc triple : les uns, et c’était le plus grand nombre, entendaient seulement donner un appui moral au Gouvernement provisoire ; les autres demandaient l’ajournement des élections ; les derniers, enfin, voulaient une épuration. Au reste, voici comment Louis Blanc, témoin et acteur dans ce drame, rend compte de l’événement :

« À peine sorti de l’acclamation populaire, le Gouvernement provisoire avait eu à se demander comment il se définirait lui-même. Se considérerait-il comme une autorité DICTATORIALE, consacrée par une révolution devenue nécessaire, et n’ayant à rendre ses comptes au suffrage universel qu’après avoir fait tout le bien qui était à faire ? Bornerait-il au contraire sa mission à convoquer immédiatement l’Assemblée nationale, en se renfermant dans les mesures d’urgence, dans des actes d’administration d’une portée secondaire ?

« Le conseil se rangea à ce dernier avis.

« Pour moi, j’avais une opinion entièrement opposée à celle qui prévalut, et je regardais l’adoption de l’autre parti comme devant exercer la plus heureuse influence sur les destinées de la République nouvelle.

« Considérant donc l’état d’ignorance profonde et d’asservissement moral où les campagnes en France vivent plongées, l’immensité des ressources que ménage aux ennemis du progrès la possession exclusive de tous les moyens d’influence et de toutes les avenues de la richesse, tant de germes impurs déposés au fond de la société par un demi-siècle de corruption impériale ou monarchique, enfin la supériorité numérique du peuple ignorant des campagnes sur le peuple éclairé des villes, je pensais :

« Que nous aurions dû reculer le plus loin possible le moment des élections ;

« Qu’il nous était commandé de prendre, dans l’intervalle, et cela hautement, hardiment, sauf à en répondre sur nos têtes, l’initiative des vastes réformes à accomplir, réserve faite pour l’Assemblée nationale du droit de raffermir ensuite, ou de renverser notre œuvre d’une main souveraine. »

On voit, sans que j’aie besoin d’en faire la remarque, que les arguments de Louis Blanc pour prendre la dictature sont exactement les mêmes que ceux dont les républicains honnêtes et modérés se sont servis après lui pour légitimer deux fois de suite l’état de siége, donner la dictature au général Cavaignac, porter à la présidence Louis Bonaparte, déclarer les socialistes ennemis de la société, et créer, sous la République, un despotisme tel, qu’on serait tenté de regarder comme un libérateur le premier prétendant qui prendra la couronne. Où peut aller une nation, quand amis et ennemis sont sûrs de la magnétiser tour à tour avec les mêmes phrases ?

« Mon opinion se trouva conforme à celle du peuple de Paris... J’appris au Luxembourg, plusieurs jours avant le 17 mars, que le peuple de Paris se disposait à faire une imposante manifestation, dans le double but d’obtenir l’ajournement des élections et l’éloignement des troupes qui occupaient encore Paris. »

Ce que dit Louis Blanc de l’éloignement des troupes est vrai. Le peuple le demandait avec instance : seulement Louis Blanc ne s’aperçoit pas que ce second motif contredit l’autre. Qu’était-ce, en effet, pour le peuple que l’éloignement des troupes ? Le désarmement du pouvoir, l’impuissance du gouvernement. Le peuple, quand il est livré à son seul instinct, voit toujours plus juste que lorsqu’il est conduit par la politique de ses meneurs : il sentait, et c’était pour lui un vieux dicton, que le gouvernement n’est jamais meilleur que lorsqu’il est sans vertu. Notre ennemi, c’est notre maître ! a dit l’homme du peuple par excellence, le vieux La Fontaine.

Voici donc quel était le plan des meneurs, Louis Blanc à la tête : 1° demander au Gouvernement provisoire l’ajournement des élections, afin de lui assurer cette autorité dictatoriale, sans laquelle, dit Louis Blanc, il ne pouvait faire le bien ; 2° modifier la composition du gouvernement. Car, et c’est encore Louis Blanc qui l’avoue, il existait entre les divers membres du Gouvernement provisoire des dissidences graves, incompatibles avec l’exercice de la dictature : or, qui veut la fin veut les moyens. À quoi bon une autorité dictatoriale, si le gouvernement demeurait hétérogène ?

Mais quels seraient les dictateurs ?...

À cette question délicate, on allait, chose merveilleuse, trouver pour toute réponse la réaction ! Écoutons le fidèle narrateur.

« Mais, je l’avoue, l’idée de la manifestation elle-même m’effraya. J’avais de la peine à croire que plus de 150,000 ouvriers traversassent tout Paris sans y causer la moindre agitation, sans y donner lieu au moindre désordre... »

Une fois arrivés au pouvoir les hommes se ressemblent tous. C’est toujours le même zèle de l’autorité, la même méfiance du peuple, le même fanatisme de l’ordre. N’est-il pas plaisant de voir que, le 17 mars, les préoccupations qui agitaient Louis Blanc, fauteur secret de la manifestation, étaient précisément les mêmes que celles qui, trois semaines auparavant, avaient agité M. Guizot ?

« Le peuple devait se porter en masse à l’Hôtel-de-Ville pour obtenir l’ajournement des élections. Cette grande démarche serait-elle sans danger ? Jusqu’alors Paris, le Paris de la révolution, avait été admirable de majesté tranquille et de puissant repos, ne devions-nous pas veiller à ce qu’il gardât jusqu’au bout cette noble attitude... »

La majesté tranquille et le puissant repos, c’est-à-dire, l’abstention du peuple, l’obéissance du souverain. Sans cela vous aurez la révolution, avait dit M. Guizot ; sans cela vous n’aurez pas la révolution, disait Louis Blanc.

Comment donc prévenir la manifestation annoncée ? C’est Louis Blanc qui se pose ainsi la question. — Et s’il était vrai que des agitateurs inconnus voulussent faire sortir quelque orage du fond de la multitude mise en mouvement, comment déjouer leurs projets ? C’est encore Louis Blanc qui prévoit le cas. Des agitateurs ! s’écrie-t-il. M. Guizot disait : des factieux !

Le moyen proposé par Louis Blanc est à citer : il méritait d’être proposé à M. Guizot. La révolution aurait été détournée le 22 février, comme la dictature prétendue de Blanqui le fut au 17 mars.

Il fallait, dit Louis Blanc, accorder à la multitude ce qu’elle demandait, c’est-à-dire l’ajournement des élections (la seule chose dont il fût parlé dans la pétition des délégués), en y mettant pour condition l’intégrité du Gouvernement provisoire. — En deux mots, accepter la lettre de la pétition, et feindre de ne pas en apercevoir l’esprit ; accorder l’ajournement, ne fût-il que de quinze jours, et maintenir le gouvernement. Voilà comment Louis Blanc imagina de donner le change aux pétitionnaires. Une autre fois, quand le peuple se mêlera de pétitionner, il saura qu’avec le pouvoir il faut s’expliquer clairement et catégoriquement.

Mais pourquoi Louis Blanc, qui appuyait les motifs de la manifestation, qui les avait développés dans le conseil, qui les avait fait pénétrer dans les masses, répugnait-il si fort à mutiler le Gouvernement provisoire ? Était-ce par considération seulement et amitié pour ses collègues ? Pas le moins du monde. Écoutons l’historien :

« Ces dissidences, qui, au point de vue de l’unité d’action, auraient fait du Gouvernement provisoire un très mauvais pouvoir, constituaient son originalité comme gouvernement de passage, destiné à garder la place de la souveraineté. Oui, l’hétérogénéité même des éléments dont il se composait était de nature à sauver la situation, parce qu’elle tendait à maintenir en équilibre les diverses forces de la société... »

Donc le Gouvernement provisoire, chargé uniquement de maintenir l’équilibre, n’avait point à diriger le mouvement révolutionnaire, pas plus dans un sens que dans l’autre ; donc, puisqu’il était conservateur, il n’était pas initiateur ; donc il n’avait que faire d’une autorité dictatoriale ; donc l’ajournement des élections était plus qu’inutile, il était impolitique : c’était un attentat à la souveraineté du peuple ; donc la manifestation était absurde. Voilà la conséquence que Louis Blanc devait tirer de ses propres prémisses, et s’il ne l’a pas tirée, les événements l’ont fait pour lui...

« Nous étions dans l’attente... Tout à coup, à une des extrémités de la place de Grève, paraît une masse sombre et compacte. C’étaient les corporations. Séparées l’une de l’autre par des intervalles égaux et précédées de leurs bannières diverses, elles arrivaient gravement, en silence, dans l’ordre et avec la discipline d’une armée...

« Les délégués étant montés à l’Hôtel-de-Ville, et l’un d’eux, le citoyen Géraud, ayant lu la pétition, j’aperçus, parmi les assistants, des figures inconnues, dont l’expression avait quelque chose de sinistre. »

C’étaient apparemment les mêmes qui furent remarquées depuis, par les honnêtes et les modérés, au 15 mai et dans les journées de juin. Les hommes de gouvernement sont sujets à de singulières hallucinations.

« Je compris aussitôt que des personnes étrangères aux corporations s’étaient mêlées an mouvement (pourquoi pas ? N’y avait-il que les corporations du Luxembourg qui fussent dignes de représenter le peuple ?) et que ceux qui se présentaient comme députés par la multitude, ne l’étaient pas tous réellement, ou au moins au même titre. Il y avait des hommes impatients de renverser au profit de l’opinion représentée par Ledru-Rollin, Flocon, Albert et moi, ceux des membres du Gouvernement provisoire qui représentaient une opinion contraire. »

L’aveu est décent, mais naïf. La dictature est bonne, tant que Louis Blanc l’espère pour lui-même ; dès que paraît Blanqui, Blanqui suspect d’aspirer aussi à la dictature, Louis Blanc n’en veut plus. Il revient à ses habitudes, il est doctrinaire ! Quelle politique, que celle qui varie ainsi au gré des considérations personnelles ! Mais voyons la fin.

Comme il est d’usage en pareille circonstance, Louis Blanc, Ledru-Rollin, Lamartine amusent le peuple par des discours ; Sobrier, Gabet, Barbès et d’autres, prennent parti pour le Gouvernement provisoire contre Flotte, Huber, Blanqui et consorts. Des voix menaçantes demandent une réponse positive : on leur répond que le Gouvernement ne peut agir si on ne le laisse délibérer. Un homme s’élance vers Louis Blanc, et lui saisissant le bras : Tu est donc un traître, toi aussi ! lui dit-il. « En pensant à cette injustice des passions, dit Louis Blanc, je ne pus me défendre d’un sourire amer, et ce fut tout. » Enfin, les membres du Gouvernement se montrent au balcon, et la comédie finit par un défilé.

« Telle fut, ajoute Louis Blanc, cette journée du 17 mars, la plus grande peut-être de toutes les journées historiques dans la mémoire des hommes !... »

MM. Ledru-Rollin, Crémieux et Lamartine ont eu le droit de dire que le 17 mars fut une belle journée, et d’en revendiquer l’honneur. Eux ne voulaient pas de la dictature, et ce jour-là la France fut peut-être sauvée des dictateurs. Mais Louis Blanc et ceux qui, à son exemple, demandaient l’ajournement indéfini des élections, afin que le gouvernement, revêtu d’une autorité sans bornes, eût le temps de faire le bien, ceux-là doivent avouer que ce fut pour eux une pitoyable journée. Quoi ! voici un homme convaincu que la dictature est nécessaire pour faire le bien du peuple ; que les hommes du pouvoir, ses collègues, sont hostiles au progrès ; que la Révolution est en péril si l’on ne réussit à les remplacer : il sait que l’occasion est rare ; qu’une fois échappée elle ne revient plus ; qu’un seul instant lui est donné pour frapper un coup décisif ; et quand arrive ce moment, il en profite juste pour refouler ceux qui lui apportent leurs dévouements et leurs bras, il se détourne de leurs sinistres figures ! Et vous ne croirez pas qu’il y avait dans cet homme quelque chose qui, à son insu, parlait plus haut que ses convictions ?

Le 17 mars commença cette longue réaction que nous allons voir passer successivement du socialisme au jacobinisme, du jacobinisme au doctrinarisme, du doctrinarisme au jésuitisme, et qui, si la raison publique n’y met ordre, ne paraît pas près de finir. Elle a commencé au sein même du Gouvernement provisoire, et par qui, grand Dieu ! par celui-là même qui poussait au mouvement, par Louis Blanc. Je ne l’en accuse pas, certes ; j’ai prouvé à sa décharge que l’instinct avait été plus sûr en lui que le jugement[1]. J’eusse seulement préféré qu’il ne se mît pas dans la nécessité de réagir contre des hommes qui, tout en posant leur compétition, ne faisaient qu’exprimer sa propre pensée : car toute réaction est regrettable. Mais m’accordera-t-on que si la République n’a tenu aucune de ses promesses ; si le socialisme est resté à l’état d’utopie, la cause pourrait bien n’être pas toute dans l’incapacité du Gouvernement provisoire et les intrigues bourgeoises ? La cause, elle est à tous ceux qui auraient voulu réaliser la révolution par voie gouvernementale, avant de l’avoir fait entrer dans la conscience publique, et qui, pour exécuter cette chimérique entreprise, ont soulevé la méfiance du pays en retardant d’un jour, d’une heure, l’exercice du suffrage universel.


  1. Le temps a révélé, depuis la première publication de cet écrit, qu’en Louis Blanc le jugement et l’instinct, la politique et la tendance, le moyen et le but, étaient parfaitement d’accord. Louis Blanc, admirateur et disciple de Robespierre, est ennemi déclaré de la liberté. Sa théorie, qui consiste à soumettre le Travail au Gouvernement ; sa formule récente : Égalité — Fraternité — Liberté ; l’opposition, peu connue, qu’il fit après Février à la liberté de la presse, à l’abolition du cautionnement et du timbre ; son panégyrique de Louis-Philippe ; enfin, son doctrinarisme constitutionnel, rendu plus clair dans sa dernière brochure : Plus de Girondins ! ont donné la mesure de son antipathie profonde pour la Révolution.