Les Cousins riches/Avertissement

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Calmann-Lévy éditeurs (p. v--).

AVERTISSEMENT

Les plus belles amitiés ne vont pas sans nuages. Le contraste qui les engendre est en même temps la source de ce qui les menace. Le fait existe aussi bien pour les individus que pour les familles et les nations. Car les lois de l’amitié sont identiques en ces trois occasions diverses.

Et c’est pourquoi à une époque où ma patrie ne vit en quelque sorte et ne respire que dans une communion extraordinaire avec les peuples alliés, je me suis livrée au plaisir de recueillir dans le cadre restreint de deux familles, comme un grand spectacle dans un petit miroir, l’image d’une de ces amitiés les plus marquantes de nation à nation. Ce qu’on ne peut embrasser et qui échappe quand il s’agit d’une alliance qui engage toute une partie du monde, se retrouve en raccourci dans l’alliance de deux familles. Ainsi peut-on, là, observer et analyser, à la faveur de l’apologue, une psychologie dont autrement, la complexité formidable déconcerterait.

Réduite à la simplicité d’un léger conte familial qui n’excède pas les ressources du romancier, j’ai tâché d’éclairer les nobles aspects d’une amitié sans cesse émouvante, la douceur de l’aide et de la reconnaissance qui s’échangent, puis la diversité de physionomie de deux races qui se complètent, mais au risque, parfois, de s’offenser subtilement.

Puissent les Cousins riches dont je me suis efforcée d’esquisser ici la figure jeune et généreuse, trouver dans ces pages un hommage à cette jeunesse de race dont mon pays a reçu par contact, un regain de flamme et de vie : jeunesse rude et neuve, jeunesse qui causera quelque conflit peut-être dans cette amitié disparate où mon pays est le plus vieux, mais jeunesse bienfaisante dont la France de la Chevalerie et de la Révolution ne récuse pas la sève nouvelle.

C. Y.